L’eucharistie, l’affaire de tous – homélie du dimanche 27 février 2022

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L’eucharistie, l’affaire de tous

 

         « On ne vendange pas du raisin sur des ronces ». Il peut arriver que des vignes, poussant sur des coteaux arides, difficiles à labourer, contiennent des ronces, ce qui n’altère en rien la qualité du raisin, si celui-ci a poussé sur un plant noble, condition essentielle pour un beau fruit. Une petite parabole parmi tant d’autres qu’aime employer Jésus pour transmettre un message important pour notre vie, à savoir dans le cas présent au sujet de la fécondité de nos vies d’homme et de femme. Ce qui fut le cas pour lui et que nous célébrons dans toute eucharistie.

         D’où mon désir aujourd’hui de vous parler de la messe, à l’invitation de plusieurs d’entre vous qui souhaitez retrouver le sens des paroles et des gestes employés dans toute célébration de l’eucharistie. On a l’habitude de dire : « c’est la messe du père untel » ; expression incorrecte, car c’est toute l’assemblée qui célèbre ; chacun a un rôle, non de spectateur, mais d’acteur, et pas seulement celui qui va lire, donner la communion, animer les chants, préparer l’autel, fleurir l’espace, tenir le piano, mais tous, tout simplement par notre présence, notre joie de retrouver les frères et de leur dire bonjour, par notre prière, par notre souci d’arriver à l’heure, par notre recueillement, par notre chant. C’est tout un peuple qui célèbre la victoire de Jésus qui a fait ce qu’il a enseigné.

         Et au milieu de ce peuple qui célèbre, le prêtre : on dit de lui qu’il préside, non pas comme un président d’association, de parti ou de nation, mais comme un signe de rassembleur de la communauté réunie au nom de Jésus. Un signe, c’est-à-dire quelqu’un qui renvoie à autre que lui, qui rappelle le rôle du Christ, seul médiateur entre l’humanité et Dieu son Père. Le rôle du prêtre est de porter la prière de son peuple, au nom du Christ, devant Dieu qui a écouté la prière de son fils, en le délivrant des liens de la mort. C’est par sa présence au milieu d’un peuple, d’une assemblée que le prêtre joue le rôle du Christ : sans assemblée le prêtre ne peut pas célébrer l’eucharistie. C’est pour cela que normalement il doit toujours y avoir au moins une personne avec le prêtre pour qu’il y ait véritablement sacrement ; quand ce n’est pas possible on contourne l’obstacle en affirmant que le prêtre est alors en communion de prière avec le monde, avec telle ou telle assemblée (ce qui fut le cas pour moi le dimanche 6 février quand le Covid me retenait à la maison).

         Ce face à face président (tenu par le prêtre) et assemblée définit par lui-même la présence du ressuscité au milieu de nous. C’est donc un service que rend le prêtre-président de l’assemblée, pour que celle-ci soit associée à la vie du Christ qui s’offre à son Père. Cela est exprimé magnifiquement dans ce que nous appelons la prière eucharistique, où nous nous tournons vers le Père, tandis que nous rappelons à travers le récit de son dernier repas, le don que Jésus a fait de sa vie. Là est le cœur de l’eucharistie, action de grâces au Père pour nous avoir donné son fils et son esprit.

         J’arrête là mon propos, bien incomplet aux yeux d’un professeur de théologie. Je souhaitais simplement nous éclairer sur cette place du prêtre dans l’eucharistie, place particulière qui n’a de sens que dans un face à face, un dialogue avec une assemblée. Et pour reprendre la parabole de Jésus, une telle assemblée priante ne peut donner que du bon fruit : même si celui-ci pousse sur les ronces de notre monde en désarroi, il sera un signe d’espérance, un vin à boire sans modération.

André Jobard
27 février 2022