Gérant malhonnête – homélie du dimanche 22 septembre 2019

        ll y a des jours où on regrette d’avoir accepté de donner l’homélie sans avoir lu les textes auparavant. C’est le cas aujourd’hui. Cette histoire d’argent malhonnête, cette corruption que Jésus semble bénir, obligent à des contorsions de l’esprit pour les faire coller avec les valeurs habituelles de l’Évangile. A croire que ceux qui ont retranscrit les paroles de Jésus n’ont pas bien compris ce qu’il voulait dire.

        On s’en sort en se limitant du tout début du texte. Il donne l’impression d’avoir été écrit pour nous alerter sur notre rapport à la Création. Un homme riche avait un gérant qui fut dénoncé comme dilapidant ses biens. Il le convoqua et lui dit : « Qu’est-ce que j’apprends à ton sujet ? Rends-moi les comptes de ta gestion, car tu ne peux plus être mon gérant. »

        Du 1er septembre, Journée mondiale de la Création, au 4 octobre, jour de la fête de Saint François d’Assise, le poète du Cantique des créatures, l’Église nous invite à célébrer la Saison de la Création. Création, c’est le mot que les chrétiens préfèrent utiliser pour parler de la nature, de la planète ou de l’environnement, rappelant ainsi que Dieu en est la source. Aujourd’hui nous sommes au milieu de cette Saison de la Création.

        Jésus parle d’un gérant. La terre nous est bien donnée en gestion. Dans son encyclique Laudato Si’ – quatre ans déjà −, l’autre François, le pape nous exhorte à corriger notre interprétation classique des Écritures sur la Création. Notre mission n’est pas de dominer la terre, comme nous l’avons peut-être cru et enseigné, mais de la cultiver et de la garder, c’est-à-dire de la protéger, de la préserver, de la soigner.

        La même encyclique rappelle que Dieu a donné la terre à tout le genre humain pour qu’elle fasse vivre tous ses membres, sans exclure ni privilégier personne et qu’il n’est pas permis, parce que cela n’est pas conforme au dessein de Dieu, de gérer ce don d’une manière telle que tous ces bienfaits profitent seulement à quelques-uns. Le prophète Amos le disait déjà avec violence quand il fustigeait ceux qui écrasent le malheureux, ceux qui achètent le faible pour un peu d’argent, le malheureux pour une paire de sandales. Et encore, Amos ne connaissait pas les multinationales et les grandes fortunes qui achètent les terres des pays pauvres et privent à terme leurs habitants des ressources qui les font vivre.

        Nous pourrions nous en remettre aux chefs d’État, ceux du G7 et les autres. D’ailleurs Saint Paul dans sa lettre à Timothée nous invite à prier pour les chefs d’État − les anciennes traductions disaient les rois − et pour ceux qui exercent l’autorité. On a l’impression d’entendre une intention de prière universelle ! La gestion de la terre fait partie des responsabilités des dirigeants. Sauf que du temps de Paul les démocraties étaient rares. Désormais les responsables sont élus et nous déléguons une part de notre responsabilité en votant, sans nous défausser. Si notre confiance est déçue, nous pouvons corriger le tir la fois suivante.

        Le combat pour la sauvegarde de la Création n’est plus l’affaire exclusive de gentils militants écologistes. Elle est l’affaire de tous et en particulier de tous les chrétiens. Ce n’est plus une option. C’est une part intégrante de la Foi.

        Il y a urgence. Nous pouvons nous mobiliser individuellement par nos choix de vie, ou collectivement. Ainsi la paroisse pourrait rejoindre le programme Église verte ou participer à la prochaine Marche pour le Climat.

Vincent Boggio

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