Jésus touché par le cri d’une femme – homélie du dimanche 16 août 2020

 

Jésus touché par le cri d’une femme

 

        Hier, à l’occasion de cette grande fête du 15 août, nous avons beaucoup prié Marie. Nous, pas seulement notre communauté, mais des foules qui se sont rassemblées dans les nombreux sanctuaires consacrés à Marie, et tant et tant d’anonymes qui ont crié vers elle dans le silence de leur cœur un appel au secours pour eux-mêmes ou pour leurs proches. J’emploie le mot ‘crier’ à dessein, en me référant à cette femme dans l’évangile qui a crié auprès de Jésus : des cris qui visiblement ont fatigué les disciples de Jésus ; ils voulaient être débarrassés de cette femme qui venait contrarier leur aventure avec Jésus.

        Oui, les cris des hommes, nos propres cris : en pensant à tel ou tel membre de notre famille ou ami, menacé par la maladie, le chômage, en pensant à cette mésentente qui s’est installée chez les enfants, en entendant les nouvelles peu rassurantes égrenées chaque jour sur la progression de la Covid 19, en voyant les scènes d’horreur au Liban au Niger en Biélorussie. Des cris qui peuvent être considérés par de beaux esprits comme une déviation de la foi chrétienne, en les considérant comme des démarches infantiles, réduisant Marie à une déesse qui aurait un pouvoir exceptionnel sur le cours de l’histoire humaine. Il est vrai qu’il peut toujours y avoir des déviations dans une piété à l’allure mercantile. Mais après avoir lu et médité cette page d’évangile, je pense qu’avec Jésus, comme lui, nous devons nous laisser toucher par le cri des hommes et des femmes qui souffrent. Au départ Jésus, prisonnier de sa culture, de son milieu, comme nous le sommes tous (c’est un homme, et pourquoi ne serait-il pas marqué par ses origines et par son milieu de vie, par sa religion?), repousse la demande de cette femme, puis il va se laisser bouleverser par sa ténacité, son audace, son humour, tout simplement parce qu’elle aime sa fille et qu’elle souhaite sa guérison ; elle va pousser Jésus à sortir de ses convictions premières, parce qu’elle souhaite le retour à une bonne santé pour sa fille. Il va découvrir à travers le courage de cette femme (courage qu’il appelle la foi) que Dieu son Père n’est pas le Dieu d’un seul peuple, d’un clan, d’une religion, mais le Dieu de tous. Alors ses yeux vont s’ouvrir et viendra à sa mémoire cette belle prophétie d’Isaïe (entendue à la première lecture) ‘ma maison, dit Dieu, s’appellera maison de prière pour tous les peuples’.

        Alors, aujourd’hui j’ai envie de me laisser toucher par les cris que j’entendrai certainement, surtout si j’ouvre mes oreilles et mon cœur à ceux que je rencontrerai. Loin de les repousser, même s’ils me dérangent, je ferai tout pour qu’à travers mon écoute, à défaut de solutions à des situations qui me dépassent, des hommes et des femmes découvrent ce Dieu qui est venu en Jésus nous dire son amour pour tous. Et si, frères et sœurs, nous demandions cette grâce au cours de notre eucharistie !

André Jobard

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