La puissance de la foi – homélie du dimanche 7 août 2022

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Les lectures du jour

La puissance de la foi

« Grâce à la foi », vous avez peut-être remarqué cette expression employée à 3 reprises dans la deuxième lecture : « grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu » plus loin « grâce à la foi, il vint séjourner » ou encore « grâce à la foi Sara… » Si nous nous arrêtions sur cette parole, peut-être pourrions-nous mieux recevoir comme une chance les paroles surprenantes et peut-être déstabilisantes de Jésus dans l’évangile du jour.

« Grâce à la foi », nous pourrions objecter que la foi nous l’avons, mais elle ne nous met pas à l’abri du danger. Et ce n’est pas parce que nous sommes chrétiens que nous ne vivons pas dans la peur de la maladie, de la mort, ou bien que nous ne sommes pas atteints par les problèmes du moment, la sécheresse, les tensions internationales, la crise sanitaire et économique. La foi que nous proclamons tous les dimanches serait-elle un onguent qui nous protégerait des effets de l’histoire humaine ?

L’auteur de la lettre aux Hébreux relit l’histoire sainte du peuple de Dieu ; il voit à travers quelques figures emblématiques cette foi des pères qui sont allés de l’avant, ont dépassé leurs peurs, leurs certitudes, car ils ont cru en la promesse de Dieu qu’Il n’abandonnerait pas son peuple. La foi est ce qui fait avancer, ce qui donne de l’audace, ce qui ouvre un avenir. Mais pour cela, quelques dispositions de cœur sont nécessaires, celles que Jésus rappelle dans l’évangile et qui peuvent nous apparaître provocantes : « vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône ».

Saisissons-nous la portée de ce qui nous est demandé à travers cette invitation de la part de Jésus ? Allons-nous contourner cet appel en disant qu’il est réservé aux religieux, aux moines, à ceux qui ont fait vœu de pauvreté ? Il me semble qu’à ce stade nous sommes au cœur de la foi chrétienne : même s’il n’est pas question d’aller à la sortie de la messe chez le notaire pour signer la vente de tous nos biens et en donner le produit aux sans abri du coin (ce serait une lecture fondamentaliste et partielle de la parole de Dieu), il nous faut cependant entendre cet appel dans toute sa radicalité. Vendre nos biens, n’est-ce pas nous détacher de ce en quoi nous avons mis notre assurance, n’est-ce pas ne plus compter sur nos richesses matérielles et aussi sur notre savoir, sur nos compétences humaines ? Que ce soit à titre personnel ou plus globalement pour la conduite de notre vie commune. Quand nos sociétés se contentent d’ajouter des caméras de surveillance après des scènes de violence au lieu d’analyser les causes de celles-ci et de prendre des décisions qui engagent au partage, à la sobriété, à la non-violence, n’est-ce pas nier l’appel de Jésus ? Et aussi renier notre tradition la plus ancienne où nos pères ont mis leur confiance en Dieu en se détournant de tous les faux dieux que sont la richesse, le repli sur soi, la fermeture du cœur et des frontières ?

Voilà où nous conduit la foi. Sur des terrains incertains, avec des risques réels, mais nous avons aussi en réserve cette autre parole de Jésus qui donne assurance à nos vies : « sois sans crainte, petit troupeau : votre père a trouvé bon de vous donner le Royaume. » Pour apercevoir ce royaume déjà là, rien de mieux que de rester en éveil, de garder nos lampes allumées, et surtout notre cœur ouvert à l’inattendu de Dieu dans notre histoire. « Heureux ces serviteurs que le maître à son arrivée trouvera en train de veiller » Une belle parole de conclusion à garder précieusement pour continuer la route.

André Jobard
7 août 2022