La résurrection : un rêve ? – homélie du dimanche 18 avril 2021

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La résurrection : un rêve ?

 

         « Ce n’est pas possible, dis-moi que je rêve ! » On entend parfois cette expression de la bouche des jeunes à la découverte de leurs résultats à un examen, que celui-ci soit réussi ou qu’il soit un échec total. Des mots pour tenter de traduire l’étonnement devant un inattendu qui va bousculer bien des projets. On a l’impression que c’est aussi ce qu’ont vécu les premiers témoins de Jésus ressuscité, et les évangiles dans leur originalité propre à chacun, nous relatent ces rencontres avec le ressuscité. Et aujourd’hui nous découvrons comment il est apparu à ses disciples, au bord du lac semble-t-il, puisqu’il est question de consommation de poisson.

        Enfermés dans leur chagrin d’avoir perdu leur ami et de s’être comportés de façon si lamentable au procès qui l’a conduit à la croix, les amis de Jésus ne voient pas d’issue, pas même une petite lueur dans leurs ténèbres. Plus d’avenir, plus d’espoir, voilà le sujet majeur de leurs conversations ; c’était déjà ce que vivaient les marcheurs en direction d’Emmaüs : « ils parlaient entre eux de tout ce qui s’était passé ». Et là, dans ce récit, surprise : « comme ils parlaient encore, lui-même (Jésus) fut présent au milieu d’eux ». Comme si le ressuscité s’engouffrait dans leur détresse, dans leur remord, dans leur vie. Non pour les accuser, mais pour leur dire ce message central, que les hommes, les femmes, les enfants de tous les temps aiment entendre : « la paix soit avec vous ! » Quel soulagement, quelle joie profonde envahit les cœurs à ce moment-là !

        Est-ce à dire que tout s’éclaire ? Pas vraiment ;  cette présence physique, cette parole d’un si grand réconfort provoquent un bouleversement intérieur puissant, qui suscite le doute, qui oblige le ressuscité à montrer son corps marqué par les blessures que lui ont infligées ses bourreaux. Et comme si cela ne suffisait pas, il exprime sa faim et demande à manger. De quoi réveiller en eux tant de bons souvenirs des repas qu’il partageait avec eux, des moments fabuleux vécus ensemble. Finalement ce qui va les conduire à admettre la résurrection de Jésus, à les sortir de ce qu’ils croyaient être un rêve, c’est la lecture ensemble et avec Jésus de toute l’histoire du peuple d’Israël, la loi de Moïse, les prophètes et les psaumes. Tout ce qu’a vécu Jésus, y compris sa mort, n’est pas un raté que la résurrection viendrait réparer ; c’est sa vie, comme toutes les vies humaines, à la fois vulnérable et mortelle, et irriguée par un amour éternel qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer. Un amour sans cesse à reconnaître, à vivifier par la prière et le retour à la source, à la Parole de Dieu.

        J’aime cette page d’évangile ; c’est ma propre façon de comprendre la résurrection de Jésus. Une compréhension jamais totalement parfaite, marquée par des doutes, des interrogations, des moments plus lumineux où se déploie dans mon cœur cette paix annoncée. La résurrection se vit dans la rencontre avec celui qui comme Jésus me demande un peu de pain, un peu d’amitié, avec celui qui veut me partager quelques bribes de sa vie, de ses surprises, de ses interrogations, de ses émotions. En cela je peux affirmer qu’elle a un sens ma vie, même quand je crois rêver comme ces jeunes étonnés d’un résultat d’examen.

André Jobard

18 avril 2021