La Sainte Famille : famille idéale ? – homélie du 26 décembre 2020

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La Sainte Famille : famille idéale ?

 

        Dans la salle d’attente de mon médecin et de mon dentiste, j’aime bien feuilleter des revues que je n’ai pas l’habitude de consulter, ces belles revues avec des publicités toutes plus alléchantes les unes que les autres, et notamment quand elles nous montrent, par exemple des publicités pour des cuisines aménagées. Tout est clean, comme on dit en français, tout est impeccablement bien rangé, avec madame au sourire satisfait de posséder le dernier cri de la technologie, le mari en retrait dans le canapé lisant son journal favori avec à ses pieds un chien (de race évidemment), et 2 beaux enfants magnifiquement habillés, souriants, sages comme il se doit : bref vous avez là l’image de la famille idéale, qui n’existe à vrai dire que dans les catalogues. Et j’allais dire qui n’est même pas l’image de la sainte famille, telle que nous la fêtons aujourd’hui. Et je suis sûr que si Marie ou Joseph étaient tombés un jour sur ce genre de description, ils ne se seraient pas reconnus, Marie étonnée de voir qu’une cuisine pouvait être aussi bien rangée, la sienne étant souvent en désordre. Quant à Joseph il se serait dit : des enfants sages comme ceux de la photo, quand je pense à Jésus, c’est loin d’être le cas, car il lui arrive de faire des caprices, de désobéir, de prendre un carré de chocolat dans le placard à l’insu de ses parents.

        Vous allez me dire : alors la sainte famille, c’est quoi , si ce n’est pas une famille parfaite ? En quoi est-elle sainte ? Nous pensions que c’était parce que Jésus était obéissant, qu’il n’y avait jamais de conflits, de caprices. Eh bien non. Ce qui en fait une sainte famille, et qui peut faire de nos familles, de nos paroisses, de nos regroupements les plus divers, c’est la foi. Cette foi qui a mis en mouvement Abraham alors qu’il se désespérait de ne pas avoir de descendance, c’est Marie et Joseph qui soumis à la loi de Moïse accomplissent les gestes rituels liés à la naissance d’un enfant et qui rencontrent ce vieillard Syméon qui ne leur annonce pas que du bon. Cette foi c’est une confiance en Dieu qui au cœur-même des nuits que nous traversons demeure fidèle à sa promesse. Une foi qui se nourrit de la foi des autres : quand l’un vient à flancher, l’autre peut venir au secours, c’est cela aussi une famille.

        Dans l’épreuve actuelle que nous traversons, la tentation est grande de baisser les bras, de nourrir nos amertumes par le colportage d’informations catastrophiques pas toujours bien vérifiées, et d’oublier tous ceux qui vivent des catastrophes autrement plus sévères. Quand le pape François nous invite dans son encyclique à la fraternité, c’est pour nous rappeler que nous formons cette grande famille humaine, où chacun, à sa place, doit faire œuvre de foi, de confiance ; faire œuvre, cela veut dire travailler à ce que tous les frères et sœurs en humanité retrouvent l’espérance et la joie de vivre. La sainte famille sera alors cette famille à l’image de Joseph, Marie, Jésus, Abraham et tant d’autres à travers l’histoire, qui n’ont jamais perdu foi en Dieu qui nous veut heureux.

André Jobard