La vie est pleine de choses inattendues – homélie du dimanche 6 février 2022

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Les lectures du jour

La vie est pleine de choses inattendues

 

         Quand j’ai vu, sur mon téléphone, vendredi soir qu’André m’appelait, je me suis dit : « André s’inquiète pour savoir si l’homélie que je lui avais promise pour aujourd’hui avançait bien ». Pas du tout. Il m’a dit : « Je vais bien, un peu enrhumé, je me suis fait testé, Résultat : Positif. « J’ai essayé d’appeler plusieurs confrères pour me remplacer, mais rien à faire : tous occupés ou covidés ! Je sais que tu seras présent ce dimanche, accepterais-tu de célébrer ce dimanche ? ». Il y a 4 ans, je disais « oui » lors de mon admission en tant que candidat au diaconat permanent, alors j’ai redit « oui ». Et en disant ce « oui », j’ai compris tout le sens de l’effroi, de la crainte de Pierre dans cette barque. Cette crainte comme pour tous ces prophètes de l’ancien testament qui sont appelés, alors qu’en théorie, ils ne sont pas faits pour cela.

         Dans la première lecture, Isaie dans un songe entend cet appel, lui qui est « un homme aux lèvres impures, qui habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures ». Dieu le purifie avec un charbon ardent et ensuite Dieu demande « qui enverrai-je ? qui sera mon messager ? » Dieu n’impose pas, mais Isaie répond : « me voici, envoie-moi ! ». Dans la deuxième lecture, Paul, le dernier des derniers, un avorton comme il dit, « mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu ». Dieu l’a choisi pour annoncer l’Évangile, annoncer la bonne nouvelle de la mort et de la résurrection de Jésus. Bonne nouvelle qu’il a reçu des Apôtres, du témoignage des Apôtres. Qui étaient-ils ces Apôtres ? Des gens comme vous et moi, avec nos défauts et nos faiblesses. Imparfaits, c’est sûr : je parle pour moi ! imparfaits, mais vivants. Vivants dans ce monde, ce monde qui va plus ou moins bien. Jésus les choisit dans le monde, car Jésus est avec nous dans ce monde, et il partage nos vies. Dieu a besoin de nous, Dieu peut faire de grandes choses, mais il a besoin de nous pour les réaliser.

         Par notre baptême, nous sommes prêtres, prophètes et rois, je le dis souvent (peut-être trop souvent), mais ça veut dire quoi ? Par notre baptême, nous avons été racheté, purifié comme Isaie avec ce charbon ardent, comme Saint Paul sur ce chemin de Damas et maintenant nous sommes appelés à vivre de ce baptême, à vivre ce baptême. A être prêtre, c’est-à-dire rendre un culte à Dieu, le prier, le remercier pour les beautés que l’on peut admirer, pour vos sourires, pour Gaëtan qui s’engage à sa suite. A être prophète, c’est-à-dire comme le dit et nous le demande si bien Saint Paul, à annoncer, à crier cette bonne nouvelle. Cela commence par sortir de la messe avec le sourire pour que ceux qui nous voient sortir aient un jour envie de venir voir ce qui nous rend si joyeux. Donc vous avez compris : interdit de faire la tête en sortant tout à l’heure ! Et à être roi, ça veut dire avoir le souci de ceux qui nous sont confiés : les pauvres, les petits, les plus faibles d’entre-nous. Mais cela commence par les membres de notre propre famille, nos voisins, nos collègues de travail, les gens que l’on croise dans les transports en commun.

         Quand Jésus est monté dans la barque, Pierre ne s’attendait pas à tout cela. Il le laisse monter, l’écoute d’une oreille tout en nettoyant ses filets, et tout à coup, ce Jésus, un charpentier, lui demande à lui, pêcheur professionnel de prendre le large et de jeter les filets. Eux n’ont rien pris de toute la nuit et ce charpentier, qui certes parle bien aux foules, saurait mieux faire qu’eux ? Il accepte, pourquoi on ne sait pas : peut-être que tout simplement il n’a plus rien à perdre après tout, et s’ils ne prennent rien ils pourront peut-être se moquer de Jésus. On ne sait pas. Et là, l’impossible arrive : un filet plein à craquer. Et cette peur, cette angoisse qui envahit Pierre et ses compagnons. Jésus ne lui a rien demandé, il ne lui dit pas « suis-moi », j’ai relu plusieurs fois : rien. Mais Pierre a compris que cet homme va bouleverser sa vie. Ça le dépasse, c’est sûr, mais Jésus lui dit : « sois sans craintes ! », « ais confiance ! ».

         Combien de fois dans nos vies, nous avons fait un pas en arrière face à la tâche, face à l’épreuve qui nous attendait. Ayons confiance, il est là, à nos côtés pour nous porter là où il veut que l’on aille ! Ces quatre-là en ont fait du chemin, ils en ont sauvé des hommes. Quel beau parcours, quel plan de carrière, imaginez : Pierre commence pêcheur sur les rives de la mer de Galilée et il finit crucifié la tête en bas à Rome. Jacques : décapité. On pourrait se dire, ils ont raté leur vie. Mais quand on regarde de plus près. Quelle vie ! Quel abandon, quelle confiance ! Quelle audace ! Quel don de soi, quel don aux autres !

         Elle est belle cette peur de Pierre, car elle ressemble tellement à nos propres peurs.

         Alors frères et sœurs, ou sœurs et frères. Ayons le courage de dépasser nos peurs, de laisser Jésus monter dans notre barque, il a, c’est certain, un beau projet pour chacun d’entre-nous.

 

Stéphane Marion
6 février 2022