L’aurore après la nuit – homélie de Pâques – 4 avril 2021

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L’aurore après la nuit

 

         Aujourd’hui de grand matin, à 6h30, une centaine de personnes sont venues ici à l’église. C’était encore les ténèbres. Pourquoi se sont-elles privées d’une grasse matinée, qui plus est un dimanche de fête ? Cela paraît bien curieux. Beaucoup d’entre elles étaient venues ces 3 derniers jours suivre l’histoire d’un certain Jésus, qui avait réuni ses amis pour un dernier repas, selon ce qu’il avait annoncé. Effectivement c’était bien le dernier, puisque le lendemain, vendredi ce Jésus allait être arrêté, condamné après un jugement inique et mis en croix. Hier grande émotion devant ce qui apparaissait comme un échec total : oui, un homme de cette qualité humaine si forte était enseveli dans son tombeau ; tristesse, sidération, silence dominaient cette journée, avec cependant, tapie au fond des cœurs, une certaine attente, attente qu’il allait se passer quelque chose. Comme Marie-Madeleine les courageux de ce matin n’ont pas pu s’empêcher de se lever tôt, ne serait-ce que pour se recueillir devant le tombeau de ce Jésus. Et au moment où le soleil pointait son nez, vers 6h50, la pierre qui fermait le tombeau creusé dans un rocher était dégagée et permettait ainsi de pénétrer dans ce caveau, où ne restaient que les bandelettes qui avaient enveloppé le corps de Jésus. Comme Marie-Madeleine, comme Pierre, comme Jean, tout ce monde a eu son interprétation de l’événement, entre ceux qui ne comprennent rien et d’autres qui voyant cela ont cru. De là ont explosé des chants d’allégresse, de victoire, des Alléluia à n’en plus finir, comme nous le faisons au cours de cette célébration.

         Oui nous voilà en présence de ce grand mystère de Pâques. Pour le pénétrer d’un peu plus près, je pense qu’il nous faut tenir ensemble ces 2 réalités: d’une part Jésus est mort, d’autre part le tombeau où il a été déposé est vide. Voilà qui bouscule nos évidences, voilà que la mort semble ne plus être un état permanent mais un passage ; la nuit n’est pas éternelle, elle est toujours suivie de l’aurore, comme nous l’avons expérimenté ce matin. Cela ne veut pas dire qu’on peut évacuer d’un revers de main la mort, son épaisseur de souffrance, de questionnement, notre propre mort, celle de nos proches, celle de toutes les victimes innocentes. Mais dans cette dure réalité, apparaît une lueur, une brèche dans le mur de nos certitudes, de nos déclarations parfois péremptoires, de nos jugements à l’emporte-pièce. Et ce qui sera déterminant pour comprendre la mort comme un passage vers une vie nouvelle, c’est l’amour. L’amour manifesté par ce Jésus jusque dans sa passion, l’amour que nous recevons jour après jour de nos semblables, amour que nous donnons gratuitement, quand nous nous nous mettons à l’écoute de l’autre, quand nous osons une démarche de pardon. Oui à ce moment-là nous perçons le mur de la peur, de l’indifférence, de l’égoïsme et celui de la mort, celle du cœur.

         Aujourd’hui nous fêtons la victoire de l’amour, de la lumière, de la vie. Accueillons avec un cœur joyeux cette nouvelle qui peut nous sortir de notre torpeur actuelle et réveiller en nous l’espérance d’un monde réconcilié.

André Jobard

4 avril 2021