L’autre Philippe – homélie du dimanche 17 mai 2020 (sans messe)

 

L’autre Philippe

 

        La première lecture nous parle de Philippe, non pas le premier ministre, ni le cinquième apôtre qui, le jour de la Cène, demanda à Jésus « Montre-nous le Père », mais le deuxième diacre de l’Église primitive. En Samarie, Philippe proclamait le Christ, accomplissait des signes (guérisons et expulsions d’esprits impurs) et provoquait une grande joie. Plus tard il baptisera le trésorier de la reine d’Éthiopie. Rien que ça ! Face à une telle pointure, le diacre d’aujourd’hui se sent tout petit joueur.

        Philippe avait été élevé dans la Foi des Juifs. Il adorait donc le Dieu unique, celui de ses pères. Il proclamait aussi le Christ, le Fils de Dieu. Enfin il proposait le baptême dans l’Esprit. Comment articulait-il, dans sa tête et dans son cœur, le Père, le Fils et l’Esprit ?

        Pierre, dans sa première lettre, donne lui aussi l’impression d’être en recherche. Quand il parle de la « sainteté du Seigneur », il ne s’agit pas du Dieu d’Israël, mais du Christ, dont il précise qu’il est « vivifié dans l’Esprit », ce qui n’est pas forcément lumineux pour le lecteur. Enfin Jean, quand il se souvient que Jésus leur a dit qu’il priera le Père pour qu’il leur donne l’Esprit, ne se doute pas qu’il faudra du temps aux chrétiens, et quelques conciles houleux, pour s’accorder à dire que la juste façon de rendre compte du lien entre Père, Fils et Esprit est de dire que Dieu est un en trois personnes.

       Le chrétien d’aujourd’hui l’a souvent appris dès le catéchisme, parfois même dès le début du catéchisme. C’est peut-être dommage car il est privé, lorsqu’il se familiarise avec le Nouveau Testament, du plaisir d’imaginer la clef de l’énigme.

        Désormais, quand il pense à Dieu, quand il prie Dieu, il associe volontiers une image à chaque personne, le rocher au père, le chemin au Fils, le feu à l’Esprit. Des images le renvoient simultanément à deux personnes, le vent vers le Père et l’Esprit, le pasteur vers le Père et le Fils, la lumière vers le Fils et L’Esprit. Et quand il parvient à s’abandonner dans la prière, les images s’estompent. Il reste alors en lui la fusion des trois personnes, l’amour qui donne la vie.

Vincent Boggio

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