Le virus et la montée vers le ciel – homélie de l’Ascension et du 7ème dimanche de Pâques (sans messe)

 

Le virus et la montée vers le ciel

 

        En l’an 2020, un inconnu avait fait apparition sur la terre, un invisible virus, provoquant un immense bouleversement sanitaire, économique et sociétal. Des adeptes d’un certain Jésus s’étaient alors tournés vers lui pour lui demander d’intercéder auprès de son père, qu’ils pensent être le Dieu qui de là-haut tire les ficelles de l’histoire humaine et serait donc en possibilité d’arrêter ce fléau. Pour cela ils s’appuyaient sur la déclaration des premiers amis de ce Jésus. Ces derniers l’avaient vu mort et ensuite vivant ; ils avaient mis tous leurs espoirs en lui, comptant d’ailleurs qu’il allait pouvoir chasser l’occupant romain et restaurer ainsi le royaume d’Israël. Quelle n’avait pas été leur surprise d’entendre comme seule réponse Jésus leur dire que là n’était pas le problème, qu’ils allaient recevoir une force appelée l’Esprit Saint. Et sur ces belles paroles il disparaissait à tout jamais de leurs yeux. Désemparés ils s’étaient alors rappelé la grande prière qu’il avait exprimée quelques jours avant sa mort, dans laquelle il eut ces mots admirables : la vie éternelle c’est de connaître Dieu.

        En 2020, c’est avec ce matériau que les adeptes de Jésus ont commencé à relire l’épisode inédit qu’ils venaient de vivre, épisode appelé confinement, puis dé-confinement. Privés de toute possibilité de rassemblements, de prières communautaires, ils avaient découvert que la pandémie n’était pas le fait d’une punition de Dieu, et que prier ne consistait plus à demander à Dieu qu’il renonce à ce châtiment. En revanche relisant la grande prière de Jésus, contemplant ce ressuscité s’élever dans le ciel après une quarantaine, méditant à la maison sur cet épisode inédit de l’histoire humaine, ils avaient fait une grande découverte. En effet les liens nouveaux créés par cette situation de confinement, les nouvelles habitudes de consommation et de vie familiale, la prise en compte de leur vulnérabilité, le retour à des valeurs oubliées, le souci d’une solidarité plus forte, tout cela, comprenaient-ils, les avait fait monter de quelques marches en direction du ciel, entrevoyant cette vie éternelle, la vie-même de Dieu. Leur véritable vocation, elle était là dans cette approche de Dieu. Même s’ils avaient dans un premier mouvement espéré que la résurrection de Jésus allait résoudre tous leurs problèmes, ils avaient pris le temps de découvrir une autre forme de présence, celle annoncée par Jésus à ses premiers disciples ; et si Jésus est monté au ciel, pensaient-ils, c’était pour manifester qu’il n’est plus cantonné à un espace donné ou à une époque donnée ; Il est pour tous, et pour tous les temps, les meilleurs comme les plus sombres. Et cette présence, ressentie en cette période de confinement, laissait entrevoir cette vie éternelle promise, où Dieu sera connu pour ce qu’il est vraiment, non pas un tout-puissant qui gère la marche des hommes, mais celui qui est fidèle et qui se laisse rencontrer dans la propre fidélité des hommes.

        En ce 21 mai, le virus est toujours là, mais l’espérance n’a pas déserté le cœur des adeptes de ce Jésus.

André Jobard

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