L’enfant prévoyant et généreux – homélie du dimanche 25 juillet 2021

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L’enfant prévoyant et généreux  

 

 

        Tous les évangiles racontent comment Jésus nourrit une foule nombreuse. Cet épisode rappelle la manne tombée du ciel pendant l’Exode. Il contribue à révéler la véritable identité de Jésus. Il préfigure l’Eucharistie. Il annonce le rôle de l’Église qui devra transmettre aux générations à venir les restes ramassés en abondance par les Apôtres.

        Jean, l’auteur du dernier évangile glisse quelques touches personnelles. Avec lui, c’est Jésus qui a l’initiative. C’est lui qui se préoccupe que la foule puisse manger à sa faim. C’est lui, et non ses disciples, qui distribue le pain. Et c’est seul qu’il se retire dans la montagne pour échapper à la foule qui ne comprend pas le sens de ce qu’il a fait. Elle le rattrapera le lendemain et Jésus essayera de leur expliquer la valeur symbolique de cette distribution de pain : « Moi je suis le pain de la vie ». Nous l’écouterons dimanche prochain.

        Aujourd’hui il s’agit simplement de faim, de pain et de manger à sa faim. Jésus satisfait un besoin primaire de la foule qui l’écoute et guette les signes qu’il leur donne : manger. Jean précise un détail : André dit à Jésus « Il y a ici un enfant qui a cinq pains d’orge et deux poissons ». Parmi les personnes que Jésus a rencontrées et qui sont citées dans les évangiles, il y a surtout des hommes. Les femmes sont moins nombreuses – mais leur rôle est essentiel – et il y a très peu d’enfants, toujours anonymes. Cet enfant est prévoyant. Pour s’aventurer à la suite de Jésus de l’autre côté de la mer de Galilée, il a mis dans son sac de quoi manger et même de quoi partager. Il est peu probable qu’il ait été le seul dans cette foule très nombreuse (5000 hommes) à y penser. D’ailleurs qu’y avait-il au début dans les paniers que la foule a emmenés sur la montagne et que les disciples ont remplis avec les restes ? La faim est une sensation désagréable qui ne rend pas altruiste. On se dit qu’un repas peut être sauté sans danger, surtout par les autres. Et on peut manger en tournant le dos aux autres. Seul cet enfant s’est manifesté. Il a ouvert son sac pour tous, avec confiance, sans crainte de tout perdre. Pour donner du pain à tous, Jésus n’est pas parti de rien. Il est parti d’un don, celui d’un enfant.

        Prévoyant et généreux, il me fait penser à Blandine, 12 ans, qui, dès que possible, s’est faite vacciner pour, dit-elle, ne plus avoir à faire de PCR avant chaque compétition de natation – elle est prévoyante – et pour participer à l’immunité collective et contribuer à protéger ceux qui hésitent à se faire vacciner – elle est généreuse. La progression de la pandémie est facilitée par des égoïsmes individuels et nationaux. L’Organisation Mondiale de la Santé s’est récemment révoltée que certains pays parlent d’une troisième dose quand d’autres attendent la première. C’est souvent dans ces mêmes pays que 800 millions d’humains sont sous-alimentés de façon chronique. Ce nombre a augmenté avec la pandémie. La famine peut en tuer 500 000 dans les mois à venir, notamment dans le Sud de Madagascar.

         L’Évangile engage à la générosité et au partage. Proclamer, commenter, écouter et relire l’Évangile est dérangeant parce que le monde ne cesse de rappeler que la générosité n’est pas encore suffisante. Quand elle le sera, le Royaume de Dieu, Royaume de justice, de paix et d’amour sera réalisé.

Vincent Boggio

25 juillet 2021