Les commandements : l’appel du fond du cœur – homélie du dimanche 29 août 2021

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Les commandements : l’appel du fond du cœur

 

         Si je vous demandais de réciter les 10 commandements, seriez-vous en capacité de le faire ? Peut-être les plus anciens d’entre vous qui ont quelques réminiscences de leur catéchisme, peut-être pourriez-vous aussi m’objecter que je n’en parle pas souvent… ce qui est bien vrai. Et pourtant Moïse pressait le peuple de garder les commandements du Seigneur (1ère lecture). Avouez que cette injonction ne passe plus guère aux yeux de nos contemporains qui veulent s’affranchir de toute directive venant d’en haut. Le temps où monsieur le curé faisait la loi dans sa paroisse, dans son village est révolu. Il me semble que l’évangile de ce jour nous ouvre une perspective vraiment nouvelle sur le sens des commandements.

         Dans sa controverse avec les pharisiens et les scribes, Jésus dénonce leur hypocrisie, et il le fait avec une véhémence qui peut surprendre de la part d’un homme doux et compréhensif. S’il agit ainsi, c’est que l’enjeu est d’importance. Quand il reprend les remarques du prophète Isaïe qui parle d’une religion des lèvres, où le cœur est absent, cela signifie que les commandements doivent être compris comme l’expression de cet appel niché dans le cœur de chacun, appel à vivre pleinement sa vie d’homme et de femme, appel à être soi, à se réaliser totalement, car c’est là que se trouve le véritable bonheur. Oui les commandements de Dieu sont inscrits au plus profond de nous ; ils ne nous écrasent pas du haut de leur hauteur ; ils balisent le chemin que chacun doit prendre pour se réaliser lui-même, pour mener son existence en cohérence avec ce qu’il porte comme désir, comme aspirations les plus fortes. Considérés ainsi, les commandements ne sont plus perçus comme une entité extérieure à l’homme, qu’on appellerait Dieu, la religion étant chargée de veiller à leur stricte obéissance. La rencontre avec Dieu sera alors une expérience personnelle, libre et libératrice, telle que Jésus l’a vécue ; lui-même ne s’est pas soumis à un règlement ; son obéissance, elle est à sa conscience qui l’appelait à se donner totalement à ses frères. Ce n’est pas une obéissance de surface, c’est la réponse à un appel intérieur très puissant.

         Pour que l’Évangile et plus largement toute la Parole de Dieu ne soient pas perçus comme un catalogue de prescriptions dont la stricte application nous offrirait le paradis, il nous faut revenir à ce qui nous porte, à ce qui nous est le plus précieux (la dernière nouveauté technologique, la réussite professionnelle pour nos enfants, ou la réconciliation après un différend, ou le partage d’une épreuve avec celui qui la vit), à ce qui est le plus important pour nous. Et cette semaine, nous avons eu droit à une surprenante mais combien stimulante déclaration de notre pape François au sujet du discours de l’Église sur la morale, alors qu’on lui reprochait un certain silence sur le sujet : « une pastorale missionnaire n’est pas obsédée par la transmission désarticulée d’une multitude de doctrines à imposer avec insistance. L’annonce évangélique doit être plus simple, profonde, irradiante. »

         En conclusion il nous faut sortir d’une conception trop étriquée de la foi chrétienne, qui n’est pas une religion où il y aurait des vérités à croire et des commandements à exécuter. Jésus nous en a libérés pour qu’à notre tour nous nous sentions responsables de nos vies, de nos actes, en réponse à cet appel inscrit au plus profond de nous.

André Jobard

29 août 2021