Où sont les miracles ? – homélie du dimanche 13 octobre 2019

        Parole de Dieu où il est question de guérison, de miracle, dont les heureux bénéficiaires sont des lépreux. A l’époque de Jésus, ceux-ci sont totalement exclus de la société par peur de contamination, et par souci de se garder pur spirituellement, la lèpre étant vue comme une conséquence du péché.

        Les miracles, on en est friand, comme de surnaturel, on veut savoir comment le guérisseur procède, et on imagine volontiers que celui-ci accomplit des gestes mystérieux, qu’il prononce des prières sur le malade, et qu’il attend une juste rétribution pour son acte de guérison. C’est ce que pensait ce général Naaman, atteint de la lèpre, et qui, sur le conseil de sa jeune servante (en réalité son esclave depuis une victoire militaire), n’avait pas hésité à emporter avec lui de quoi payer grassement son guérisseur ; il s’attendait à être accueilli avec les honneurs dus à son rang. Or il n’en est rien. Et ce que lui propose le prophète bouscule tellement son schéma de pensée, (aller se plonger 7 fois dans l’eau du Jourdain), que dans un premier temps il refuse. Cela lui semble totalement inefficace et même offensant à son égard de la part du prophète. Observons alors l’audace de ses serviteurs qui osent recommander à leur maître de suivre les recommandations d’Elisée. La même audace dont a fait preuve la jeune servante qui n’a pas eu peur d’évoquer à sa maîtresse la présence dans son pays, d’un prophète susceptible de guérir Naaman. Le miracle n’est-il pas là dans cette intervention des petits, des serviteurs, des pauvres qui ont l’audace de partager leur foi pour que leur maître trouve la guérison ? Une foi que découvre Naaman, qui va le guérir mais surtout le sauver quand il reconnaît la source de sa guérison.

        En cela nous rejoignons les lépreux de l’évangile, eux aussi attendant de Jésus qu’il opère sur eux des gestes pour les guérir de leur lèpre. Jésus, à l’instar d’Elisée, se contente de recommander d’aller se montrer aux prêtres, ce qu’ils exécutent sans hésitation, alors qu’ils étaient en droit de se demander si le seul fait de voir les prêtres allait provoquer leur guérison. « En cours de route ils vont être purifiés » nous dit saint Luc ; il leur a fallu marcher, oser aller se montrer aux prêtres ce qui était interdit tant qu’ils étaient malades. C’est donc bien dans ce geste de confiance que va se produire le miracle, une fois de plus sans geste mystérieux de la part de Jésus, sinon cet appel à partir. Et Luc va se faire un immense plaisir, lui si attentif aux pécheurs, aux païens, aux étrangers, aux exclus, à mettre en avant la démarche de ce Samaritain (un schismatique aux yeux des Juifs), qui ne se contente pas de son nouvel état de santé, mais souhaite reconnaître la force de Dieu dans le geste de Jésus. Celui-ci l’invite alors à se relever, à ressusciter, grâce à sa foi, qui est source de salut. Le miracle n’est pas tant dans la guérison physique, que dans l’accueil du salut donné à travers la personne de Jésus.

        Si j’ai pris le temps de pointer ce qui constitue le miracle, c’est pour que nous aussi nous croyions aux miracles ; pas seulement ceux de Lourdes, mais surtout ceux qui se produisent chaque jour dans nos vies. Chaque fois où nous répondons à un appel à aller au-delà de ce que nous pensions devoir accomplir, chaque fois où nous nous mettons à l’écoute des frères, des petits, des pauvres, et qui nous poussent à croire à l’impossible, c’est un miracle qui se produit. Nous sommes au cœur de la foi, qui n’est pas seulement une proclamation théologique, mais une confiance totale en ce Jésus qui donne le salut au-delà de nos maladies, de nos petitesses. Saint Paul nous le rappelle : « souviens-toi de Jésus-Christ, ressuscité d’entre les morts. » Il est notre salut, notre gloire éternelle.

André Jobard

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