Pas hier ni demain, mais aujourd’hui – homélie du dimanche 30 octobre 2022

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Pas hier ni demain, mais aujourd’hui

« Si je me tais, ils attendront. Si je parle ils seront attentifs, et si mon discours se prolonge, ils mettront la main à leur bouche » (Sag 8, 12) J’ai découvert cette parole vendredi dans la Bible, dans le livre de la Sagesse. J’ai pensé à vous chers auditeurs, en ayant la préoccupation de ne pas prolonger mes propos afin que vous n’alliez pas mettre la main devant votre bouche, pour cacher un bâillement dû à la longueur de mon discours. Merci alors à ce sympathique Zachée qui va nous tenir en haleine aujourd’hui.

D’ailleurs c’est sur le mot ‘aujourd’hui’ que je voudrais m’arrêter, présent à 2 reprises dans notre texte comme il l’est souvent chez saint Luc. « Aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison » et « Aujourd’hui le salut est arrivé pour cette maison ». L’aujourd’hui de notre vie, on peut le considérer négativement, pour des raisons personnelles (maladie, deuil, échec, tensions familiales) ou collectives (violence, guerre, injustice, pénurie, famine). On a vite fait alors de se tourner vers le passé, très facilement idéalisé : « c’était mieux avant ! », ou bien de penser que le meilleur viendra après, après telle ou telle invention technologique, telle ou telle décision politique ou économique, à moins que ce soit au-delà de la mort, le paradis. Comment alors comprendre qu’aujourd’hui il peut se passer quelque chose de bon ?

Je noterai d’abord qu’il est dit que Jésus, entré dans Jéricho, traversait la ville. Il n’a pas pris les boulevards extérieurs ou les rocades de contournement, il est entré, il s’est mêlé à la foule qu’il n’a pas dédaignée, sous prétexte qu’elle pouvait être dangereuse, ou hostile. Oui le Seigneur passe dans nos vies, comme elles sont, il se ‘mouille’ avec nous, on le sent d’ailleurs heureux au milieu de ces foules, elles-mêmes heureuses d’être ainsi reconnues.

En même temps on peut être perdu dans la foule, totalement ignoré, surtout quand on est de petite taille, comme Zachée, qui court alors devant cette foule et monte sur son arbre pour voir Jésus qui passait, sans penser le moins du monde qu’il serait vu et reconnu. Oui, Jésus veut s’adresser à lui personnellement, comme à chacun de nous. Et avec lui, on ne peut pas être simplement spectateur, on est aussi interlocuteur, on devient important pour quelqu’un d’autre. «  Aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. » Moi qui croyais que ma vie ne valait rien, que mon présent était calamiteux, voilà que Jésus s’y intéresse au point de souhaiter venir chez moi, dans ma maison pas toujours très bien rangée ni très propre. Il n’a pas demandé si c’était possible, s’il n’allait pas déranger, il s’est invité. Aujourd’hui, et non pas demain quand j’aurai mis de l’ordre dans ma vie, ou quand je me serai converti, il vient, il passe dans ma vie de pécheur. Et il vient dans notre monde tel qu’il est aujourd’hui : un monde fatigué, violent sous bien des formes, injuste, un monde qui veut comme Zachée monter sur un piédestal, se hisser comme étant le meilleur. « Zachée, descends vite ! » Une belle invitation à être vrai, humble.

De même qu’il vient dans la maison des pécheurs, ce qui provoque la récrimination des honnêtes gens, Jésus vient dans nos mains à chaque communion, nos mains comme elles sont, tantôt propres, tantôt maculées de nos travaux, de nos bassesses. Cette rencontre change nos cœurs, nous met, comme Zachée à égalité avec les pauvres que nous avons peut-être oubliés. Le salut, il est déjà là, aujourd’hui quand nos cœurs s’ouvrent à cette rencontre. Alors merci, Zachée, pour ton initiative qui nous a rappelés combien chacun de nous était important pour Jésus.

Et ton entrain, ton enthousiasme nous a peut-être évité de nous assoupir !

André Jobard
30 octobre
2022