Prophète pour les nations – homélie du dimanche 3 février 2019

         «Aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays». Il y a 6 ans, j’étais invité dans mon pays natal, à Meursault pour une fête locale paroissiale, et je devais donner l’homélie sur cet évangile; vous devinez bien qu’ayant lu cette parole de Jésus, j’y allais tout tremblant. Rassurez-vous, je n’ai pas été conspué comme Jésus à Nazareth.

        Revenons à une autre parole entendue cette fois dans la première lecture: «Je fais de toi un prophète pour les nations». Que chercher comme parole plus adaptée à notre journée paroissiale? Assemblée où nous nous mettons en route pour que nous soyons ouverts à nos frères et sœurs dans une recherche commune et ardente de ce qui nous fait vivre. Nous sommes bien conscients que le trésor de cette foi chrétienne que nous avons reçu doit nous mettre en mouvement, non pas pour faire de nouveaux adeptes de notre religion, mais tout simplement pour bâtir avec nos contemporains une société plus fraternelle, selon le souhait du créateur, où la parole circule, où sont échangés les raisons de vivre et les espoirs de chacun.

        Cela dit, qu’en est-il vraiment de cette mission prophétique, reçue à notre baptême, où nous avons été consacrés prêtres, prophètes et rois? Je voudrais souligner 2 points importants qui peuvent nous aider à voir les enjeux de cette mission, et que je retrouve dans les textes de ce jour.

        Le premier, c’est le refus, l’opposition ou seulement l’indifférence que nous pouvons essuyer quand nous nous hasardons à entrer en dialogue avec nos proches, nos voisins, nos collègues sur ce qui nous fait vivre. Eh bien, c’était déjà le cas pour Jérémie, qui tremblait devant ceux qu’il appréhendait comme de potentiels ennemis, c’était le cas pour Jésus qui s’est fait jeter de la synagogue. Écoutons la fin du récit de l’évangile: «Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin». J’aime beaucoup cette phrase un peu énigmatique, mais qui reprend, me semble-t-il l’autre parole entendue par Jérémie de la part de Dieu: «je suis avec toi pour te délivrer»; oui, continuons le chemin, le Seigneur sera toujours avec nous dans notre désir.

        Le deuxième point, c’est saint Paul qui met le doigt sur l’amour, le don de Dieu par excellence. Dans nos dialogues avec nos frères, ce qui importe le plus, c’est l’amour. Un amour de part et d’autre; nous recevons en effet autant que nous donnons. Et bien des conversations, même les plus anodines, quand elles sont inspirées par l’amour peuvent être des cadeaux extraordinaires. Aller à la rencontre de l’autre ne procède pas d’un devoir à accomplir mais d’un désir d’échanger, de manifester de l’amitié, de la compassion. Il s’en passe des choses dans le quotidien de nos vies, dès qu’il y a un peu d’amour !

        «Je fais de toi un prophète pour les nations». Peut-être cette mission nous fait-elle peur. Nous nous imaginons en vaillants prédicateurs de l’évangile sur les places publiques,dans les centres commerciaux. Même s’il faut peut-être de ces styles de prophètes, je pense vraiment que là où nous vivons, dans nos rencontres, quand il y a échange en vérité sur ceque nous sommes, sur ce que nous espérons, s’accomplit l’annonce d’un Dieu qui prend soin de chacun de nous et de toute notre humanité.

André Jobard

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