Un appel à la conversion toujours d’actualité – homélie du dimanche 4 décembre 2022

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Un appel à la conversion toujours d’actualité

Un jour du temps, monsieur le curé était monté en chaire coiffé de sa barrette et avait proclamé d’une voix tonitruante : « mes frères, il faut vous convertir. » Bien des paroissiens, ses auditeurs, hochèrent la tête, se demandant si leur curé, par ailleurs chanoine titulaire de la cathédrale avait bien encore tous ses esprits. En effet comment pouvait-il demander la conversion à eux si fidèles à la messe, aux commandements de Dieu et de l’Église, et qui plus est (cerise sur la gâteau!) étaient en règle avec leur contribution au Denier de l’Église ? La conversion, disaient-ils, elle est pour les païens, ceux qui ne connaissent pas Dieu, pour les musulmans, les bouddhistes, les athées et ceux qui font du mal aux chrétiens. Mais pour nous, à quoi bon la conversion ? Telles étaient les réflexions de ces paroissiens, totalement déboussolés par les propos de leur curé, curé qui avait peut-être été avare d’explications. De mon côté, chers paroissiens, je vais tenter d’apporter quelques éclaircissements.

En effet cette injonction à la conversion nous vient de Jean-Baptiste, homme étrange par son comportement, son habillement, son style de vie. Pour les Juifs, auditeurs de l’évangile de Matthieu, il est la réplique du prophète Élie, dont le retour annonçait l’avènement d’un messie, d’un sauveur, d’un envoyé de Dieu. Autant dire que l’apparition de Jean-Baptiste se situe dans une longue tradition d’appel à un retour sur soi, comme le signifie le mot ‘conversion’. La vie, dans son quotidien a tendance à nous éparpiller, à nous tenir à la surface des choses, à oublier ce pour quoi nous existons. De là des découragements, des jugements hâtifs, alignés sur l’opinion publique, elle-même à la merci d’influences pas toujours très bonnes. De là aussi une pratique religieuse superficielle, qui à elle seule ne donne pas de goûter à la richesse de l’évangile. Revenir sur soi, c’est se mettre à l’écoute de la voix de Jean-Baptiste, qui n’est autre que la voix de la conscience qui nous appelle du fond de notre être intérieur à travailler pour un monde plus humain, à des relations plus apaisées, plus fraternelles, et à un rapport à la nature plus respectueux de sa beauté et de sa fragilité. Saint Paul ne disait pas autre chose.

Et cette conversion, elle n’est pas pour demain, mais pour aujourd’hui, pour le moment présent. Ce présent, marqué par des problèmes immenses, par des tragédies de toute sorte, par des innombrables défis à relever, peut se révéler comme un temps favorable à l’avènement de ce que décrivait Isaïe dans la première lecture, un monde réconcilié, ce monde que nous pressentons possible chaque année à Noël, à condition que nous entrions dans le sens plénier de cette fête. Ce monde nouveau ne serait-ce pas ce feu dont parle Jean-Baptiste, feu du courage, de l’engagement, de l’amour, un feu qui ne s’éteint pas, alimenté par tout ce qu’apportent les initiatives individuelles ou collectives dans nos sociétés en mal d’espérance et de foi en l’avenir ?

Baptisés dans le feu de l’Esprit Saint nous sommes appelés à vivre cette conversion permanente, que nous soyons paroissiens de la Visitation ou fidèles auditeurs du curé à la barrette perché dans la chaire de son église. Oui, elle est de tout temps et de tous les instants.

André Jobard
4 décembre 2022