C’est quoi un diacre ?
Dans notre montée vers Pâques, vers la Résurrection que Jésus annonce encore aujourd’hui de façon mystérieuse, la présence de René, de Bernard et de Victor, devenus diacres ici-même il y a 10 ans m’invite à faire un pas de côté pour essayer de répondre à une question que j’entends souvent « C’est quoi un diacre ? » et à laquelle je ne sais pas toujours bien répondre.
De 2017 à 2023, en cherchant « diacre » sur Internet, on tombait d’abord sur Corinne Diacre, sélectionneur de l’équipe de France féminine de foot, preuve que le foot intéresse plus que la religion. Quelques lignes en-dessous on trouvait des sites qui définisssent le diacre catholique en le comparant au prêtre (hiérarchie, célibat, profession, position de l’étole) et qui insistent surtout sur les rites et les sacrements que le diacre a « le droit » de faire.
Le diaconat dans sa forme permanente est récent. Il a été rétabli par Paul VI en 1967, dans le bouillonnement du Concile. Il n’est pas encore totalement reçu, comme en témoigne la formule « prêtres et laïcs », souvent utilisée pour dire « tous les baptisés », formule qui exclut les diacres lesquels ne sont ni prêtres ni laïcs ! Le bouillonnement du Concile a contribué par ailleurs avec bonheur à élargir la place des laïcs. De sorte que le diaconat cherche encore sa place, différemment selon les diacres, les pays, le vouloir des évêques et l’évolution de l’Eglise dans un monde en accélération. La théorie et la pratique se nourrissent mutuellement. Comme le vin, le diaconat nouveau pourra se bonifier avec l’âge… ou pas.
On devient chrétien par le baptême. Les baptisés ont pour mission commune d’annoncer l’Evangile du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme Dieu vous aime » pour que le monde devienne un Royaume de justice, de paix et de joie.
« Comme Dieu vous aime ». Il s’agit bien de ce Dieu qui a fait sortir son peuple de la maison d’esclavage, qui l’a rendu libre, et lui a demandé d’accepter librement de le reconnaitre comme seul Dieu en échange de sa fidélité juqu’à la millième génération, ce qui nous donne encore du temps.
C’est bien ce Dieu qui a envoyé son Fils Jésus, Dieu-fait-Homme, visiter son peuple pour compléter l’enseignement de Moïse et des prophètes et corriger les déviations de ce peuple dans l’observance des projets de Dieu. En commençant par une belle colère lors de son retour au Temple, là où ses parents l’avaient présenté au Seigneur en offrant deux colombes, ce Temple qu’il désigne comme la maison de son Père, transformé en salon de l’Agriculture par un excès de sacrifices de bestiaux, sacrifices dont le peuple avait perdu le sens sacré pour en faire un commerce.
Aux commandements de Dieu, Jésus a rajouté l’amour, cet amour dont Jean dans les dernières pages de son évangile dessine et redessine un triangle entre le Père, le Fils et les disciples, cet amour dont il souligne l’expression majeure : le service. Il se fait serviteur et invite ses disciples à se faire serviteurs. Dieu a libéré son peuple de la maison d’esclavage et son Fils demande à ses disciples de devenir un Temple de serviteurs, des serviteurs en liberté.
Pour aider les chrétiens sur le chemin du service dans le monde, l’Eglise demande à certains, les diacres, d’être un signe vivant de l’Eglise servante dans le monde, là où ils vivent, dans leur famille, leur travail, leur quartier, leur Eglise, et de s’engager pour toute leur vie.
Les prêtres, qui rendent les services de l’Eucharistie et de la Miséricorde du Seigneur. qui animent la vie de leur communauté, ont toujours été diacres avant d’être prêtres. Devenus prêtres, ils restent diacres et sont invités à être ouverts au monde non chrétien ce qui nécessite que les laïcs de leur communauté leur donnent le temps nécessaire.
Les évêques aussi restent diacres en étant au service d’un morceau du monde, le diocèse qui leur est confié, et en encourageant leur peuple à être au service du monde.
Il ne me semblerait pas incongru quand on demande au Seigneur, au cours de la messse, de se souvenir de son Eglise, d’inverser l’ordre des présentations en disant « tous les baptisés, les diacres, les prêtres, notre évêque Antoine, l’ensemble des évêques et notre pape François ».
Quand Laurent, aujourd’hui évêque de Paris, m’avait demandé de réfléchir avec Marie-Claude au diaconat, une véritable aventure puisque nous ne connaissions aucun diacre permanent et que lui-même n’en connaissait pas beaucoup, ma première question a été : « Pourquoi ne demander qu’à des hommes ? » J’ai naïvement espéré que cette injustice serait rapidement corrigée. C’était il y a 35 ans. L’Evangile continue à me faire rêver à l’égalité des femmes et des hommes dans l’Église que j’aime.
Vincent Boggio
3 mars 2024