La vie : un festin de noces ?
Il y a 8 jours, dimanche dernier, nous étions invités à cheminer dans le vignoble bourguignon, et ainsi à contempler la beauté de la nature, semblable à l’humanité, que l’auteur du texte biblique qualifiait comme étant l’œuvre de Dieu. Aujourd’hui nous pouvons encore nous émerveiller de ce Dieu qui a pour seul souci de nous inviter à la noce de son fils. Hélas, une fois de plus, notre humanité fait la fine bouche devant ces propositions, et l’actualité de ces derniers jours révèle la violence de nos refus de nous associer à cette joie promise. Oui la sidération est totale devant le déferlement de la haine.
Curieusement cette violence nous la retrouvons dans cet évangile ; et la fin du texte, qu’on serait tenté d’omettre, nous détourne d’une approche positive et aimante de la part de Dieu ; en effet il exclut violemment ce pauvre hère, qui n’a peut-être pas eu l’argent nécessaire ou le temps pour acheter un costume-cravate. Sans parler de la violence dont sont victimes les serviteurs du roi, chargés d’aller porter les cartons d’invitation. Comment comprendre l’existence de cette atmosphère si nauséabonde, sinon dans le refus des invités de participer pleinement à la noce ? Chacun met en avant ses propres préoccupations, son champ, son commerce, et l’invité de la dernière heure n’éprouve pas le besoin de changer de tenue pour faire honneur aux mariés. On est dans un climat du chacun pour soi, indifférent à la joie des autres.
Cela ne nous fait-il pas penser à notre actualité ? Nous vivons dans un monde où ce qui est mis en avant, c’est la recherche de son confort, de son bonheur à soi ; c’est le souci de maintenir des acquis, de garder ses privilèges, que ce soit au niveau personnel ou national. Le conflit israélo-palestinien est en cela révélateur du désintérêt de la communauté internationale vis à vis d’une situation complexe, préférant ignorer le sort de toutes les victimes de ce conflit. De même bien d’autres foyers de guerre, bien des réalités de pauvreté, bien des attaques à l’environnement n’atteignent pas les opinions publiques de nos pays développés, préoccupés par le maintien de leur pouvoir d’achat.
Peut-être Jésus veut-il, à travers cette parabole destinée aux grands prêtres et aux pharisiens, attirer notre attention sur le danger que nous prenons en nous enfermant dans notre suffisance et notre inconscience devant les grands défis de notre époque : laisser la misère, la souffrance et les foyers de guerre se développer, tolérer l’accroissement monstrueux des inégalités, exploiter à la folie les ressources vitales du sous-sol, c’est aller droit vers le suicide collectif. Ce n’est plus seulement celui qui n’a pas revêtu son habit de fête qui sera jeté dans les ténèbres, c’est notre humanité toute entière qui risque de disparaître.
Je pense que c’est ce constat d’une humanité allant au désastre, qui a motivé notre pape à produire l’exhortation apostolique ‘Louez Dieu’. C’est un cri d’alarme à destination de tous les hommes et femmes de bonne volonté pour qu’ils comprennent l’enjeu d’une transformation profonde de leurs comportements, de leurs modes de vie. Et cela non pas pour brimer notre existence et notre soif de bonheur, mais pour vraiment fêter les noces du fils de Dieu, ressuscité après avoir donné sa vie librement et par amour. Ne boudons pas le projet de Dieu sur notre monde qu’il veut fraternel. Que soit faite sa volonté, il compte sur nous. !
André Jobard
15 octobre 2023