Une surprenante médaille d’or
A l’heure où tous les regards et toutes les conversations sont tournés vers les jeux olympiques, j’ai pensé comparer l’attitude de Jésus avec ses interlocuteurs à une course-poursuite. Qui va alors emporter la médaille d’or ? On le saura au terme des 4 dimanches où nous seront lus les évangiles, appelés ‘discours sur le Pain de vie’. Souvenez-vous, dimanche dernier nous avons entendu le récit de la multiplication des pains, dans lequel Jésus, grâce à la confiance d’un jeune qui n’a pas hésité à partager son pique-nique, a nourri 5000 hommes. Vous pensez bien qu’un tel phénomène mérite qu’on s’y arrête. De là le désir des foules rassasiées à prix encore moins cher qu’à Carrefour ou au Leclerc du coin, désir de retenir ce magicien et pourquoi pas, ne soyons pas mesquins dans nos désirs, faire de cet homme notre roi ?
S’engage alors un dialogue entre Jésus et ses interlocuteurs, un dialogue qui va bousculer bien des certitudes, bien des habitudes, où se mêleront déception, agressivité, enthousiasme et foi. Ce dimanche Jésus regrette que ces foules nourries gratuitement ne voient pas plus loin que le côté miraculeux de ce geste, miraculeux entendu comme merveilleux, accompli par un super-héros, un génie exceptionnel. Or le miracle, comme le désigne l’étymologie grecque du mot signifie le signe, signe d’un appel à lire, au-delà du geste ponctuel, un message capital. Et notamment à découvrir le véritable auteur de cette multiplication qui n’est autre que Celui qui avait donné la manne au désert quand les Hébreux souffraient de la faim (première lecture). En renvoyant à plus loin que lui, en désignant Dieu comme son Père qui veut nous nourrir, Jésus pousse ses interlocuteurs à se tourner vers l’essentiel, avec cette question que nous pouvons nous poser : « qu’est-ce qui vraiment nous nourrit ? » Qu’est-ce qui va donner de la saveur à notre existence ? Un bon repas chez Loiseau, des vacances exceptionnelles, des revenus de plus en plus florissants, des loisirs excitants, une santé inébranlable, ou même tout simplement une vie tranquille sans aspérités, sans contrariétés ?
La réponse de Jésus a de quoi nous surprendre, comme elle provoquera des réactions très vives et même agressives : « le pain de la vie, c’est moi ». Sous-entendu, ce qui me fait vivre , ce qui me nourrit, et qui doit donc vous faire vivre, c’est le service du plus humble, c’est l’amour inconditionnel envers tout homme, toute femme, quitte à se donner corps et âme pour cette noble mission. Et donc manger le pain qui donne la vie, c’est se mettre à la même table que Jésus, non pas pour la satisfaction immédiate et passagère d’une faim, mais pour vivre comme lui le service du plus pauvre, pour édifier la fraternité telle que Dieu l’a voulue.
Inutile de vous préciser que la course-poursuite va se prolonger pour mettre d’accord tous les protagonistes. Nous en apercevons déjà l’issue, quand les interlocuteurs de Jésus lui demandent ce qu’il faut faire pour travailler aux œuvres de Dieu. Entendant cela spontanément comme chrétiens pratiquants nous pensons à nos bonnes œuvres, à nos divers engagements, familiaux, professionnels, associatifs ; tout cela est respectable, nécessaire et Jésus lui-même ne manque jamais d’en faire l’éloge. Mais pourtant sa réponse est celle-ci : « l’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé ». C’est donc la foi qui est appelée, foi en la puissance de Dieu et de Jésus, qui met à mal notre défaitisme, nos ‘à quoi bon’. Et si la médaille d’or, c’était cette foi !
André Jobard
4 août 2024