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Quand un enfant partage son pique-nique – homélie du dimanche 28 juillet 2024

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Les lectures du jour

Quand un enfant partage son pique-nique

Au cours des vacances que j’ai eu la chance de vivre en ce mois de juillet, j’ai rencontré à plusieurs reprises des groupes d’enfants ou adolescents le sac à dos certainement chargé des pique-niques nécessaires à l’appétit féroce de ces jeunes. Et je pensais à ce jeune garçon de l’évangile, qui permit de débloquer une situation qui était dans l’impasse. J’aime beaucoup ce récit de la multiplication des pains tel que le relate saint Jean pour plusieurs raisons.

Tout d’abord la question de Jésus, « où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? »  Elle est à la fois expressive de son attention à l’égard de cette foule affamée, et aussi provocante : une façon de mettre à l’épreuve Philippe et nous-mêmes, toujours enclins à ne chercher que des solutions comptables ou techniques devant les défis à relever.

Arrive alors une 2ème étape : André (je n’y suis pour rien!) a repéré ce gamin qui a su faire preuve de clairvoyance en apportant son pique-nique. Ce regard est important, un regard qui ne laisse pas de côté l’insignifiant, le méprisable, le fragile, même si la réaction première est de juger difficile la solution apportée par cette découverte.

Et la 3ème étape : c’est cet enfant qui accepte de donner le précieux contenu de son sac à dos, de se dépouiller de toute chance de survie. On l’oublie trop souvent, ce geste de partage, cette générosité inattendue d’un jeune. Sans lui, que serait-il advenu pour cette foule affamée ?

Enfin ce qui va être déterminant , ce ne sont pas des gestes magiques de la part de Jésus qui agit dans une grande discrétion, mais tout simplement c’est cette prière d’action de grâce dans sa bouche. Action de grâce pour la générosité, la confiance de cet enfant, celle de ses disciples, celle de cette foule qui s’assoit dans l’attente de ce qui va se passer. Pour Jésus, tous ces petits gestes, toutes ces attitudes sont l’expression de l’amour de Dieu, et c’est cela son action de grâce. Et en rendant grâce, Jésus ne veut pas s’attribuer le succès de l’opération ;il en est juste l’instrument, le médiateur, Dieu étant celui qui donne généreusement.

Des défis, nous en avons beaucoup à relever, peut-être encore plus importants que de nourrir 5000 hommes avec le pique-nique d’un enfant. C’est le défi de la paix, de la justice, de la fraternité , du dialogue, en ces temps difficiles que nous traversons. Si nous réagissons comme l’apôtre Philippe, devant l’immensité des problèmes, en baissant les bras, alors tout paraît impossible. En revanche si nous acceptons de regarder autrement la réalité, notamment en faisant attention aux moindres gestes, aux plus petites paroles qui font avancer l’entente, la fraternité, même si ce n’est pas plus gros qu’un casse-croûte, si nous portons des paroles de confiance et non de dénigrement permanent, Dieu saura nous combler au-delà de toute attente.

Avant-hier soir avait lieu la cérémonie d’ouverture des J.O. : au-delà de ce qu’on pourrait retenir comme un désir de promotion nationale, n’y avait-il pas une belle image de la joie de se retrouver entre toutes les nations autour du sport ? J’ai tendance à voir dans cette multiplication des pains un formidable appel à dépasser notre amertume et notre angoisse devant un futur menaçant,à rester attentif et vigilant (comme André) à tout ce qui contribue à des rapports bienveillants, et enfin à rendre grâce pour tout ce que le Seigneur nous donne : c’est le rôle de toute eucharistie, où nous recevons la vie en abondance. Ce sera toujours dans la fragilité, la vulnérabilité, dans la pauvreté, mais la fécondité d’une telle attitude dépassera notre imagination.

André Jobard
28 juillet 2024

Venez à l’écart et reposez vous un peu – homélie du dimanche 21 juillet 2024

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Les lectures du jour

Venez à l’écart et reposez vous un peu, nous dit Jésus.

Chers frères et sœurs, chers amis,

Ces paroles résonnent bien pour ceux d’entre nous qui ont à cœur de prendre un repos estival ces jours-ci. Moi en premier. Mais ces paroles s’adressent au fond à tous ! Venez à l’écart et reposez-vous un peu. Nous avons tous besoin de ce repos spirituel dans ce monde où tout va à mille à l’heure, où tous courent vers un bonheur que l’on croit trouver dans la consommation. Nous ressemblons par beaucoup de traits à ces foules de l’évangile. Ils sont comme des brebis sans berger, dit Jésus.

Imaginons tous ces hommes et femmes dans l’attente de quelque chose ; d’une guérison, d’un travail, d’une reconnaissance, d’un regard qui leur dise qu’ils sont aimés qu’ils ne sont pas nuls. Imaginons ces hommes et ces femmes dans l’attente de quelqu’un, dans l’attente d’un idéal, d’un avenir. Imaginons ces hommes et ces femmes dans l’attente de ce qui leur donne conscience d’être quelqu’un, d’être aussi une personne. N’est-ce pas pour tous ces gens que Dieu s’est incarné en Jésus Christ ?

Dans notre société où l’individualisme et le matérialisme sont si puissants, les uns traînent l’ennui d’une vie sans souffle, un jour ressemblant désespérément à un autre, d’autres sont à l’étroit dans une société qui réglemente, qui judiciarise, qui étouffe ; d’autres encore surfent sur la vague ambiante sans vraiment discerner les conséquences…. Et voilà qu’une parole de Jésus retentit : venez à l’écart et reposez-vous un peu. Venez à l’écart avec le maître, à l’écart avec le vrai berger, à l’écart avec celui qui aime gratuitement et qui peut nous apprendre ce regard qui humanise. Car dans le cœur de Jésus il y a cette foule, cette multitude, ces hommes et femmes de toute génération qui cherchent désespérément un sens à leurs vies. Cette foule, ce matin, c’est nous qui avons accepté d’être ici à l’écart dans cette église. Ils étaient – nous sommes – comme des brebis sans berger. Nous avons besoin d’être éclairés dans ce monde où tout se vend. Nous avons besoin d’être nourris dans ce monde où la nourriture est souvent factice et superficielle. Comment cacher le vide de la vie en courant après l’argent, en courant après les modes, le dernier cri, en misant sa vie sur le paraître, ou encore en se confectionnant un monde à soi, avec comme critère ce qui me fait plaisir. Jésus fut saisi de compassion envers eux. Alors, il se mit à les enseigner longuement. Avant de donner du pain c’est d’abord par sa parole que Jésus rassasie les humains. Il parle à leur conscience, il parle à leur cœur. Le récit de la multiplication des pains qui va suivre l’extrait d’évangile de ce matin, ne doit pas être séparé de ce qui précède. C’est d’abord par la parole que Jésus s’efforce de rassembler la foule en un nouveau peuple de Dieu. C’est d’ailleurs pour cela que dans la messe il y a ces deux tables qui s’enchaînent : la table de la parole qui nous instruit et nous éclaire et la table du pain qui nous nourrit et nous donne la force.

Et voici que la foule accourt et rejoint à nouveau Jésus et ses disciples de l’autre côté de la rive. Le Concile Vatican II disait que les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ. Tous ces gens qui ont couru de l’autre côté et sont arrivés avant Jésus et ses disciples portent aussi en eux cette soif de Dieu. Laissons-nous donc rattraper par des frères et des sœurs qui cherchent un sens à leurs vies. Au fond, comme Jésus, nous ne pouvons pas vraiment vivre à l’écart dans un endroit désert . Nous ne pouvons que partager cette Bonne Nouvelle de l’Amour de Dieu pour tout homme. Ce matin nous venons vers Jésus pour l’entendre dire que Dieu aime chacun, que notre vie n’est pas un hasard et qu’elle a du sens. Puissions nous dire : parle Seigneur, je veux t’écouter et mettre ta parole en pratique. Parle Seigneur, je veux t’écouter et n’écouter que toi.

Judicaël Mitokpey
21 juillet 2024

Être envoyé avec un trésor à offrir au monde – homélie du dimanche 14 juillet 2024

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Être envoyé avec un trésor à offrir au monde

Chers frères et sœurs, chers amis….

Sur nos routes estivales nous rencontrons ce matin dans l’évangile, les missionnaires que Jésus envoie. Drôle de missionnaires qui s’en vont sans manteau ou tunique de rechange (pour la météo changeante de cet été, ce n’est pas très prudent).

Sur nos routes cet été, que nous soyons partis ou que nous restions chez nous, nous sommes appelés aussi à nous identifier à ces envoyés très particuliers qui ont reçu de Jésus des consignes très clairs. Les consignes que Jésus leur donne nous permet de les reconnaître dans les personnes que nous rencontrons, mais elles nous permettent aussi de nous identifier à eux.

– Ils sont avant tout invités à la sobriété. C’est la signification du fait de ne pas avoir de tunique de rechange. Il ne s’agit pas de défier la météo, mais il s’agit de renoncer à l’accumulation et à la tendance consumériste de notre époque. Ils s’en vont non pas comme des conquérants, mais comme des serviteurs suffisamment libre pour entrer en dialogue et vivre l’hospitalité et la rencontre avec les autres. Ils n’ont rien à vendre, mais un trésor à offrir. Il n’est pas question ici de performance mais de témoignage. C’est l’attitude de Jésus lui-même quand il demande à boire à la samaritaine. En demandant à boire à cette femme, Jésus lui permet de donner ce qu’elle peut donner. Cette manière d’agir va favoriser une confiance et un dialogue qui remet cette femme en route. Aimer ce n’est pas dire à l’autre : « regarde comme je suis bien, deviens comme moi ! » C’est lui dire en toute simplicité, « j’ai besoin de toi, donne-moi à boire. Toi aussi tu as des qualités, tu as quelque chose à donner ». Ce qui compte en premier c’est donc de créer des conditions d’un échange, de rendre possible un dialogue. C’est pourquoi Jésus demande à ses disciples un certain dénuement. Il les invite à oser être vulnérables. N’est-ce pas à cette condition que l’Esprit-Saint pourra passer par nous et à travers nous ? Ne pas craindre d’être pauvre, cela nous oblige à compter sur le Christ et sur les autres. Les douze que Jésus envoie en mission ne sont pas des cracks mais des personnes fragiles qui apprennent à compter sur Dieu. Aujourd’hui nous ne sommes pas meilleurs ni moins bien qu’eux. Nous sommes des serviteurs quelconques, des vases d’argile portant le trésor de l’évangile et c’est seulement si nous acceptons de ne pas être tout-puissant que le trésor que nous portons pourra être visible pour les gens que nous rencontrerons. Cette sobriété et cette pauvreté du disciple possèdent un autre avantage : celui d’apprendre à recevoir, et de penser l’autre non pas comme un réceptacle de ma générosité, mais comme une personne dont j’ai à apprendre quelque chose. Et cela change tout dans les relations.

Les envoyés sont pauvres et sobres mais vous aurez remarqué en écoutant l’évangile qu’il y a quand même quelque chose à emporter : D’abord, un bâton. C’est un objet très utile pour éloigner des serpents, c’est à dire le mal. Il leur a donné le pouvoir sur les esprits mauvais. Ce bâton c’est l’autorité sur les esprits impurs. c’est savoir que le mal n’aura pas le dernier mot et que le pardon peut apporter un surcroît de vie. C’est faire gagner l’amour contre la haine. Ensuite, ils emportent aussi des sandales. Les sandales, c’est pour pouvoir aller loin ; pour ne pas s’ébrécher les pieds ni se fatiguer trop vite. La mission est rude et le chemin est long. Il faut tenir le coup. C’est le signe de l’endurance, de la persévérance, mais aussi l’importance de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres. Enfin, la tunique unique ne serait-elle pas le signe de notre dignité de filles et fils de Dieu. Dignité de nous savoir aimé du père, envoyé par Lui. Il est important d’aller à la rencontre des autres, vêtus de notre tunique de baptisé. Soyons des baumes de douceur pour celles et ceux que rencontrerons, et chassons les démons : faisons reculer le mal en proposant la bienveillance comme antidote.

Judicaël Mitokpey
14 juillet 2024

Homélie du dimanche 7 juillet 2024

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Les lectures du jour

Chers frères et sœurs, chers amis,

Si Jésus était au milieu de nous ce matin, (bien sûr il est au milieu de nous, dans la communion de cette assemblée réunie qui écoute sa Parole, et qui va recevoir l’Eucharistie qui est son corps) ; mais s’il était au milieu de nous physiquement, et s’il était français, français gaulois, ou français depuis quelques générations, ou encore immigré naturalisé français, bref, si ce 07 juillet 2024 Jésus était parmi nous, il irait voter. Voilà. A César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Je ne vous dit pas pour qui il irait voter. Mais il aurait estimé juste d’accomplir ce devoir citoyen par lequel on choisit de déléguer nos libertés et nos possibilités à ceux qui, à l’échelle de l’état, pourraient agir en faveur d’un plus grand nombre, notamment les plus pauvres. La politique est le lieu par excellence où s’exerce la charité, la justice sociale, et la promotion des conditions qui permettent aux uns et aux autres de s’accomplir. L’évangile indique une boussole, c’est l’option préférentielle pour les pauvres. Les pauvres vous en aurez toujours avec vous, dit-Jésus, il y aura donc toujours à se souvenir avant tout de toutes ces personnes accablées par toute sorte de pauvreté humaine, spirituelle, psychique, et matérielle.

Non je n’ai pas choisi de prêcher sur les élections, mais j’estime que quand on est une famille, on peut se parler de ces sujets d’intérêt général, pour s’éclairer mutuellement. Et l’Église a la délicate mission d’éclairer les consciences avec le message de l’Évangile. Sans une conscience soigneusement formée et éclairée, on ne peut faire de bons choix. Chacun jouit bien évidemment de sa liberté de choisir. C’est pourquoi l’Église ne donne pas de consigne de vote mais elle éclaire les consciences. Voilà pourquoi je disais que l’une des boussoles de l’action politique que suggère l’Évangile, c’est l’option préférentielle pour les pauvres.

Dans l’apparence, tout ceci n’a peut-être pas grande chose à voir avec les Paroles que nous adressent le Seigneur aujourd’hui. Mais regardons Ezéckiel qui nous raconte, dans la première lecture, comment il a été envoyé vers un peuple difficile et désobéissant pour parler de la part du Seigneur. Alors, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas, lui dit le Seigneur, ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux. C’est à peu près ce à quoi nous sommes tous appeler dans nos choix politiques et sociaux, éclairés par l’Évangile, dans le contexte paradoxal d’un monde plus que jamais globalisé où cependant le repli sur soi et l’enfermement, les revendications identitaires et l’indifférence deviennent une mode et sont perçus comme une solution au besoin de paix, de sécurité et de bien-être matériel. Que l’on nous écoute ou que l’on ne nous écoute pas, on saura qu’il y a des prophètes dans ce pays. Moyennant quoi, nous pouvons comme le psalmiste, garder nos yeux levés vers le Seigneur et attendre sa clémence en faveur de ceux qui sont méprisés. Nous pouvons même être les expressions de cette clémence. Pour réussir cette mission prophétique dans nos familles, dans nos sociétés, le Seigneur dit à chacun comme à Saint Paul « Ma grâce te suffit car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ». Ce n’est pas grave si tu te sens impuissant devant les situations et les temps difficiles qui courent. C’est dans ta faiblesse que le Seigneur agit.

Le seigneur continue sans aucun doute de susciter des prophètes parmi nous. Prophète des temps nouveaux. Le charisme prophétique reçu par chacun de nous au baptême, il le confirme puissamment dans la vie de certains parmi nous, parmi vous. Notre attitude vis à vis de ceux là qui sont comme une étincelle dans la nuit peut être comme celle des gens de Nazareth qui ne peuvent s’empêcher de voir en Jésus ce jeune homme qui fait du zèle et de mépriser sa sagesse et sa parole. Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. A l’opposée, saurons-nous accueillir les signes prophétiques de notre temps? Saurons-nous porter nous-mêmes prophétiquement la Parole d’Espérance et de paix dans une société fracturée? Saurons-nous être des prophètes batisseurs de ponts d’amour et non pas de murs de séparation, mais aussi des défenseurs des droits des pauvres et des marginalisés? Voilà ce à quoi nous appelle notre devoir chrétien et notre devoir citoyen. Que le Seigneur nous y aide!

Judicaël Mitokpey
7 juillet 2024