L’amour, sommet de la gloire
Avec la fête de l’Ascension, il est beaucoup question de gloire (Jésus élevé dans la gloire), de montée au ciel, de siéger à la droite de Dieu sur un trône sacré ; toutes expressions qui peuvent chatouiller nos oreilles, désireuses d’entendre un autre discours, celui issu du concile Vatican II, qui a centré ses réflexions sur cet homme Jésus, un homme comme nous, qui a partagé entièrement notre humanité, proche des sans gloire, des terriens que nous sommes, des petits. Alors que viennent faire ces expressions d’un autre âge, qui trahissent l’identité-même de Jésus, le Nazaréen ?
Il nous faut alors aller chercher ce qui a motivé ce vocabulaire, ce style. Les témoins de la vie de Jésus ont été saisis par ses paroles, ses actes, et bien sûr par la façon dont il est mort, mort à laquelle il a donné tout son sens, à savoir une mort par fidélité à ses frères et sœurs en humanité, et fidélité à son Père, dans une confiance totale. C’est ainsi qu’ils ont compris la résurrection, comme l’authentification par Dieu de sa démarche d’amour ; c’est bien ce qu’ils expriment quand ils disent : « Dieu l’a ressuscité d’entre les morts ». Et pour témoigner de l’accomplissement de sa vie, de sa vocation, ils ont pris les mots du langage courant, tout simplement quand on dit de quelqu’un qui a eu un beau parcours de vie: « il est au sommet de sa gloire ». Cela est vrai pour Jésus, et c’est ce que célèbre cette fête de l’Ascension.
Et les proches de Jésus le disent en pensant non pas aux lieux de pouvoir qu’il aurait pu fréquenter, mais à sa compassion avec tous, à son souci de rejoindre les exclus, les plus pauvres. Pour eux, c’était cela qui valait à Jésus ces titres glorieux, parce qu’il avait ainsi réalisé sa vocation de fils d’un Dieu qui a créé le monde et l’a voulu fraternel et pacifique.
D’où l’appel qu’il adresse à ses amis, à nous, ses disciples, d’expulser les démons, de parler en langues nouvelles, de prendre des serpents dans les mains, d’imposer les mains aux malades. Expressions étonnantes, et incompréhensibles pour une oreille peu habituée à ce langage biblique. En résumé il s’agit d’apporter au monde un message d’espérance et d’amour par notre agir quotidien, par nos engagements les plus divers au service de la fraternité universelle. Et ainsi nous nous élevons dans le ciel, comme Jésus, pour être à notre tour assis à la droite de Dieu. Nous serons glorifiés, notre existence ne se limitera plus à sa dimension terrestre, elle sera déjà dans les cieux.
N’est-ce pas un stimulant puissant pour notre Église, qui ne tient pas sa gloire des lustres du Vatican, ni de somptueuses cérémonies, ni de titres honorifiques donnés à ses responsables ? La gloire de l’Église, c’est la disposition de cœur de tous ceux qui se revendiquent amis et disciples de Jésus, c’est la puissance de l’amour fraternel, c’est le service qu’elle peut apporter à l’humanité toute entière.
N’ayons plus peur alors d’employer ces termes de puissance, de gloire, de majesté, quand ils sont entendus comme expression d’une puissance d’amour : Dieu tout-puissant, c’est Dieu tout-amour !
André Jobard
9 mai 2024 – Ascension