Si Dieu existe pourquoi la souffrance?
La souffrance du juste : drame pour notre foi, Puissance de salut
Chers frères et sœurs,
chers amis,
La première lecture de ce dimanche décrit un serviteur de Dieu qui connaît les plus grandes humiliations. Il souffre. On le frappe, on lui arrache la Barbe, on lui crache au visage. Mais il affirme contre toute attente que le Seigneur son Dieu vient à son secours et qu’il n’est pas atteint par les outrages. Il estime que Celui qui témoigne de sa justice est proche, et qu’Il prendra sa défense. Ce texte qui appartient au chant du serviteur souffrant dans le livre du prophète Isaïe nous dit quelque chose du juste dans l’épreuve. Il laisse entendre que l’épreuve, l’injustice et l’humiliation n’épargnent pas les amis de Dieu. Ceci est à contre courant de nos pensées humaines. Si Dieu existe pourquoi la souffrance ? S’il est amour pourquoi laisse t-il ceux qui croient en lui souffrir de la maladie, ou connaître quelque situation difficile. Le mystère de la souffrance du juste est ce qu’il y a de plus inaudible dans le Christianisme et c’est aussi, paradoxalement, ce qui fait la puissance de notre foi. Non pas que Dieu gagne en puissance en nous faisant souffrir, mais précisément parce qu’il vient habiter et porter la condition de souffrance qui est la nôtre et en fait un chemin du salut. Dire que Jésus a souffert la croix, à peu près en subissant les mêmes humiliations que le Serviteur souffrant d’Isaïe auquel la tradition l’a d’ailleurs identifié, ce n’est pas un mythe, ce n’est pas une légende, c’est un fait. Et ce n’est pas non plus un parti pris pour le dolorisme. Nous faisons bien de marcher avec Jésus, de reconnaître comme Pierre qu’il est le Fils du Dieu vivant. Mais sommes-nous prêts à entendre que le Fils de l’homme va souffrir, qu’il va être rejeté et que sans doute nous ne serons pas épargnés ? C’est là que notre vie de Chrétien prend son virage le plus décisif. Sommes nous prêts à annoncer et à suivre un messie crucifié ?
Et qu’est ce que suivre un messie crucifié ? Selon Jésus lui-même, c’est prendre le chemin qui conduit à se perdre et sans lequel, il serait impossible de se trouver. C’est prendre un chemin de renonciation. Devenir disciples de Jésus et le suivre, c’est renoncer à tout un tas de petites et de grandes choses qui nous attachent à nous-mêmes. C’est accueillir notre vulnérabilité et celle des autres comme un vase creux qui se laisse remplir par l’amour infini de Dieu.
Ensuite, c’est agir. Si Jésus a renoncé à son divin rang et a embrassé notre condition de souffrance, il a aussi beaucoup agit en faveur des pauvres et des malades, des plus vulnérables de son temps. C’est là que la preuve de son amour s’est faite la plus explicite. Il a guérit les malades, donner à manger à la foule qui avait faim ; il a consolé ceux qui étaient dans le deuil et leur a rendu la joie ; il a pardonné à la femme adultère et lui a rendu sa dignité. Telle doit être notre attitude devant les souffrances et les humiliations. Plutôt que de nous contenter de rêver d’un monde ou elles disparaîtront, agissons en faveur des plus vulnérables et des plus pauvres. C’est là l’expression la plus vraie et la plus éloquente de notre foi. Et c’est ce que nous rappelle Saint Jacques dans la deuxième lecture : Si quelqu’un prétend avoir la foi sans la mettre en œuvre à quoi cela sert-il ?
Frères et sœurs, notre réponse à la question « pour vous qui suis-je ?» définit notre identité chrétienne. Cette réponse n’est pas verbale. Elle se trouve dans notre rapport personnel à la croix et dans notre capacité à porter les croix les uns des autres.
Judicaël Mitokpey
15 septembre 2024