Rendez à César ce qui est à César, et rendez vos cœurs à Dieu, parce qu’ils sont à Dieu
Chers frères et sœurs, chers amis,
Cet évangile que nous venons de proclamer nous est très familier avec cette sentence de Jésus que nous connaissons par cœur : « Donner à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu ». Certains ajoutent volontiers que César lui-même est à Dieu. On a l’habitude de se fonder sur ce texte pour dire l’attitude de Jésus par rapport au pouvoir temporel et pour justifier la nécessité d’une séparation entre la religion et l’État. J’aurais voulu faire une réflexion sur cette question, la question de la séparation entre l’Église et l’État, la question de la laïcité, la place de la religion dans le débat social et politique, la problématique de l’espace public comme espace agnostique et du confinement de la religion à la sphère privée. Mais je crains qu’un tel exposé avec des arguments philosophiques et théologiques paraisse trop universitaire voire soporifique pour vous. Alors j’ai posé la question à Jésus de nous donner une explication plus simple de cette sentence qui a traversé les siècles – à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu – et bien évidemment de nous éclairer surtout sur ce que cela peut impliquer pour nous, au-delà de la question de la séparation entre le pouvoir temporel nécessaire et la religion tout autant indispensable pour construire la cité de Dieu au cœur même de la cité des hommes.
Alors il m’a semblé que l’on peut s’attarder sur cette question de Jésus : « Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ? ». Comme à l’époque de Jésus, on peut encore voir sur toutes les pièces de monnaie et sur tous les billets de banque, une effigie et des inscriptions ne seraient-ce que pour dire combien vaut cette pièce ou ce billet. Je ne sais pas s’il existe des pièces ou des billets sur lesquels on a mis l’effigie de Dieu ou l’inscription « Dieu est amour », même si certains ont pu écrire « In God we trust, en Dieu nous croyons » sur leur billet de banque ». Mais alors l’image de Dieu, l’effigie de Dieu où est-elle gravée depuis toujours ? Qu’est ce qui porte de manière indélébile la marque de Dieu et qui mérite d’être rendu à Dieu selon la sentence de Jésus, « A César ce qui est à César et à Dieu ce qui est Dieu » ? Il me semble que c’est le cœur de chacun de nous. Oui, nous l’oublions peut-être souvent, « Nous sommes fait à l’image et à la ressemblance de Dieu ». Cela signifie que le centre de notre être, notre cœur, est marqué de cette ressemblance et de cette image divine. Rendez à César ce qui est à César, et rendez vos cœurs à Dieu, parce qu’ils sont à Dieu. Livrez-lui tout votre être parce que vous lui appartenez. Nous sommes faits pour lui, nous rappelle saint Augustin, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en lui. Les préoccupations matérielles aussi importantes soient-elles ne doivent pas nous faire oublier qu’à Dieu revient notre cœur. Et ce n’est une mauvaise chose de travailler à restaurer l’image de Dieu en nous parce que la fidélité à la ressemblance de Dieu nous ouvre des chemins de justice et de vérité qui nous permettent de discerner la juste attitude à avoir face à la gestion des biens de ce monde, face aux conflits qui menacent une partie du grand corps humains que nous formons. Cette fidélité à l’effigie de Dieu au fond de nos cœurs nous ouvre aussi des chemins de paix. Si nous rendons à Dieu ce qui lui appartient en premier, c’est-à-dire nos cœurs qui sont marqués par son effigie, nous trouverons la paix. Parce qu’en Dieu il n’y a que paix amour et justice. Prions donc sans cesse pour que nos cœurs ainsi que ceux de tous nos frères et sœurs humains se tournent vers Dieu avec sincérité. Alors régnera la paix. Et dans nos sociétés adviendra la cité de Dieu.
Judicaël Mitokpey
22 octobre 2023