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Mon Seigneur et mon Dieu – homélie du dimanche 27 avril 2025

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Judicaël

Courons vers le Ressuscité qui fait toute chose nouvelle – homélie du 20 avril 2025 – dimanche de Pâques

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En 2025, regarde l’Étoile, invoque Marie ! – homélie du 1er janvier 2025

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Naissance de Jésus : Lumière dans nos familles, Lumière pour ceux qui cherchent Dieu ! – homélie du dimanche 29 décembre 2024

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Il est né le divin enfant ! Allons à la rencontre de l’humilité, de l’autre, de Dieu ! – homélie du mercredi 25 décembre 2024 – Jour de Noël

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Judicaël Mitokpey, vicaire

Bienvenue à l’église de la Visitation pour vivre une expérience de Visitation ! – homélie du dimanche 22 décembre 2024

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Obsèques de Vincent Boggio – homélie du P. Jobard – 10 décembre 2024

Les obsèques de Vincent Boggio se sont déroulés le 10 décembre 2024 en l’église de La Visitation. Retrouvez l’homélie prononcée par le Père André Jobard.

Évangile de Luc 10,25-37 – Le bon Samaritain

Homélie du Père Jobard

A retrouver sur le site du diocèse

Dans sa condition mortelle et la pauvreté de son cœur, l’homme découvre en Dieu la Vie éternelle… – homélie du dimanche 10 novembre 2024

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Chers frères et sœurs,

Dans les textes de la Parole de Dieu de ce dimanche il est question de veuves :

– dans la première lecture, une Elie rencontre veuve qui est seule avec son fils, dans le psaume145, il est mentionné que le Seigneur soutient la veuve et l’orphelin, dans l’Evangile, contemplant la salle du trésor Jésus remarque une veuve qui met dans le tronc deux pièces de monnaie. Quand à elle, l’épitre aux hébreux rappelle un élément fondamental de notre condition humaine « le sort des hommes est de mourir une seule fois. »

Méditons tout d’abord sur la situation des veuves : une veuve est celle qui a vu son mari mourir. D’une certaine manière, elle perd sa moitié ou la moitié d’elle-même. L’expérience humaine nous montre que le deuil de son mari est un processus long et pas facile à vivre. La veuve se trouve fragilisée et cette fois ci seule à prendre en charge la vie. Si des enfants sont à la maison, elle se retrouve seule à les prendre en charge. Dans certaines législations et moments de l’histoire, la veuve en perdant son mari, perd aussi les biens de son mari. C’est alors que ces veuves s’en trouvent d’autant plus appauvries.

Dans la première lecture, la veuve que rencontre Elie est avec son fils et n’a pour bien qu’un peu de farine et d’huile. Elle donne d’abord de l’eau à Elie, puis exprime sa désespérance lorsqu’Elie lui demande du pain «  je rentre préparer le pain, nous le mangerons avec mon fils et puis nous mourrons ! » Le veuvage fait aussi prendre davantage conscience de sa propre mort possible. Ici, cette veuve exprime que pour elle et son fils, tout est fini, leur vie devient une impasse où par la mort toute l’histoire s’arrête. Mais cette veuve désespérée, déjà généreuse à donner de l’eau fait cependant confiance à Dieu par l’intermédiaire d’Elie. Et une nouvelle issue est donnée par l’espérance en Dieu ; tous trois ont à manger du pain. La jarre de farine ne s’épuisa pas.

La veuve de l’Évangile est marquée par une extrême indigence et une surprenante générosité et confiance en Dieu : elle donne à Dieu tout ce qu’elle a, son indigence et ses deux pièces de monnaie. Jésus la prend en exemple face aux gros riches et aux scribes qui aiment qu’on les remarque. Eux ne se préoccupe pas bien de Dieu mais plus de leur image, d’en mettre plein la vue à tous… Jésus sachant que ces situations à long terme ne rendent pas heureux, préfère comme dans les béatitudes montrer le chemin du bonheur : être pauvre de cœur, être en capacité d’aimer et de tout donner au Seigneur. Cette veuve sait donner sa vie à Dieu et comment le faire. Cette veuve est donnée en exemple par Jésus parce qu’au milieu des richesses encombrantes, des scribes qui régissent tout pour les autres et du monde des apparences, le chemin du bonheur est de faire confiance en Dieu, de devenir pauvre de cœur, de vivre la pauvreté comme une béatitude, et de tout donner à Dieu. Ce qu’a expérimenté aussi la veuve qu’Elie rencontre.

Le psaume exprime combien Dieu prend soin des pauvres et leur donne de quoi vivre : il soutient la veuve et l’orphelin. Ce chant merveilleux de l’action de Dieu montre que Dieu libère les pauvres de leurs misères et les mets en capacité d’aimer et même de partager alors qu’ils ont peu de choses. Le partage devient alors aussi un chemin de bonheur. Le pauvre est libéré, redressé dans sa dignité.

C’est alors ce qu’indique l’épitre aux hébreux : l’homme peut vivre sa condition mortelle comme un couloir sombre où tout d’un coup avec la mort tout s’arrête. Ce regard arrive lorsque l’homme est enfermé dans son péché, dans la fatalité des forces mauvaises et contraires à la vie. Mais le Christ est venu délivrer l’homme de ce couloir de la mort « il apparaitra une seconde fois » pour le salut pour lui donner la vie éternelle.

Enfin, on peut se demander pourquoi à quelques dimanches de la fin d’une année liturgique, la Parole de Dieu nous parle de veuves et de notre condition mortelle. Certainement parce que l’année liturgique n’est pas un cycle qui finit comme une route qui n’a plus d’issue et que nous recommencerions encore bêtement à reprogrammer une année liturgique qui dans un an se finirait encore. L’année liturgique n’est pas que répétitions, elle est un approfondissement du mystère de Dieu. Dieu est si grand que la multiplicité des années liturgiques n’épuisera jamais le mystère de Dieu. Et l’homme découvre dans l’approfondissement et l’enrichissement des années liturgiques qu’il célèbre, comment devenir petit à petit en grandissant, devenir « pauvre de cœur » et donc heureux, et qu’en s’approchant de la mort, il s’approche en fait de la vie éternelle. »

Père Jérôme Richon, curé de la paroisse de la Visitation

32ième Dimanche du temps ordinaire : Première lecture I Roi 17,10-16, Psaume 145, Heb 9, 24-28, Mc 12, 38-44

Quel est le plus grand cadeau que Dieu puisse nous offrir ? – homélie du dimanche 13 octobre 2024

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Quel est le plus grand cadeau que Dieu puisse nous offrir ?

On peut répondre la vie. Et même la vie éternelle. Mais c’est quoi la vie éternelle ???

Dans l’Évangile de ce dimanche, un jeune homme riche pose cette question à Jésus : « Que dois-je faire de bien pour avoir en héritage la vie éternelle ? »

S’il y a une chose à comprendre avant tout, et que le jeune homme de l’évangile n’a vraisemblablement pas compris, c’est que la vie éternelle est un don. C’est quelque chose que Dieu donne gratuitement.

Quelle est cette vie éternelle ? Elle est avant tout une vie. Ce n’est pas tout à fait notre vie présente, avec ses souffrances, ses injustices, ses maladies, ses problèmes socio-économiques… Mais c’est une vie qui n’est pas coupée de celle-ci. Parce que la vie éternelle commence dès à présent, certes de manière imparfaite, mais de manière certaine, là où l’amour de Dieu se manifeste. Si nous vivons de l’amour de Dieu, nous sommes déjà dans l’éternité. Là où est répandu l’amour de Dieu, là a commencé la vie éternelle. Or, c’est le Saint Esprit qui répand l’amour dans les cœurs. La vie éternelle nous est donnée dans l’Esprit Saint. L’Esprit Saint est Celui qui fait advenir en nous la vie éternelle.

Comme le jeune homme de l’évangile, Nous sommes des hommes et des femmes en recherche de quelque chose. En recherche de sens. Comme lui, nous sommes riches de nos personnes, et nous nous demandons ce qu’il faut faire pour être heureux. Heureux non pas de l’illusion de bonheur qui passe dans la pub et que propose notre société de consommation. Nous cherchons comment faire pour être heureux d’un vrai bonheur. Pour être en adéquation avec cette chose en nous qui nous porte et nous dit qu’il y a quelque chose de plus profond et de plus vrai à découvrir. Nous voulons savoir ce qu’il faut faire. Et nous nous rendons compte que la seule observance de la loi et de la raison droite nous laisse insatiable.

Jésus nous annonce une bonne nouvelle : quand nous devenons chrétiens, c’est-à-dire disciple de Jésus, le plus important ce n’est plus ce que nous devons faire ou ne pas faire. Ce n’est plus la loi. Tu dois manger ceci, tu ne dois pas manger cela, tu dois faire ceci, tu ne dois pas faire cela. Non cela ne passe plus en premier. Le plus important, c’est ce que Dieu a fait pour chacun de nous. Dieu t’a aimé personnellement dès avant ta naissance, Il t’aime et Il t’aimera toujours. Il est pour toi un Père. Et Jésus est un frère incomparable qui a donné même sa vie pour ton bonheur éternel. Accueillir ce vrai bonheur c’est devenir disciple de Jésus. Se laisser conduire par lui dans l’Esprit-saint qu’Il donne. Partir à l’aventure avec le Christ et se recevoir du Père comme un enfant, qui voit tous les autres humains comme des frères et sœurs. C’est cela le vrai bonheur. C’est là le seul critère de liberté pour chacun de nous. Avec une telle liberté, on peut non seulement donner sans compter, mais on peut tout donner et devenir pauvre comme le pauvre que l’on désire aider. L’Esprit Saint seul peut nous conduire le plus loin possible dans la charité du disciple du Christ.

Puissions-nous, nous laisser conduire vraiment par l’Esprit.

P. Judicaël

Homélie du dimanche 06 Octobre 2024

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« La liturgie de la Parole de ce dimanche, comme une harmonie, commence par cette ouverture :

« Dieu dit : il n’est pas bon que l’homme soit seul ! » Dieu s’inquiète de ce que l’homme vive dans la solitude. Être seul n’est pas bon pour l’homme. Combien de solitudes dans nos sociétés : des personnes sont seules dans leur appartement, leur maison, sur un lit d’hôpital, dans un Epahd, dans la rue. Nos sociétés produisent ces solitudes.

Dieu veut permettre à l’homme de sortir de ces solitudes. Pour cela, il lui propose de se mettre en marche. La liturgie est un peu comme une randonnée où Dieu fait progresser l’homme de pas en pas.

Tout d’abord, Dieu fait à l’homme un cadeau, celui de la création, comme nous le voyons dans le livre de la Genèse. Plus précisément, il lui fait le cadeau des animaux et des oiseaux. Un animal familier permet de rompre un peu la solitude. J’ai moi-même un chat. Les oiseaux du ciel sont très beaux, combien de couleurs à leurs plumes et comme leur chant est beau. Lorsque l’on fait une randonnée, même seul, la nature nous donne du bonheur et la fraicheur du vent ! Mais un animal de compagnie ne suffit pas. C’est pourquoi, Dieu fait l’humanité « Ish et Isha «  en hébreu, c’est-à-dire masculin et féminin. Rencontrer le genre différent de nous permet une bonne ouverture. L’homme ne peut avoir raison seul, ni la femme seul non plus, mais ils se complètent. Quand les hommes parlent avec les femmes et vice versa ils se complètent mutuellement Il est fait aussi bien sûr allusion à la famille, l’épouse et l’époux qui ne forment qu’une seule chair et l’Evangile reprend la beauté du couple uni et de la famille. Mais, n’allons pas trop vite, marchons à notre rythme.

Le Psaume qui suit la première lecture commence par une béatitude « Heureux qui craint le Seigneur qui a foi en lui et marche selon ses voies » . Voyez, il est bien question de marche et de randonnée. Celui qui ouvre sa vie à La parole de Dieu et marche selon ses voies est heureux : il découvre en lui la présence infinie de Dieu, comme je vous le disait ces dimanches passés,  « l’inhabitation de Dieu ». L’homme fait un pas de plus, s’il conjugue à la création ‘l’ouverture à Dieu dans sa propre vie.

« Voilà comment sera béni l’homme qui a foi dans le Seigneur » poursuit encore le psaume. Notre vie est faite pour devenir bénédicition ! pour porter des fruits délicieux tous les jours de notre vie. Dieu bénit la vie !

Suit l’Épître aux Hébreux : une épitre difficile et bien souvent nous aurions la tentation de passer directement à l’Évangile pour éviter la difficulté. Mais : l’épître aux hébreux dit quelque chose d’essentiel pour le chemin de notre vie. « Celui pour qui et par qui tout existe voulait conduire une multitude de fils jusqu’à la gloire » Voici que Jésus par qui tout existe nous montre l’horizon et l’aboutissement de notre randonnée humaine. La vie ne s’arrête pas avec la mort comme une impasse, mais elle est faite pour la gloire. La Vierge Marie est l’exemple le plus parfait de celle qui nous montre cette vie glorieuse à laquelle Dieu veut nous faire aspirer !

Bien souvent, dans une randonnée, quelqu’un va demander : »Où allons nous ? C’est encore long ? C’est quand qu’on mange ? »

A ces questions de la randonnée de notre vie, Jésus nous montre le terme : la vie dans la gloire : nous sommes faits pour cela. L’Épître poursuit encore en nous disant que le Christ « mène à la perfection » ! Dieu veut rendre l’homme parfait. Trop souvent dans la vie, nous baissons les bras et renonçons à cette possibilité de partager la perfection de Dieu. Certes cette perfection n’est peut être pas pour l’aujourd’hui : mais elle commence et s’achève dans la gloire !

Vient ensuite l’Évangile où Jésus reprend d’une part le beau socle de l’union de l’époux et de l’épouse, du couple et de la famille dans une vie sociale.

Mais il dit « ce que Dieu a uni que l’homme ne le sépare pas ». Cette parole appuyée sur la solidité du premier testament, nous dit une chose encore de notre vie humaine pour échapper à la tristesse de la solitude. Dieu veut faire de notre vie une union, une communion, une alliance. L’évangile dans la liturgie st toujours précédé d’une antienne évangélique souvent tiré d’un autre Evangile afin d’éclairer de l’intérieur ce qui va être révélé dans l’Evangile que nous allons recevoir ; Ce dimanche l’antienne tiré de l’Évangile selon saint Jean, alors que notre Évangile est de Marc proclame «  Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous et en nous son amour atteint sa perfection ». Il est bien question de perfection et au terme de notre route de perfection dans l’Amour de Dieu. Dieu veut faire de nos vies chacune selon sa vocation propre une communion, une alliance. Nous ne devons pas vivre seul mais en communion. Dieu veut que les peuples vivent en communion en alliance, non pas fermés dans leurs murs !

Comment arriver à la perfection de l’amour pour un couple ou pour toute autre vocation ? Comment arriver à la perfection de l’amour dans nos vies humaines ? Jésus posant la main sur les enfants dit alors : « Le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent ». Un bébé, un enfant vit essentiellement dans l’amour, c’est ainsi qu’il s’épanouit et grandit. Dans l’Évangile l’enfant c’est aussi le petit, le pauvre. Celui qui vit simplement pauvrement. Il ne s’agit pas de mener notre vie de manière infantile, mais de vivre dans la petitesse et la béatitude de la pauvreté.

Dans une randonnée, il est bon de décharger son sac de choses trop lourdes et même de ne plus en avoir pour marcher main dans la main, les uns avec les autres, en serrant de manière privilégiée la main du pauvre pour qui la solitude est encore plus dure à vivre.

Vous aurez bien compris qu’en ce dimanche, par Sa Parole, Dieu veut nous mettre en marche et nous apprendre à marcher pas à pas, capable de parcourir la randonnée de la vie jusqu’au bout. C’est aussi le sens du Synode sur la Synodalité que vit l’Église de ce temps§

Aussi laissons Dieu nous apprendre à sortir de nos solitudes, à contempler la création, les animaux et les oiseaux à nous ouvrir à Sa Parole pour être heureux, à marcher dans le cap de la gloire et de la perfection de l’amour qui commence par l’Eucharistie, hommes et femmes à marcher ensemble en nous aimant les uns les autres avec les pauvres.

Dieu ne nous dit-il pas « Bonne Route » ! »

Père Jerôme Richon, curé de la paroisse de la Visitation

« Le Seigneur est mon appui… » ps 58 – homélie du dimanche 22 septembre 2024

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Les lectures du jour

« C’est la rentrée paroissiale. Nous commençons notre année pastorale en célébrant la messe. Nous voulons vivre notre année à l’image d’une partition de musique que nous voulons jouer ensemble.

Nous venons de vivre la première partie de la messe que l’on appelle la liturgie de la Parole. Nous pouvons aisément comparer la liturgie de la parole à un « orchestre » qui se met en place pour que la musique soit heureuse et harmonieuse.

Dans un orchestre, il y a divers instruments ! De gros instruments un peu lourds à mettre en place que l’on peut comparer aux premières lectures issues de l’ancien testament, que l’on connait souvent assez mal. Ils sont si lourds que parfois nous pouvons avoir tendance à les considérer comme faisant parti du passé, de l’ancien. Un psaume tiré aussi de l’ancien testament vient faire suite à la première lecture. Puis une deuxième lecture issue des lettres du Nouveau testament et enfin un texte d’Évangile. Cela forme un orchestre. Pour que ces lectures deviennent une « harmonie », il s’agit de faire jouer ensemble ces instruments. Dans une orchestre, il y a un chef d’orchestre qui avec un instrument que l’on appelle un diapason, prend la note de départ et donne le ton pour que l’ensemble soit juste. Le curé à la tête d’une paroisse n’a pas de diapason mais « la prédication » pour que la communauté qui veut vivre des textes de la parole de Dieu puisse vivre l’harmonie de Dieu.

Pour cela, il nous faut extraire un verset qui «  donne le ton ». Aujourd’hui c’est un verset du psaume qui nous est offert comme le « bon ton » de ce que nous allons vivre. Ce verset est le suivant tiré du Psaume 58 : « Le seigneur est mon appui ». Dans la vie, nous avons besoin de point d’appui. Vous êtes assis sur des bancs dont le dossier est votre appui. Lorsque nous faisons une randonnée par exemple, nous pouvons nous arrêter contre un rocher pour reprendre souffle et nous appuyer. Après cette pause nous pouvons repartir. Le Messie est d’ailleurs souvent comparer à un rocher dans le premier testament

La parole de ce dimanche nous offre de comprendre la présence de Dieu dans nos vies comme un appui nécessaire pour que la vie soit harmonieuse. Pourquoi avons-nous besoin de l’appui de Dieu ? Parce que nous risquons de tomber, le monde bousculé risque de tomber, c’est-à-dire de ne plus permettre aux hommes de vivre ensemble en harmonie. Les lectures viennent aussi l’expliquer lorsque Saint Jacques dit « d’où viennent les guerres, d’où viennent les conflits ? ». Il est question aussi dans la première lecture du livre de la Sagesse du juste persécuté, tué malmené. L’histoire humaine semble , sans cesse, répéter les guerres les conflits. La vie humaine est bousculée par ces épreuves, par ce sang innocent trop souvent versé pour écrire l’histoire. Dieu n’est pas indifférent à ce monde malmené, une planète que l’on détruit , où peut être bientôt nous ne pourrons plus vivre, des empires qui veulent s’étendre et qui, pour cela, détruisent, font la guerre et tuent ! Notre monde bousculé, malmené a besoin de l’appui du Seigneur. C’est pour cela que Dieu se présente à nous comme notre Appui et cela est une bonne nouvelle ; parce que Dieu donne et veut la Vie, et non la mort et les conflits.

Dans l’Evangile, Jésus enseigne que le Fils de l’homme est livré aux mains des hommes, qu’il sera tué et que trois jours après sa mort il ressuscitera ».. Les disciples ne comprirent pas bien cette annonce ce manque de compréhension peut être légitime , car lorsque Jésus énonce cela – un Messie livré, tué puis ressuscité – la résurrection n’ pas encore eu lieu. Mais justement, c’est au cœur de la vie humaine bousculée, au cœur de la vie des sociétés malmenées, au cœur de la souffrance humaine que de toute manière un jour où l’autre nous rencontrons que Jésus annonce ce que Fait le Seigneur. Jésus entre au cœur de l’histoire, il prend sur lui conflits et guerres pour que la marche du monde puisse traverser ces souffrances et marcher vers la vie. Les hommes ne font que construire une histoire qui revient sans cesse au point de conflits et de mort. Dieu ne construit pas l’histoire de cette manière : Dieu fait de l’histoire une harmonie tenue vers la Vie uniquement ! Jésus nous demande de regarder vers l’avenir, de regarder devant, de regarder vers la vie ! Les yeux fixés sur le Christ, la vie du monde ne s’arrêtera pas avec la mort, les guerres et les conflits, comme arrivée au bout d’une impasse.

Il ressuscitera ! La vie du monde ressuscitera, en prenant appui sur le Seigneur.

C’est pour quoi en ce dimanche, le Seigneur nous demande d’ouvrir nos cœurs, de prendre appui sur Lui pour que la vie devienne une harmonie, pour qu’ensemble , comme un orchestre nous puissions faire de l’histoire une belle partition de musique, une harmonie. Le seigneur est notre appui pour que nous vivions et sachions traverser les guerres et le conflits, les épreuves. Le Seigneur est le levier qui permet la vie à l’histoire de l’humanité! Seigneur donne la résurrection parce que Jésus est le Chemin, La Vérité et la Vie !

Père Jérôme Richon, curé de la paroisse de La visitation

Si Dieu existe pourquoi la souffrance? – homélie du dimanche 15 septembre 2024

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Si Dieu existe pourquoi la souffrance?
La souffrance du juste : drame pour notre foi, Puissance de salut

Chers frères et sœurs,

chers amis,

La première lecture de ce dimanche décrit un serviteur de Dieu qui connaît les plus grandes humiliations. Il souffre. On le frappe, on lui arrache la Barbe, on lui crache au visage. Mais il affirme contre toute attente que le Seigneur son Dieu vient à son secours et qu’il n’est pas atteint par les outrages. Il estime que Celui qui témoigne de sa justice est proche, et qu’Il prendra sa défense. Ce texte qui appartient au chant du serviteur souffrant dans le livre du prophète Isaïe nous dit quelque chose du juste dans l’épreuve. Il laisse entendre que l’épreuve, l’injustice et l’humiliation n’épargnent pas les amis de Dieu. Ceci est à contre courant de nos pensées humaines. Si Dieu existe pourquoi la souffrance ? S’il est amour pourquoi laisse t-il ceux qui croient en lui souffrir de la maladie, ou connaître quelque situation difficile. Le mystère de la souffrance du juste est ce qu’il y a de plus inaudible dans le Christianisme et c’est aussi, paradoxalement, ce qui fait la puissance de notre foi. Non pas que Dieu gagne en puissance en nous faisant souffrir, mais précisément parce qu’il vient habiter et porter la condition de souffrance qui est la nôtre et en fait un chemin du salut. Dire que Jésus a souffert la croix, à peu près en subissant les mêmes humiliations que le Serviteur souffrant d’Isaïe auquel la tradition l’a d’ailleurs identifié, ce n’est pas un mythe, ce n’est pas une légende, c’est un fait. Et ce n’est pas non plus un parti pris pour le dolorisme. Nous faisons bien de marcher avec Jésus, de reconnaître comme Pierre qu’il est le Fils du Dieu vivant. Mais sommes-nous prêts à entendre que le Fils de l’homme va souffrir, qu’il va être rejeté et que sans doute nous ne serons pas épargnés ? C’est là que notre vie de Chrétien prend son virage le plus décisif. Sommes nous prêts à annoncer et à suivre un messie crucifié ?

Et qu’est ce que suivre un messie crucifié ? Selon Jésus lui-même, c’est prendre le chemin qui conduit à se perdre et sans lequel, il serait impossible de se trouver. C’est prendre un chemin de renonciation. Devenir disciples de Jésus et le suivre, c’est renoncer à tout un tas de petites et de grandes choses qui nous attachent à nous-mêmes. C’est accueillir notre vulnérabilité et celle des autres comme un vase creux qui se laisse remplir par l’amour infini de Dieu.

Ensuite, c’est agir. Si Jésus a renoncé à son divin rang et a embrassé notre condition de souffrance, il a aussi beaucoup agit en faveur des pauvres et des malades, des plus vulnérables de son temps. C’est là que la preuve de son amour s’est faite la plus explicite. Il a guérit les malades, donner à manger à la foule qui avait faim ; il a consolé ceux qui étaient dans le deuil et leur a rendu la joie ; il a pardonné à la femme adultère et lui a rendu sa dignité. Telle doit être notre attitude devant les souffrances et les humiliations. Plutôt que de nous contenter de rêver d’un monde ou elles disparaîtront, agissons en faveur des plus vulnérables et des plus pauvres. C’est là l’expression la plus vraie et la plus éloquente de notre foi. Et c’est ce que nous rappelle Saint Jacques dans la deuxième lecture : Si quelqu’un prétend avoir la foi sans la mettre en œuvre à quoi cela sert-il ?

Frères et sœurs, notre réponse à la question « pour vous qui suis-je ?» définit notre identité chrétienne. Cette réponse n’est pas verbale. Elle se trouve dans notre rapport personnel à la croix et dans notre capacité à porter les croix les uns des autres.

Judicaël Mitokpey
15 septembre 2024

Puiser de la force dans la contemplation pour agir en faveur de la création ! – homélie du dimanche 1er septembre 2024

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Puiser de la force dans la contemplation pour agir en faveur de la création !

Chers frères et sœurs,

Chers amis,

Vous le savez ou vous ne le savez peut-être pas, aujourd’hui c’est le dimanche de l’entre-deux. Non pas de l’entre-deux chaises, mais l’entre-deux curés. Voilà c’est comme ça ! nous rendons grâce à Dieu pour l’un et l’autre. Pour celui qui s’en va se reposer (nous souhaitons que ce puisse être vraiment le cas) et nous rendons grâce pour celui qui vient vient travailler à l’avènement du royaume de Dieu et à la croissance de ce royaume dans le cœur de chacun (nous souhaitons aussi que ce puisse être vraiment le cas). Et enfin nous rendons grâce pour ceux qui restent là, vous et moi. Que nous puissions accueillir ces changements non pas comme des spectateurs qui restent au balcon de l’histoire et qui en subissent les changements mais comme des coopérateurs de ce que la providence divine enseigne et apporte avec chaque changement. Aujourd’hui c’est donc le dimanche de l’entre-deux curés, parce que le père Jérôme Richon, nouveau curé va être installé et établi dans cette charge dimanche prochain.

Vous le savez ou vous ne le savez peut-être pas, aujourd’hui c’est aussi la journée mondiale de prière pour le don de la création. Cette journée de prière pour le don de la création qui est toujours célébrée le 1er septembre et ouvre le mois de la création. Cette journée est à la fois un moment pour célébrer la décision de Dieu de créer, [oui toute la création et toutes les créatures y compris vous et moi, sont des dons de Dieu], mais cette journée est aussi un moment pour réfléchir sur la façon dont nous gérons ce grand don de la création. Tout commence dans l’Écriture avec le grand mystère de la création comme une étincelle généreuse au milieu d’un chaos obscure. Qu’avons-nous fait de ce don ? Qu’avons nous fait de cette création qui est comme le dit le pape François, langage de l’amour de Dieu. Cette journée interpelle notre responsabilité individuelle et collective vis-à-vis de la création et nous invite à passer à l’action. Une action enracinée dans la contemplation de la beauté de Celui qui crée et de ce qui est créé.

Autrement nous serons ni plus ni moins qu’un peuple qui honore Dieu des lèvres et qui ne l’a pas dans le cœur. L’évangile de ce jour nous met en garde contre cette tentation.

Notre communauté Église et chacun de nous avec elle, est aussi tentée de se scléroser dans des pratiques religieuses extérieures. Ce peuple m’honore des lèvres mais leur cœur est loin de moi. Si Jésus a pris naissance dans notre humanité, s’il est venu vivre dans la création et au milieu des créatures, c’est parce que l’homme en tant qu’il est inséré dans la création a du prix aux yeux de Dieu. Et c’est ce souci de l’autre et de la réalité création dans laquelle il est pris et sans laquelle il ne peut vivre qui doit nous habiter. Autrement, nous pouvons être tenté comme les pharisiens de tomber dans une espèce de ritualisme qui consiste à s’enfermer dans le rite en oubliant complètement pourquoi le rite est fait. Ce que le Seigneur attend de nous, c’est qu’en pratiquant le rite, en venant célébrer le dimanche, en priant, en faisant des pèlerinages, en recevant les sacrements, nous apprenions à aimer. Nous apprendrons à aimer non pas en nous attachant au rite, mais à la personne du Christ. Le danger qui nous guette tous, c’est que, en s’habituant au rite et aux pratiques religieuses, nous en fassions des protections qui nous empêchent de nous poser les vraies questions. On peut s’organiser par exemple une vie confortable et ne plus se laisser interpeler par l’audace du Christ et de son évangile, ou par ce qui se passe autour de nous. Une pratique religieuse est évaluée à partir de l’esprit qui l’anime. Nous passerons ainsi d’un comportement religieux apparemment parfait, à la foi qui est une relation de confiance avec le Seigneur.

Que notre action puise sans cesse dans la contemplation de ce Dieu qui nous aime tant et de ses œuvres qui sont des langages de son Amour.

Et comme dit Saint Paul, Que le Christ habite en nos cœurs par la foi.

Judicaël Mitokpey, vicaire

Une foi soumise à bien des remises en cause – homélie du dimanche 25 août 2024

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Les lectures du jour

Une foi soumise à bien des remises en cause

Il était une fois un curé d’une très grande paroisse, dans la banlieue d’une très grande ville, que les circonstances, en partie heureuses pour lui, peut-être plus tristes pour ses paroissiens, amenaient à quitter sa charge, après 13 ans de service. C’était donc l’heure du bilan, avec les considérations habituelles quand un responsable quitte sa charge :dans quel état laisse-t-il les finances ? Quels travaux importants ont marqué son passage ? Combien d’apéritifs et de repas partagés a-t-il initiés ? Combien de baptêmes, de mariages, d’obsèques a-t-il célébrés ? Quel est le montant de la participation de la paroisse au denier de l’Église ? Comment étaient ses homélies ? Donnait-il l’impression d’être un homme de prière ? Avait-il des initiatives en matière liturgique pas toujours conformes au Missel romain ? Sur tous ces sujets, les avis peuvent être variés, suivant ce que chacun estime prioritaire. Il se trouve que l’évangile du jour de sa dernière messe comportait cette magnifique profession de foi de Pierre : « A qui irions-nous, Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle ? » Il ne lui en fallait pas plus pour le guider dans la relecture de son ministère. Vous avez compris de quel curé il était donc question !

Oui, cette parole de Pierre est une belle profession de foi ; toute la fougue de Pierre est présente dans ces quelques mots. On sait qu’elle fut suivie par un épisode moins glorieux, à savoir le triple reniement à l’heure cruciale, suivi lui aussi par ce dialogue étonnant avec Jésus ressuscité qui lui demande à trois reprises : « m’aimes-tu ? » et qui lui confie la charge de son Église. Cela nous conduit à comprendre que la foi n’a rien d’une certitude définitive, qu’elle est sujette à bien des remises en cause, à des doutes, jusqu’à des reniements. En cela la foi est totalement tributaire du contexte dans lequel nous vivons : un accident de santé, un revers professionnel, la venue d’une mésentente familiale, la situation politique nationale et internationale, tous ces aléas peuvent ébranler notre foi chancelante. Pour avoir partagé beaucoup de choses avec vous, chers paroissiens, j’ai découvert combien il était important, capital même, de rester humble dans l’affirmation de sa foi, qui est plutôt une démarche de confiance. Celle-ci est soutenue par une communauté de croyants, tous balbutiant des mots de foi, et surtout accueillant des situations parfois très bancales, se mettant au service des plus fragiles, revêtant le tablier du service afin de transmettre un peu de cette confiance perdue par les blessures de l’existence.

Je vous avoue que j’ai aimé vous accompagner sur ces chemins de la foi, de l’espérance, de l’amour. Et vous-mêmes vous m’avez soutenu dans mon ministère certains jours moins fastes que d’autres. C’est une réciprocité que nous avons vécue, dans la bienveillance, dans une certaine exigence, dans l’audace, dans l’effort, afin de donner un témoignage de la présence de Dieu à notre histoire humaine. Tout cela me fait dire qu’à notre façon nous avons repris la confession de Pierre, conscients de notre propre fragilité, et confiants en la puissance du Christ ressuscité.

Ayant dit tout cela, je pense que certains d’entre vous attendaient une explication de la pensée de Paul, qui nous heurte avec ses mots tellement dissonants dans notre modernité : « Femmes, soyez soumises à vos maris ». J’entends parfois le reproche fait aux prédicateurs de sauter par dessus une telle difficulté. Je me risque à dire que pour les comprendre et surtout les recevoir comme Parole de Dieu, il faut sortir du contexte de l’époque pour entendre l’appel à une véritable conversion dans nos rapports les uns avec les autres afin d’aimer tout homme, toute femme comme Jésus qui a aimé jusqu’à donner sa vie. Ouf ! Et si j’ai un ultime message à vous transmettre, c’est bien celui-là : changeons nos cœurs, gardons présent en nous et dans notre paroisse, ce souci d’une conversion permanente, puisque avec Pierre, nous affirmons que Jésus a les paroles de la vie éternelle.

Pour revenir à l’histoire de ce curé qui faisait le bilan de son passage dans sa paroisse, la légende dit qu’après un tel bilan, son évêque accepta son souhait de faire valoir son droit à la cessation de sa responsabilité pour profiter d’une retraite paisible et féconde.

André Jobard
25 août 2024

Le pain de vie – homélie du dimanche 18 août 2024

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Les lectures du jour

Le pain de vie

Depuis plusieurs dimanches nous écoutons le discours de Jésus sur le pain de vie. « Je suis le pain de vie ». C’est un long discours, un discours en boucle, qui comporte des redites. Certains pourraient se dire : « J’ai bien compris, on pourrait passer à autre chose ».

Or, les passages d’évangile proclamés à la messe ont été choisis par des spécialistes en Écriture sainte. Leurs travaux ont duré 4 ans après le concile. C’est dire combien leur choix a été soigneux. Il a abouti au lectionnaire que nous utilisons depuis plus de 50 ans. Ceux qui ont choisi de nous faire déguster plusieurs dimanches de suite ce discours du pain de vie pour que nous le méditions pendant la semaine, ne l’ont pas fait au hasard. Ils ont voulu souligner la place essentielle de ce discours dans l’évangile de Jean, lequel a recueilli ces paroles de Jésus, les as méditées toute sa vie, et peut-être enrichies en leur donnant par anticipation une tonalité eucharistique (« Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle »), alors que ce même Jean n’évoquera pas la fraction du pain lors du dernier repas de Jésus, comme si ce n’était plus nécessaire puisque Jésus l’avait annoncé dans ce discours du pain de vie : « Le pain que je donnerai, c’est ma chair ».

On comprend combien ces paroles pouvaient être incompréhensibles pour les Juifs qui interrogeaient Jésus : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Mettons-nous à leur place. Ils n’avaient pas la clef de lecture, celle du dernier repas. Nous, nous l’avons et tout s’éclaire.

Dans ce discours du pain de vie, Jésus alterne les sujets de chaque phrase. C’est tantôt le Père, tantôt le Fils, tantôt les auditeurs. Le Père comme sujet : « Mon Père donne le vrai pain venu du ciel ». Le Fils comme sujet : « Moi je suis le pain vivant qui est descendu du ciel ». Les auditeurs, autrement dit nous-mêmes, comme sujets : « Si vous ne mangez pas ma chair, vous n’avez pas la vie en vous ». C’est simple. C’est lumineux.

En relisant ce discours à plusieurs reprises, il m’a semblé que Jésus, tout en parlant, découvrait ce qu’il était en train de dire et qu’il s’en persuadait : « Je suis le pain de vie ».

En effet, la mission de Jésus ne suit pas un programme écrit à l’avance. Dans l’évangile de Jean, l’ampleur de sa mission lui apparaît progressivement. C’est au fur et à mesure de ses rencontres qu’il en prend conscience. Point de départ : la rencontre avec Jean-Baptiste au Jourdain qui atteste qu’il est le Fils de Dieu. Voilà une sacrée révélation ! Mais que doit-il faire ? Puis la rencontre avec les premiers disciples qui le suivent sans savoir où il va, ce qui a pu étonner Jésus qui devient un Maître à suivre, la rencontre à Cana de jeunes mariés qui lui font découvrir un pouvoir extraordinaire, celui de faire des miracles, puis la rencontre avec les marchands du Temple qui déclenche une colère qui a dû le surprendre, la rencontre dans la nuit avec Nicodème qui le conduit à dire que celui qui croit en lui a la vie éternelle et qu’il est la lumière du monde au milieu des ténèbres, la rencontre avec la Samaritaine où il comprend que sa Parole est une source jaillissant en vie éternelle, et enfin la rencontre avec 5000 hommes affamés auxquels il donne du pain pour nourrir leurs corps.

C’est là que sa mission prend un tournant. A partir de cette distribution de pain, il comprend qu’il est lui-même le pain de vie, qu’il doit non seulement donner sa vie, mais, mieux, sa chair à manger pour que tous ceux qui mangeront sa chair aient la vie éternelle, la vie qui ne déçoit pas comme disait Pierre la semaine dernière. Donner sa vie. Il le fera. Donner sa chair à manger. Il le fera. Et nous mangeons sa chair comme il l’a dit pour avoir la vie éternelle.

Ce n’est pas rien. Gardons-nous au moment de la communion d’en faire une geste banal.

Vincent Boggio
18 août 2024

Quand le ciel vient sur la terre – homélie du jeudi 15 août 2024 – Assomption

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Quand le ciel vient sur la terre

Grâce à votre générosité, chers paroissiens, j’ai donc acquis la semaine dernière un nouvel ordinateur et un smartphone : quelle révolution pour moi, quelle intelligence est appelée pour le bon fonctionnement de ces appareils, qui ont pour but de faciliter la communication, la rencontre entre les personnes : voilà un beau projet. A un moment où je butais sur un os, j’ai abandonné mon exercice pour me reposer par la lecture de mon journal préféré: mais alors sur quoi je tombe ? Sur la chronique d’une journaliste qui s’est engagée à laisser son smartphone au placard pendant une semaine, pour être davantage présente à son entourage, rejoignant ainsi un mouvement plus général de libération par rapport à ces moyens numériques qui prennent la place de vraies rencontres. Autant dire que je me suis senti une fois de plus en décalage par rapport à mon époque. C’est alors que m’est revenue l’histoire d’une autre rencontre qui s’est passée sans smartphone, sans téléphone, à moins que l’on assimile l’ange Gabriel à une application venant de l’univers de Dieu !

Vous l’avez reconnue, cette rencontre, celle de Marie et de sa cousine Élisabeth, dont nous venons de lire le récit. Une véritable rencontre qui les a marquées toutes les 2, je dirais même tous les 3, le bébé dans le ventre d’Élisabeth ayant lui aussi manifesté sa réaction à la venue de Marie. Rencontre à l’image des rencontres qui nous touchent particulièrement, qui nous font avancer. C’est bien ce que ressent Elisabeth, sensible à la démarche de sa jeune cousine, avec qui elle va pouvoir partager sa joie de l’arrivée surprise d’une grossesse tant attendue. D’ailleurs elle voit derrière cette visite celle de son Seigneur, tellement elle est imprégnée de la foi qui lui fait dire que la joie ressentie ne peut venir que du ciel. Une foi confirmée par l’allégresse exprimée par son enfant. Et elle comprend qu’à la source de cette joie il y a, chez Marie, la foi en l’accomplissement de la promesse de Dieu faite à son peuple. Et c’est ce que va chanter Marie, en reprenant dans son magnificat le récit de l’action de Dieu dans notre histoire. Il lui a fallu cette rencontre, ce partage de la même foi, pour exprimer son action de grâce, alors qu’elle ne l’avait pas fait sitôt après la venue de l’ange le jour de l’Annonciation.

Je suis toujours surpris de constater qu’en ce jour où célébrons la montée au ciel de Marie, la liturgie nous propose ce récit, tout simple, tout ordinaire, très terre à terre de la Visitation. Je me souviens d’un très beau cantique de Gounod : aujourd’hui le ciel est venu sur la terre. Je dirais volontiers que la terre a rejoint le ciel, que nos existences, dans ce qu’elles ont de plus ordinaire, prennent une dimension d’éternité, c’est-à-dire de solidité, de fidélité. C’est cela que nous reconnaissons en Marie, femme entre toutes les femmes, qui vécut tout simplement dans cette humble bourgade de Nazareth en accueillant par surprise l’enfant Jésus ; elle l’a accompagné dans sa croissance comme toute mère aimante, elle l’a suivi dans sa vocation, certainement pas sans interrogation ni souffrance, jusque dans sa passion. Sa foi en la fidélité de Dieu, qui doit être la nôtre, lui a permis de traverser la mort pour participer pleinement à la vie de ressuscité de son fils. De là notre espérance : dans nos vies compliquées, au cœur d’une situation planétaire très bousculée, il est précieux de pouvoir contempler en Marie, figure du peuple de Dieu, notre destinée : oui nous sommes appelés à entrer dans la lumière du ressuscité.

Souhaitons-nous de connaître la joie de belles rencontres, bien réelles, sans smartphone ni appareils révolutionnaires, dans la même simplicité vécue par Elisabeth et Marie.

André Jobard
15 août 2024

La vie éternelle – homélie du dimanche 11 août 2024

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La vie éternelle

Nous venons d’entendre « amen, amen, je vous le dis, il a la vie éternelle, celui qui croit ».

Dimanche dernier, c’était « Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle ».

Dimanche prochain, ce sera « Moi je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement » ; et le suivant, « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ».

C’est quoi, la vie éternelle ?

Quelque chose qui commence après la mort et ne finit jamais ? Interminable, donc, ou, selon le mot de Kafka, « l’éternité, c’est long, surtout vers la fin » ?

Cela n’est pas le sens premier, profond, du mot éternel, ce n’en est qu’un sens dérivé, secondaire et, j’ose le dire, de peu d’intérêt.

Dans l’Ancien Testament, le mot éternel n’est pas un adjectif qui s’applique à une chose ou à une autre. C’est un attribut de Yahvé, en tant que Dieu-qui-aime-son-peuple. Le psalmiste écrit :

« Rendez grâce à Yahvé car il est bon, car éternel est son amour ! »

C’est même, avant tout, un nom – un des noms de Yahvé : « L’Éternel ». Un nom qui signifie : « Celui en qui on peut se fier, qui est toujours fidèle, qui ne ment pas. ». Le psalmiste dit aussi :

« Mieux vaut s’abriter en Yahvé que se fier en l’homme ;

Mieux vaut s’abriter en Yahvé que de se fier aux puissants »

Ou bien :

« L’amour est bâti à jamais, aux cieux tu as fondé ta fidélité (…),

Dieu puissant, que ta fidélité entoure »

Ou encore :

« Une fois j’ai juré par ma sainteté : mentir à David, jamais ! »

Et bien d’autres encore, que chacun de vous pourra trouver…

L’Éternel, c’est Celui qui ne déçoit pas. Celui qui ne déçoit jamais : Il n’a jamais déçu dans le passé, aussi loin que la mémoire de l’homme peut remonter. Et le passé est garant de l’avenir : aussi loin qu’on puisse se projeter dans le futur, Il ne nous décevra jamais : un Dieu que la Bible dit bienveillant pour des milliers de générations.

C’est de ce double « aussi loin que l’on se souvienne dans le passé ou se projette dans l’avenir », qu’a dérivé, tardivement, le sens de « sans commencement ni fin ». Mais l’important n’est pas dans ce dernier sens, c’est que Dieu, l’Éternel, est Celui qui ne déçoit pas. Quand Brassens souhaite à l’Auvergnat, lorsqu’il mourra, que le croque-mort le « conduise au Père éternel », c’est bien de ce Dieu-là qu’il parle !

La vie éternelle, ce n’est donc pas une vie qui ne finit pas, mais une vie qui ne déçoit pas – LA seule vie qui ne déçoive pas, celle avec Dieu, en Dieu. La phrase « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi et celui que tu as envoyé » (Jn 17, 3) n’a pas de sens si éternel veut dire sans fin. Mais si éternel signifie qui ne déçoit pas, et si connaître a le sens biblique d’aimer, alors elle est pleine de sens et nous dit un chemin !

Et c’est dès maintenant que cette vie ne déçoit pas. Choisir la vie éternelle, à l’appel de Jésus et en suivant ses pas, ce n’est pas sacrifier un présent tangible et réel pour un futur incertain. C’est ne pas se laisser tromper par tant de choses qui finissent toujours par décevoir, pour choisir la vie nourrie de l’amour de Dieu qui ne déçoit pas : « L’homme, ses jours sont comme l’herbe des champs qui fleurit. Sur lui, qu’un souffle passe, il n’est plus. Mais l’amour du Seigneur, pour qui le chante, est de toujours à toujours » (Ps. 102). Et cette vie éternelle est bien réelle et actuelle, même si nous n’en percevons la plénitude qu’à certains moments privilégiés.

A nous tous alors, bienvenue dans la vie éternelle, dès aujourd’hui !

Pierre Morlon
11 août 2024

Pour repartir dans l’espérance – homélie du dimanche 11 août 2024 – (Carmel)

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Pour repartir dans l’espérance

En ces jours de grande chaleur, nous pouvons être tentés comme Elie de nous mettre à l’ombre d’un buisson et dire au Seigneur : « maintenant, c’en est trop, reprends notre vie ». Mais plus encore que la chaleur étouffante, c’est la situation internationale, avec toutes ses violences, qui nous fait douter d’un retour possible de la paix, de la justice et de la préservation de la nature. De même dans notre vie personnelle, familiale, nous pouvons traverser de lourdes épreuves, de santé, de dialogue difficile, d’incompréhension, de jalousie. D’où la tentation de baisser les bras et de se laisser aller en abandonnant toute volonté d’une emprise sur la réalité ; ne serait-ce pas la signification du sommeil dans lequel s’enfonce Elie, découragé dans sa marche au désert, alors qu’il est traqué par la reine Jézabel ?

Or c’est précisément dans son sommeil qu’Elie va vivre une expérience, une véritable découverte de ce qu’est la Foi, une expérience à laquelle Jésus invite ses auditeurs. Dans son dénuement extrême, tandis qu’il s’abandonne tout entier dans les mains de Dieu (ne dit-il pas à Dieu : ’reprends ma vie’ ), il est réveillé par un ange qui l’invite à manger ce pain cuit sur le feu et à boire cette cruche d’eau. Sa faim et sa soif sont apaisées sur le champ, et une 2ème fois il est réveillé et appelé à se relever pour continuer la route. Cette route qui n’était qu’un chemin d’errance devient le chemin qui conduit à la montagne de Dieu. Il n’en fallut pas plus pour provoquer ce sursaut, grâce à ce pain et à cette cruche, qui n’étaient qu’un signe de la proximité de Dieu. Comme la manne au désert, comme ces pains qui avaient nourri 5000 hommes. C’est bien dans l’expérience du dénuement, de la vulnérabilité que se découvre cette présence de Dieu, à condition de lire dans nos vies toutes ces petites miettes de pain et ces quelques cruches qui se trouvent sur nos chemins.

Et quand Jésus se désigne comme le pain vivant descendu du ciel, il tourne le regard de ses auditeurs, et donc nos regards à nous, vers toutes ces réalités qui nous font avancer dans la vie. Au lieu de nous désespérer devant l’étalage sur nos écrans, de la misère du monde, recherchons, repérons tout ce qui contribue à la paix. J’aime beaucoup la parole de Paul quand il dit : « n’attristez pas le Saint-Esprit » et qu’il énumère toutes ces dispositions, ces pensées qui introduisent le mal dans nos relations. Reprenons plutôt le chant du psaume : ’Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur’. Nous passerons ainsi de la récrimination dont s’étaient rendus coupables les auditeurs de Jésus à la contemplation de ce que Dieu nous offre jour après jour, que ce soit dans les rencontres avec nos frères, dans les tentatives de réconciliation, dans la nature qui nous entoure, dans la main tendue pour accompagner le malade ou le désespéré. La vie éternelle, elle est déjà là, et pour reprendre le mot du philosophe, elle n’est plus un cadeau à attendre plus tard, elle est un chantier à alimenter par nos actes d’aujourd’hui.

André Jobard
Carmel
11 août 2024

Une surprenante médaille d’or – homélie du dimanche 4 août 2024

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Une surprenante médaille d’or

A l’heure où tous les regards et toutes les conversations sont tournés vers les jeux olympiques, j’ai pensé comparer l’attitude de Jésus avec ses interlocuteurs à une course-poursuite. Qui va alors emporter la médaille d’or ? On le saura au terme des 4 dimanches où nous seront lus les évangiles, appelés ‘discours sur le Pain de vie’. Souvenez-vous, dimanche dernier nous avons entendu le récit de la multiplication des pains, dans lequel Jésus, grâce à la confiance d’un jeune qui n’a pas hésité à partager son pique-nique, a nourri 5000 hommes. Vous pensez bien qu’un tel phénomène mérite qu’on s’y arrête. De là le désir des foules rassasiées à prix encore moins cher qu’à Carrefour ou au Leclerc du coin, désir de retenir ce magicien et pourquoi pas, ne soyons pas mesquins dans nos désirs, faire de cet homme notre roi ?

S’engage alors un dialogue entre Jésus et ses interlocuteurs, un dialogue qui va bousculer bien des certitudes, bien des habitudes, où se mêleront déception, agressivité, enthousiasme et foi. Ce dimanche Jésus regrette que ces foules nourries gratuitement ne voient pas plus loin que le côté miraculeux de ce geste, miraculeux entendu comme merveilleux, accompli par un super-héros, un génie exceptionnel. Or le miracle, comme le désigne l’étymologie grecque du mot signifie le signe, signe d’un appel à lire, au-delà du geste ponctuel, un message capital. Et notamment à découvrir le véritable auteur de cette multiplication qui n’est autre que Celui qui avait donné la manne au désert quand les Hébreux souffraient de la faim (première lecture). En renvoyant à plus loin que lui, en désignant Dieu comme son Père qui veut nous nourrir, Jésus pousse ses interlocuteurs à se tourner vers l’essentiel, avec cette question que nous pouvons nous poser : « qu’est-ce qui vraiment nous nourrit ? » Qu’est-ce qui va donner de la saveur à notre existence ? Un bon repas chez Loiseau, des vacances exceptionnelles, des revenus de plus en plus florissants, des loisirs excitants, une santé inébranlable, ou même tout simplement une vie tranquille sans aspérités, sans contrariétés ?

La réponse de Jésus a de quoi nous surprendre, comme elle provoquera des réactions très vives et même agressives : « le pain de la vie, c’est moi ». Sous-entendu, ce qui me fait vivre , ce qui me nourrit, et qui doit donc vous faire vivre, c’est le service du plus humble, c’est l’amour inconditionnel envers tout homme, toute femme, quitte à se donner corps et âme pour cette noble mission. Et donc manger le pain qui donne la vie, c’est se mettre à la même table que Jésus, non pas pour la satisfaction immédiate et passagère d’une faim, mais pour vivre comme lui le service du plus pauvre, pour édifier la fraternité telle que Dieu l’a voulue.

Inutile de vous préciser que la course-poursuite va se prolonger pour mettre d’accord tous les protagonistes. Nous en apercevons déjà l’issue, quand les interlocuteurs de Jésus lui demandent ce qu’il faut faire pour travailler aux œuvres de Dieu. Entendant cela spontanément comme chrétiens pratiquants nous pensons à nos bonnes œuvres, à nos divers engagements, familiaux, professionnels, associatifs ; tout cela est respectable, nécessaire et Jésus lui-même ne manque jamais d’en faire l’éloge. Mais pourtant sa réponse est celle-ci : «  l’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé ». C’est donc la foi qui est appelée, foi en la puissance de Dieu et de Jésus, qui met à mal notre défaitisme, nos ‘à quoi bon’. Et si la médaille d’or, c’était cette foi  !

André Jobard
4 août 2024

Quand un enfant partage son pique-nique – homélie du dimanche 28 juillet 2024

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Quand un enfant partage son pique-nique

Au cours des vacances que j’ai eu la chance de vivre en ce mois de juillet, j’ai rencontré à plusieurs reprises des groupes d’enfants ou adolescents le sac à dos certainement chargé des pique-niques nécessaires à l’appétit féroce de ces jeunes. Et je pensais à ce jeune garçon de l’évangile, qui permit de débloquer une situation qui était dans l’impasse. J’aime beaucoup ce récit de la multiplication des pains tel que le relate saint Jean pour plusieurs raisons.

Tout d’abord la question de Jésus, « où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? »  Elle est à la fois expressive de son attention à l’égard de cette foule affamée, et aussi provocante : une façon de mettre à l’épreuve Philippe et nous-mêmes, toujours enclins à ne chercher que des solutions comptables ou techniques devant les défis à relever.

Arrive alors une 2ème étape : André (je n’y suis pour rien!) a repéré ce gamin qui a su faire preuve de clairvoyance en apportant son pique-nique. Ce regard est important, un regard qui ne laisse pas de côté l’insignifiant, le méprisable, le fragile, même si la réaction première est de juger difficile la solution apportée par cette découverte.

Et la 3ème étape : c’est cet enfant qui accepte de donner le précieux contenu de son sac à dos, de se dépouiller de toute chance de survie. On l’oublie trop souvent, ce geste de partage, cette générosité inattendue d’un jeune. Sans lui, que serait-il advenu pour cette foule affamée ?

Enfin ce qui va être déterminant , ce ne sont pas des gestes magiques de la part de Jésus qui agit dans une grande discrétion, mais tout simplement c’est cette prière d’action de grâce dans sa bouche. Action de grâce pour la générosité, la confiance de cet enfant, celle de ses disciples, celle de cette foule qui s’assoit dans l’attente de ce qui va se passer. Pour Jésus, tous ces petits gestes, toutes ces attitudes sont l’expression de l’amour de Dieu, et c’est cela son action de grâce. Et en rendant grâce, Jésus ne veut pas s’attribuer le succès de l’opération ;il en est juste l’instrument, le médiateur, Dieu étant celui qui donne généreusement.

Des défis, nous en avons beaucoup à relever, peut-être encore plus importants que de nourrir 5000 hommes avec le pique-nique d’un enfant. C’est le défi de la paix, de la justice, de la fraternité , du dialogue, en ces temps difficiles que nous traversons. Si nous réagissons comme l’apôtre Philippe, devant l’immensité des problèmes, en baissant les bras, alors tout paraît impossible. En revanche si nous acceptons de regarder autrement la réalité, notamment en faisant attention aux moindres gestes, aux plus petites paroles qui font avancer l’entente, la fraternité, même si ce n’est pas plus gros qu’un casse-croûte, si nous portons des paroles de confiance et non de dénigrement permanent, Dieu saura nous combler au-delà de toute attente.

Avant-hier soir avait lieu la cérémonie d’ouverture des J.O. : au-delà de ce qu’on pourrait retenir comme un désir de promotion nationale, n’y avait-il pas une belle image de la joie de se retrouver entre toutes les nations autour du sport ? J’ai tendance à voir dans cette multiplication des pains un formidable appel à dépasser notre amertume et notre angoisse devant un futur menaçant,à rester attentif et vigilant (comme André) à tout ce qui contribue à des rapports bienveillants, et enfin à rendre grâce pour tout ce que le Seigneur nous donne : c’est le rôle de toute eucharistie, où nous recevons la vie en abondance. Ce sera toujours dans la fragilité, la vulnérabilité, dans la pauvreté, mais la fécondité d’une telle attitude dépassera notre imagination.

André Jobard
28 juillet 2024

Venez à l’écart et reposez vous un peu – homélie du dimanche 21 juillet 2024

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Venez à l’écart et reposez vous un peu, nous dit Jésus.

Chers frères et sœurs, chers amis,

Ces paroles résonnent bien pour ceux d’entre nous qui ont à cœur de prendre un repos estival ces jours-ci. Moi en premier. Mais ces paroles s’adressent au fond à tous ! Venez à l’écart et reposez-vous un peu. Nous avons tous besoin de ce repos spirituel dans ce monde où tout va à mille à l’heure, où tous courent vers un bonheur que l’on croit trouver dans la consommation. Nous ressemblons par beaucoup de traits à ces foules de l’évangile. Ils sont comme des brebis sans berger, dit Jésus.

Imaginons tous ces hommes et femmes dans l’attente de quelque chose ; d’une guérison, d’un travail, d’une reconnaissance, d’un regard qui leur dise qu’ils sont aimés qu’ils ne sont pas nuls. Imaginons ces hommes et ces femmes dans l’attente de quelqu’un, dans l’attente d’un idéal, d’un avenir. Imaginons ces hommes et ces femmes dans l’attente de ce qui leur donne conscience d’être quelqu’un, d’être aussi une personne. N’est-ce pas pour tous ces gens que Dieu s’est incarné en Jésus Christ ?

Dans notre société où l’individualisme et le matérialisme sont si puissants, les uns traînent l’ennui d’une vie sans souffle, un jour ressemblant désespérément à un autre, d’autres sont à l’étroit dans une société qui réglemente, qui judiciarise, qui étouffe ; d’autres encore surfent sur la vague ambiante sans vraiment discerner les conséquences…. Et voilà qu’une parole de Jésus retentit : venez à l’écart et reposez-vous un peu. Venez à l’écart avec le maître, à l’écart avec le vrai berger, à l’écart avec celui qui aime gratuitement et qui peut nous apprendre ce regard qui humanise. Car dans le cœur de Jésus il y a cette foule, cette multitude, ces hommes et femmes de toute génération qui cherchent désespérément un sens à leurs vies. Cette foule, ce matin, c’est nous qui avons accepté d’être ici à l’écart dans cette église. Ils étaient – nous sommes – comme des brebis sans berger. Nous avons besoin d’être éclairés dans ce monde où tout se vend. Nous avons besoin d’être nourris dans ce monde où la nourriture est souvent factice et superficielle. Comment cacher le vide de la vie en courant après l’argent, en courant après les modes, le dernier cri, en misant sa vie sur le paraître, ou encore en se confectionnant un monde à soi, avec comme critère ce qui me fait plaisir. Jésus fut saisi de compassion envers eux. Alors, il se mit à les enseigner longuement. Avant de donner du pain c’est d’abord par sa parole que Jésus rassasie les humains. Il parle à leur conscience, il parle à leur cœur. Le récit de la multiplication des pains qui va suivre l’extrait d’évangile de ce matin, ne doit pas être séparé de ce qui précède. C’est d’abord par la parole que Jésus s’efforce de rassembler la foule en un nouveau peuple de Dieu. C’est d’ailleurs pour cela que dans la messe il y a ces deux tables qui s’enchaînent : la table de la parole qui nous instruit et nous éclaire et la table du pain qui nous nourrit et nous donne la force.

Et voici que la foule accourt et rejoint à nouveau Jésus et ses disciples de l’autre côté de la rive. Le Concile Vatican II disait que les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ. Tous ces gens qui ont couru de l’autre côté et sont arrivés avant Jésus et ses disciples portent aussi en eux cette soif de Dieu. Laissons-nous donc rattraper par des frères et des sœurs qui cherchent un sens à leurs vies. Au fond, comme Jésus, nous ne pouvons pas vraiment vivre à l’écart dans un endroit désert . Nous ne pouvons que partager cette Bonne Nouvelle de l’Amour de Dieu pour tout homme. Ce matin nous venons vers Jésus pour l’entendre dire que Dieu aime chacun, que notre vie n’est pas un hasard et qu’elle a du sens. Puissions nous dire : parle Seigneur, je veux t’écouter et mettre ta parole en pratique. Parle Seigneur, je veux t’écouter et n’écouter que toi.

Judicaël Mitokpey
21 juillet 2024

Être envoyé avec un trésor à offrir au monde – homélie du dimanche 14 juillet 2024

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Être envoyé avec un trésor à offrir au monde

Chers frères et sœurs, chers amis….

Sur nos routes estivales nous rencontrons ce matin dans l’évangile, les missionnaires que Jésus envoie. Drôle de missionnaires qui s’en vont sans manteau ou tunique de rechange (pour la météo changeante de cet été, ce n’est pas très prudent).

Sur nos routes cet été, que nous soyons partis ou que nous restions chez nous, nous sommes appelés aussi à nous identifier à ces envoyés très particuliers qui ont reçu de Jésus des consignes très clairs. Les consignes que Jésus leur donne nous permet de les reconnaître dans les personnes que nous rencontrons, mais elles nous permettent aussi de nous identifier à eux.

– Ils sont avant tout invités à la sobriété. C’est la signification du fait de ne pas avoir de tunique de rechange. Il ne s’agit pas de défier la météo, mais il s’agit de renoncer à l’accumulation et à la tendance consumériste de notre époque. Ils s’en vont non pas comme des conquérants, mais comme des serviteurs suffisamment libre pour entrer en dialogue et vivre l’hospitalité et la rencontre avec les autres. Ils n’ont rien à vendre, mais un trésor à offrir. Il n’est pas question ici de performance mais de témoignage. C’est l’attitude de Jésus lui-même quand il demande à boire à la samaritaine. En demandant à boire à cette femme, Jésus lui permet de donner ce qu’elle peut donner. Cette manière d’agir va favoriser une confiance et un dialogue qui remet cette femme en route. Aimer ce n’est pas dire à l’autre : « regarde comme je suis bien, deviens comme moi ! » C’est lui dire en toute simplicité, « j’ai besoin de toi, donne-moi à boire. Toi aussi tu as des qualités, tu as quelque chose à donner ». Ce qui compte en premier c’est donc de créer des conditions d’un échange, de rendre possible un dialogue. C’est pourquoi Jésus demande à ses disciples un certain dénuement. Il les invite à oser être vulnérables. N’est-ce pas à cette condition que l’Esprit-Saint pourra passer par nous et à travers nous ? Ne pas craindre d’être pauvre, cela nous oblige à compter sur le Christ et sur les autres. Les douze que Jésus envoie en mission ne sont pas des cracks mais des personnes fragiles qui apprennent à compter sur Dieu. Aujourd’hui nous ne sommes pas meilleurs ni moins bien qu’eux. Nous sommes des serviteurs quelconques, des vases d’argile portant le trésor de l’évangile et c’est seulement si nous acceptons de ne pas être tout-puissant que le trésor que nous portons pourra être visible pour les gens que nous rencontrerons. Cette sobriété et cette pauvreté du disciple possèdent un autre avantage : celui d’apprendre à recevoir, et de penser l’autre non pas comme un réceptacle de ma générosité, mais comme une personne dont j’ai à apprendre quelque chose. Et cela change tout dans les relations.

Les envoyés sont pauvres et sobres mais vous aurez remarqué en écoutant l’évangile qu’il y a quand même quelque chose à emporter : D’abord, un bâton. C’est un objet très utile pour éloigner des serpents, c’est à dire le mal. Il leur a donné le pouvoir sur les esprits mauvais. Ce bâton c’est l’autorité sur les esprits impurs. c’est savoir que le mal n’aura pas le dernier mot et que le pardon peut apporter un surcroît de vie. C’est faire gagner l’amour contre la haine. Ensuite, ils emportent aussi des sandales. Les sandales, c’est pour pouvoir aller loin ; pour ne pas s’ébrécher les pieds ni se fatiguer trop vite. La mission est rude et le chemin est long. Il faut tenir le coup. C’est le signe de l’endurance, de la persévérance, mais aussi l’importance de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres. Enfin, la tunique unique ne serait-elle pas le signe de notre dignité de filles et fils de Dieu. Dignité de nous savoir aimé du père, envoyé par Lui. Il est important d’aller à la rencontre des autres, vêtus de notre tunique de baptisé. Soyons des baumes de douceur pour celles et ceux que rencontrerons, et chassons les démons : faisons reculer le mal en proposant la bienveillance comme antidote.

Judicaël Mitokpey
14 juillet 2024

Homélie du dimanche 7 juillet 2024

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Les lectures du jour

Chers frères et sœurs, chers amis,

Si Jésus était au milieu de nous ce matin, (bien sûr il est au milieu de nous, dans la communion de cette assemblée réunie qui écoute sa Parole, et qui va recevoir l’Eucharistie qui est son corps) ; mais s’il était au milieu de nous physiquement, et s’il était français, français gaulois, ou français depuis quelques générations, ou encore immigré naturalisé français, bref, si ce 07 juillet 2024 Jésus était parmi nous, il irait voter. Voilà. A César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Je ne vous dit pas pour qui il irait voter. Mais il aurait estimé juste d’accomplir ce devoir citoyen par lequel on choisit de déléguer nos libertés et nos possibilités à ceux qui, à l’échelle de l’état, pourraient agir en faveur d’un plus grand nombre, notamment les plus pauvres. La politique est le lieu par excellence où s’exerce la charité, la justice sociale, et la promotion des conditions qui permettent aux uns et aux autres de s’accomplir. L’évangile indique une boussole, c’est l’option préférentielle pour les pauvres. Les pauvres vous en aurez toujours avec vous, dit-Jésus, il y aura donc toujours à se souvenir avant tout de toutes ces personnes accablées par toute sorte de pauvreté humaine, spirituelle, psychique, et matérielle.

Non je n’ai pas choisi de prêcher sur les élections, mais j’estime que quand on est une famille, on peut se parler de ces sujets d’intérêt général, pour s’éclairer mutuellement. Et l’Église a la délicate mission d’éclairer les consciences avec le message de l’Évangile. Sans une conscience soigneusement formée et éclairée, on ne peut faire de bons choix. Chacun jouit bien évidemment de sa liberté de choisir. C’est pourquoi l’Église ne donne pas de consigne de vote mais elle éclaire les consciences. Voilà pourquoi je disais que l’une des boussoles de l’action politique que suggère l’Évangile, c’est l’option préférentielle pour les pauvres.

Dans l’apparence, tout ceci n’a peut-être pas grande chose à voir avec les Paroles que nous adressent le Seigneur aujourd’hui. Mais regardons Ezéckiel qui nous raconte, dans la première lecture, comment il a été envoyé vers un peuple difficile et désobéissant pour parler de la part du Seigneur. Alors, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas, lui dit le Seigneur, ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux. C’est à peu près ce à quoi nous sommes tous appeler dans nos choix politiques et sociaux, éclairés par l’Évangile, dans le contexte paradoxal d’un monde plus que jamais globalisé où cependant le repli sur soi et l’enfermement, les revendications identitaires et l’indifférence deviennent une mode et sont perçus comme une solution au besoin de paix, de sécurité et de bien-être matériel. Que l’on nous écoute ou que l’on ne nous écoute pas, on saura qu’il y a des prophètes dans ce pays. Moyennant quoi, nous pouvons comme le psalmiste, garder nos yeux levés vers le Seigneur et attendre sa clémence en faveur de ceux qui sont méprisés. Nous pouvons même être les expressions de cette clémence. Pour réussir cette mission prophétique dans nos familles, dans nos sociétés, le Seigneur dit à chacun comme à Saint Paul « Ma grâce te suffit car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ». Ce n’est pas grave si tu te sens impuissant devant les situations et les temps difficiles qui courent. C’est dans ta faiblesse que le Seigneur agit.

Le seigneur continue sans aucun doute de susciter des prophètes parmi nous. Prophète des temps nouveaux. Le charisme prophétique reçu par chacun de nous au baptême, il le confirme puissamment dans la vie de certains parmi nous, parmi vous. Notre attitude vis à vis de ceux là qui sont comme une étincelle dans la nuit peut être comme celle des gens de Nazareth qui ne peuvent s’empêcher de voir en Jésus ce jeune homme qui fait du zèle et de mépriser sa sagesse et sa parole. Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. A l’opposée, saurons-nous accueillir les signes prophétiques de notre temps? Saurons-nous porter nous-mêmes prophétiquement la Parole d’Espérance et de paix dans une société fracturée? Saurons-nous être des prophètes batisseurs de ponts d’amour et non pas de murs de séparation, mais aussi des défenseurs des droits des pauvres et des marginalisés? Voilà ce à quoi nous appelle notre devoir chrétien et notre devoir citoyen. Que le Seigneur nous y aide!

Judicaël Mitokpey
7 juillet 2024

La foi ou la fin d’un cauchemar – homélie du dimanche 30 juin 2024

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Les lectures du jour

La foi ou la fin d’un cauchemar

Je me suis réveillé ce matin, le cœur lourd et le cerveau bien embrumé. Je venais de rêver que nous entrions dans une ère de glaciation ; qu’il s’agisse de la météo, de la politique, de l’église. Finis les vacances, les étés où il fait bon de profiter des longues soirées dans les jardins autour d’une grillade partagée avec les voisins, les amis, la famille réunie. Fini aussi le souci du bien commun, de l’avenir de la planète, de la justice pour tous et pour tous les peuples. Finie enfin l’aventure de la mission de l’Église telle que l’avait encouragée le concile Vatican II.

Heureusement pour me débarrasser de cet encombrant cauchemar, après une douche stimulante, une parole m’a procuré une paix immense et une joie vraie: la Parole de Dieu, celle que nous venons d’entendre, avec des formules si denses : « Dieu n’a pas fait la mort », « ce qui naît dans le monde est porteur de vie », « lui qui est riche, il s’est fait pauvre pour vous », « Jésus partit avec lui », « ma fille, ta foi t’a sauvée », « ne crains pas, crois seulement », « il pénètre, là où reposait l’enfant ». Pensant à tout ce que nous vivons en ce moment, comme inquiétudes, difficultés à échanger, comme peur de l’autre différent, voire même peur de la fin d’un monde, de telles paroles m’ont profondément rejoint, et ont réveillé ce que j’appelle la foi. Oui c’est bien la foi qui est appelée, la foi qui n’est pas simplement récitation de belles formules, mais l’engagement de toute une vie pour l’avènement d’un monde fraternel, à l’image du règne de Dieu voulu par lui.

Pour revenir à notre évangile, que ce soit Jaïre, ce chef de synagogue, ou bien cette femme malade depuis 12 ans, c’est la foi qui les a sauvés. Leur situation semblait désespérée mais leur confiance en Jésus est telle qu’ils ne baissent pas les bras ; ils réagissent, Jaïre va voir Jésus, la femme aux pertes de sang va toucher son manteau. Une foi qui s’enrichit de la foi de Jésus lui-même : il s’engage avec Jaïre, il part avec lui, il entame un long chemin avec lui, sans nécessairement en connaître le terme. Il ne se contente pas des explications de ses disciples qui n’ont pas vu la démarche de la femme qui a touché la frange de son manteau, il veut une vraie rencontre avec elle. Et enfin, à tous ceux qui signent la mort de la jeune fille, ce qui pourrait décourager Jésus de toute intervention, il répond par cette parole lumineuse : « ne crains pas, crois seulement. »

C’est bien à cette foi, frères et sœurs, que nous sommes appelés encore aujourd’hui. Au lieu de nous lamenter sur le cours des événements, qui nous déroutent et peuvent nous faire peur, engageons-nous dans une recherche patiente de la vérité (ce qui suppose de ne pas nous contenter d’informations partielles, voire partiales), dans le souci non pas de mon pouvoir d’achat ou de ma sécurité mais du bien commun, dans un dialogue constructif avec tous, quelles que soient leurs opinions, leurs façons de vivre. Oser la foi, vivre dans l’espérance, c’est miser sur l’avenir à long terme, sur la chance d’une sortie de crise qui soit bénéfique à tous. En cela nous nous inscrivons dans la vie de tout un peuple, celui de la Bible, d’Israël, qui au-delà des vicissitudes de son histoire a gardé confiance en la promesse d’un règne de justice et de paix. C’est le combat de tous ceux qui dans les pires crises de leur existence ont travaillé à un mieux-vivre pour tous.

Alors, débarrassons-nous de nos vieux cauchemars, et prions pour que la Parole de Dieu fasse son travail en nos cœurs, dans celui de tous nos concitoyens, et dans nos Églises.

André Jobard
30 juin 2024

Dans nos traversées – homélie du dimanche 23 juin 2024 (Fête paroissiale en l’honneur du départ de André)

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Dans nos traversées

« Les longues homélies font bouger les chaises … Mais les courtes homélies font bouger les cœurs ». Cette citation d’un évêque retraité me conduit à me demander au moment où je vous quitte si, je l’espère, à défaut de ne pas vous avoir fait bouger les bancs, j’ai réussi à faire bouger vos cœurs. L’exercice de l’homélie n’est pas facile. A plusieurs reprises on m’a fait remarquer que j’aimais correspondre avec le ciel, avec Dieu ou Jésus par voie électronique, sachant qu’en la matière j’avais une compétence reconnue ! J’ai donc décidé pour aujourd’hui de me lancer dans cette moderne communication pour entrer dans la pensée de Jésus à travers cette scène de la tempête sur le lac.

Et oui j’ai envoyé un SMS à Jésus pour le réveiller de son sommeil, alors que la situation actuelle dans notre monde n’est pas brillante, et que nous traversons de rudes tempêtes. Je lui ai écrit qu’il y avait aujourd’hui une paroisse en Côte d’Or qui s’interrogeait sur son avenir, secouée par le départ de son curé qui s’en va couler des jours heureux en retraite. Je lui ai aussi avoué qu’il me semblait que le dit-curé devait ressentir une certaine émotion à l’idée de quitter cette communauté si vivante et chaleureuse. Je lui ai transmis tout ce que vous venez d’exprimer des tempêtes que nous traversons. « Oui Jésus cela ne te fait rien que nous coulions ? » ai-je eu envie de lui dire, comme beaucoup le pensent actuellement. « Mais qui es-tu ? Pour nous laisser aller dans une telle dérive ? »

J’ai dû le réveiller car une heure après, j’avais une réponse. Savez-vous ce qu’il m’a écrit ? D’abord que c’est lui qui nous a invités à passer sur l’autre rive ; il pense qu’il est bon que nous ne fassions pas du sur-place, que nous ne restions pas crispés sur nos acquis, et que notre avenir il est dans l’aventure qu’engendre toute situation nouvelle, et que lui Jésus, présent dans la barque, est avec nous dans cette traversée.

Mais tout en restant proche de nos vies, il veut par son sommeil, par sa mise à distance par rapport à nos difficultés, nous permettre de prendre nos responsabilités. En cela il nous met en garde contre un infantilisme, contre une dévotion asservissante ; il ne veut pas être celui qui répond à la manière d’un bouton qu’il suffirait d’appuyer pour que ça marche.

Quand il reproche à ses disciples d’avoir peur, c’est leur manque de foi qu’il pointe, c’est ce défaitisme qui atteint tous ceux qui traversent des tempêtes. Où est-elle notre foi en lui, si nous baissons les bras au moindre incident, semble-t-il nous demander ? Il exhorte fermement ses proches à s’appuyer sur leur confiance en lui comme une force intérieure permettant de faire face au déluge de la peur.

Et enfin cette mer apaisée, ce vent réduit au silence, n’est-ce pas le moment d’une nouvelle intimité entre Jésus et ses disciples ? Leur question sur son identité se transforme en contemplation de sa vraie nature : un homme présent à notre histoire humaine, dont la rencontre avec lui peut générer de grandes choses : « il est celui à qui le vent et la mer obéissent. ».

Le texto était finalement assez long, un vrai cours de théologie, qui m’a fait du bien, qui a fait bouger mon cœur, comme le vôtre, je l’espère. C’est un message que nous devons nous transmettre les uns aux autres, pas seulement par la parole, mais par toute notre vie de service, de prière personnelle et communautaire. Et si vous le souhaitez, je peux vous donner l’adresse-mail du ciel : amouresperanceconfiance@regnededieu.fr (tout attaché sans accent).

André Jobard
23 juin 2024 (départ de la Visitation)

Une bonne nouvelle par temps pluvieux – homélie du dimanche 2 juin 2024

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Fête du Corps et du Sang du Christ 2024 (Profession de foi)

Une bonne nouvelle par temps pluvieux

Relisant une ancienne homélie, je relevais que ce qui faisait l’essentiel des conversations du moment c’était la canicule : il devait faire très très chaud à cette époque. On pourrait dire qu’aujourd’hui on ne parle plus que de la pluie et on se désole de constater que les longues soirées que nous pourrions passer dehors se vivent au coin du feu. Et dans cette même homélie je me demandais si la météo était notre seule préoccupation, et si pour chacun de nous c’était là l’essentiel. La fête que nous célébrons aujourd’hui, celle du corps et du sang de Jésus-Christ (et celle de la profession de foi) peut nous ramener à l’essentiel.

Vous l’avez entendu dans les textes, il est beaucoup question de sang. Le sang, ça peut provoquer un malaise pour des âmes sensibles, mais c’est aussi le signe de la vie. En écoutant le récit de la première lecture, l’Exode, on peut être surpris par le côté archaïque de ce rituel, où le sang coule abondamment en vue d’une alliance entre deux parties. Ici il est question de sceller une alliance entre Dieu et les hommes. Une importance majeure à une époque où l’on pensait que les dieux ne s’intéressaient nullement à l’histoire des hommes. Cette alliance entre Dieu et les hommes appelle une réponse, c’est celle de la foi. (vous, les jeunes, l’avez bien exprimé à travers la mise en œuvre de la première lecture).

Et dans l’évangile, qui relate le dernier repas de Jésus avec ses amis, Jésus livre son corps, il se donne à nous, il offre son sang pour signifier qu’il donne toute sa personne, pour sceller la belle alliance de Dieu avec l’humanité. Le sang qui coule, c’est celui de l’homme égorgé. On le voit : Jésus n’a pas fait semblant, il a souffert terriblement, pour authentifier son message d’amour ; il ne s’est pas contenté de belles paroles, de belles promesses, il s’est engagé corps et âme pour nous. Par ce don de sa vie, il a reçu une vie nouvelle, au matin de Pâques : sa vie a pris une dimension extraordinaire. Et quand nous communions, nous ne mangeons pas seulement le corps de Jésus, nous recevons son corps meurtri, son corps livré aux mains des bourreaux, son corps crucifié et cette vie nouvelle du ressuscité.

Que cela implique-t-il dans notre vie ? Si Jésus s’est donné à nous par son corps jusqu’au sang, ne devons-nous pas à notre tour nous donner tout entiers à lui ? Et nous donner à lui, ce n’est pas nécessairement chercher le martyre, comme le font les terroristes au nom d’une prétendue volonté divine, mais tout simplement dans notre quotidien mettre toujours en avant le souci de l’autre, le désir de son bonheur. C’est nous donner aux autres, à nos parents, nos familles (nos copains), à tous ceux en qui Jésus s’est reconnu, l’affamé, le malade, l’étranger, le démuni, le prisonnier. Les bons sentiments ne suffisent plus, c’est notre vie, dans toutes ses dimensions qui est appelée à se donner et à devenir une offrande comme celle de Jésus. Et l’eucharistie est le rappel de l’offrande de Jésus à laquelle nous nous associons tout au long de notre vie.

Nous voilà peut-être revenus à l’essentiel, même si demeurent les préoccupations météorologiques du moment! Nous le savons bien, et parfois il faut un événement grave ou compliqué pour nous rappeler cet essentiel. Que nos messes, nos eucharisties, soient le reflet de ce désir de nous associer, par nos vies de service et de fraternité, à celle de Jésus, qui l’a donnée pour notre plus grand bonheur.

André Jobard
2 juin 2024



Trinité et écologie : un couple insolite – homélie du samedi 25 mai – Trinité

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Trinité et écologie : un couple insolite

Nous venons de vivre à la Visitation une intense journée autour des préoccupations actuelles relatives à la protection de notre environnement, aux problèmes de l’évolution du climat et de ses répercussions sur l’ensemble de l’humanité. Un sujet qui semble bien loin de ce que l’Église propose en cette fête de la Trinité, concept inventé par des théologiens en chambre, comme certains se plaisent à le dire. Oui Trinité ne fait pas recette, et même dans les manuels actuels des catéchismes, on ne trouve rien sur le sujet. Or, y a-t-il vraiment une opposition, une dichotomie entre ce souci de l’avenir de notre planète, de notre maison commune, selon l’expression de notre Pape François, et le mystère de la sainte Trinité ? Ainsi posée, la question n’attend qu’une seule réponse : non.

Pour preuve qu’il y a un lien très fort entre nos préoccupations actuelles et la sainte Trinité, il suffit de relire le premier texte. Moïse, le vieux Moïse, la veille de sa mort, il regarde sa vie, son histoire avec son peuple. Que voit-il ? Dieu les a accompagnés, il a eu souci d’eux, il les a libérés, il a mis d’énormes moyens pour cela, y compris cette traversée extraordinaire de la mer rouge. C’est donc un Dieu proche, désireux de rejoindre l’humanité dans son aspiration à vivre en paix, en liberté, et je dirais aujourd’hui soucieuse de préserver le riche patrimoine que lui a laissé la création toute entière. Un Dieu proche, donc, comme l’a aussi révélé Jésus, fils de Dieu, avec ses derniers mots sur terre : « je suis avec vous, tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

Un Dieu proche, un Dieu qui, en Jésus notre frère, s’est révélé comme un père qui a le souci de sa progéniture. Et le moins que l’on puisse répondre à ce souci, c’est de nous atteler à satisfaire sa volonté, volonté d’un monde fraternel, réconcilié avec tous les éléments qui composent son environnement. C’est épouser son esprit, celui qui habitait Jésus, notre frère en humanité.

Et ainsi pour célébrer ce Dieu, à la fois père, fils et esprit, il s’agit de rappeler cette proximité avec lui, tandis que nous travaillons à la construction d’une humanité, d’une maison commune où tous ont leur place, où il fait bon vivre. L’écologie, un mot à la mode et parfois utilisé sans discernement, est la réponse que tout baptisé doit mettre en œuvre. Ce n’est pas une option parmi d’autres, c’est constitutif de notre être de baptisé. Par le baptême nous sommes associés à la vie de Jésus, qui a été au sommet du service de l’humanité. Ainsi nous pouvons passer d’une conception de dominant (d’exploitant) sur tout ce qui existe à celle d’un être vivant au milieu d’un environnement avec une place originale, toute empreinte d’humilité (d’ailleurs le mot humilité a pour origine humus ce qui veut dire en latin la terre, le sol) ; et à ce titre j’ai été sensible au témoignage du producteur en bio qui a insisté sur la nécessité que la bonne plante est celle qui est reliée au sol.

Que la sainte Trinité, qui est circulation d’un flux d’amour entre les 3 personnes divines, nous habite. Qu’elle irrigue en nous cette puissance d’amour, qui fera de nous des êtres respectueux de toute la création et de tous ses habitants quels qu’ils soient. Trinité et écologie ? Pas aussi loin l’une de l’autre.

André Jobard
25 mai 2024

Un souffle qui balaie toute désespérance – homélie du samedi 18 mai 2024 – Pentecôte

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Un souffle qui balaie toute désespérance

« Il vint du ciel comme un violent coup de vent. » En ces temps météorologiques agités, nous sommes témoins de catastrophes naturelles dont sont victimes des régions entières, des professions. Mais si nous sommes pour l’instant épargnés par ces phénomènes, peuvent surgir dans nos vies personnelles ou communautaires de violents bouleversements, semblables au cataclysme qu’ont connu les premiers apôtres le jour de Pentecôte.

En effet c’est un coup au cœur qu’ont ressenti ces hommes, enfermés à Jérusalem, dans la peur. Encore blessés par leur lâcheté à l’égard de leur ami Jésus, alors que celui-ci venait d’être arrêté et allait mourir sur la croix, ils étaient assaillis de doutes et même s’ils avaient eu la chance de rencontres merveilleuses, mais très fugaces avec le ressuscité, ils restaient prisonniers des souvenirs de leur vie avec lui sur les routes de Palestine et du drame de la passion. Jésus leur avait promis la venue de son Esprit, esprit qui leur donnerait force, audace à annoncer cette bonne nouvelle, à savoir : Jésus n’est plus enfermé dans la mort, et avec lui l’humanité n’est plus condamnée à la violence, à la haine, à la disparition. Mais comment allait se manifester la venue de cet esprit ? C’est l’image de ce coup de vent, qui va les faire se lever, se mettre à parler toutes les langues de ceux qui étaient rassemblés pour la fête juive, la fête de la Pentecôte. Là où habituellement on pense que les différences de langue, de religion, de culture sont un obstacle pour se comprendre, voilà que règne un climat d’entente, de paix, de joie, ce qui fait dire à tous ces gens reconnus pour ce qu’ils sont : « nous les avons entendu parler dans nos langues les merveilles de Dieu.»

Allons-nous aussi nous lever, nous chrétiens, assaillis comme les premiers apôtres par les doutes sur l’avenir de notre humanité, en proie à de terribles défis ? Défi de le guerre, de l’injustice, de la crise climatique et tant d’autres problèmes liés à notre mode de vie ? Car les informations que nous déversent en continu les médias sur l’état du monde ont de quoi faire frémir.

Comment passer d’une culture du désespoir, de l’anxiété permanente, à une culture de paix, de joie, de fraternité ? Peut-être en nous laissant emporter par le souffle de Jésus, lui qui au cœur-même de ce qu’il a vécu de plus terrible (sa condamnation à mort, sa mise en croix), a gardé l’espérance d’un monde nouveau. Saint Paul ne dit pas autre chose : « marchez sous la conduite de l’Esprit-Saint ». Il oppose d’ailleurs à cette expression celle de l’emprise de la chair, chair entendue comme l’ensemble des pulsions, des convoitises, des habitudes, du prêt-à-penser, qui nous maintiennent dans une insatisfaction permanente et nous éloignent les uns des autres.

A ce propos, je voudrais souligner l’initiative prise par un groupe de paroissiens autour du thème ‘écologie intégrale’. Loin de nous culpabiliser ou nous enfoncer encore plus dans la désespérance face au défi du dérèglement climatique, cette rencontre de samedi prochain veut simplement nous établir dans le partage de ce qui se vit déjà, de ce qui peut se vivre pour protéger notre maison commune… à l’exemple d’une famille qui se retrouve avec plaisir pour imaginer la transformation de la maison familiale. Il peut y régner un climat de paix, d’écoute, d’imagination…pourquoi pas une trace de l’Esprit-Saint ?

André Jobard
18 mai 2024 – samedi de Pentecôte

La flamme olympique de l’amour – homélie du dimanche 12 mai 2024

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La flamme olympique de l’amour

A un ami qui me téléphonait hier soir, j’exprimais ma perplexité devant les textes de ce jour pour écrire une homélie. En effet ceux-ci ne sont pas à première vue des plus palpitants, et je ne voyais pas très bien comment les relier à nos vies, à notre actualité. Il me suggéra alors de parler de la flamme olympique ; en effet il avait été captivé par son arrivée au port de Marseille cette semaine, et me disait que peut-être cela intéresserait mes auditeurs. Pourquoi pas ? Mais que dire à ce sujet, et surtout que dire qui ait un lien, même ténu, avec la parole de Dieu proposée aujourd’hui ?

Flamme, dans le vocabulaire chrétien, cela fait penser à Pentecôte, ces langues de feu qui tombent sur la tête des apôtres, mais c’est dimanche prochain. Flamme évoque aussi l’amour naissant entre 2 êtres, la passion pour un métier, une œuvre d’art, c’est aussi l’enthousiasme ressenti par tous les spectateurs massés sur le port de Marseille pour accueillir cette flamme qui va parcourir notre pays en prévision de ce grand rassemblement sportif. Peut-on alors dire que ce passage d’évangile que nous venons d’entendre suscite le même enthousiasme capable de soulever des foules? Je n’irais pas jusque là, et pourtant dans ce qu’on peut qualifier de prière j’ai trouvé aussi un souffle puissant, une réelle flamme intérieure à condition que cette prière soit accueillie comme un testament de la part de Jésus, méditée, susurrée, murmurée, afin qu’elle entre au plus profond de nos cœurs.

Et alors apparaîtra la richesse de ces mots prononcés par Jésus, des mots d’amour, de joie, de vérité, de consécration. Il faut dire que ces paroles, qui ont pu être prononcées par Jésus (mais y avait-il un micro pour les capter fidèlement?), sont surtout le fruit d’une méditation par la communauté des premiers chrétiens rassemblés autour de l’apôtre Jean. Devant les difficultés qu’ils rencontraient dans leur vie, notamment contestation idéologique, persécution, Jean leur rappelait ce que lui-même avait entendu dans la bouche de Jésus au long de toutes ses déclarations ; il avait lui-même été saisi par la puissance d’amour, de compassion que Jésus manifestait à tous ses interlocuteurs. Quand il dit, par exemple, « j’ai veillé sur eux, et aucun ne s’est perdu » ou bien « pour qu’ils aient en eux ma joie et qu’ils en soient comblés », on perçoit que cette parole a fait mouche dans la tête de Jean, et il le répète à ses auditeurs découragés.

C’est donc un texte à reprendre sans cesse, surtout quand on a l’impression que tout va mal. Un texte qui complète bien l’autre passage de Jean (2ème lecture), où est rappelée la primauté de l’amour, un amour qui nous est donné et que nous avons à déployer dans nos relations humaines. Et dans cet élan je reviens à la flamme olympique qui annonce ces jeux où vont se retrouver des athlètes du monde entier au cœur d’une actualité internationale si tendue. Comment nous, chrétiens, disciples de ce Jésus qui a prié pour l’unité, pourrions-nous nous désintéresser de ce rassemblement ? Bien sûr nous connaissons les limites de cette compétition, les excès en tous genres qu’elle génère, les relents de nationalisme qu’elle suscite. Mais communions à la joie qu’elle procure chez les compétiteurs et chez tous les spectateurs que nous serons, en direct ou par les ondes.

Une belle façon d’accueillir la prière de Jésus, qui est venu pour que nous ayons la joie, la joie du don de soi, la joie de la foi en Lui. Et n’ayons pas peur de porter très haut la flamme (olympique) de notre foi.

André Jobard
12 mai 2024

L’amour, sommet de la gloire – homélie du 9 mai 2024 – Ascension

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L’amour, sommet de la gloire

Avec la fête de l’Ascension, il est beaucoup question de gloire (Jésus élevé dans la gloire), de montée au ciel, de siéger à la droite de Dieu sur un trône sacré ; toutes expressions qui peuvent chatouiller nos oreilles, désireuses d’entendre un autre discours, celui issu du concile Vatican II, qui a centré ses réflexions sur cet homme Jésus, un homme comme nous, qui a partagé entièrement notre humanité, proche des sans gloire, des terriens que nous sommes, des petits. Alors que viennent faire ces expressions d’un autre âge, qui trahissent l’identité-même de Jésus, le Nazaréen ?

Il nous faut alors aller chercher ce qui a motivé ce vocabulaire, ce style. Les témoins de la vie de Jésus ont été saisis par ses paroles, ses actes, et bien sûr par la façon dont il est mort, mort à laquelle il a donné tout son sens, à savoir une mort par fidélité à ses frères et sœurs en humanité, et fidélité à son Père, dans une confiance totale. C’est ainsi qu’ils ont compris la résurrection, comme l’authentification par Dieu de sa démarche d’amour ; c’est bien ce qu’ils expriment quand ils disent : « Dieu l’a ressuscité d’entre les morts ». Et pour témoigner de l’accomplissement de sa vie, de sa vocation, ils ont pris les mots du langage courant, tout simplement quand on dit de quelqu’un qui a eu un beau parcours de vie: « il est au sommet de sa gloire ». Cela est vrai pour Jésus, et c’est ce que célèbre cette fête de l’Ascension.

Et les proches de Jésus le disent en pensant non pas aux lieux de pouvoir qu’il aurait pu fréquenter, mais à sa compassion avec tous, à son souci de rejoindre les exclus, les plus pauvres. Pour eux, c’était cela qui valait à Jésus ces titres glorieux, parce qu’il avait ainsi réalisé sa vocation de fils d’un Dieu qui a créé le monde et l’a voulu fraternel et pacifique.

D’où l’appel qu’il adresse à ses amis, à nous, ses disciples, d’expulser les démons, de parler en langues nouvelles, de prendre des serpents dans les mains, d’imposer les mains aux malades. Expressions étonnantes, et incompréhensibles pour une oreille peu habituée à ce langage biblique. En résumé il s’agit d’apporter au monde un message d’espérance et d’amour par notre agir quotidien, par nos engagements les plus divers au service de la fraternité universelle. Et ainsi nous nous élevons dans le ciel, comme Jésus, pour être à notre tour assis à la droite de Dieu. Nous serons glorifiés, notre existence ne se limitera plus à sa dimension terrestre, elle sera déjà dans les cieux.

N’est-ce pas un stimulant puissant pour notre Église, qui ne tient pas sa gloire des lustres du Vatican, ni de somptueuses cérémonies, ni de titres honorifiques donnés à ses responsables ? La gloire de l’Église, c’est la disposition de cœur de tous ceux qui se revendiquent amis et disciples de Jésus, c’est la puissance de l’amour fraternel, c’est le service qu’elle peut apporter à l’humanité toute entière.

N’ayons plus peur alors d’employer ces termes de puissance, de gloire, de majesté, quand ils sont entendus comme expression d’une puissance d’amour : Dieu tout-puissant, c’est Dieu tout-amour !

André Jobard
9 mai 2024 – Ascension

Le curé bien aimé – homélie du 5 mai 2024

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Les lectures du jour

Le curé bien-aimé

Si nous écoutons de façon distraite les lectures du jour (ça peut arriver !), on en retient cependant quelques mots-clefs surtout quand ils sont répétés avec insistance. Aujourd’hui, dans sa première lettre et dans son évangile, Jean nous a parlé d’aimer et d’amour dans tous les sens. Dieu est amour, Dieu nous aime, le Père aime le Fils, le Fils aime le Père, le Fils aime ses disciples, il veut que ses disciples l’aiment et qu’ils s’aiment entre eux. L’amour s’écoule du Père au Fils, du Fils aux disciples puis entre les disciples. Il remonte des disciples au Père en passant par le Fils. C’est une circulation sans fin.

Mais que veut dire aimer ? Aimer et amour sont des mots de chaque jour. Nous conjuguons aimer au passé et au futur, sous forme affirmative, négative ou interrogative. Je t’aime. Tu m’aimes ? Je t’aimerai toujours. Je l’ai aimé. Tu ne m’aimes plus. Je vous aime tous… Aimer dépasse le cadre familial. Même des politiques osent dire « Je vous aime » au peuple qui leur est confié ou qu’ils veulent séduire.

Mais que veut dire aimer ? Que veut dire dit « Je t’aime » quand l’affirmation n’est pas précisée par d’autres mots, et surtout par des actes qui lui donnent du sens ? Pour Jésus, l’amour, c’est donner sa vie. Dieu est la source de l’amour. Il donne la Vie. Jésus donne sa vie. Il le dit, il le fait. Jésus a dit à ses disciples de donner leur vie. Ils l’ont fait. En devenant disciples, nous sommes invités à aimer, à donner notre vie pour ceux que nous disons aimer.

Dans son évangile et dans ses lettres, Jean utilise 120 fois les mots aimer et amour. Cent vingt fois en 60 pages ! Son psychologue aurait dit qu’il avait un TOC, une obsession, et ses amis une fixette. Pourtant je connais quelqu’un qui a fait mieux que Jean. Il s’appelle André. Il est depuis 13 ans et pour quelques mois encore curé de cette paroisse. J’ai relu sur le site paroissial toutes ses homélies et tous ses éditos parus dans l’Echo de la Visitation, la feuille paroissiale. Les mots aimer et amour reviennent 348 fois. Trois fois mieux que Jean. La comparaison n’est pas tout à fait juste, les écrits d’André sont plus longs que ceux de Jean.

Quand André dit aimer et amour, c’est d’abord pour commenter les lectures proposées à la messe. Cet enseignement fait partie de sa mission. Il est payé pour, pas très cher d’ailleurs… Et comment ne pas parler d’amour quand on commente ce que Jésus a dit et ce qu’il a fait ?

Quand André dit aimer et amour, c’est aussi pour nous suggérer – Je dis bien « suggérer » car il commence toujours par « N’y a-t-il pas ? » ou « N’y aurait-il pas ? » – suggérer donc des destinataires privilégiés à notre amour, en plus de nos proches qu’il n’oublie pas, en énumérant ceux que nous risquons d’oublier, les étrangers et les migrants, les pauvres, les sans-abris et les exclus, les malades et ceux qui portent un handicap, les victimes des guerres et des catastrophes. Il salue alors les acteurs du CCFD, du Secours catholique, du groupe solidarité de la paroisse et des visiteurs de malades, sans oublier celles et ceux qui agissent dans le même sens, par amour des autres, sans croire en Dieu.

Quand André dit aimer et amour, c’est aussi, plus discrètement, mais plus souvent ces dernières années, pour relire sa vie et raconter comment son goût pour la rencontre des autres l’a conduit à devenir prêtre et à donner sa vie à Dieu et aux autres.

Enfin quand André suggère aimer et amour, sans le dire vraiment, c’est, notamment dans les échos de chaque rentrée en septembre, pour souhaiter que ses paroissiens tissent des liens toujours plus apaisés et fraternels. Aimez-vous les uns les autres, c’est bien le commandement de Jésus à ses disciples.

Nous venons d’entendre que, dans sa première lettre, Jean appelle « Bien-aimés » les amis auxquels il écrit. André n’a jamais osé dire « Bien-aimés » à ses paroissiens . Mais il me semble (pour reprendre une de ses expressions modestes les plus familières) qu’il les aime et que nous sommes nombreux ici à pouvoir lui dire en retour : « Tu es notre curé bien-aimé. »

Vincent Boggio
5 mai 2024

Vigne de Bourgogne, vigne de Jésus ? – homélie du 28 avril 2024

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Les lectures du jour

Vigne de Bourgogne, vigne de Jésus ?

« Moi, je suis la vraie vigne ! » Pour avoir dit une chose pareille, il fallait que Jésus ne connaisse pas le vignoble de Bourgogne ! Voilà donc une image employée par Jésus, une de plus, dimanche dernier par exemple il se comparait au bon pasteur, ailleurs il dira je suis la porte, le chemin, la vérité, la vie. Certains sont en droit de critiquer ce qui leur apparaît comme une prétention de la part de cet homme, qui, c’est certain, a fait beaucoup de bien, a prononcé des paroles bienveillantes, nouvelles, stimulantes. Mais de là à se prendre pour un héros, ce n’est pas supportable. En disant cela je pense à un groupe de lycéens qui avaient été choqués par ce discours, avec entre autres, cette affirmation : ‘en dehors de moi vous ne pouvez rien faire’. Quelle prétention et qu’en est-il alors de la liberté de l’homme ? Vous le constatez : il y a besoin d’un approfondissement de ces paroles.

Fils de vigneron, je comprends la force de cette image : comme les sarments de la même vigne, nous sommes reliés les uns aux autres, tributaires ensemble du mode de culture du vigneron, du rôle de la météo, de la terre où elle puise sa richesse. Pas question de faire sécession, de se désolidariser de l’ensemble sous prétexte qu’on est mieux que tous les autres, qu’on a la vraie religion et qu’on a une conduite irréprochable. Cela s’applique à notre vie commune, où le repli sur soi, la critique systématique de celui qui est différent, la dérision devant des initiatives qui ne sont pas les nôtres sapent un vivre-ensemble, condition indispensable pour un monde fraternel, tel que Dieu le veut. Ainsi le fait d’être reliés les uns aux autres et à Jésus, loin d’aliéner notre liberté, nous ouvre un chemin de responsabilité et de vie nouvelle.

Bien sûr cela demande une dose d’humilité, où notre désir de toute-puissance est mis à mal. Il est bon que Jésus nous redise que sans lui nous ne pouvons rien faire, afin d’évacuer toute prétention à nous considérer comme seul acteur de notre vie. C’est aussi le sens de l’émondage, de la taille auxquels est soumis tout sarment s’il veut porter de beaux fruits ; par émondage, j’entends le renoncement pour des parents à une éducation parfaite pour leur enfant, l’échec dans la réalisation d’un projet, même le plus louable, les critiques sur telle ou telle décision ou opinion: épreuve d’humilité au départ, mais qui peut être source d’une grande joie, d’un autre regard. Tant pis si la reconnaissance n’est pas pour soi, mais pour l’autre ; cela peut procurer une joie intérieure de loin plus profonde que l’autosatisfaction. L’humilité c’est le chemin emprunté par Jésus, qui s’est fait serviteur, renonçant à la toute-puissance que pouvait lui donner son statut de fils de Dieu.

Un verbe revient sans cesse dans ce passage d’évangile, celui de ‘demeurer’. J’oppose volontiers à ce terme celui de ‘s’éparpiller’, vouloir être partout, s’enfoncer dans un activisme épuisant et inutile. Demeurer, c’est rester fidèle à ses engagements, fidèle à ses compagnons de route, fidèle à cette parole inestimable, celle de Dieu, Jésus en personne. C’est notre guide, le seul qui peut transformer notre action, même la plus petite, la plus humble, en une œuvre remarquable, et nous faire porter de beaux fruits ; il ne s’agit pas de produire (c’est la sève qui produit) ,mais de transmettre la sève qui ne vient pas de nous. C’est là notre mission.

J’ai essayé, en vain, de joindre Jésus hier soir par les moyens modernes de communication; je voulais l’inviter à venir en Bourgogne voir ce qu’est une vraie vigne : peut-être m’aurait-il appelé à l’humilité, et à l’action de grâce pour avoir la chance d’habiter une si belle région.

André Jobard
28 avril 2024

Comme le Bon Pasteur, répondre à notre appel particulier … – homélie du dimanche 21 avril 2024

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Les lectures du jour

Dimanche du Bon Pasteur et journée de prière pour les vocations

Comme le Bon Pasteur, répondre à notre appel particulier. Appel à se donner aux autres

Chers frères et sœurs, Chers amis….

Il y a une question que vous vous êtes déjà posée ou que vous vous posez encore. Et c’est une question qu’il convient de se poser à tout âge : A quoi Dieu m’appelle-t-il ? A quoi m’appelle-t-il aujourd’hui ? Que veux-tu de moi Seigneur ? Que veux-tu que je fasse de plus que ce que je fais déjà ? Ou encore, comment mieux faire ce que tu me demandes ? Oui cela fait plusieurs questions finalement. Ces questions font écho à ce que nous propose l’Église depuis 61 ans maintenant. C’est de prendre le 4e dimanche de Pâques qui est aussi le dimanche du Bon Pasteur pour prier pour les vocations. Quand on entend vocation, on pense à ceux qui se destine à la vie religieuse en devant prêtre, religieux ou religieuse. Oui c’est vrai, ces vocations sont essentielles à la vie de l’Église ; mais au fond ce mot vocation signifie « appel » et concerne tous les chrétiens et même tous les croyants, dans la mesure où ils peuvent se poser ces questions : à quoi suis-je appelé en ce monde ? A quoi suis-je appelé aujourd’hui ?

Il y a un lien entre la parabole du Bon Pasteur que nous venons d’écouter dans l’Évangile et ce thème de l’appel. Jésus se présente comme le Bon Pasteur qui accueille sa vocation de protéger les brebis que le Père lui a confiées. Et nous savons que pour leur plus grand bien, il vient partager leur existence, leurs peines et leurs joies. Et ce que nous célébrons ces jours-ci, c’est justement le don qu’il fait de sa vie pour ceux qu’il aime. Notre vocation à nous, consiste avant tout, à découvrir comment nous entrons dans la logique du Bon Pasteur, qui accueille l’appel à aller vers les autres malgré les différences, à les servir malgré les critiques et à les aimer jusqu’au bout. Chacun peut alors se demander : quels sont ceux vers qui le Seigneur m’envoie ? Et surtout n’allez pas chercher trop loin. Ce peut être cet époux ou cette épouse éprouvée par la maladie que vous êtes appelés à soutenir jusqu’au bout ; ce fils ou ce petit fils difficile qu’il faut éduquer avec patience, cet ami qui ne prend plus des nouvelles et se renferme sur lui-même (ou sur elle-même) envers qui il faut rester généreux et attentif. Ces voisins âgés à qui l’on peut proposer une visite, un sourire ou un service.

Le thème retenu pour cette 61e journée de prière pour les vocations est : Appelés à semer l’espérance et à construire la paix ! Je voudrais partager avec vous deux idées contenues dans le message du pape. « La Journée mondiale de Prière pour les Vocations, écrit le pape dans son message, nous invite, chaque année, à considérer le don précieux de l’appel que le Seigneur adresse à chacun de nous, son peuple fidèle en chemin, pour que nous puissions prendre part à son projet d’amour et incarner la beauté de l’Évangile dans les différents états de vie. Écouter l’appel divin, c’est loin d’être un devoir imposé de l’extérieur, peut-être au nom d’un idéal religieux ; [Il ne s’agit pas de faire comme les autres ou de se voir infliger une corvée qui dépasse nos forces] c’est au contraire la manière la plus sûre que nous ayons d’alimenter le désir de bonheur que nous portons en nous : notre vie se réalise et s’accomplit quand nous découvrons qui nous sommes, quelles sont nos qualités, dans quel domaine nous pouvons les mettre à profit, quelle route nous pouvons parcourir pour devenir signe et instrument d’amour, d’accueil, de beauté et de paix, dans les contextes où nous vivons ».

« Être pèlerins d’espérance et constructeurs de paix signifie alors fonder notre existence sur le roc de la résurrection du Christ, sachant que chacun de nos engagements, dans la vocation que nous avons embrassée et que nous portons en avant, ne tombe pas dans le vide. Malgré les échecs et les revers, le bien que nous semons grandit de manière silencieuse et rien ne peut nous séparer du but ultime : la rencontre avec le Christ et la joie de vivre dans la fraternité entre nous pour l’éternité ». C’est cela l’ultime appel auquel a répondu en premier, avant nous et pour nous, Jésus notre Bon Pasteur.

Judicaël Mitokpey – 21 avril 2024

Ce que nos yeux ont vu … – homélie du dimanche 14 avril 2024

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Les lectures du jour

Ce que nos yeux ont vu, ce que nos oreilles ont entendu, voilà ce que nous vous annonçons !

Chers frères et sœurs, chers amis…

Le Ressuscité se manifeste une fois encore à ses disciples. Et voyez avec quelle insistance il leur montre qu’ils ne fabulent pas. Qu’il ne s’agit pas d’une image mentale, d’un délire d’attachement à sa personne qui leur ferait croire qu’ils le voient ou encore d’un esprit qui vient les tourmenter. Le Ressuscité leur montre ses mains et ses pieds où l’on peut voir encore les marques des blessures du Crucifié. Il leur demande de le toucher. Il mange avec eux. Tout ceci pour leur révéler qu’il est bien vivant. A partir de cette expérience sensible, il ouvre leur intelligence aux ‘Écritures’ qui avaient annoncé qu’il fallait que le messie souffre, qu’il meurt et qu’il ressuscite. Alors seulement, on peut proclamer un message de conversion en son nom pour le pardon des péchés et pour la vie éternelle avec Dieu. C’est fort de cette double expérience des apôtres, l’expérience sensible et celle de l’éclairage des Écritures que les disciples de Jésus ont proclamé l’Évangile de manière qu’il parvienne jusqu’à nous. Leur expérience du Ressuscité était si forte que saint Jean a pu dire : « ce que nos yeux ont vu, ce que nos oreilles ont entendu, voilà ce que nous vous annonçons. » Et Pierre nous redit dans la première lecture d’aujourd’hui : Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, nous en sommes les témoins. Nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts.

Frères et sœurs, notre monde cartésien a bien du mal à croire au pied de la lettre que Jésus est vraiment ressuscité. Il veut bien confesser qu’il est vivant, mais seulement dans le souvenir de ses amis ; qu’il n’est pas ressuscité en chair en os : « touchez-moi, regardez, dit Jésus dans l’Évangile, un esprit n’a pas de chair ni d’os comme vous constatez que j’en ai ». Notre monde voudrait bien voir en tout ceci une image, un symbole. Mais si le Christ n’était ressuscité qu’en image, dans l’esprit de ses amis, au fond de leur cœur, ils seraient eux-mêmes mort avec cette image, et le message de l’Évangile ne nous serait pas parvenu 2000 ans plus tard. Il y a une puissance immortelle dans ce message. Et cette puissance vient de la Résurrection. Si le Christ n’était pas ressuscité, nous ne serions pas là. Le message de l’Évangile resterait une doctrine sans vie. La foi elle-même ne serait pas vivante, elle serait une adhésion quelconque à une croyance du passé. Si vous avez un peu de foi, vous verrez que Jésus est vivant et que sans cela vous ne seriez pas là. Oui mais nous ne l’avons pas vu. C’est vrai et c’est tant mieux : ses disciples l’ont vu. Et Jésus leur a dit « vous croyez parce que vous m’avez vu, heureux ceux qui croient sans avoir vu ». Là il est clairement question de nous. Et il nous appartient d’accueillir cette béatitude ou de nous en exclure. Heureux ceux qui croiront sans avoir vu.

Dans une deuxième lecture plutôt spirituelle de l’Évangile, il est possible de voir aujourd’hui le Ressuscité, non pas avec les yeux de la chair mais avec les yeux de la foi, là où il y a les marques de ses blessures, c’est-à-dire dans les souffrances et les misères de notre monde ; de le rejoindre et le toucher là. Il est possible de le reconnaître à la fraction du pain, c’est-à-dire dans l’Eucharistie ou tout simplement dans les lieux où la charité se fait partage joyeux. Mais si l’on peut dans la foi le rencontrer en ces lieux-là, grâce aux Écritures qui nous y invitent, c’est sans aucun doute parce qu’il est vraiment ressuscité et vivant à jamais. C’est cela le mystère de la foi. Et il est grand le mystère de la foi !

Judicaël Mitokpey
14 avril 2024

Le bon Dieu est bon – homélie du 7 avril 2024 – dimanche de la miséricorde

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Le bon Dieu est bon

Dimanche dernier c’était Pâques, la fête de la Résurrection de Jésus.

On l’avait cloué sur une croix pour le faire taire. Il est mort sur cette croix. On imagine la surprise de ses amis quand il est venu chez eux trois jours plus tard et leur a montré ses mains avec la marque des clous pour qu’ils le reconnaissent. Il était ressuscité, relevé de la mort, revenu à la vie, vivant. C’était une bonne nouvelle, une très bonne nouvelle. C’est toujours une bonne nouvelle. Jésus est vivant avec nous et sa Parole reste vivante.

Aujourd’hui c’est la fête de la Divine miséricorde ! Divine miséricorde ! Deux mots qui ne sont pas dans le langage courant, le langage des enfants ou des non-chrétiens.

Divin, divine, c’est facile ! C’est ce qui est à Dieu, de Dieu, ou ce qui vient de Dieu. L’amour divin, c’est l’amour de Dieu. La joie divine, c’est la joie de Dieu.

Miséricorde, c’est plus compliqué. Pour les gens d’aujourd’hui, ce mot veut dire pitié ou pardon. Mais la Bible a été écrite en hébreu et en grec et traduite en français en choisissant les meilleurs mots. Parfois au lieu de miséricorde, les traducteurs ont choisi amour, tendresse, pitié, compassion, clémenceou douceur, et bonté.

Je retiens le mot de bonté qui me semble contenir tous les autres. La divine miséricorde, c’est la bonté de Dieu. La fête d’aujourd’hui, c’est la fête de la bonté de Dieu. Dieu est bon. Quelquefois on parle du Bon-Dieu, en collant les deux mots, sans trop réfléchir, comme on dit un bonhomme ou un brave gars, mais la bonté de Dieu n’est pas une attitude, un instinct ou un style. C’est une bonté consciente, voulue, à l’image de sa fidélité. Le Bon-Dieu est bon.

Dieu bon a créé le monde. Il a créé les enfants les femmes et les hommes à sa ressemblance, donc bons. C’est la Bible qui le dit. Après avoir tout créé, Dieu vit tout ce qu’il avait fait. Voilà, c’était très bon. La bonté de Dieu est orientée vers chacune de ses créatures, chacun de nous.

Jésus, le Fils de Dieu, est venu dans son peuple pour mieux faire connaître la bonté de son Père. Jésus lui-même a été plein de bonté avec les enfants, les femmes et les hommes qu’il a rencontrés. Il leur a demandé, il nous demande, d’être bons comme son Père, donc d’avoir pour les autres, amour, tendresse, pitié, compassion, douceur, bref bonté.

On vient d’entendre comment Jésus a été bon avec Thomas. Thomas n’avait pas cru ce que disait les autres disciples. Huit jours plus tard, Jésus revient et il est bon avec Thomas. Il ne lui fait pas de reproches. Il fait avec douceur ce que Thomas a demandé. Il lui montre ses mains et son côté et lui propose de les toucher. Jésus a de la tendresse pour Thomas.

Dans un instant huit d’entre nous, qui sont malades, qui se sentent vieillir, qui ressentent la solitude, ou qui ont envie de « nettoyer leur vie », vont recevoir un signe de Dieu, un sacrement, le même mot utilisé pour le baptême ou la communion. Ce sacrement est l’Onction des malades. C’est le sacrement de la tendresse de Dieu, de sa bonté.

Il a semblé bon que les enfants voient la bonté de Dieu pour Colette, Espérance, Geneviève, Hélène, Jean-Claude, Monique, Simone et Veronica.

Vincent Boggio
7 avril 2024

La pierre devant le tombeau – homélie du 31 mars 2024 – Pâques

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La pierre devant le tombeau

Un enfant de 8 ans posait un jour la question : « quand on est mort, c’est pour longtemps ? » Aujourd’hui, sans paraître surpris par cette curieuse demande, nous pourrions lui répondre à propos de Jésus : « ça a duré 48h ». Même si nous lui affirmons cela avec un certain aplomb, demeure en nous peut-être une réserve, la même qu’ont ressentie ces femmes, qui, premières témoins du tombeau vide « s’enfuirent, toutes tremblantes et hors d’elles-mêmes. Elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur ». Oui l’annonce de la résurrection de Jésus n’a rien d’évident, c’est l’évangéliste saint Marc qui le souligne. Pourtant demeure vivace en ces femmes, l’amour de leur ami Jésus; elles veulent lui rendre un dernier hommage en venant embaumer son corps. Elles savent qu’il y a un obstacle de poids, cette lourde pierre placée à l’entrée du tombeau, mais elles y vont quand-même, l’amour étant plus fort que tout. C’est alors qu’elles découvrent que la pierre a été roulée et que le tombeau est vide. Elles vont être invitées à regarder au-delà de ce qui leur paraissait immuable, c’est-à-dire la mort définitive, l’absence de toute perspective autre que la mort. Le crucifié (et non pas le mort, car ce n’est pas son état) n’est plus là ; il est ailleurs que là où elles l’enfermaient ; il est en Galilée, sans plus de précision, mais c’est là où grouille la vie, où se rencontrent des nationalités diverses, multiples, là où se joue le destin du monde. Heureusement qu’elles avaient à cœur de venir embaumer le corps de leur ami sans s’arrêter sur l’obstacle de la pierre fermant le tombeau ; c’est bien cette détermination qui leur a valu de faire l’expérience du ressuscité : j’appelle cela la foi, une foi qui donc ne vient pas au vu de Jésus ressuscité; elle est le socle qui permet de vivre l’expérience de la résurrection.

Cette foi, est-elle la nôtre ? Si nous sommes là ce matin, si nous avons eu le courage d’un lever très matinal, ne serait-ce pas le signe d’une foi en la lumière plus forte que les ténèbres ; ces ténèbres nous les connaissons : guerres, injustices, violences jusque dans nos quartiers, mésentente familiale, maladie, deuil, et tant d’autres contrariétés ou souffrances. De quoi parfois perdre confiance, désespérer de l’avenir. Pourtant demeure en nous une force qui nous permet de continuer le chemin . Une force que j’appelle la foi et qui peut être réactivée par un petit événement inattendu. Je voudrais juste vous citer ce qu’une personne m’a confié récemment, une situation familiale très tendue du fait de la maladie psychique de l’un des membres, des dérives d’un des fils à qui a été retiré son enfant de 12 ans désormais placé par les services sociaux: situation complexe, douloureuse, mais illuminée par la demande de ce petit garçon à ses grand-parents de lui offrir une croix pour le jour de Pâques ; croix que j’ai bénie de bon cœur tant elle représente pour cette famille au bord du gouffre un baume de tendresse. La résurrection a du sens, vécue dans un tel contexte si difficile.

Personnellement j’ai vu dans l’appel du pape aux Ukrainiens de proposer des négociations à leur opposant russe, l’expression d’une volonté de sortir de la spirale de la violence pour établir la paix. Cela paraît utopique, comme une pierre très lourde à faire rouler, mais n’est-ce pas un acte de foi qui nous donne de croire que Jésus est encore bien vivant et non plus enfermé dans les liens de la mort ?

Car la mort, pour répondre au petit enfant qui demandait si elle était pour longtemps, ne dure qu’un instant dans la mesure où nous croyons en la force de la résurrection du Christ, capable de faire sauter tous les obstacles que nous estimons infranchissables.

André Jobard
31 mars 2024 – Pâques

Empêcher la Parole – homélie du 29 mars 2024 – Vendredi Saint

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Empêcher la Parole

Jésus a été exécuté, mis au tombeau : « ouf, Jésus ne parlera plus ! » disent certains au milieu de la foule des pèlerins venus fêter la Pâque à Jérusalem. D’un côté ils ont raison : Jésus commençait à remuer les foules et par petites touches, il ébranlait des convictions nationales et religieuses… pensez donc ! A force d’accueillir les pécheurs et de renvoyer chez eux des gens comme la femme adultère, ne risquait-il pas d’obscurcir dans la conscience du peuple le sens de ce qui est bon et de ce qui est mal ?

Avec lui, le sabbat n’était plus respecté : si on ne laisse plus à Dieu toute la place qui doit lui revenir par le respect de ce jour sacré, où va-t-on ?

Et Jésus lui-même se faisait l’égal de Dieu : si Dieu est aussi petit que l’homme, est-il encore Dieu ? L’autorité, le magistère savent qui est Dieu et ce qu’il attend de l’homme. Il est scandaleux qu’un homme comme Jésus vienne remettre en cause une image de Dieu élaborée pendant des siècles, reçue par toute une tradition. Dieu est présent au monde avec puissance, car il est Dieu ! Tout est dit, rien à rajouter.

Il est donc bon que Jésus se taise… même s’il a fallu pactiser avec Rome pour faire tomber cet homme si difficile à saisir.

Ce sont les mêmes griefs qui continuent de tuer aujourd’hui ; chaque fois que nous nous accrochons à une image figée de Dieu ; chaque fois que nous résistons à la nouveauté du royaume de paix, de liberté, de vie.

Par sa mort librement acceptée, Jésus ouvre à tout jamais nos yeux sur le visage nouveau de Dieu : un Dieu qui aime la vie au point de la faire surgir au matin de Pâques.

André Jobard
29 mars 2024 – Vendredi Saint

Venir à la lumière – homélie du samedi 9 mars 2024

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Venir à la lumière

Au cœur d’une nuit profonde, éclairés seulement par une bougie à la flamme vacillante, deux hommes échangent des propos intimes sur leurs croyances, leurs certitudes, leur confiance. Ils sont aussi dans la nuit comme leurs contemporains, spectateurs impuissants et désabusés devant le massacre d’innocents, qui ont le malheur d’habiter en Ukraine, à Gaza et tant d’autres lieux de souffrances et de guerres, sans parler des injustices qui s’aggravent ni des menaces qui pèsent sur l’avenir des démocraties. Ce sont les ténèbres du monde, de tous les temps. Mais ils découvrent dans leur partage que tout espoir n’est pas perdu.

En effet pétris l’un et l’autre de toute une tradition religieuse, ils ont en tête le récit d’un peuple, appelé ‘Israël’ déporté à Babylone sous la férule du terrible Nabuchodonosor ; ce peuple crie sa souffrance à Dieu dans un psaume déchirant, mais ils ne manquent pas de révéler aussi l’intervention de Dieu qui n’a pas hésité à confier à un roi païen le retour des déportés à Jérusalem. L’un des 2 protagonistes a fait parler de lui depuis quelques mois qu’il parcourt les routes de Galilée, et lui aussi ose évoquer la sortie des ténèbres, et il accompagne ses paroles de gestes merveilleux, comme des guérisons, qu’on appelle ‘miracles’ ; et c’est cela qui a valu à l’autre personnage d’être incité à engager cette conversation à l’abri de regards indiscrets, donc la nuit. D’où cette lumière, cette joie, quand retentissent ces mots : « Dieu a tant aimé le monde, et il a envoyé son fils non pas pour condamner (comme le pensaient les déportés à Babylone), mais pour sauver. »

Cette découverte, nous avons à la recevoir aujourd’hui, non pas pour asséner des vérités abstraites à ceux qui ne la connaîtraient pas, mais pour nous engager à faire vivre l’espérance, en faisant la vérité sur nos vies, sur notre histoire commune, tandis que la rumeur des médias et de nombre de nos conversations quotidiennes entretiennent un climat de peur, de suspicion, de mort, de fin du monde. Faire la vérité, en reprenant les mots de toute la tradition biblique, c’est partager son pain avec celui qui a faim, c’est accueillir le pauvre sans abri, c’est soutenir la veuve et l’orphelin, c’est recevoir l’immigré.

Dans 3 semaines nous accueillerons au petit matin de Pâques la douce lumière de la résurrection : non parce que nous aurons vécu quelques belles performances de carême, mais parce que le Dieu que nous prions et que nous a révélé Jésus nous donne gratuitement la vie, la liberté. N’ayons pas peur de la nuit : le prophète Osée (Os 6,3) l’avait proclamé : «  le lever du Seigneur est aussi sûr que l’aurore. » De quoi nourrir notre espérance.

André Jobard
9 mars 2024

C’est quoi un diacre ? – homélie du dimanche 3 mars 2024

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Les lectures du jour

C’est quoi un diacre ?

Dans notre montée vers Pâques, vers la Résurrection que Jésus annonce encore aujourd’hui de façon mystérieuse, la présence de René, de Bernard et de Victor, devenus diacres ici-même il y a 10 ans m’invite à faire un pas de côté pour essayer de répondre à une question que j’entends souvent « C’est quoi un diacre ? » et à laquelle je ne sais pas toujours bien répondre.

De 2017 à 2023, en cherchant « diacre » sur Internet, on tombait d’abord sur Corinne Diacre, sélectionneur de l’équipe de France féminine de foot, preuve que le foot intéresse plus que la religion. Quelques lignes en-dessous on trouvait des sites qui définisssent le diacre catholique en le comparant au prêtre (hiérarchie, célibat, profession, position de l’étole) et qui insistent surtout sur les rites et les sacrements que le diacre a « le droit » de faire.

Le diaconat dans sa forme permanente est récent. Il a été rétabli par Paul VI en 1967, dans le bouillonnement du Concile. Il n’est pas encore totalement reçu, comme en témoigne la formule « prêtres et laïcs », souvent utilisée pour dire « tous les baptisés », formule qui exclut les diacres lesquels ne sont ni prêtres ni laïcs ! Le bouillonnement du Concile a contribué par ailleurs avec bonheur à élargir la place des laïcs. De sorte que le diaconat cherche encore sa place, différemment selon les diacres, les pays, le vouloir des évêques et l’évolution de l’Eglise dans un monde en accélération. La théorie et la pratique se nourrissent mutuellement. Comme le vin, le diaconat nouveau pourra se bonifier avec l’âge… ou pas.

On devient chrétien par le baptême. Les baptisés ont pour mission commune d’annoncer l’Evangile du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme Dieu vous aime » pour que le monde devienne un Royaume de justice, de paix et de joie.

« Comme Dieu vous aime ». Il s’agit bien de ce Dieu qui a fait sortir son peuple de la maison d’esclavage, qui l’a rendu libre, et lui a demandé d’accepter librement de le reconnaitre comme seul Dieu en échange de sa fidélité juqu’à la millième génération, ce qui nous donne encore du temps.

C’est bien ce Dieu qui a envoyé son Fils Jésus, Dieu-fait-Homme, visiter son peuple pour compléter l’enseignement de Moïse et des prophètes et corriger les déviations de ce peuple dans l’observance des projets de Dieu. En commençant par une belle colère lors de son retour au Temple, là où ses parents l’avaient présenté au Seigneur en offrant deux colombes, ce Temple qu’il désigne comme la maison de son Père, transformé en salon de l’Agriculture par un excès de sacrifices de bestiaux, sacrifices dont le peuple avait perdu le sens sacré pour en faire un commerce.

Aux commandements de Dieu, Jésus a rajouté l’amour, cet amour dont Jean dans les dernières pages de son évangile dessine et redessine un triangle entre le Père, le Fils et les disciples, cet amour dont il souligne l’expression majeure : le service. Il se fait serviteur et invite ses disciples à se faire serviteurs. Dieu a libéré son peuple de la maison d’esclavage et son Fils demande à ses disciples de devenir un Temple de serviteurs, des serviteurs en liberté.

Pour aider les chrétiens sur le chemin du service dans le monde, l’Eglise demande à certains, les diacres, d’être un signe vivant de l’Eglise servante dans le monde, là où ils vivent, dans leur famille, leur travail, leur quartier, leur Eglise, et de s’engager pour toute leur vie.

Les prêtres, qui rendent les services de l’Eucharistie et de la Miséricorde du Seigneur. qui animent la vie de leur communauté, ont toujours été diacres avant d’être prêtres. Devenus prêtres, ils restent diacres et sont invités à être ouverts au monde non chrétien ce qui nécessite que les laïcs de leur communauté leur donnent le temps nécessaire.

Les évêques aussi restent diacres en étant au service d’un morceau du monde, le diocèse qui leur est confié, et en encourageant leur peuple à être au service du monde.

Il ne me semblerait pas incongru quand on demande au Seigneur, au cours de la messse, de se souvenir de son Eglise, d’inverser l’ordre des présentations en disant « tous les baptisés, les diacres, les prêtres, notre évêque Antoine, l’ensemble des évêques et notre pape François ».

Quand Laurent, aujourd’hui évêque de Paris, m’avait demandé de réfléchir avec Marie-Claude au diaconat, une véritable aventure puisque nous ne connaissions aucun diacre permanent et que lui-même n’en connaissait pas beaucoup, ma première question a été : « Pourquoi ne demander qu’à des hommes ? » J’ai naïvement espéré que cette injustice serait rapidement corrigée. C’était il y a 35 ans. L’Evangile continue à me faire rêver à l’égalité des femmes et des hommes dans l’Église que j’aime.

Vincent Boggio
3 mars 2024

Une erreur de discernement – homélie du dimanche 25 février 2024

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Les lectures du jour

Une erreur de discernement

« Ne porte pas la main sur le garçon. Ne lui fais aucun mal ! » Certains d’entre vous, peut-être nombreux, ont pu être troublés par ce cri de l’ange du Seigneur, le messager du Seigneur. Parce que ce cri aura ranimé une souffrance, celle d’avoir été un enfant battu ou abusé par un adulte, en particulier un père, ou celle de partager la souffrance d’une famille abîmée par de telles violences ou de tels abus, la trahison de l’innocence, ou bien parce qu’ils ont pensé aux enfants victimes il y a plus de 30 ans dans cette paroisse des abus sexuels d’un prêtre à qui ils étaient confiés, ou encore parce qu’ils ont fait eux-mêmes du mal à des enfants.

« Ne porte pas la main sur le garçon. Ne lui fais aucun mal ! » L’épilogue de cette histoire étrange est lumineux. Le Seigneur de tendresse et d’amour, lui dont le psaume rappelle « qu’il lui en coûte de voir mourir les siens », ne peut pas accepter qu’un père fasse du mal à son enfant. Mais quelle étrange attitude que celle d’Abraham qui est prêt au pire ! Que veulent nous dire les auteurs du livre de la Genèse qui ont composé ce récit ? Pourquoi Dieu Père aurait-il mis Abraham au défi ? Dieu n’est pas un tentateur. Nous avons pu le croire quand nous disions « Ne nous soumets pas à la tentation », mais nous avons rectifié avec justesse et nous disons désormais « Ne nous laisse pas entrer en tentation « 

En méditant ce texte avec la communauté CVX, l’un d’entre nous a suggéré une explication. Abraham a cru que Dieu lui demandait de sacrifier son fils. Mais il s’est trompé. Ce n’était pas le souhait de Dieu. Abraham a manqué de discernement. Peut-être parce qu’en Chaldée, son pays d’origine, on pratiquait les sacrifices humains et qu’il n’avait pas encore compris que le Dieu unique pour lequel il avait quitté la Chaldée était le Dieu de la vie. Il a cru que c’était Dieu qui lui parlait. Il s’est trompé. Ce n’était pas Dieu mais le démon, le Malin si malin qu’il sait se faire passer pour Dieu pour faire justifier le mal au nom de Dieu.

Ainsi le texte met le lecteur en garde contre les erreurs de discernement les plus graves celles qui consistent à invoquer Dieu pour faire le mal, en particulier la guerre et ses massacres. « Ne lui fais aucun mal ! »L’Histoire est tristement riche de guerres menées au nom de Dieu. Les chrétiens en ont pris leur part et la prennent encore quand ils voient Satan dans leurs adversaires pour justifier une invasion.

Avant de baptiser un adulte on lui demande s’il est prêt à renoncer au mal. Quand il s’agit d’un nourrisson, on demande plutôt aux parents s’ils sont prêts à l’aider à discerner le bien et le mal et à lui apprendre à chosisir le bien. On demande au Seigneur de lui donner le don de la conscience, cette conscience qui est l’instance suprême de la décision morale, plus haute que les lois, les normes ou la tradition.

Chaque jour nous pouvons renouveler cette demande à Dieu : « Donne-nous une conscience droite. »

Vincent Boggio
25 février 2024

Carême, un temps pour s’entraîner au combat de la vie ! – homélie du dimanche 18 février 2024

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Les lectures du jour

Carême, un temps pour s’entraîner au combat de la vie !

Chers frères et sœurs, chers amis…

Comme vous le savez, nous sommes embarqués en Église depuis mercredi dernier dans ce temps fort du carême pour nous préparer à la rencontre du Seigneur Ressuscité à Pâques.

Ce temps nous est donné pour vraiment préparer nos cœurs par l’exercice concret du jeûne, de l’aumône et de la prière, pas simplement pour faire plaisir au bon Dieu mais pour entraîner nos âmes au combat spirituel dans lequel nous sommes pris au quotidien à travers les choix inévitables que nous avons à faire. Parler ou se taire selon les circonstances, aimer ou haïr tant les blessures sont douloureuses. Rendre le mal qu’on nous a fait, ou pardonner. Ou encore des choix plus simples pour certains, mais plus durs pour d’autres : par exemple, se lever de bonne heure le matin pour prier et se rendre utile, ou continuer à dormir. Venir à la messe dimanche matin ou vaquer à une autre activité plus divertissante. Donner du temps aux autres ou préférer rester seul sur son smartphone. Tous ces choix du quotidien, des plus banals au plus graves, sont les lieux concrets du combat spirituel dans lequel nous sommes pris. Et pour notre liberté, nous devons choisir le bien au détriment du mal qui brille parfois de mille feux et qui procure un vilain plaisir. C’est en choisissant la vie au détriment de la mort, en choisissant le bien que nous devenons vraiment libres. Et non l’inverse.

Oui frères et sœurs, pendant tout ce temps de carême, nous vivrons 40 jours de retraite spirituelle et nous nous entraînerons à choisir la vie en toute chose et en toute circonstance, à honorer la vie que Dieu nous donne à tous : la mienne et aussi celle des autres. Cet entraînement au combat spirituel fait penser à cette image de Saint Paul qui compare notre vocation chrétienne à la vocation d’un athlète qui est bien obligé de se donner une discipline sévère en vue de gagner la course et de recevoir la couronne. Or la couronne qui attend nos âmes, la couronne qui nous attend est bien plus précieuse que celle que reçoit un athlète. Il est donc normal que Jésus lui-même nous propose de nous imposer une discipline humaine et spirituelle. Notre âme est promise à quelque chose qui mérite que nous puissions nous nous entraîner. Elle est promise à une vie éternelle dans le bonheur. (Il faut d’abord croire que nous ne sommes pas simplement une matière, un corps qui périra dans quelques années et qu’il n’y aura plus rien après, mais que nous avons une âme, et pour dire les choses de manière juste, je suis une âme qui subsistera au-delà de la mort biologique. C’est quelque chose qui est aujourd’hui attesté par les sciences (même si les philosophes grecs anciens qui réfléchissaient beaucoup l’avaient su et l’avaient dit). En étudiant des dizaines de milliers de récits d’expériences de mort imminente, on a pu établir qu’il y a une conscience même après la mort cérébrale.

Les deux parties de l’évangile de ce dimanche nous redisent les enjeux de notre entraînement au combat spirituel. Dans la première partie, saint Marc nous rappelle que Jésus a été conduit au désert où il a été tenté pendant 40 jours et il précise que c’était juste après son baptême. Cette précision nous dit que notre alliance avec Dieu à notre baptême nous oblige à entrer dans un combat pour le bien et il faut s’entraîner pour ce combat. Pour réussir un combat il faut s’entraîner. La première lecture qui évoque l’alliance avec Noé et l’arc en ciel qui est signe de cette alliance nous rappelle que c’est toute la création qui est concerné par l’appel au choix de la vie que notre carême nous rappelle. Notre salut n’est pas simplement spirituel, il a une dimension cosmique. La terre elle-même aspire à cette vie que Dieu promet et elle est aussi concernée. Plus que pour ceux qui ne sont pas chrétiens, notre devoir de la protéger est un présupposé et une conséquence de notre baptême. D’ailleurs, les signes par lesquels nous recevons les grâces qui nous sanctifient nous viennent de la terre et de la nature : l’eau pour baptiser, le pain et vin pour célébrer l’Eucharistie, l’huile pour fortifier les malades.

Dans la deuxième partie de l’Évangile, Jésus nous redit cette phrase que le prêtre nous a dite mercredi dernier quand nous recevions les cendres sur nos fronts en signe de pénitence : convertissez-vous et croyez à l’évangile. Se convertir c’est accueillir cet appel à aller au désert de son cœur et à faire pénitence : reconnaître ses fautes devant Dieu et devant les autres et demander pardon (Il y a un sacrement qui s’appelle le sacrement de pénitence qui existe toujours et qui met à l’épreuve notre capacité à poser un acte d’humilité). Prier, se priver de quelques plaisirs et faire aumône, c’est une manière de s’entraîner à choisir la vie. C’est une manière de préserver la jeunesse de l’âme en vue du rendez-vous éternel.

Judicaël Mitokpey
18 février 2024

Un cadeau à Dieu pour la saint Valentin – homélie du mercredi des Cendres – 14 février 2024

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Un cadeau à Dieu pour la saint Valentin

Aujourd’hui, c’est la fête de la saint Valentin : vous allez peut-être penser que je m’égare complètement, entraîné par le matraquage publicitaire lié à cette fête des amoureux. Il n’en est rien, puisque je pense que s’il y a un amoureux que je dois honorer en ce jour c’est Dieu lui-même, ce Dieu qui nous convoque tout spécialement à revenir à lui à travers ce temps exceptionnel qui nous est offert : le carême. Vous allez m’objecter encore une fois, qu’en fait de cadeau de la part de Dieu, il y a mieux, le carême étant associé à privations, jeûne, effort redoublé pour la prière, et partage ; l’évangile du jour présente ces trois efforts constitutifs de ces 40 jours qui nous séparent de Pâques. Or en lisant la lettre de notre Pape François, écrite en ouverture du carême, j’ai mieux compris que ce temps pouvait être un chemin vers la liberté.

Une liberté, dit-il, mise à mal par la désespérance que génèrent la situation mondiale, les crises sociales à répétition, les problèmes liés à l’écologie. Nous sommes alors en panne d’espérance, prisonniers de nos peurs, de nos regrets, de notre impuissance devant la marche chaotique du monde comme autrefois le peuple hébreu qui n’en pouvait plus de marcher dans le désert et qui en arrivait à regretter sa situation d’esclavage en Égypte. Dieu avait vu sa misère, entendu son cri et l’avait libéré en le faisant traverser le désert. Cette longue marche, de 40 ans que rappellent nos 40 jours de carême, a été un grand moment d’éducation du peuple par Dieu pour qu’il se sorte lui-même de sa situation d’esclave, et qu’il atteigne ainsi la vraie liberté. A nous d’entendre dans ce désert que nous traversons le cri des habitants de Gaza, d’Ukraine, de tant d’autres victimes de la guerre, de l’injustice, du rejet, de la faim, de l’exclusion sous le prétexte de la couleur de peau, de la religion, du milieu social ?

S’il est une action que nous indique François, apte à nous conduire vers une plus grande liberté, c’est de « s’arrêter en prière pour accueillir la Parole de Dieu, et s’arrêter comme le bon Samaritain en présence du frère blessé. L’amour de Dieu et du prochain est un unique amour. Ne pas avoir d’autres dieux, c’est s’arrêter en présence de Dieu, devant la chair de son prochain. C’est pourquoi la prière, l’aumône et le jeûne ne sont pas trois exercices indépendants, mais un seul mouvement d’ouverture, de libération. » Il suggère alors que « le Carême soit aussi un temps de décisions communautaires, de petits et de grands choix à contre-courant, capables de changer la vie quotidienne des personnes et la vie d’un quartier. J’invite chaque communauté chrétienne à faire cela : offrir à ses fidèles des moments pour repenser leur style de vie : se donner du temps pour vérifier leur présence dans le quartier et leur contribution à le rendre meilleur. » Dans notre paroisse, le groupe ‘écologie intégrale’ (avec le groupe CCFD-Terre Solidaire) est en train de préparer des initiatives aptes à entrer dans une démarche de sauvegarde de notre maison commune, qui nous seront présentées dès que possible. François termine par ces mots déjà adressés aux jeunes à Lisbonne (JMJ 2023) : « prenons le temps de penser que nous ne sommes pas dans une agonie, mais au contraire dans un enfantement… il faut du courage pour penser cela. »

En cette fête de la saint Valentin, offrons à notre amoureux, en échange de ce cadeau que sont ces 40 jours à venir, notre désir de grandir en liberté pour le bien de tous.

André Jobard
14 février 2024 Cendres

Pièces jointes – homélie du dimanche 4 février 2024

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Pièces jointes

Cette année nous lisons l’évangile selon saint Marc. Il est court et concret. Pour le lire une soirée suffit (comme un épisode de Columbo ou un match de foot). Marc raconte seulement ce qui lui a été transmis. Il n’en « rajoute » pas. Depuis 3 dimanches nous sommes toujours dans le chapitre 1.

En ce temps-là…

On est en Galilée, à Capharnaüm. Marc dit que Jésus proclame l’Évangile de Dieu. On traduit par « Bonne Nouvelle ». Mais de quoi s’agit-il ? Il dit que c’est un enseignement, nouveau, proclamé avec autorité, pas comme les scribes. Mais il ne dit rien de son contenu. Pourtant « Bonne » et « Nouvelle », c’est une excellente accroche commerciale qui donne envie de cliquer sur la pièce jointe. Sauf que… il n’y a pas de pièce jointe.

Marc entretient le suspense sur cette Bonne Nouvelle et sur la réponse à la question que tout le monde se pose, « Qui est Jésus ? », puisque celui-ci empêche les démons de le révéler. Pour le savoir il faudra patienter jusqu’au milieu du livre (la mi-temps du match). En réalité, l’auteur a vendu la mèche dès le premier verset de son livre, peut-être sous la pression de son éditeur. Souvenez-vous, Marc, chapitre 1, verset 1, commencement de l’Évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu !

Pour l’instant, Marc raconte soigneusement ce que les témoins des faits, André, Pierre, Jacques et Jean lui ont transmis :

– les déplacements de Jésus : Il sortit de la synagogue, il entra dans la maison de Simon, il sortit et se rendit dans un endroit désert, il parcourut la Galilée ;

– ses gestes : Il saisit par la main la belle-mère de Simon, il guérit beaucoup de gens, il expulsa beaucoup de démons, il priait ;

– l’ambiance autour de lui : On lui parla de la malade, on lui amenait tous ceux qui étaient malades ou possédés, la ville entière se pressait à la porte, sa renommée se répandit dans toute la région ;

– et une seule phrase « Allons ailleurs afin que là aussi je proclame l’Évangile« . Et toujours pas de pièce jointe !

Jésus est un guérisseur et un ennemi du mal. Il guérit les malades, il chasse les démons, on vient vers lui… Les disciples tout neufs, encore stressés d’avoir été soudainement arrachés à leurs filets de pêche, ont bien enregistré et transmis les déplacements, les gestes de Jésus et les réactions des gens. Mais son attitude les a tellement scotchés qu’ils ont oublié de nous dire ce qu’il disait dans les synagogues. Peut-être n’ont-ils pas bien écouté ? Ou bien ont-ils mélangé son premier enseignement avec ceux qui ont suivi ?

On peut les comprendre. Que racontons-nous à nos enfants de nos premiers cours à l’école ou au lycée, de notre premier stage professionnel, de notre première séance de catéchisme ? Nous racontons notre premier cartable, le look de la maîtresse, notre première blouse d’étudiant, les manies de nos profs, la bougie allumée par la catéchiste et les silhouettes collées sur le mur. Pourvu que nos enfants ne nous demandent pas le contenu de ces enseignements nouveaux ? Nous les avons largement oubliés. Heureusement qu’ils se sont répétés, complétés, clarifiés et que nous nous sommes accrochés.

Eux aussi, les premiers disciples se sont accrochés. En suivant Jésus, ils sont restés attentifs à ses gestes et à ses rencontres, et ils sont devenus plus appliqués pour écouter son message souvent illustré en paraboles, à le retenir, à l’incorporer dans l’orientation de leur vie et le transmettre à de nouveaux disciples.

Quand une personne qui n’a pas reçu la Foi ou que celle-ci a quittée vient pour la première fois à la messe dans cette église, elle ne parle pas en sortant des lectures, des prières ou des prédications. Elle dit plutôt qu’elle a apprécié le lieu, l’accueil, l’animation, l’entrain chantant de la communauté. Ces signes, ces gestes et cette ambiance lui disent que la Bonne Nouvelle rend les chrétiens heureux et qu’elle peut à son tour la découvrir en lisant le livre de Marc, lequel contient dès les chapitres suivants de nombreuses pièces jointes, belles et nouvelles.

Vincent Boogio
4 février 2024

Le règne de Dieu, il est là – homélie du samedi 20 janvier 2024

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Le règne de Dieu, il est là

« Encore 40 jours, le temps est limité, les temps sont accomplis, le règne de Dieu est tout proche ». Voilà bien des expressions qui nous font dire qu’il y a urgence, qu’il va se passer quelque chose, mais quoi au juste ? Certains gourous tout au long de l’histoire depuis Jésus Christ se sont arrêtés à la lettre de ces paroles, en prêchant qu’il fallait toutes affaires cessantes se mettre en prière et attendre dans la crainte le retour du Messie ; d’autres ont assimilé au règne de Dieu leur projet politique et ont cru avoir la bénédiction de Dieu en forçant les personnes, les peuples à adhérer à leur pouvoir. Est-ce cela que la parole de Dieu veut nous faire entendre aujourd’hui ? A la façon dont je pose la question vous comprenez qu’il n’en est rien.

Ce règne de Dieu, tout proche, qui devrait nous stimuler, souvent nous le réduisons à nos rêves, à nos propres projets. Nous rêvons en effet de la paix entre les nations en guerre, nous rêvons d’une France plus harmonieuse, nous rêvons d’un travail épanouissant pour nous-mêmes ou pour notre enfant, nous rêvons d’une guérison, d’une bonne entente familiale, d’une paroisse plus vivante, plus accueillante, plus priante. Nous rêvons d’être à l’abri de tout danger, et pourquoi pas d’être immortels. Tout en constatant, désabusés, que ce règne de Dieu il est encore loin. Or nous dit Jésus, il est tout proche, il est peut-être là où vous avez l’impression de peiner le plus, et de ne rien récolter.

Et c’est à ce moment que l’appel des premiers disciples est instructif. La formule, qui m’a longtemps séduit, « je ferai de vous des pêcheurs d’hommes » dit bien à ces hommes qui vivaient de la pêche, qui avaient le souci du quotidien, de la rentabilité de leur activité, que tout en continuant leur métier de pêcheur ils pourront vivre une autre dimension en mettant devant eux non plus leurs préoccupations, même légitimes, mais Jésus, le Christ. C’est vraiment un appel à se mettre, comme lui, au service de l’homme, au cœur-même des activités les plus ordinaires. On peut l’être tout en étant plombier, routier, professeur, cadre commercial ou administratif, chômeur, retraité, femme ou homme à la maison, malade étendu sur son lit de souffrance, jeune en études, prêtre. Ce qui compte désormais c’est de ne plus faire de son travail, de ses préoccupations, même les plus louables, un absolu. Certainement un appel qui sonne juste, puisque ces hommes aussitôt suivent Jésus.

Un appel que nous entendons encore ce soir : une chance, et non une source de culpabilisation. Que cela nous aide à mettre de l’ordre dans nos préoccupations. Cela en vaut la peine : alors pourquoi attendre plus longtemps ?

André Jobard
20 janvier 2024

Réception à la crèche – homélie du dimanche 7 janvier 2024 – Épiphanie

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Réception à la crèche

Aujourd’hui arrivent à la crèche, les derniers de la longue cohorte de tous les intéressés par le curieux spectacle d’un bébé né dans une étable ; ce sont ceux qu’on appelle les Mages. Il nous est raconté par Matthieu qu’ils ont apporté comme cadeaux de l’or, de l’encens et de la myrrhe, riches cadeaux révélateurs de leur condition sociale. Ce geste généreux de leur part a stimulé ma réflexion ; je me suis demandé en effet ce que, de notre côté, nous pourrions apporter à l’enfant Jésus.

Nos silhouettes accrochées aux murs de notre église pendant le temps de l’Avent ont voulu exprimer notre marche vers la crèche ; beaucoup ont été réalisées par les enfants, qui ont mis tout leur cœur à ce travail avec l’espoir bien compréhensible de la venue d’un père Noël très généreux. Des adultes ont aussi écrit leur attente d’une paix dans le monde, dans leur famille, attente d’une santé rétablie, attente d’une vie meilleure. C’est donc avec tout cela que nous sommes venus à la crèche, comme les bergers et leurs moutons. Cela forme un ensemble de présents, de cadeaux bien disparate, et peut-être pas le plus approprié pour un nouveau-né qui avait certainement plus besoin d’une brassière et de chaussons (je cite le chanteur Julos Beaucarne). Mais cela exprime tout à fait que pour Jésus, rien n’est rejeté, toute démarche est agréée, du moment qu’elle vient du fond du cœur. J’aime bien le chant de Didier Rimaud où il met en scène les mages parlant à Jésus « Que feras-tu de cet argent, de ces bijoux, de notre encens ? Nous les avions pris en pensant à nos manières… » Oui dans les réceptions mondaines certains invités offrent les chocolats de la boutique la mieux cotée de la ville, d’autres apportent une tablette, et d’autres rien.

Épiphanie, cela veut dire manifestation, révélation d’une réalité très importante. L’arrivée des mages, venus d’Orient, et donc étrangers à la nation et à la religion juives signe la destination universelle de ce qu’apporte la naissance de Jésus ; il n’est pas la propriété d’une religion, d’une secte, d’un pays, d’une race, du Vatican ; il est pour tous, à la fois individuellement, et collectivement ; on dit qu’il est venu pour le salut du monde (pas seulement de ma petite personne), et donc qu’il n’est pas indifférent à la bonne marche de notre monde, qu’il s’y engage totalement jusqu’à la mort, par le don de sa personne. Tout homme et toute femme de bonne volonté est appelée à bénéficier de ce salut ; la bénédiction de Dieu n’est pas réservée aux gens parfaits, bien dans les ‘clous’, elle peut être donnée à tous, dans la mesure où elle n’est pas revendiquée comme un dû, mais accueillie comme un don gratuit.

La joie ressentie par les mages à la vue de l’étoile après la rencontre décevante avec les responsables religieux de Jérusalem manifeste la puissance d’amour que secrète déjà la présence de cet enfant couché dans une mangeoire. C’est à cette joie que nous sommes conviés, dans la mesure où nous acceptons de venir à la crèche les mains peut-être vides mais le cœur rempli de la confiance que le salut vient encore par les voies les plus fragiles de notre humanité.

André Jobard
7 janvier 2024 – Épiphanie

Devenir témoins et artisans de paix – homélie du 1er janvier 2024

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Devenir témoins et artisans de paix avec le Prince de la Paix et par la Prière de la Reine de la paix.

Chers frères et sœurs, chers amis.

Les trois choses que nous portons dans l’eucharistie ce soir, les thèmes de la paix (c’est journée mondiale de la paix aujourd’hui), du nouvel an (c’est le premier jour de l’an aujourd’hui – j’espère que vous le savez) et de la maternité divine de la sainte vierge, – ces trois thèmes ne nous dispersent pas. Ils nous ramènent tous les trois au Christ et à sa mère. Le Christ est prince de la paix. C’est vers lui que montent la clameur de nos prières et notre grande aspiration à la paix dans le monde. Le premier jour de l’an nous porte à rendre grâce et à nous confier à Lui qui est maître du temps et de l’histoire et qui demeure toujours malgré le temps et les années qui passent.

Comme les bergers de l’évangile, en reconnaissant dans l’enfant couché dans la mangeoire, ce Jésus qui est prince de la paix, Fils de Dieu né dans la chair, nous reconnaissons aussi en même temps, que Marie sa mère est une femme exceptionnelle choisie pour avoir le privilège d’être la mère de Dieu. Dans la deuxième lecture, Saint Paul nous redit le rôle irremplaçable de cette femme de qui est né le Fils envoyé de Dieu à la plénitude des temps. Marie est aussi la figure de l’Église qui nous engendre à la vie divine par le baptême. Nous avons donc tous Marie pour mère à partir du moment où nous devenons par le baptême, des fils et filles bien aimées de Dieu, des frères et sœurs de Jésus.

L’Esprit Saint, nous dit saint Paul, crie en nos cœurs – Abba ! – c’est-à-dire Père. Et il atteste vraiment à nos esprits que nous sommes fils et filles de Dieu, héritiers du royaume de Dieu. Avec Jésus, le prince de la paix, nous devenons donc à notre tour des ambassadeurs et des artisans de paix. A ce stade, nous pouvons nous demander ce que nous pouvons faire à l’échelle de nos capacités si limitées, pour qu’advienne la paix.

Nous pouvons avant tout devenir nous-mêmes, des témoins et des artisans de paix et d’amour dans nos relations avec notre proche entourage. C’est là que commence la paix. Avant de vouloir la paix en Palestine ou ailleurs, commençons par faire la paix avec nos voisins. Au-delà, nous pouvons nous souvenir qu’au ciel, nous avons une mère qui est aussi reine de la paix. Et parce qu’elle est mère de Dieu, le bon Dieu lui accordera tout ce qu’elle lui demandera pour nous. Nous pouvons donc nous tourner vers elle et prier pour que viennent la justice et la paix partout dans le monde : en France, en Ukraine, en Russie, en Palestine, en Israël, dans tout le moyen orient, en Afrique et sur toute la terre. Amen.

Judicaël Mitokpey
31 décembre 2023 – Fête de la Sainte Famille

La foi comme « GPS » – homélie du dimanche 31 décembre 2023

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La foi comme « GPS »

Apprendre à aimer et à entrer en relation dans une famille et partir sans savoir où l’on va avec la foi comme « GPS »

Chers frères et sœurs, chers amis…

Nous avons eu raison d’acclamer l’évangile en chantant « Voici Noël Alléluia » parce que c’est encore Noël. On peut encore donner et recevoir des cadeaux. Le mystère de Noël est si grand qu’il faut bien huit jours pour le célébrer, de même qu’on le fait à Pâques. Huit jours pour contempler Dieu qui se dit et qui se donne dans l’humble, pauvre et fragile enfant de la crèche. Au fond, il ne faut pas seulement huit jours, mais tous les jours d’une vie pour contempler ce mystère. Le dimanche qui intervient dans l’octave de noël, nous célébrons la sainte famille de Jésus, Marie et Joseph. Cette fête nous rappelle que l’Emmanuel – Dieu avec nous – se manifeste dans une famille et que Dieu a eu besoin de Marie et de Joseph pour accomplir son projet. Marie et Joseph sont les modèles d’une disponibilité totale offerte à Dieu pour manifester sa présence dans leur vie et dans leur famille. Ils ont cru en Dieu comme Abraham dans les lectures de ce dimanche, mais aussi comme le vieux Syméon ou la prophétesse Anne dans l’évangile. Abraham partit sans savoir où il allait avec pour seule lumière la foi en Dieu et en sa promesse. Il n’est déjà pas facile de marcher résolument vers une destination que l’on sait d’avance. Il n’est pas facile de poursuivre et d’atteindre les objectifs et les résolutions que l’on prend au début d’une nouvelle année. Mais alors comment partir sans savoir où l’on va, avec pour seule lumière, avec pour seul « GPS », la foi et le désir d’obéir à Dieu. Comment le vieux Syméon dans l’Évangile peut-il reconnaître Jésus comme étant la manifestation du salut promis par Dieu, au milieu des dizaines d’enfants qui sont présentés au temple chaque jour, si ce n’est par cette seule lumière de la foi ? La foi qui met en route Abraham, la foi qui éclaire la vision du vieux Syméon, cette même foi qui conduit Marie et Joseph au temple est une aventure avec Dieu. Une aventure qui ne s’enracine pas dans une conviction intellectuelle ou abstraite mais dans une relation vivante et intime avec Dieu.

Or, la famille est le premier lieu où l’on apprend à entrer en relation. C’est en famille que l’on tisse les premières relations de la vie. La manifestation de l’Emmanuel dans la sainte famille de Nazareth nous redit avec puissance que toute famille est école de vie. La famille est une école où l’on apprend à vivre, à aimer, à donner, à partager, à croire et à faire confiance. Si l’on n’apprend pas à entrer en relation avec les autres, comment peut-on être en relation avec Dieu ? Et où apprend-on à entrer en relation et à faire confiance si ce n’est en famille ? Tous les enfants devraient avoir la chance de grandir dans une famille unie.

En contemplant la Sainte Famille aujourd’hui, nous pouvons demander à l’Emmanuel de visiter nos familles, afin qu’elles soient pour tous leurs membres, en particulier pour les plus jeunes, cette école où l’on apprend à aimer, à pardonner et à partir en aventure avec la lumière de la foi. Amen

Judicaël Mitokpey
31 décembre 2023 – Fête de la Sainte Famille

Le dernier évangile – homélie du 25 décembre 2023 – Jour de Noël

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Les lectures du jour

Le dernier évangile

Si vous étiez hier à la « messe de la nuit » et que vous êtes venus aujourd’hui à la « messe du jour », vos proches s’inquiètent peut-être de cet excès de piété. Alors proposez-leur de lire les deux passages d’évangile. Ils comprendront que l’inouï de la Nativité justifie votre présence aux deux messes.

Hier Matthieu nous a raconté la naissance de Jésus comme s’il parlait à des enfants avec de belles images : des parents, un nouveau-né, une mangeoire, des anges et des bergers. Aujourd’hui Jean rappelle à des chrétiens convaincus le sens profond de l’Incarnation : « Le Verbe s’est fait chair ».

Les plus anciens parmi nous, qui ont connu la messe en latin, avant 1965, se souviennent que ce texte de Jean était le « dernier évangile ». Après la bénédiction finale et l’envoi « Ite missa est », le prêtre se retournait comme s’il avait oublié quelque chose. Il récitait à voix basse ce texte de Jean, prologue de son évangile « In principio erat verbum… » pendant que le servant de messe s’impatientait car il avait faim puisqu’il était à jeun… Là vous sentez que c’est du vécu !

Que ce morceau d’évangile ait pu être lu pendant des siècles à chaque messe en plus de l’évangile du jour, cela dit assez combien il est fondamental, ce que ce jeune servant ne pouvait pas comprendre, même après l’avoir traduit en français.

Il aurait fallu lui expliquer que ce Verbe-là ne désigne pas une action, comme on l’apprend à l’école, mais qu’il a une majuscule parce que c’est la Parole de Dieu, et que la chair, c’est la vie des hommes.

Il aurait mieux compris si on lui avait dit simplement « La Parole, celle de Dieu, s’est faite Homme, ou encore plus simplement « Dieu s’est fait Homme, il a habité parmi nous ». Alors il aurait dit « Ben oui, je sais, c’est Jésus, dans la crèche ».

Nous avons appris à aimer cette Parole majuscule. Elle ne se réduit pas aux mots, aux phrases, aux paraboles de Jésus, mais elle comprend les gestes qu’il a posés, les signes qu’il a donnés, toute sa vie. On pourrait relire les évangiles en remplaçant partout « Jésus » par « la Parole de Dieu ». La Parole a grandi à Nazareth, la Parole a appelé des disciples à le suivre, la Parole a guéri les malades, la Parole a pardonné les pécheurs, la Parole a été acclamée par les foules, la Parole a chassé les vendeurs du Temple, la Parole a fait peur à certains, la Parole a été clouée sur une croix pour la faire taire. Mais elle est revenue à la vie.

Cette Parole vivante nous la cultivons pour qu’elle grandisse en nous, nous la soignons pour qu’elle ne soit pas maltraitée ou manipulée, nous la partageons avec d’autres pour ne pas la trahir, nous faisons savoir combien nous l’aimons pour que d’autres la découvrent, et nous continuons de la dévorer en particulier à la messe pour nous en imprégner, pour qu’elle devienne une part de nous, pour que ce Dieu qui a partagé notre humanité nous unisse à sa divinité.

En même temps, comme dirait l’autre, la Parole ne nous enferme pas. Elle excite notre discernement et nous pousse vers les autres, tous les autres.

Quant à ce morceau d’évangile, qui a conclu tant de messes, vous pouvez le déguster quand vous voulez. On le trouve facilement sur Internet en français ou en latin. Cliquez sur ce lien : « Jean chapitre 1, versets 1 et suivants. » Et vous pouvez poursuivre sur les autres chapitres. Ils racontent la vie parmi nous de ce Verbe qui s’est fait chair et qui nous est très cher.

Vincent Boggio
25 décembre 2023 – Noël

Un enfant nous est né ! Faisons-lui une place dans nos vies – homélie du 24 décembre 2023 – 20:30 – Nuit de Noël

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Les lectures du jour

Un enfant nous est né ! Faisons-lui une place dans nos vies

Chers frères et sœurs, chers amis,

En pensant que c’est Noël ce soir, mon esprit chante en moi cet hymne du Père Didier Rimaud que l’on trouve au bréviaire de liturgie des heures. Je voudrai partager avec vous quelques phrases de cette louange à la nuit de Noël :

Voici la nuit,
L’immense nuit des origines,
Et rien n’existe hormis l’Amour,
Hormis l’Amour qui se dessine :
En séparant le sable et l’eau,
Dieu préparait comme un berceau
La Terre où il viendrait au jour.

Voici la nuit,
L’heureuse nuit de Palestine,
Et rien n’existe hormis l’Enfant,
Hormis l’Enfant de vie divine :
En prenant chair de notre chair,
Dieu transformait tous nos déserts,
En Terre d’immortels printemps.

Oui frères et sœurs, en cette immense nuit, un enfant nous est né ! un Fils nous est donné. Depuis combien d’années fêtez-vous noël ? 50, 40, 70 ? 85 ? 90 ou encore plus ? Quelque soit la réponse que chacun peut trouver facilement, remarquez qu’on ne se lasse pas de cette fête de l’Emmanuel Dieu avec Nous. Elle peut prendre différentes couleurs selon les circonstances, belles, très belles ou moins belles. Mais on ne s’en lasse pas. Et le message de Noël est toujours nouveau : Emmanuel Dieu avec Nous. Lumière dans notre nuit. L’Amour qui se dessine, l’enfant de vie divine, c’est l’Emmanuel – Dieu avec nous pour transformer nos déserts en terre d’immortels printemps. La fraîcheur et la puissance de ce message traverse les siècles et même si à notre époque, la signification de Noël paraît éclipsée par les lumières étincelantes des centres commerciaux et la frénésie des achats de fin d’année, Noël c’est Noël, Dieu avec Nous. Joie pour nos cœurs. Horizons nouveaux pour notre espérance.

Quelle signification Noël prend pour chacun de nous au fil des années ? Au-delà de la joie de se retrouver en famille, quel lien tissons-nous avec l’enfant de la crèche à part bien sûr notre présence très estimable et très estimée à cette célébration ? Qu’avons-nous encore de commun avec l’enfant humble et pauvre couché dans la mangeoire de Bethléem ?

Il me semble qu’en contemplant les nombreuses crèches où l’on peut voir couché le petit enfant de Bethléem, nous pouvons nous laisser toucher par sa pauvreté et sa simplicité. L’Évangile nous conduit à cette étable simple où la lumière divine brille au milieu de la modestie. De même, faut-il que dans nos vies souvent tumultueuses et parfois éblouies par des lumières éphémères, nous fassions une crèche où l’Emmanuel peut naître chaque jour (et non pas une fois par an).

Frères et sœurs, chers amis, alors même que le plus grand cadeau qui puisse exister nous est donné dans cet humble et petit enfant de la crèche, alors même que la générosité de Dieu se manifestait par ce don suprême à notre humanité, s’est joué un drame qui est encore aujourd’hui, d’une actualité frappante. « Il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune ». Oui aujourd’hui encore, il n’y a pas de place pour Dieu dans nos salles communes. Pas de place pour lui dans notre monde autosuffisant et matérialiste. Où trouvera-t-on ces crèches spirituelles pour accueillir l’enfant de vie divine ? Trouvera-t-on dans ton cœur l’humble étable pour accueillir le prince de paix ?

Puissions-nous faire une place à Dieu dans nos cœurs et dans nos vies, et que Noël apporte à chacun une lumière et une joie toute spirituelle qui transforment les ténèbres et les tristesses de nos sombres nuits en immortels printemps de lumière et de grâce. Amen

Judicaël Mitokpey
24 décembre 2023 Nuit de Noël

Rendez-vous manqué – homélie du 24 décembre 2023 – 18:30 – Nuit de Noël

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Rendez-vous manqué

Ce matin, j’ai ressenti l’urgence d’aller consulter un psychanalyste, à la suite des rêves que je vis depuis un certain temps ; déjà hier je vous racontais celui de ma dernière nuit, et voilà que cette nuit encore, je fus transporté dans un monde imaginaire, où, tenez-vous bien, j’étais exclu de la crèche : il n’y avait plus de place, elle était envahie de moutons avec leurs bergers, il y avait aussi des bovins, et puis toute une troupe céleste qui chantait à tue-tête des cantiques. Pour justifier mon exclusion, on m’a seulement dit : ici il n’y a que les pauvres qui ont droit d’entrer.

Devinez mon état d’âme à mon réveil ! Moi qui me préparais à écrire de belles paroles sur la crèche, sur l’amour qui partant de la crèche devait rayonner sur le monde entier, me voilà anéanti par la vision de cette scène apocalyptique. J’étais donc trop riche, le traitement que me donne mon évêque était trop gros, j’habitais dans un palais trop luxueux ! Et puis, le service des pauvres était le dernier de mes soucis! De quoi me demander où pouvait se nicher ma prétendue richesse qui m’exclut de la crèche. Voilà bien des questions qui me tourmentaient, au point d’envisager l’aide d’un psychanalyste.

Mais avant de prendre rendez-vous, j’ai ouvert ma bible. En lisant ce que dit le prophète Isaïe, son annonce de l’arrivée d’une lumière sur les habitants de l’ombre, je me suis dit : « encore un qui n’a pas ouvert sa télé ces jours-ci, qui ne sait pas que la guerre tue des civils innocents à Gaza, en Israël, en Ukraine, que le pays des droits de l’homme, notre pays, est tenté de mettre sous le tapis la dignité de certaines personnes, etc… Isaïe n’est plus dans le coup, ses propos sont de la pure utopie. » Il faut bien reconnaître que la paix est encore loin, et que ce n’est pas la peine de se bercer d’illusions sous prétexte que nous sommes à Noël. Je me demandais comment on pouvait croire qu’un bébé né il y a 2000 ans dans une mangeoire à animaux au cours de l’exode de ses parents allait changer le monde. Je rejoignais en cela la cohorte de tous mes contemporains qui ont des idées sur tout, des solutions magiques et radicales et qui pensent que seule une véritable révolution politique peut remettre de l’ordre dans les rapports internationaux. J’étais riche de toutes ces certitudes, quand je me suis rendu compte qu’avec ces idées en tête, effectivement je n’avais pas ma place dans la crèche, que ma démarche était inutile.

La crèche en effet est le rendez-vous de tous ceux qui n’ont rien à présenter à Dieu, ceux dont on n’attend rien, comme les bergers, qui se savent bien dépassés par les événements. En venant à la crèche les mains vides, ils gardent intacte leur confiance en Dieu qui manifeste sa fidélité en nous donnant son fils, Jésus. Nous, ce soir, après avoir entrepris notre marche depuis plusieurs semaines comme en témoignent toutes ces silhouettes accrochées sur les murs de l’église, nous venons à la crèche, peut-être le cœur plein de nos soucis, de nos peines. Nous allons dire à ce Jésus, si vulnérable, si proche de nous, nos propres difficultés, et bien sûr nos espérances et nos joies du moment. Et là nous ne risquons pas d’être repoussés.

Et personnellement j’espère que ma prochaine nuit ne sera pas troublée par de mauvais cauchemars et que je n’aurai pas besoin de prendre rendez-vous chez le psychanalyste.

André Jobard
23 décembre 2023

Comme Marie, dire oui – homélie du samedi 23 décembre 2023 – 4ème dimanche de l’Avent

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Comme Marie, dire oui

J’ai rêvé cette nuit que, pris d’un grand désir d’honorer notre Dieu, j’avais décidé d’agrandir notre église de la Visitation, en doublant sa surface, en érigeant un vrai clocher avec un important carillon de 24 cloches  et en installant un orgue à tuyaux de 15 jeux; en effet le rayonnement de notre paroisse était tel qu’on ne pouvait absolument plus accueillir toutes les nouvelles recrues. Quand je me suis réveillé ce matin, j’ai pris la mesure de notre communauté, et j’ai lu le texte d’Isaïe, l’histoire de David qui avait de grandes ambitions pour son Dieu, et peut-être aussi pour sa propre gloire ! « Le Seigneur t’annonce qu’il te fera lui-même une maison. » Voilà David ramené à cette prise de conscience : c’est le Seigneur qui construit, ce n’est pas par ses propres mérites que va perdurer sa royauté.

Et dans la foulée, j’ai lu aussi le texte bien connu de l’Annonciation, où Marie, après avoir appris qu’elle allait enfanter, a cette parole extraordinaire : « comment cela se fera-t-il ? » et non pas « qu’est-ce que je dois faire ? ». C’est comme si elle renonçait à se mettre en avant, en se demandant comment l’action de Dieu va- pouvoir se réaliser au cœur-même de ce qu’elle vit et qui semble de prime abord opposé au projet de Dieu ? Il s’agit donc pour Marie d’une mise à disposition de Dieu de toute sa personne, de ses propres projets, de ceux qu’elle avait bâtis avec son fiancé, Joseph. Tout cela devient second, seule compte la volonté de Dieu.

Les 2 figures de David et de Marie peuvent nous parler, à nous qui sommes toujours tentés de mettre en avant nos désirs de bien faire, de faire pour, de donner, d’agir pour les pauvres, de nous mobiliser. Comme eux, laissons nous travailler par l’Esprit Saint, pour accueillir le projet de Dieu sur nos vies, dans notre histoire, même la plus troublée. Chacun de nous est peut-être en ce moment bousculé dans ses projets par suite d’une maladie, d’un échec professionnel, d’un désaccord familial ou amical, d’un deuil. La situation internationale met à mal nos désirs de paix, trouble notre tranquillité. Face à cela allons-nous dire oui, comme Marie : « voici la servante du Seigneur, que tout m’advienne selon ta parole ! » ? Quel est notre oui, ce soir ?

Finalement mon rêve d’une grande église, petit à petit va se transformer. En effet par mon consentement à ce qu’est réellement notre paroisse, je sais que le Seigneur peut y accomplir de grandes choses, pas forcément visibles au grand jour mais réelles au fond des cœurs. Comme Marie, chacun de nous par son oui, peut enfanter Jésus, du moment que nous laissons l’Esprit Saint nous couvrir de son ombre et de sa tendresse.

André Jobard 23
décembre 2023 (4ème dimanche de l’Avent)

Soyez toujours dans la joie – homélie du dimanche 17 décembre 2023

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Les lectures du jour

Chers frères et sœurs, chers amis.

La liturgie de ce dimanche nous invite à la joie. Une attente peut être stressante ou même angoissante. Parce qu’on ne sait pas comment les choses vont se passer. Ou parce qu’on ne sait pas si Celui que l’on attend viendra vraiment. Mais il est une forme d’attente qui remplit aussi de joie. C’est l’attente des parents lorsque leurs fils ou leur fille qui étudie dans une autre ville ou dans un autre pays annonce qu’il revient. C’est l’attente de la femme dont le mari parti en voyage annonce son retour. Pour être juste et cohérent, il faut reconnaître donc que c’est l’annonce et la certitude que la personne vient qui remplit de joie. Si le fils parti à l’étranger ne donne pas de nouvelle, on est plutôt triste. S’il n’annonce pas qu’il revient, on pense à lui, parfois avec une petite tristesse dans le cœur, et on espère vraiment qu’il reviendra très vite. Une fois qu’il a annoncé qu’il va venir, on se réjouit à l’idée de le voir bientôt.

Frères et sœurs, notre joie ce dimanche est de cette nature. Nous pouvons être sûr que Jésus vient vraiment à Noël. Il est déjà venu, il vient encore et il viendra à la fin des temps. Et en voyant sa lumière poindre à l’horizon, nous pouvons laisser libre court à notre enthousiasme et à notre joie. Saint Paul nous invite dans la deuxième lecture à cet exercice extraordinaire. Ne pensez à rien d’autre qu’au Seigneur qui vient et se laisser remplir de sa joie. Ou plutôt, au cœur de toutes les préoccupations et de toutes les pensées auxquelles nous ne pouvons nous dérober – la famille, le travail, les engagements ici et là – nous pouvons introduire la joie du Seigneur. Nous pouvons vraiment laisser la joie de son avènement toucher toutes les choses qui nous occupent et nous préoccupent. Nous pouvons laisser sa lumière irradier toutes ces réalités de manière que nous pensions désormais à toutes ces choses avec des cœurs remplis de joie et d’espérance. Et non avec des cœurs tristes, assombris et désespérés. Soyez toujours dans la joie dit Saint Paul. Le Seigneur vient bientôt. Il illuminera toute chose et sa joie transformera toute tristesse. Saint Paul continue en disant : priez sans relâche. Rendez grâce en toute circonstance. Oui vraiment en toute circonstance. Il ne dit pas rendez grâce malgré les circonstances. Mais il dit : rendez grâce en toute circonstance. Discernez la valeur de toute chose : ce qui est bien gardez-le, et éloignez-vous de toute espèce de mal.

Cette dernière phrase indique bien que le mal ne fait pas bon ménage avec la joie. Il convient donc d’assainir les cœurs pour qu’ils soient disposés à rayonner de la joie de cette attente du Seigneur. C’est peut-être pour cela que l’Évangile nous fait entendre la voix de celui qui crie dans le désert et qui nous invite à redresser les chemins du Seigneur et à rendre droit ses sentiers. C’est cette voix qui rend témoignage à la lumière. Veux-tu rendre témoignage à la lumière qui se lève à l’horizon ? Écoute cette voix qui t’invite à l’humilité, à la sobriété, à la simplicité, et enfin à la joie. Dans l’aujourd’hui de notre attente, frères et sœurs, ne nous laissons pas submerger par les soucis de monde présent. Portons–les dans la foi, dans l’espérance et dans la joie, à la rencontre de Celui qui vient. Amen

Judicaël Mitokpey
17 décembre 2023 – 3ème dimanche de l’Avent

Veillez, c’est être et agir en vue du Jour du Seigneur – homélie du samedi 2 décembre 2023

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Veillez, c’est « être » et « agir » en vue du Jour du Seigneur

Chers amis chers frères et sœurs,

A l’aurore de ce temps de l’avent et de cette nouvelle année liturgique, on peut se souhaiter une joyeuse marche vers Noël et une sanctifiante année liturgique. L’avent marque notre préparation aussi bien au mystère de Noël qu’au dernier avènement du Seigneur. Il prépare vraiment nos cœurs à vivre une nouvelle année liturgique. Le calendrier liturgique est rythmé par la célébration des mystères de notre salut. En nous faisant revivre les moments forts de cette histoire du salut (Noël et Pâques en sont les deux sommets), il nous permet d’écrire notre propre histoire et les cycles de notre vie dans cette histoire du salut.

Ce petit topos sur le temps de l’avent et sa signification spirituelle n’est pas sans lien avec les textes de la liturgie de ce 1er dimanche de l’avent. L’évangile nous invite à veiller. Veiller, c’est être dans l’attente, c’est vivre d’espérance. Ce n’est certainement pas attendre pour attendre, ou encore attendre comme on attend un train. Mais c’est « être » et « agir » en vue de quelque chose. Mieux, en vue de quelqu’un. Cette personne, nous dit l’évangile, viendra peut-être à l’improviste. Mais sa venue ne doit pas nous faire peur. Nous avons même tout intérêt à ce qu’il vienne. Au milieu de notre monde en proie à la violence, aux conflits, à la pauvreté de tous ceux qui subisse l’injustice due à la confiscation des biens de la terre par quelques-uns ; au milieu de ce monde en perte de vitesse aussi bien en ce qui concerne ses prouesses destructrices pour la terre et pour l’environnement et le déclin vertigineux des valeurs morales qui fondent notre commune humanité ; au milieu de ce mode plus proche que jamais de sa fin, oui il va de notre intérêt qu’il vienne. Avec le prophète Isaïe dans la première lecture, nous pouvons même crier : « Ah si tu déchirais les cieux et si tu descendais ! » les montagnes d’injustices et de haines, les montagnes d’armement et d’engins de guerre seraient ébranlés devant ta face.

Notre attente, en ce temps de l’avent, peut être communion aux cris de tous ceux qui sont victimes des guerres, des injustices, des famines et des catastrophes. C’est dans cette communion intime avec notre monde et avec celui qui vient, que nous ferons entrer l’histoire du salut dans l’histoire de notre temps. L’appel de Jésus à veiller est appel à « être » et à « agir » en vue du jour qui vient ; en vue de ce temps où Dieu établira son règne. Viens Seigneur Jésus, vienne ton règne, vienne ton salut.

Judicaël Mitokpey
2 décembre 2023

Quel roi ? – homélie du dimanche 26 novembre 2023

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Quel roi ?

Avez-vous remarqué le contraste entre ce prétendu roi, qui avoue qu’il a eu faim, soif, étranger, malade, prisonnier ? Curieux pour un roi d’être obligé de quémander un peu de nourriture ou simplement une visite parce qu’il est malade ou pire encore enchaîné comme un mal-propre. Drôle de roi, très loin de nos schémas, de nos représentations. Voilà comment se présente Jésus, affublé de ce titre que nous répugnons, en bons républicains que nous sommes.

Il a beau être réduit à la figure d’un pauvre, d’un sans-domicile, il n’en est pas moins un juge, capable de la plus grande charité et en même temps de la plus grande sévérité : encore une image qui nous heurte, cette punition, ce châtiment éternel, si nous n’avons pas donné la piécette au mendiant de nos villes. Et si c’était une façon pour Jésus de prendre au sérieux notre vie : on ne fait pas n’importe quoi de cette existence qui nous a été donnée. Jésus respecte notre liberté, notre responsabilité ; nous pouvons choisir : soit nous enfermer sur nos acquis, nos richesses, avec au cœur le sentiment d’une insatisfaction, d’un remords, soit au contraire oser la rencontre, partager avec celui qui a faim de pain et surtout d’amitié, d’écoute, et là ressentir la paix, une vraie joie. Arrivera le moment où il sera trop tard ; c’est notre éternité qui se joue là.

Cela exige de notre part de prendre le temps de regarder notre vie, de discerner ce qui se joue dans les choix que nous faisons, de peser avec d’autres les enjeux de telle ou telle initiative, déclaration, posture. C’est ce que proposent les équipes de révision de vie, comme le CMR par exemple. Tout cela pour orienter notre vie pour plus de fraternité, de justice, et donc plus de joie.

Une lecture littérale pourrait nous amener à penser que la charité se limite à donner une piécette au SDF du coin, ou à une visite d’hôpital, au détriment d’une réflexion plus large sur ce que doit être une vie de disciple de Jésus. Quand le CMR et bien d’autres organismes mettent en avant les problèmes planétaires d’alimentation, il s’agit de repérer comment par une gestion défectueuse, les richesses de notre terre peuvent être accaparées par une minorité, les plus riches, au détriment de populations plus vulnérables. Dans une économie mondialisée qui est la nôtre, opter pour une alimentation saine, c’est déjà permettre à un petit paysan de l’autre bout de la planète de se nourrir, lui et sa famille correctement ; c’est selon Jésus, lui donner le pain dont il a besoin.

Nous le voyons, ce roi, pauvre, démuni, livré à la compassion des autres, n’est autre que ce Jésus, qui humilié sur la croix, donnera son dernier cri ‘j’ai soif !’ Nous sommes loin des palais royaux de nos monarchies, loin de la sphère des gens influents du monde. Nous sommes au cœur de l’évangile, à savoir au cœur de cette bonne nouvelle : ‘il y a beaucoup de joie à donner , la vie éternelle est de se donner’.

André Jobard
26 novembre 2023

Qui a un seul talent ? – homélie du dimanche 19 novembre 2023 – Journée mondiale des pauvres

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Qui a un seul talent ?

Quel est le malheureux qui n’a qu’un seul talent ? C’est la question que nous pouvons nous poser à la suite de cet évangile, tant n’est pas enviable son sort. Les bénévoles du Secours Catholique pourraient certainement vous dire que les accueillis dans leurs permanences semblent bien correspondre à ce profil, ces personnes qui souvent n’ont pas eu de chance au départ de leur existence et souvent ressentent durement cette situation par rapport à tous ceux qui, comme nous, je suppose, ont reçu beaucoup par leur culture, leur milieu social, leur éducation, ce qui nous permet de mieux faire face aux aléas de l’existence.

En posant la question de savoir quel est celui qui n’a qu’un seul talent, je pense à moi, à vous peut-être(!), donc à nous tous, qui trop souvent jetons un regard d’envie sur l’autre qui a tellement plus de talents que nous, plus de fortune, plus de relations, plus de chance. La tentation du repli sur soi est alors très forte, avec en prime une certaine révolte, un sentiment d’injustice contre le créateur qui ne nous a pas dotés des moyens qui nous auraient permis d’avoir une meilleure situation, une plus grande considération de la part des autres. Ce qui engendre repli sur soi, jugement abrupt, et enfouissement de nos propres talents, de nos aptitudes, au détriment de la collectivité qui en aurait tant besoin. Avec en prime ces réactions du style : « surtout je ne mêle pas de tel problème, pas envie d’avoir des histoires, les uns tels, bien plus compétents que moi vont bien s’en occuper, mieux vaut me taire plutôt que de me risquer à être soumis à la critique ! » C’est ainsi que l’emporte seulement le souci d’être en règle, de permettre à Dieu de récupérer son bien, puisque que nous avons sous-estimé nos capacités, sans chercher ce qui pouvait jaillir de neuf de notre unique talent. Je pense qu’une telle attitude nous guette tous, et quand Jésus, à la fin de la parabole menace des foudres éternelles le détenteur d’un seul talent, il ne fait que décrire l’insatisfaction et la tristesse que nous pouvons ressentir quand nous n’avons pas fait fructifier notre talent.

En revanche nous pouvons être témoins de la formidable énergie que déploient ceux que l’on pense n’avoir qu’un seul talent, notamment les pauvres qui frappent aux portes du Secours Catholique ou de tant d’autres organismes de solidarité. Ils n’hésitent pas à faire fructifier le peu qu’ils ont : l’envie de réussir, de donner un avenir à leurs enfants, de s’intégrer dans notre pays après avoir été chassés du leur, par la guerre ou la récession économique. Ils nous réveillent de nos torpeurs, ils nous obligent à regarder autrement la réalité du monde, avec ses crises, ses tentatives de réconciliation, ses difficultés à protéger la planète. Ils nous invitent à un autre regard sur leur existence. Et j’entends bien Jésus, comme ce maître dans la parabole, leur dire : ‘très bien , serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle en peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton Seigneur.’

En cette journée mondiale des pauvres, où notre pape reprend la parole de Tobie dans la bible « Ne détourne ton visage d’aucun pauvre », en cette journée nationale du Secours Catholique, faisons fructifier nos talents, même si devant l’immensité de la pauvreté et des défis qu’elle appelle, nous avons le sentiment de ne pas en avoir beaucoup. Le Seigneur parti en voyage nous confie cette formidable tâche : construire un monde juste et fraternel ; ne nous dérobons pas à cette responsabilité ; les pauvres, ce dont ils ont le plus besoin, c’est de notre humanité, de notre cœur ouvert à l’amour, peu importe que nous ayons cinq, deux ou un seul talent.

André Jobard
19 novembre 2023

Le royaume des cieux ! Un scénario à jouer dans nos vies ! – homélie du dimanche 12 novembre 2023

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Le royaume des cieux ! un scénario à jouer dans nos vies !

J’ai imaginé qu’avec vous les enfants du caté, on pourrait jouer un sketch avec le scénario de l’évangile qui vient d’être proclamé. Quand on lit bien ce texte, on a l’impression que c’est un scénario de pièce théâtrale que Jésus propose. Alors, pour jouer ce sketch j’aurai besoin de 10 filles et d’un seul garçon qui s’appellera l’époux. Les 10 jeunes filles sont invitées à une fête de noce qui commence tard la nuit. Vous avez certainement remarqué qu’on nous parle dans ce scénario de l’époux, et jamais de l’épouse. Ce que dit explicitement le texte, c’est que les jeunes filles sont des invitées ; Elles ne sont pas les fiancées ; heureusement d’ailleurs, car ce serait surprenant que le seul garçon, l’époux, ait à se marier avec les dix jeunes filles en même temps. En tout cas, pour nous aujourd’hui ce serait bien bizarre. Oui en effet, il faut reconnaître que les paraboles de Jésus mettent en relief des situations « bizarres » et disproportionnées par rapport à la réalité. Il me semble que c’est parce que les choses que Jésus désire montrer en racontant ces paraboles sont bien au-delà de notre logique humaine. Revenons à notre scénario. Parmi les dix filles, il en faut cinq qui soient sages et prévoyantes, et cinq autres qui soient insouciantes. Je ne sais pas s’il y a parmi vous des filles qui ont envie de jouer le rôle des insouciantes. En règle générale, personne ne veut se définir comme étant insouciante ou inconsciente. Vous les enfants, vous savez que dire de quelqu’un qu’il est inconscient, c’est un gros mot et qu’on ne doit jamais dire ça. En tout cas, voilà un scénario facile à jouer, inventé par Jésus pour illustrer ce qu’est le royaume des cieux. Ce royaume c’est ces 10 jeunes filles invitées à des noces.

La première chose à retenir dans ce scénario, c’est que le royaume des cieux est une invitation. Invitation faite à tout le monde sans exception. Invitation à une fête. Et quelle est cette fête ? – Des noces, c’est-à-dire un mariage. Il y a quelqu’un qui se marie. A chaque messe, le prêtre dit cette parole : « heureux les invités au repas des noces de l’Agneau ». A chaque messe il y a donc cette fête à laquelle nous sommes invités. Mais dans le scénario de l’Évangile, cette fête de mariage n’a pas vite commencé. Et les invités se sont endormis à force d’attendre l’arrivée de l’époux. La deuxième chose à retenir c’est donc que le royaume est une attente. Attente de l’époux pour que la fête soit lancée. L’époux c’est Jésus, et Jésus est Dieu. Le royaume est attente de Dieu. Attendre Dieu au-delà des moments d’assoupissement.

Une fois que l’Époux est là, il faut aller à sa rencontre. Le royaume est donc aussi rencontre avec Jésus. Et pour que cette rencontre se passe dans de bonnes conditions, les invitées de l’évangile ont pensé à prendre des lampes qui éclaireraient leur chemin et leur permettraient de reconnaître l’époux. Pour qu’une lampe puisse briller, il faut y mettre de l’huile. La fête de la rencontre avec l’époux a lieu quand on s’est préparé à le rencontrer, en ayant sa lampe allumée, avec l’huile de la charité pour maintenir allumée cette lampe qui éclaire et qui permet de le reconnaître. Autrement dit, chers amis, lorsque vous êtes bienveillants avec une personne, lorsque vous aidez un copain qui n’a pas compris le devoir donné par la maîtresse ou par le prof, lorsque vous partagez votre sandwich avec cet autre copain qui n’a rien à manger, vous mettez de l’huile de votre gentillesse et de votre charité dans vos lampes. Et cela vous aidera et reconnaître Jésus, l’Époux qui vous invite à la fête de ses noces avec votre âme. Nos âmes sont comme ces dix jeunes filles invitées aux noces.

Enfin, le royaume est reconnaissance des invités par l’Époux. Il y aura un temps où l’Époux reconnaîtra ses invités en ceux qui ont de l’huile de la charité dans leur lampe et qui sont allés à sa rencontre malgré la tentation de l’assoupissement due à l’attente.

Et maintenant, nous pouvons demander à Jésus de nous aider à jouer ce scénario dans nos propres vies, de manière à être vraiment de la fête en découvrant pas à pas sa présence et son royaume à travers l’Invitation qu’il nous lance, – l’Attente dans la veille – L’huile de la charité qui nous est nécessaire pour garder nos lampes allumées et la Rencontre joyeuse et festive avec Lui.

Judicaël Mitokpey
12 novembre 2023

Heureux, même en novembre – homélie du samedi 11 novembre 2023 – Messe pour la paix

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Heureux, même en novembre

« Heureux ! » Pensez-vous vraiment que nous pouvons être heureux au mois de novembre, mois des défunts, mois du souvenir de la grande catastrophe humanitaire de la guerre 14-18, mois où les jours baissent de façon vertigineuse, quand la météo se revêt d’une grande tristesse, et en ce mois de novembre 2023, où notre humanité est plongée dans des violences sur nombre de ses territoires ? Et pourtant des chrétiens, des gens illuminés, diront certains, osent proclamer cette invitation au bonheur, avec ce texte bien connu, des béatitudes. Comment comprendre ce discours paradoxal au cœur de notre célébration où nous voulons prier pour la paix ?

Avant d’être un enseignement moral, comme parfois il a pu être interprété, ce discours dans la bouche de Jésus procède d’un regard qu’il pose sur ces foules qui le suivent depuis un certain temps : « voyant les foules, Jésus gravit la montagne ». Ces foules, ce sont tous ces gens malades, découragés, assoiffés de paix, de justice, des affligés de toutes sortes, des exclus ; ils ont entendu dire qu’un certain Jésus, de Nazareth, était apparu dans leurs contrées, qu’il avait des dons prodigieux pour soulager toutes ces souffrances, qu’il avait une parole puissante, qui ne laissait pas indifférent. Oui, Jésus est certainement saisi de compassion devant cette réalité, qui pour lui ne doit pas être une fatalité. C’est pourquoi il lâche ce mot ‘heureux’, que certains exégètes ont traduit par ‘debout, en marche’, laissant entendre que Jésus veut casser une spirale de la désespérance, en invitant à regarder autrement ce qui se passe dans la vie. Il sait qu’au cœur des drames les plus atroces, des paroles, des gestes, des regards peuvent soulever l’espérance, et une joie, très loin de nos canons définissant le bonheur. Comment ne pas éprouver par exemple une vraie émotion, source d’une joie profonde quand un pardon a pu être vécu au sein d’une famille, ou après un violent désaccord ou même un acte criminel ? C’est à tout cela que pense Jésus quand il ose proclamer ‘heureux les miséricordieux’, c’est à vivre cela qu’il nous invite.

Et en ce jour de prière pour toutes les victimes passées et présentes des guerres, des conflits de toutes sortes, laissons-nous bousculer par cet appel des béatitudes. Sachons être des messagers de paix, à commencer dans nos pensées, dans nos paroles. N’abandonnons pas le combat pour la justice, pour la vérité, pour le pardon, pour des rapports humains emplis de douceur. Laissons-nous ébranler par les larmes de ceux qui souffrent, car les larmes partagées génèrent la paix, la vraie joie.

Que notre assemblée de ce matin nous transforme de l’intérieur ; reconnaissons notre pauvreté, notre impuissance devant la complexité des défis à relever pour une société plus fraternelle. C’est par là que l’invitation au bonheur proposée par Jésus nous rejoindra et nous apportera la véritable joie.

André Jobard
11 novembre 2023 – Messe pour la paix et les victimes de guerre

Une vie unifiée – homélie du dimanche 5 novembre 2023

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Une vie unifiée

« Ils disent et ne font pas », voilà ce que reproche Jésus aux scribes, et que déplorait déjà le prophète Malachie. Certainement un reproche qui met le doigt sur l’enjeu d’une conduite cohérente avec nos paroles. En effet l’enjeu, il est là : sans cesse témoigner de l’amour inconditionnel de Dieu, ce Dieu qui a fait alliance avec notre humanité. C’est cela que Jésus veut rappeler : non pas une dévotion de façade, mais un comportement sincère, inspiré par le seul désir d’accomplir sa volonté en vivant la fraternité, ou selon son expression, de faire advenir son royaume de paix et de justice.

« Ils disent et ne font pas ». En entendant ce reproche, spontanément nous pensons aux autres avant de penser à nous-mêmes ; oui nous visons tous ceux, hommes et femmes politiques, responsables religieux qui sont loin de vivre ce qu’ils préconisent. On sait ce qu’il advient très souvent des promesses électorales ; on sait aussi, hélas, comment des responsables religieux, au discours moral très ferme ont pu commettre des crimes. Mais nous-mêmes, où en sommes-nous ? Nous aspirons à la paix, peut-être parce que nous craignons que les tensions actuelles au Proche Orient, en Ukraine notamment ne se propagent sur notre pays. Peut-être aussi par compassion pour toutes ces victimes innocentes dont les médias nous montrent en boucle leur détresse. Il est donc bon que nous souhaitions la paix. Mais que faisons-nous pour qu’advienne cette paix ? Sera-t-elle possible tant que nous-mêmes entretenons et répercutons des pensées négatives sur telle ou telle personne, sur telle ou telle religion ou nation, sous prétexte de différence de conceptions politiques, religieuses  ? Le désir de vengeance, qui peut se comprendre après des horreurs, s’il s’installe durablement, va-t-il contribuer à l’émergence d’un climat de paix ? Sommes-nous prêts à un changement radical de nos manières de penser et même d’organiser notre vie? Si nous nous contentons de suivre telle ou telle idéologie à la mode, si nous avons pour seul objectif notre confort individuel ou la tranquillité de notre quartier ou la prospérité de notre pays, la paix restera bien loin. Saisissons-nous tous les leviers disponibles pour alerter nos dirigeants afin qu’ils œuvrent vraiment pour la paix ?

Et comme chrétiens, la prière est nécessaire, je ne le nie pas, et nous le ferons encore dans cette messe en pensant à ces innocents écrasés par la guerre. Mais ne faut-il pas aussi sortir d’une spiritualité trop désincarnée si elle ne nous met pas en route pour travailler à la paix, peut-être en participant aux efforts de si nombreux mouvements et organisations qui œuvrent à la construction de la paix ? Comment allons-nous, dans notre paroisse approfondir cette notion de paix, notamment en cherchant la rencontre avec ceux que l’on connaît moins bien ? (de là notre souci de favoriser la réunion de tous les groupes et services recensés). Avons-nous le souci de bâtir des ponts avec la communauté musulmane qui vit sur nos quartiers ? Toutes ces démarches manifesteront un message de paix, plus que de longs discours. On peut nous qualifier de doux rêveurs, d’utopistes, c’est peut-être cela que Jésus entend par être abaissé. Lui-même abaissé au rang des criminels, humilié sur une croix nous relèvera.

Saint Charles Borromée dont c’était la fête hier écrivait aux prêtres de son diocèse : « soucie-toi de prêcher par ta vie et tes mœurs ; évite qu’en te voyant dire une chose et en faire une autre, les gens ne se moquent de tes paroles en hochant la tête » J’espère, chers paroissiens, ne voir personne d’entre vous hocher la tête après cette homélie !

André Jobard
5 novembre 2023

« Jésus se mit à pleurer » – homélie du 2 novembre 2023 – messe des défunts

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« Jésus se mit à pleurer »

Alors Jésus se mit à pleurer. Les Juifs disaient « Voyez comme il l’aimait ! » La suite de ce texte, beaucoup d’entre vous la connaissent. Jésus fera sortir Lazare du tombeau. Il le relèvera de la mort comme il l’avait laissé entendre en réponse à la Foi de Marthe : « Moi je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra. » Ce retour à la vie de Lazare préfigure la Résurrection de Jésus lui-même le jour de Pâques. La Résurrection de Jésus, le nœud de la foi chrétienne, est la clef de notre espérance dans une vie qui se prolonge après la mort, comme l’apôtre Paul, le premier, l’a compris dans sa lettre aux Thessaloniciens, cette lettre que beaucoup d’entre vous ont lu ou fait lire lors des obsèques. Paul dit à ses amis : Jésus nous le croyons est mort et ressuscité ; de même, nous le croyons aussi, ceux qui se sont endormis, Dieu par Jésus, les emmènera avec lui. »

Cette espérance est le moteur de l’équipe d’accompagnement au deuil qui a préparé avec vous la célébration des obsèques. Ensemble, nous avons partagé cette espérance par des paroles et des signes, ceux de la lumière et de l’eau.

Cependant les obséques sont si proches de la mort que les paroles d’espérance en une vie éternelle, étaient difficilement audibles, noyées par le chagrin de la séparation. Pour beaucoup l’espérance est encore à venir. C’est pourquoi j’ai choisi d’interrompre la lecture du passage d’évangile pour mettre en relief un passage étonnant, plein d’humanité. Alors Jésus se mit à pleurer. Les Juifs disaient « Voyez comme il l’aimait ! »

Dieu s’est d’abord fait connaître par ses prophètes. Mais il a fait beaucoup plus. Ce qu’il a fait est simplement inouï. Il s’est fait Homme en la personne de Jésus. Jésus, Dieu-fait-Homme a partagé notre humanité dans toutes ses dimensions. Comme nous il a connu le travail et le repos, la joie et le plaisir, l’amitié et la tendresse. Comme nous il a été tenté et il a douté. Comme nous il a connu la souffrance, et cette souffrance particulière, celle du deuil.

Jésus, l’Homme-Dieu, aurait pu alors se hâter de faire revenir Lazare à la vie. Mais avant de révéler ainsi sa divinité, Jésus, Dieu-fait-Homme a pris le temps de partager en plénitude notre humanité dans le deuil. Il a pleuré, comme nous. Il n’a pas fait semblant. Ses larmes sont le déversoir du trop-plein de sa compassion, cette couleur que prend l’amour quand on partage le chagrin des autres. Ce n’est pas tant la mort de Lazare qui le fait pleurer que le chagrin et les larmes de ses amis juifs et surtout celles de Marie, l’amie si proche qu’elle avait osé essuyé avec ses cheveux le parfum répandu sur ses pieds, l’amie dont il doit maintenant essuyer les larmes.

« Jésus se mit à pleurer. » Dans l’Évangile Jésus ne cesse de nous révéler son Père. Aujourd’hui ses larmes donnent du corps à la tendresse de ce Père, tendresse si souvent chantée par les psalmistes. Dieu tendresse pleure avec ceux qui souffrent. Il ne plaît pas à Dieu que les Hommes souffrent.

Les Juifs disaient : « Voyez comme il l’aimait ! » Ils ont compris que l’amour était le fil directeur de la vie de Jésus, cet amour qui l’a conduit à donner sa vie.

C’est cet amour qu’il nous transmet en nous demandant d’aimer les autres. C’est cet amour qu’il nous donne à travers l’eucharistie que nous allons maintenant célébrer. Sous l’apparence d’une hostie Jésus s’invite en nous, dans notre humanité pour nous aider à vivre en étant pour nos frères un signe de son amour pour toute l’Humanité.

Vincent Boggio
2 novembre 2023

Déambulation dans un cimetière – homélie du mercredi 1er novembre 2023 – Toussaint

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Déambulation dans un cimetière

En cette fête de la Toussaint je vais vous parler de cimetière ; cela semble d’actualité même si, paraît-il, il ne faut pas confondre fête de la Toussaint et jour de prière pour les défunts demain.Dernièrement, je suis allé sur la tombe de mes parents, et là, j’ai retrouvé une vieille connaissance et tout en parlant nous avons déambulé dans le cimetière. Devant de nombreuses tombes (à nos âges on connaît plus de défunts que de vivants!) nous nous sommes arrêtés, nous rappelant ce qui avait été marquant dans la vie de la personne ensevelie sous cette tombe. D’où ces quelques commentaires :

«  Tu te souviens de Marguerite, une pauvre fille, qui n’a pas eu beaucoup de chance dans sa vie, mais qui est restée toujours gaie. Tiens Robert, le Robert, un costaud, un dur à cuire, pas toujours commode, mais quel courage il a eu pour soigner son épouse jusqu’à la fin ! Et puis voilà Jeannette, une femme généreuse, le cœur sur la main : on ne la voyait pas souvent à l’église, mais que de visites n’a t-elle pas faites auprès des malades du pays. Et là, toute la tribu des Dupont : il y en a eu des querelles entre tous ses membres ; faut dire que l’héritage était conséquent, mais il paraît qu’avant de mourir le grand-père a tendu la main à son gendre avec qui il avait eu un profond désaccord. Et ce petit, Anthony, mort à 3 ans, tu te souviens de la peine des parents, immense bien sûr, aux obsèques ils ont demandé de prier pour les enfants victimes de la guerre et de l’injustice : c’était poignant.  Et là, Pierre, bien connu dans le village pour son amour du travail bien fait, un artisan hors pair et toujours disponible. Et encore ce couple dont le fils a suivi une trajectoire bien éloignée de leur tradition sociale et religieuse, mais qui n’a jamais exprimé le moindre reproche à son encontre. Et tous ces jeunes tués dans les 2 dernières guerres, dont nous connaissons les familles : que de souffrances, mais aucune révolte ! »

Et ce tour s’est encore prolongé, avec l’énumération de tous ces gens qui ont laissé une trace de leur passage dans nos vies. Ah ce n’étaient pas des gens parfaits(pas des anges non plus, chantait Brassens), mais je pense qu’ils ressemblent beaucoup aux interlocuteurs de Jésus qui l’ont entendu déclarer devant eux « heureux » ; en effet il avait vu ces gens, il les avait écoutés, il avait compris leur fardeau de chaque jour, leur combat pour améliorer leur sort, leurs beaux gestes de fraternité. Il révélait ainsi comment le quotidien peut faire de chacun d’entre nous un saint, c’est-à-dire une personne appelée au bonheur, appelée à vivre de ce royaume d’amour que Dieu veut établir. Les saints que nous fêtons aujourd’hui sont ceux dont l’existence a été imprégnée de ces béatitudes et qui nous disent par leurs choix de vie quelle destinée nous est réservée. Que cela nous encourage à croire que l’important se joue dans notre existence comme elle est, avec ses joies, ses peines, ses échecs, ses réussites.

Au terme de cette déambulation, j’ai rendu grâces pour tous ces gens, hommes, femmes, enfants, vieillards, qui, selon la vision de saint Jean dans l’Apocalypse «  vêtus de robes blanches viennent de la grande épreuve ». La grande épreuve n’est-elle pas tout simplement la traversée de la vie, où chaque jour nous appelle à choisir la route du vrai bonheur ? Tous ces défunts nous montrent un chemin de vie, un chemin de bonheur. De là notre désir, bien légitime ces jours-ci, d’aller fleurir leur tombe.

André Jobard
1er novembre 2023 – Toussaint

Aimer Dieu et Aimer son prochain, c’est Aimer sans mesure … – homélie du dimanche 29 octobre 2023

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Aimer Dieu et Aimer son prochain, c’est Aimer sans mesure…

Chers frères et sœurs, chers amis,

Dans l’oraison d’ouverture des célébrations de ce dimanche, (c’est la même qui est reprise partout dans toutes les églises), d’un seul cœur et dans un même esprit, nous demandons à Dieu de nous faire aimer ce qu’il commande pour obtenir ce qu’il promet. Ce qu’il promet c’est bien plus que du chocolat, c’est une vie remplie de sa présence, de sa paix et de sa joie. C’est ce qu’on appelle la vie éternelle avec Dieu. Cette vie-là ne nous attend pas après notre mort, mais cette vie est déjà commencée lorsque nous vivons de la foi, de l’espérance et de la charité, que nous lui demandons à juste titre d’augmenter en nous. Voilà ce qu’il promet. Et quel est ce qu’il commande ? – puisque nous avons dit « fais nous aimer ce que tu commandes pour obtenir ce que tu promets ». Ce qu’il commande, c’est ce dont il s’agit dans l’évangile de ce dimanche avec cette question posée à Jésus : « quel est le plus grand commandement ? ». La réponse de Jésus, c’est « Aimer ». Aimer Dieu de tout son cœur et aimer son prochain comme soi-même ou encore « aimer-vous les uns les autres comme je vous ai aimé ». Au fond, en nous faisant aimer son commandement « d’aimer », Dieu lui-même nous aide à accomplir ce commandement.

Maintenant je vous pose une question difficile : Avez-vous déjà pris le temps de vous confronter à ces paroles de Jésus ? Avez-vous déjà pris la mesure de votre amour pour Dieu ? On reconnaît l’amour par ses manifestations. Comment manifestez concrètement à Dieu cet amour de tout notre cœur ? Ce peut être intéressant de s’arrêter et de voir les gestes d’amour qu’on a pu poser en faveur de Dieu : le temps qu’on lui a donné, la tendresse qu’on lui a manifestée. Ce peut-être aussi intéressant de se demander pourquoi Jésus associe ce commandement d’aimer Dieu au commandement d’aimer inconditionnellement le prochain – ce qui n’est pas toujours facile. C’est sans doute parce qu’on ne peut pas aller vers Dieu en se dépassant sur le chemin sans se saluer, ou sans se soucier de l’autre.

Il me semble qu’en associant les deux commandements, Jésus veut nous montrer que c’est dans notre amour pour le prochain (quelquefois capricieux) que se trouve la mesure de notre amour pour Dieu. Et quel doit être la mesure de notre amour pour le prochain ? Eh bien il n’y a pas de mesure. Il ne peut y avoir de mesure parce qu’en Dieu il n’y a pas de mesure à l’amour. La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure, comme le disait saint Augustin. Il y a un chant qui dit : « l’amour de Dieu est si grand qu’on ne peut le surmonter, si profond qu’on ne peut le sonder, si vaste qu’on ne peut le contourner ». Si ce discours sur la mesure de l’amour du prochain venant de la mesure sans mesure de l’amour de Dieu d’une part et manifestant d’autre part la mesure de notre amour pour Dieu – si ce discours peut paraître un peu abstrait, nous pouvons trouver la déclinaison concrète de ce commandement d’amour dans ce que dit le Seigneur dans le livre de l’Exode et que nous avons proclamé en première lecture : « Tu n’exploiteras pas l’immigré, tu ne l’opprimeras pas, car vous étiez vous-même autrefois des immigrés. Vous n’accablerez pas la veuve et l’orphelin (ils représentent toutes les personnes vulnérables de notre société). Si tu prêtes de l’argent à quelqu’un, à un pauvre (…), tu ne lui imposeras pas d’intérêts (…) S’il crie vers moi, je l’écouterai, car moi je suis compatissant ».

Si au nom du commandement d’aimer, chacun vit sans commentaire ces préceptes, et qu’aux plus hauts niveaux de nos sociétés, on revient à ces prescriptions, notre monde se porterait certainement mieux. En outre, toi, ta manière d’aimer le prochain détermine ton amour pour Dieu. Et s’il y a encore une mesure, une limite à ta manière d’aimer ton prochain, c’est que tu n’aimes pas assez Dieu.

Judicaël Mitokpey
29 octobre 2023

Rendez à César ce qui est à César, et rendez vos cœurs à Dieu, parce qu’ils sont à Dieu – homélie du dimanche 22 octobre 2023

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Rendez à César ce qui est à César, et rendez vos cœurs à Dieu, parce qu’ils sont à Dieu

Chers frères et sœurs, chers amis,

Cet évangile que nous venons de proclamer nous est très familier avec cette sentence de Jésus que nous connaissons par cœur : « Donner à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu ». Certains ajoutent volontiers que César lui-même est à Dieu. On a l’habitude de se fonder sur ce texte pour dire l’attitude de Jésus par rapport au pouvoir temporel et pour justifier la nécessité d’une séparation entre la religion et l’État. J’aurais voulu faire une réflexion sur cette question, la question de la séparation entre l’Église et l’État, la question de la laïcité, la place de la religion dans le débat social et politique, la problématique de l’espace public comme espace agnostique et du confinement de la religion à la sphère privée. Mais je crains qu’un tel exposé avec des arguments philosophiques et théologiques paraisse trop universitaire voire soporifique pour vous. Alors j’ai posé la question à Jésus de nous donner une explication plus simple de cette sentence qui a traversé les siècles – à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu – et bien évidemment de nous éclairer surtout sur ce que cela peut impliquer pour nous, au-delà de la question de la séparation entre le pouvoir temporel nécessaire et la religion tout autant indispensable pour construire la cité de Dieu au cœur même de la cité des hommes.

Alors il m’a semblé que l’on peut s’attarder sur cette question de Jésus : « Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ? ». Comme à l’époque de Jésus, on peut encore voir sur toutes les pièces de monnaie et sur tous les billets de banque, une effigie et des inscriptions ne seraient-ce que pour dire combien vaut cette pièce ou ce billet. Je ne sais pas s’il existe des pièces ou des billets sur lesquels on a mis l’effigie de Dieu ou l’inscription « Dieu est amour », même si certains ont pu écrire « In God we trust, en Dieu nous croyons » sur leur billet de banque ». Mais alors l’image de Dieu, l’effigie de Dieu où est-elle gravée depuis toujours ? Qu’est ce qui porte de manière indélébile la marque de Dieu et qui mérite d’être rendu à Dieu selon la sentence de Jésus, « A César ce qui est à César et à Dieu ce qui est Dieu » ? Il me semble que c’est le cœur de chacun de nous. Oui, nous l’oublions peut-être souvent, « Nous sommes fait à l’image et à la ressemblance de Dieu ». Cela signifie que le centre de notre être, notre cœur, est marqué de cette ressemblance et de cette image divine. Rendez à César ce qui est à César, et rendez vos cœurs à Dieu, parce qu’ils sont à Dieu. Livrez-lui tout votre être parce que vous lui appartenez. Nous sommes faits pour lui, nous rappelle saint Augustin, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en lui. Les préoccupations matérielles aussi importantes soient-elles ne doivent pas nous faire oublier qu’à Dieu revient notre cœur. Et ce n’est une mauvaise chose de travailler à restaurer l’image de Dieu en nous parce que la fidélité à la ressemblance de Dieu nous ouvre des chemins de justice et de vérité qui nous permettent de discerner la juste attitude à avoir face à la gestion des biens de ce monde, face aux conflits qui menacent une partie du grand corps humains que nous formons. Cette fidélité à l’effigie de Dieu au fond de nos cœurs nous ouvre aussi des chemins de paix. Si nous rendons à Dieu ce qui lui appartient en premier, c’est-à-dire nos cœurs qui sont marqués par son effigie, nous trouverons la paix. Parce qu’en Dieu il n’y a que paix amour et justice. Prions donc sans cesse pour que nos cœurs ainsi que ceux de tous nos frères et sœurs humains se tournent vers Dieu avec sincérité. Alors régnera la paix. Et dans nos sociétés adviendra la cité de Dieu.

Judicaël Mitokpey
22 octobre 2023

La vie : un festin de noces ? – homélie du dimanche 15 octobre 2023

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La vie : un festin de noces ?

Il y a 8 jours, dimanche dernier, nous étions invités à cheminer dans le vignoble bourguignon, et ainsi à contempler la beauté de la nature, semblable à l’humanité, que l’auteur du texte biblique qualifiait comme étant l’œuvre de Dieu. Aujourd’hui nous pouvons encore nous émerveiller de ce Dieu qui a pour seul souci de nous inviter à la noce de son fils. Hélas, une fois de plus, notre humanité fait la fine bouche devant ces propositions, et l’actualité de ces derniers jours révèle la violence de nos refus de nous associer à cette joie promise. Oui la sidération est totale devant le déferlement de la haine.

Curieusement cette violence nous la retrouvons dans cet évangile ; et la fin du texte, qu’on serait tenté d’omettre, nous détourne d’une approche positive et aimante de la part de Dieu ; en effet il exclut violemment ce pauvre hère, qui n’a peut-être pas eu l’argent nécessaire ou le temps pour acheter un costume-cravate. Sans parler de la violence dont sont victimes les serviteurs du roi, chargés d’aller porter les cartons d’invitation. Comment comprendre l’existence de cette atmosphère si nauséabonde, sinon dans le refus des invités de participer pleinement à la noce ? Chacun met en avant ses propres préoccupations, son champ, son commerce, et l’invité de la dernière heure n’éprouve pas le besoin de changer de tenue pour faire honneur aux mariés. On est dans un climat du chacun pour soi, indifférent à la joie des autres.

Cela ne nous fait-il pas penser à notre actualité ? Nous vivons dans un monde où ce qui est mis en avant, c’est la recherche de son confort, de son bonheur à soi ; c’est le souci de maintenir des acquis, de garder ses privilèges, que ce soit au niveau personnel ou national. Le conflit israélo-palestinien est en cela révélateur du désintérêt de la communauté internationale vis à vis d’une situation complexe, préférant ignorer le sort de toutes les victimes de ce conflit. De même bien d’autres foyers de guerre, bien des réalités de pauvreté, bien des attaques à l’environnement n’atteignent pas les opinions publiques de nos pays développés, préoccupés par le maintien de leur pouvoir d’achat.

Peut-être Jésus veut-il, à travers cette parabole destinée aux grands prêtres et aux pharisiens, attirer notre attention sur le danger que nous prenons en nous enfermant dans notre suffisance et notre inconscience devant les grands défis de notre époque : laisser la misère, la souffrance et les foyers de guerre se développer, tolérer l’accroissement monstrueux des inégalités, exploiter à la folie les ressources vitales du sous-sol, c’est aller droit vers le suicide collectif. Ce n’est plus seulement celui qui n’a pas revêtu son habit de fête qui sera jeté dans les ténèbres, c’est notre humanité toute entière qui risque de disparaître.

Je pense que c’est ce constat d’une humanité allant au désastre, qui a motivé notre pape à produire l’exhortation apostolique ‘Louez Dieu’. C’est un cri d’alarme à destination de tous les hommes et femmes de bonne volonté pour qu’ils comprennent l’enjeu d’une transformation profonde de leurs comportements, de leurs modes de vie. Et cela non pas pour brimer notre existence et notre soif de bonheur, mais pour vraiment fêter les noces du fils de Dieu, ressuscité après avoir donné sa vie librement et par amour. Ne boudons pas le projet de Dieu sur notre monde qu’il veut fraternel. Que soit faite sa volonté, il compte sur nous. !

André Jobard
15 octobre 2023

Le chant de la vigne – homélie du dimanche 8 octobre 2023

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Le chant de la vigne

Dernièrement, Isaïe et Jésus (vous les avez peut-être rencontrés!) se promenaient entre Pommard et Meursault, et séduits par la beauté du paysage en ces temps d’automne ensoleillé se mirent à chanter un éloge remarquable à la vigne. Ils ne purent s’empêcher de comparer cette merveille à une autre merveille : l’humanité, si riche de toutes ses composantes, œuvre de Dieu créateur, humanité qu’il a voulue heureuse. Revenus à la maison, ils ont ouvert la télé, pianoté sur leurs smartphones pour connaître les dernières nouvelles de cette humanité : quel choc : la vigne s’était transformée en terre de combats, de jalousie, de convoitise. Quelle déception pour Dieu, ont-ils pensé, et quel malheur pour les hommes alors qu’ils avaient dans les mains de quoi bâtir une humanité fraternelle et joyeuse !

Heureusement l’histoire ne s’arrête pas sur cet échec. Tout d’abord de tout temps des alertes ont été envoyées par ceux qu’on appelle des prophètes pour rappeler la vocation de la vigne : produire des bons vins et non du verjus, produire la justice, le partage, l’ouverture aux autres et aux différents, et demeurer dans une attitude de reconnaissance : en effet cette vigne a été donnée, il n’y a pas à l’accaparer comme veulent le faire les vignerons de la parabole ; en agissant ainsi ils se croient propriétaires de leurs biens, de leurs richesses, y compris spirituelles, ils s’estiment les vrais adorateurs de Dieu par leurs dévotions, alors qu’ils portent préjudice, par leur mode de vie, aux plus pauvres et à la nature. De tous temps les prophètes rappellent qu’on ne peut grandir que dans le consentement à une retenue par rapport à ses biens, à ses œuvres, même les plus admirables. Afin que tous puissent bénéficier de ce que Dieu a laissé à l’homme pour son bonheur.

C’est ici que je pense, par exemple, à des parents bousculés dans ce qui leur semblait être des valeurs sûres, par leur enfant empruntant des chemins bien éloignés de ces mêmes valeurs. Je pense à ces personnes âgées qui compte-tenu de leur santé dégradée doivent quitter leur maison pour une institution, je pense aux éducateurs, aux responsables de communautés, aux curés, qui doivent accepter que tout ne marche pas selon leur attente, et qui sont amenés à comprendre les ratés, les limites des personnes. Remettre à Dieu notre récolte, lui rendre grâce, comme nous le faisons à chaque eucharistie c’est accepter de se dé-saisir de ses biens, de ses œuvres, de ses projets ; c’est vivre un certain détachement par rapport à ce que nous avons, à ce qui nous est donné. Mais la liberté, la vraie liberté intérieure, n’est-elle pas à ce prix-là ?

Des prophètes nous en avons aujourd’hui encore. Tout dernièrement un certain François a exhorté l’humanité, chacun de nous, les dirigeants du monde entier, à prendre soin de notre maison commune, malmenée par notre consommation débridée. Son message est un cri d’alarme, le temps presse, et dit-il : « réveillons-nous, sortons de notre torpeur, travaillons à construire une humanité respectueuse de chacun, des plus pauvres et de la nature. » Des prophètes, notre monde, et pas seulement l’Église, en est rempli ; des personnes, des groupes, des associations qui accueillent le malade, l’étranger, le prisonnier sont pour nous des éveilleurs de l’essentiel ; c’est la nouvelle vigne qu’attend notre créateur.

André Jobard
8 octobre 2023

Connaître et accomplir la volonté de Dieu – homélie du samedi 30 septembre 2023

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Les lectures du jour

Connaître et accomplir la volonté de Dieu

Chers frères et sœurs, chers amis,

L’extrait d’Évangile que nous venons d’entendre appartient au chapitre vingt-et-un du récit de Matthieu qui, entre autres, montre Jésus pris comme dans un jeu de question-réponse avec les juifs qui sont représentés par les grands prêtres et les anciens. C’est d’abord eux qui lui demandent de quelle autorité il peut entrer dans le temple et chasser tous les marchands qui s’y trouvent… Et lui, pour toute réponse, il leur demande si le baptême de Jean vient de Dieu ou s’il vient des hommes. Et comme par malice, ils ne lui firent aucune réponse, Jésus enchaîne avec la parabole des deux enfants que nous venons d’entendre en leur demandant une fois encore leur avis. Lequel de ces deux fils a fait la volonté du Père ? Est-ce celui qui a répondu favorablement et immédiatement à l’appel du Père sans pour autant faire ce qui lui est demandé, ou le premier qui a rejeté l’appel et s’est repenti plus tard pour faire ce que son père attendait de lui. Puisque cette parabole permet de contourner pédagogiquement le malaise et de déplacer la question, les auditeurs de Jésus purent répondre sincèrement que c’est le fils repenti qui a fait la volonté de son Père. Et la conclusion de Jésus est sans commentaire : Ceux qui étaient publiquement considérés comme les plus grands pécheurs, c’est-à-dire les publicains et les prostituées, pour avoir cru et s’étant converti, ont accompli la volonté de Dieu au détriment des anciens et des ministres du culte, qui passent pour les personnes les plus proches de Dieu. L’apparence est trompeuse.

Frères et sœurs, faire la volonté du Père. Voilà une chose bien simple mais aussi très compliquée. Il faut d’abord savoir quelle est la volonté du Père. Est-ce toujours ce qui est convenable et agréable aux autres ? Non, s’il en était ainsi, Jésus n’aurait pas chassé ces pauvres marchands du temple en leur disant que leur activité dans le temple ne correspond pas à la volonté de son père, puisqu’ils ont fait du temple « un repaire de brigands ! ». Faire la volonté du Père, est-ce simplement reconnaître ce qui vient de Dieu et ce qui ne vient pas de lui ? Non plus. Ce n’est pas seulement cela. Autrement, les juifs et les anciens n’auraient pas craint de répondre à Jésus que le baptême de Jean vient du Ciel. Ils le savaient et pourtant ils ne crurent pas en lui. Enfin, faire la volonté du Père, est-ce dire oui immédiatement et le manifester devant tout le monde sans pour autant accomplir ce que contient et implique cette volonté ? Certainement pas. Il y a alors une question qui se pose : dans lequel des deux fils nous-retrouvons nous ? Celui qui dit « je ne veux pas » puis se repent plus tard dans le secret de son cœur, ou celui qui dit oui publiquement de bonne foi ou par hypocrisie et qui dans tous les cas ne fait pas ce que Dieu attend de lui. Lequel des deux fils sommes-nous ?

Si nous nous examinons bien, nous verrons peut-être que nous avons les deux fils en nous. Nous avons tous fait au moins une fois l’expérience de dire oui et de ne pouvoir honorer notre engagement ou de dire non puis de nous repentir de cette décision initiale. Le prophète Isaïe nous rassure dans la première lecture que si nous nous détournons du mauvais chemin peu importe comment, nous vivrons certainement. Mais au fond, le défi de notre vie et de notre identité chrétienne est de dire OUI et de marcher suivant ce OUI. Pour cela nous avons l’exemple du Christ devant nous. Il a dit oui dans la joie et dans la souffrance. Il s’est abaissé, il s’est même anéanti par humilité, pour accomplir la volonté de Dieu. C’est en faisant cela qu’il nous a montré le chemin du vrai bonheur en Dieu. Cet hymne sur l’abaissement et l’exaltation du Christ que reprend Saint Paul dans la deuxième lecture nous dit à quel point découvrir et accomplir la volonté de Dieu exige de notre part une attitude d’humilité. Comment découvrir la volonté de Dieu ? Et comment l’accomplir ? La volonté de Dieu se trouve du côté où tu es appelé à exercer la vertu de l’humilité.

Judicaël Mitokpey
30 septembre 2023

Loin de notre logique humaine – homélie du samedi 23 septembre 2023

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Loin de notre logique humaine

« Les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. » Comment voulez-vous avec de telles déclarations stimuler un enfant à travailler pour obtenir la meilleure place ? Il a de drôles idées, ce Jésus qui ne comprend rien à la psychologie de l’enfant. Et pourtant cette parole en forme de maxime a traversé les siècles et arrive jusqu’à nous ce soir. Pourquoi ? Y a-t-il intérêt à la retenir ?

Nous voilà au cœur de la logique de Jésus, qui ne fait que reprendre celle que le prophète Isaïe attribuait à Dieu : « mes pensées ne sont pas vos pensées, vos chemins ne sont pas mes chemins ». Une logique qui a de quoi nous dérouter totalement. A l’image de ce que notre pape François ne cesse de déclarer, encore aujourd’hui à Marseille, et qui peut en déconcerter plus d’un, à savoir qu’il nous faut sortir de notre indifférence devant le drame des réfugiés et migrants qui frappent aux portes de notre riche Europe. Devant ce drame, l’opinion publique souvent abusée par des propos politiciens à courte vue, se replie sur des considérations purement économiques, sur une peur fantasmée de perte de son identité. Le message évangélique nous appelle à un autre regard, à celui de Jésus devant la souffrance d’hommes et de femmes, d’enfants, errant sur de dangereuses routes en quête d’un peu de vie meilleure, de sécurité. Il s’agit d’une conversion radicale, qui peut réveiller en nous une véritable paix intérieure, avec la conscience que ce chemin, celui de Jésus, est un chemin de vie.

L’actualité, à savoir le drame des migrants, la journée mondiale des réfugiés, la visite du pape à Marseille, tout cela ne doit pas nous empêcher de visiter d’autres aspects de notre vie et de regarder ce qui est appelé à vivre de cette logique de Dieu, à l’inverse de nos propres logiques. La parabole des vignerons met en exergue la bonté de Dieu, qui se joue de nos étroites conceptions de la justice. Nous avons à la recevoir avec reconnaissance, surtout si loin de nous considérer comme les premiers, les meilleurs, nous avons l’humilité de nous savoir bien petits dans notre attention aux autres, dans nos relations empreintes de nos suffisances. Pour Dieu, tel que nous le révèle Jésus, pas de différence, pas d’exclusion… de quoi extirper de nous toute jalousie, et nous rendre plus ouverts à ceux qui sont différents de nous, et compréhensifs des multiples et divers chemins que prennent les autres. Tout récemment encore, j’ai été émerveillé comment des grands-parents avaient accueilli affectueusement la décision de leurs petits-enfants , quand ceux-ci avaient déclaré prendre leurs distances par rapport à la foi chrétienne.

C’est donc toute notre logique humaine qui est bouleversée, une logique mortifère, sans avenir, et qui doit laisser place à d’autres priorités que celles du succès, de son petit confort, de la richesse, de la suffisance. Saint Maurice, dont c’était la fête hier, et ses compagnons sont allés jusqu’au martyre pour témoigner de la vérité de cette logique, celle de l’amour et de la fidélité. C’est toujours à un renouvellement de nos pensées, à une vie nouvelle que nous sommes invités : et sortis d’une approche trop comptable et humaine de nos existences, nous goûterons aux joies de l’avènement d’un monde transformé et fraternel.

André Jobard
23 septembre 2023

Que le pardon est difficile ! – homélie du dimanche 17 septembre 2023

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Que le pardon est difficile !

Il y a deux ans, dans un tribunal du Kentucky, Abdul-Munim, le père de Salahuddin, livreur de pizza poignardé à mort, a pardonné à celui qui plaidait coupable pour ce crime. Il lui a expliqué : « Le pardon est le plus grand cadeau de bienfaisance en Islam »… « Je ne suis pas en colère contre toi » … « Je suis en colère contre le diable. Je blâme le diable qui t’as égaré pour commettre un crime aussi horrible ».

De temps à autre, assez rarement, les médias évoquent de tels pardons étonnants comme celui de Jean-Paul II à Mehmet Ali Agça qui avait tenté de l’assassiner. Cependant on entend plus fréquemment des témoignages du type « Jamais je ne lui pardonnerai. C’est impensable, il m’a fait trop de mal. »

Mon Dieu, que le pardon est difficile ! La question elle-même du pardon est bien difficile

Elle nous poursuit depuis notre enfance. « Demande pardon ! » disaient nos parents quand on avait fat une bêtise. Elle interfère avec notre foi. Elle culmine avec des interrogations vertigineuses : Tout est-il pardonnable ? Peut-on pardonner à celui qui ne demande pas pardon ? Comment demander pardon ou pardonner à celui qui est mort ?

Pour les chrétiens et sans doute pour d’autres croyants, le pardon aux frères et le pardon que nous demandons à Dieu sont liés. Deux siècles avant Jésus-Christ, Ben Sira le Sage a déjà évoqué ce lien que Jésus a repris à son compte.

Au cours de la messe, nous n’arrêtons pas de demander pardon à Dieu. Dès l’ouverture, avec la préparation pénitentielle conclue par « Que Dieu nous fasse miséricorde, qu’il nous pardonne nos péchés« , puis dans le Gloria « Toi qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous« , le Notre Père « Pardonne-nous nos offenses« , que le prêtre prolonge ainsi « Par ta miséricorde, libère-nous du péché » puis « Ne regarde pas nos péchés » Je passe sur le geste de paix qui n’est pas vraiment un geste de réconciliation, sauf en couple quand on s’est disputé avant de partir à la messe. Avant la communion on remet çà « Agneau de Dieu, prends pitié de nous » et enfin « Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri.« 

Le profane attentif qui viendrait pour la première fois à la messe pourrait dire à la sortie : « Et bien, vous demandez beaucoup pardon. Pourquoi insistez-vous autant ? Ou bien vous êtes très, très pécheurs…Ou bien vous n’y croyez pas tant que çà à la miséricorde de votre Dieu ? On dirait que vous parlez à un sourd. Ou bien ceux qui ont bâti la messe sont partisans de la pédagogie de la répétition. Ou alors ils ont mis bout à bout des prières anciennes sans se rendre compte que cela créait des redondances. Par contre l’évocation du pardon aux frères est timide : ‘Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés’. On dirait que ça vous écorche la bouche.

C’est pas faux ! On aimerait peut-être dire plus humblement « comme nous pourrions pardonner à ceux qui nous ont offensés !« .

Cette disproportion entre la demande de pardon à Dieu et le pardon aux frères interroge. Tout se passe comme si l’insistance à demander pardon à Celui-ci nous libérait de notre incapacité à pardonner à ceux-là.

Le passage de l’évangile de Matthieu éclaire sur le désir de jésus pour nous, lui qui a pardonné à ses bourreaux. On pourrait habilement éluder la question en disant que la parabole concerne seulement la remise de dettes. Soit ! Que les pays riches remettent leurs dettes aux pays pauvres, voilà une belle lecture de cet évangile. Je ne serai pas étonné que le pape François en parle en conclusion des Rencontres Méditerranéennes à Marseille la semaine prochaine.

Mais la parabole est précédée d’une question de Pierre sur la fréquence du pardon qui interdit de tricher sur le sens de la parabole. La remise de dettes est bien symbole de pardon. Jésus répond donc à Pierre que la répétition du pardon est infinie et il ajoute que le pardon du Père est intimement lié au pardon aux frères. Comme Ben Sira l’avait dit avant lui.

Vincent Boggio – 17 septembre 2023

Guetteur, à ton poste ! – homélie du dimanche 10 septembre 2023

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Guetteur, à ton poste !

« Fils d’homme, j’ai fait de toi un guetteur ». Curieuse mission confiée à Ézéchiel, et par ricochet à nous-mêmes. Car ce mot de guetteur, cela fait penser à surveillant, à espion, à redresseur de tort, à cette personne à l’affût du moindre faux pas, des erreurs, et qui s’immisce dans la vie intime. Ce malaise, on peut aussi le ressentir à la lecture de l’évangile, où il est question de corriger son frère qui a péché. Allons-nous rester sur cette impression ? Ce serait bien dommage. Allons donc chercher derrière celle-ci le beau message pour notre foi et même tout simplement pour notre vie.

Pour Ézéchiel, le contexte dans lequel il reçoit cette invitation de la part de Dieu est un contexte douloureux, celui de la déportation à Babylone, avec la tentation de la désespérance : plus rien à attendre de la vie. Guetteur, Ézéchiel va devoir rappeler la gravité des enjeux de l’existence, quand celle-ci est menée ou non selon la loi de Dieu. De même dans l’évangile la question de la fidélité au témoignage de la foi dans un contexte de persécution agitait la première communauté chrétienne à laquelle s’adresse Matthieu. Dans les deux situations, il est bon que soit rappelée par un guetteur, un frère, l’urgence de la conversion. Car existe une vraie solidarité entre tous, nous dirions une véritable fraternité : nous sommes liés les uns aux autres puisque nous sommes enfants du même père.

De là, cet appel vibrant à se soucier les uns des autres ; non pas pour juger le frère défaillant, le condamner, mais parce que son salut nous concerne. Nous ne pouvons pas être sauvés, seuls ; c’est avec mes frères et sœurs, même les plus éloignés de moi, que je peux vivre et participer à la vie en Dieu. Plus question d’ignorer le sort de mon voisin, celui qui est dans la grande détresse morale ou physique, ou celui qui est aveuglé par ses richesses matérielles ou par sa soif de pouvoir. Pas question non plus de négliger la survie de notre maison commune, la création toute entière. Il est salutaire que nous soit rappelée sans cesse cette exigence de préserver la planète et de promouvoir une société de justice, que ce soit de la part de notre pape, ou des multiples mouvements, associations, responsables de partis : tous ces guetteurs, à leur place respective, nous alertent sur les dangers de la poursuite aveugle dans un système économique, sociétal, politique qui engendre encore tant de misères, génère autant d’exilés, sans parler des conséquences désastreuses sur la création toute entière.

Parfois nous pouvons baisser les bras devant l’inertie des populations, des pouvoirs publics, des institutions ; les appels à la conversion, au changement de nos pratiques sont mis en sourdine, soit parce qu’ils bousculent trop nos habitudes, soit parce que nous recentrons notre vie chrétienne sur quelques dévotions ou actes de bienfaisance. Même si cela est tout à fait respectable, la priorité n’est-elle pas de participer au projet-même de Dieu, qui attend une humanité réconciliée et fraternelle ? De là la nécessité de la prière afin que les récalcitrants à ses appels (nous en premier) soient considérés comme des païens et des publicains, selon la parole mystérieuse de Jésus… ce même Jésus qui, par ailleurs leur a fait bon accueil ! La construction d’un monde fraternel est à la fois de notre ressort et aussi de l’aide de Dieu ; dans notre prière nous lui confions nos propres difficultés et celles de toute notre humanité, tentée trop souvent de mettre sa confiance dans ses propres œuvres. Finalement, merci à tous les guetteurs, nous en avons tant besoin.

André Jobard
10 septembre 2023

Qu’il prenne sa croix – homélie du 3 septembre 2023

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Les lectures du jour

Qu’il prenne sa croix

Jésus disait à ses disciples : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, et qu’il me suive. » Voilà qui est clair. Y’a qu’à ! Pas facile mais possible ! Paul va dans le même sens : « Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu ». C’est tout aussi clair. Y’a qu’à ! Pas facile mais possible !

Sauf que j’ai tronqué la phrase de Jésus. Il dit : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » « Qu’il prenne sa croix. » Cette phrase est gênante. Quelle est cette croix individuelle (« sa croix ») que Jésus invite ses disciples, nous invite, à prendre pour le suivre ? Il ne le précise pas.

« Qu’il prenne sa croix. » C’est peut-être la croix du martyr. En annonçant sa Passion, Jésus pressent que ses disciples, dont Pierre, seront martyrisés pour l’avoir suivi. Martyr s’entend ici au sens propre. Mourir en martyr, c’est subir un supplice souvent sadiquement raffiné et prolongé destiné à faire renoncer à la foi, c’est donc accepter la mort plutôt que d’abjurer. C’est aussi, sans le vouloir, renforcer la foi de ses amis et favoriser l’éveil à la foi de ceux qui découvrent que le verset du psaume de ce jour « L’amour de Dieu vaut mieux que la vie » est une réalité pour les martyrs. Si l’Évangile s’est répandu si vite dans les premiers siècles, c’est d’abord à cause de la force du message, c’est aussi à cause du martyre de nombreux messagers.

« Qu’il prenne sa croix. » C’est peut-être la croix de la souffrance. J’ai demandé à mon amie Marie-Thérèse ce qu’elle pouvait dire de cette phrase de Jésus, elle qui vit en EHPAD, rendue dépendante par une maladie invalidante et douloureuse. Elle m’a dit : Ma vieillesse difficile m‘invite à regarder surtout la croix des autres résidents ; nous nous suivons les uns et les autres en portant chacun une croix, modeste par rapport à celle du Christ mais la somme de ces croix égale celle du Christ ; suivre le Christ, c’est ne pas chercher à l’atteindre ; je rencontre chaque jour des aides-soignantes qui ont le visage de Simon de Cyrène et de Véronique ; j’ai prêté mon huile d’amandes douce pour oindre les lèvres d’une autre résidente proche de la mort.

« Qu’il prenne sa croix. » C’est peut-être la croix de l’amour. La Croix du Christ, c’est le signe de son Amour, amour vécu jusqu’à la mort. Amour incommensurable. Amour total. Nous aussi, disciples du Christ, nous aimons. Nous aimons Dieu, nous aimons les autres. Mais notre amour est très en deçà de celui du Christ pour le monde. « Qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » J’entends : « Que chacun aime comme il le peut et qu’il me suive. » Le Christ connaît les limites de l’amour de ses disciples et de chacun de nous. Chargé de notre croix d’amour, petite, nous pouvons suivre l’immense croix d’Amour du Christ pour aimer toujours davantage.

Dans les célébrations de mariage, on entend presque toujours la première lettre aux Corinthiens et son hymne d’amour : « L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas… » Paul donne 16 couleurs à l’amour. Notre amour pour les autres est coloré de quelques-unes de ses couleurs. Mais il en manque toujours, l’empathie, le pardon ou d’autres. En suivant Jésus nous pouvons enrichir la palette et faire de l’amour un arc-en-ciel.

« Qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » Il y a d’autres façons de comprendre cet appel. Chacun est invité à en trouver le sens en « renouvelant sa façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu », comme Paul le propose.

Vincent Boggio
3 septembre 2023

La foi qui apporte la joie – homélie du dimanche 27 août 2023

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La foi qui apporte la joie

« Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas… » Oui, heureux es-tu d’avoir confessé que Jésus était le Messie. Donc nous devons être heureux nous qui chaque dimanche proclamons à notre tour que Jésus est le Messie. Mais au fait, sommes-nous si heureux que cela ? Des personnes, étrangères à la foi chrétienne qui seraient de passage dans notre église en ce moment feraient-elles le constat que nous sommes vraiment heureux ? Si je pose ainsi la question, vous devinez la réponse… Il nous faut donc réfléchir à quel bonheur nous conduit la foi, puisque c’est elle qui est au centre de cette scène.

Tout d’abord nous pouvons nous demander si ce que nous vivons, soit personnellement, soit collectivement, est source d’un grand bonheur. Moi-même je suis volontiers à me plaindre de ce qui ne va pas dans le déroulement de mes journées, des contre-temps, des oublis fâcheux, des ratés dans mon emploi du temps ou dans mes relations. Je pense aussi à telle ou telle personne atteinte d’une maladie grave, je pense à cette famille désunie pour une question d’héritage, je pense à ce couple qui se sépare laissant des enfants désemparés. Pour me remonter le moral j’ouvre la radio, ou je lis mon journal : des drames, des guerres en Ukraine, en Afrique, au Moyen-Orient, des gangs qui terrorisent la population d’Haïti, la famine qui sévit un peu partout et qui touche des enfants, des incendies qui ravagent des régions entières, une canicule encore plus difficile à supporter à 3 détenus dans une cellule de prison de 9 m2. J’arrête là mon inventaire, mais avouez que cette énumération a de quoi nous éloigner de l’idée du bonheur. Comment pouvons-nous encore entendre, recevoir cette promesse et la proclamer à la face du monde qui ne peut plus nous prendre au sérieux ?

L’autre jour à l’issue d’un entretien téléphonique avec une personne totalement remontée contre sa famille, comme je ne voyais aucune issue à ce déchaînement de haine, et que j’étais totalement déstabilisé, j’ai prié et j’ai réalisé au-delà de mon désespoir la force de la foi. Une foi qui me fait dire qu’il y aura une issue à cette dramatique situation, peut-être pas sur le champ, peut-être au bout d’un temps long, dans une configuration inconnue, à condition que je tourne mon regard vers Jésus, le Messie. Comme pour Pierre, cette foi en Lui, en son identité de Messie, ne vient pas de moi, de ma force de conviction, de mon intelligence, mais de plus loin, du plus profond de mon cœur : «  ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. » De là une grande paix en moi, source d’une joie profonde.

C’est cette joie que chrétiens, nous avons à diffuser autour de nous. J’emploie le terme ‘diffuser’, qui est autre chose que de le proclamer sur les toits. D’ailleurs Jésus recommande le silence à ses disciples. Il s’agit bien de témoigner de notre foi en ce Messie qui est venu nous libérer de cette tentation permanente du dénigrement, du ‘à quoi bon ?’, du repli sur soi et sur ses opinions définitives. Cela se vit dans nos conversations quotidiennes, quand nous évoquons tous ces drames de notre monde. Sommes-nous porteurs de cette espérance que nous donne la foi au Christ, le Messie ? Quand tout va bien, c’était le cas pour Pierre dans les débuts avec Jésus, pas compliqué de croire en Lui. Mais quand arrive l’épreuve, la contestation, la mort, nous pouvons nous aussi renier notre foi en Lui, tout simplement en épousant l’opinion générale du défaitisme, de l’accusation absolue. Où est alors notre joie, promise à Pierre, promise à tous ceux qui mettent leur foi en Lui ?

André Jobard
27 août 2023

Au cœur de tout homme, la foi – homélie du dimanche 20 août 2023

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Au cœur de tout homme, la foi

C’était à Noël 1970 ; j’étais alors sous les drapeaux. Le capitaine de la compagnie avait organisé un grand repas pour la veillée ; or à la même heure l’aumônier du régiment avait prévu la messe de la nuit, à laquelle je ne pouvais en aucun cas me dérober ; d’ailleurs nous avions fait connaissance quelques semaines avant et il m’avait confié l’accompagnement des chants prévus à cette veillée. Me voilà donc obligé de renoncer au plaisir d’un bon repas de fête avec mes copains de chambrée qui eux, ne se sentaient pas du tout concernés par la messe de Noël. Au retour de celle-ci, dont je n’ai plus aucun souvenir, qu’est-ce que je découvre en entrant dans la chambre ? Une table de fête, garnie de tout ce que mes compagnons de chambrée avaient mis de côté pour le partager avec moi ; ils m’ont dit qu’ils n’avaient pas pu imaginer vivre la fête sans moi ni admettre que j’en sois privé. Vous devinez le choc émotionnel qui m’envahit à cet instant, inattendu, surtout de la part de garçons que mes directeurs de séminaire de l’époque avaient cru utile de me présenter comme un danger potentiel pour ma vocation. Ce fut tout le contraire, et si j’ai pris le temps de vous livrer cette expérience personnelle, c’est à la suite de la lecture de notre évangile du jour.

En effet Jésus va découvrir lui aussi la foi d’une païenne (c’est ainsi qu’étaient considérés ceux qui n’étaient pas du peuple juif) ; c’était ainsi que je considérais mes copains, issus des banlieues parisiennes, sympathiques mais sans lien avec aucune religion. Jésus, en présence de cette femme qui a l’audace de lui adresser la parole, va dans un premier temps se fermer à elle, à sa plainte, sous prétexte qu’il n’est pas venu pour les étrangers, mais pour le peuple élu, Israël. C’était l’attitude générale des croyants juifs qui étaient convaincus que la révélation du Dieu d’amour leur était réservée ; ils avaient pourtant bien lu le prophète Isaïe, comme nous l’avons entendu « ma maison s’appellera maison de prière pour tous les peuples », mais cela n’avait pas suffi à ouvrir leur cœur. Jésus était bien comme eux, de son peuple, de son milieu. Heureusement cette femme, maniant l’humour, forte de sa confiance en Jésus et portée par son amour de maman à l’égard de sa fille malade va retourner le cœur de Jésus.

Certains commentateurs de ce passage d’évangile hésitent à reconnaître la transformation intérieure qu’a vécue Jésus, oubliant peut-être qu’il est homme, et comme tout homme appelé à grandir, à entrer par étapes, dans le mystère du Dieu d’amour. Et ainsi il comprend et révèle par là-même que la foi n’est pas seulement la reconnaissance explicite de Dieu, elle est cette force qui nous met en route, qui nous fait franchir les obstacles, qui nous pousse à aller à la rencontre des autres, vers ceux qui sont dans le besoin. Elle est en toute personne, non réservée à une élite, elle n’est pas la propriété de ceux qui sont allés au catéchisme, qui sont à jour de leur Denier de l’Église. Elle est dans cette femme qui a osé crier sa détresse, elle est dans ces copains de chambrée qui ont eu à cœur de m’attendre pour que je puisse fêter Noël avec eux.

Laissons-nous surprendre par la foi, l’amour que vivent tant et tant de gens, souvent les plus pauvres. Ils font preuve d’une belle énergie pour mener leur existence. Laissons-nous aussi surprendre par ceux qui ont pu s’éloigner de nous ou qui ne partagent pas nos opinions politiques, religieuses. Que nous puissions dire avec Jésus « grande est ta foi ! » et avec Isaïe : « ma maison s’appellera ‘Maison de prière pour tous les peuples ‘! »

André Jobard
20 août 2023

Une rencontre toute ordinaire – homélie du 15 août 2023 – Assomption

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Une rencontre toute ordinaire

Hier, dans ma campagne nuitonne, alors que l’orage me retenait à l’intérieur de la maison, je me suis mis à la composition de l’homélie de ce jour. Mais démuni de mon ordinateur et en l’absence de documents aptes à m’aider, j’ai pris mon agenda. J’y ai découvert une multitude de rencontres (que je note chaque soir) ; des rencontres qui m’ont fait du bien, même celles qui m’avaient un peu bousculé sur le coup. Je me suis rendu compte que c’est elles, ces rencontres aux formes multiples et diverses, qui apportent du sens à ma vie d’homme et de prêtre, et qui tout compte fait me donnent de croire en l’humanité. Même si celle-ci est plongée dans bien des misères et doit relever des défis gigantesques, je suis comme l’auteur de l’Apocalypse : à travers l’image de la femme victorieuse du dragon, il croit à la victoire de l’humanité sur le mal.

Entendant cela vous êtes en droit de vous demander si je vais enfin parler du 15 août, de la Vierge Marie, de l’Assomption, et comment ma longue introduction peut servir la compréhension de cette grande fête. Il est curieux qu’en ce jour où nous célébrons Marie élevée dans la gloire du ciel, la lecture d’évangile proposée soit le récit de la Visitation de Marie à sa cousine Élisabeth. Il s’agit d’une rencontre entre ces 2 femmes, qui ont certainement beaucoup de choses à se partager après ce qui leur arrivé : donc une rencontre toute simple, qu’on n’a pas de mal à imaginer, nous en vivons tous les jours. Comment expliquer la présence de ce récit proposé à notre méditation aujourd’hui ? Justement ce choix nous appelle à considérer l’importance capitale de toute rencontre. En effet nous sommes des êtres sociables, nous ne pouvons pas vivre totalement repliés sur nous-mêmes, selon le projet de Dieu dès la création du monde. L’accomplissement de notre vocation de créature ne se réalise que dans la rencontre avec l’autre ; et dans la mesure où nous donnons de l’importance à toute relation avec les autres, nous grandissons en humanité, et nous nous reconnaissons enfants d’un même Père, frères et sœurs, appelés à bâtir ce que Jésus appelle le royaume de Dieu. Et en cela Marie a accompli sa vocation dans sa plénitude, la rencontre avec Élisabeth étant le modèle, l’exemple le plus emblématique de ce que peut être une vraie relation humaine. Et si saint Luc a pris la peine de relater cet événement au début de son évangile, c’est bien parce qu’il considérait que Marie, en se précipitant vers sa vieille cousine, réalisait déjà toute la mission qui était la sienne, à savoir donner, apporter son fils Jésus. C’est d’ailleurs pour cela qu’Élisabeth et le fils qu’elle porte en son sein exultent à la voix de Marie entrant dans la maison.

Paul VI, au terme du concile Vatican II, déclarait que l’Église était conversation, que c’était là sa principale mission, entrer en dialogue avec le monde : un dialogue qui se vit chaque fois que les chrétiens vivent la fraternité au cours des innombrables rencontres du quotidien. Le pape François, dans son encyclique ‘Fratelli tutti’ revient sur cette nécessité de la rencontre, qui n’est autre que celle de Dieu avec l’humanité, par Jésus, né de Marie. Et si l’Église en ce jour solennel fête Marie en osant annoncer qu’elle n’a pas connu la corruption de son corps après sa mort, ne serait-ce pas pour dire que nous sommes tous appelés comme elle à aller vers les autres, quels qu’ils soient , sans a priori, et que c’est ainsi que nous recevons la vie de Jésus, mort et ressuscité ? De quoi attacher une grande importance à toutes nos relations humaines, et pour cela d’avoir un bon agenda !

André Jobard
15 août 2023

« Viens » – homélie du dimanche 13 août 2023

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Les lectures du jour

« Viens »

Beaucoup d’entre nous avons du mal avec l’Ancien Testament. Nous préférons déguster et méditer un passage d’Évangile, une histoire de Jésus comme disent les enfants. Une des raisons c’est que dans l’Ancien Testament, Dieu se révèle souvent, dans le discours des prophètes et par ses interventions, sous des images qui font peur, celle du chef de guerre, de la vengeance, ou du juge sévère, comme s’il lui fallait de la force pour s’imposer dans un monde violent. Des éditeurs ont même effacé quelques versets de certains psaumes pour réduire cette image violente alors que dans d’autres le Seigneur se montre plein de douceur, faisant se rencontrer l’amour et la vérité, s’embrasser la justice et la paix.

L’image de douceur l’emporte sur celle de la violence quand le prophète Elie guette le passage du Seigneur à la caverne de l’Horeb. Le Seigneur n’était ni dans l’ouragan, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu. Il était dans le murmure d’une brise légère. Quand souffle la tempête, on a peur, on s’enferme, on s’inquiète pour ceux qui sont dehors. La tempête ne dit pas Dieu. Elle ne sent pas Dieu. Mais quand on ouvre les volets et qu’on voit frissonner les feuilles des arbres et que la douceur du vent frais glisse sur la peau, on y reconnait le souffle de l’Esprit. On sent Dieu.

Quand Jésus s’est fait Homme pour visiter son peuple et délivrer son message d’amour, il a renoncé à la violence et a choisi la douceur et la tendresse.

Écoutons-le dire à Pierre de le rejoindre en marchant sur le lac. Il lui dit « Viens ». On aimerait entendre le ton de sa voix quand il dit « Viens ». Il n’y a aucune colère, probablement la pointe d’autorité qui inspire confiance, en tout cas beaucoup de tendresse. « Viens », c’est ce que dit le père en tendant les mains à l’enfant qui risque ses premiers pas. « Viens », c’est ce que dit la grande fille à sa petite sœur pour l’inviter à sauter dans le grand bain où elle l’attend en lui ouvrant les bras. Viens » dit l’institutrice à l’enfant timide pour qu’il montre à tous le dessin qu’elle va s’efforcer de valoriser. « Viens », c’est le guide qui aide son ami à traverser la crevasse sur un pont de neige tout en l’assurant solidement. Ce « Viens » adressé à Pierre par Jésus, nous pouvons l’entendre aujourd’hui.

« Viens », c’est ce que dit le Seigneur par la voix du prêtre ou du diacre à l’enfant qui s’avance vers le baptistère après que ses parents aient affirmé leur confiance en Dieu. « Viens », c’est ce que dit le Seigneur au pêcheur qui craint de demander le sacrement du pardon, et à celui qui hésite à s’approcher de la table de communion parce qu’il ne se sent pas digne… alors qu’il vient de dire « Dis seulement une parole et je serai guéri ». « Viens », c’est ce que dit avec tendresse le Seigneur au mourant qui s’accroche à la vie pour apaiser ses dernières angoisses.

Dans l’Évangile, Jésus manie le pluriel pour s’adresser aux foules : « Venez à moi ». Mais aujourd’hui c’est « Viens », un singulier qui s’adresse à chacun au cours de cet été pour prendre le temps d’une prière singulière en se laissant bercer par la brise de l’esprit. Le livret proposé par l’EAP peut y aider.

Vincent Boggio
13 août 2023

Pour un avenir lumineux – homélie du dimanche 6 août 2023

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Pour un avenir lumineux

« Sur une haute montagne ». Si vous avez eu la chance, qui fut la mienne, de faire l’ascension de cette montagne de Palestine, vous pouvez sourire sur le qualificatif de ‘haute’, cette montagne ne s’élevant que de quelques centaines de mètres de la plaine de Galilée. A comparer avec les sommets des Alpes, cette haute montagne est bien petite. Si l’évangéliste dit qu’elle est haute, c’est parce qu’elle tient une place capitale dans toute l’histoire biblique, et dans la révélation chrétienne. Et nous pouvons en conclure que cet épisode doit être un moment-clé de l’aventure de Jésus avec ses disciples.

Un moment-clé parce qu’ils viennent de vivre la première mission de Jésus, qui fut un succès (guérisons, miracles, paroles fortes, enseignement qui a fait vibrer les foules etc…). A tel point que Pierre n’hésite pas à reconnaître en Jésus le Messie tant attendu par tout Israël (ce Fils d’homme, comme l’annonçait le prophète Daniel dans la première lecture et en qui Jésus s’est reconnu). Mais voilà que Jésus va lui-même rectifier la perception qu’a Pierre de la mission qui lui est confiée, et prévient ses amis que tout cela va mal finir, jusqu’à la mise à mort violente, celle de la croix. Imaginez le choc produit chez ces hommes qui avaient tout misé sur Jésus, attendant de lui de quoi surmonter les épreuves de la vie, parce que tout-puissant, parce que reprenant le pouvoir de David, figure emblématique du roi envoyé de Dieu. Ils se demandent s’ils n’ont pas fait fausse route en quittant tout pour le suivre. Douloureuse interrogation, qui continue peut-être de nous travailler, nous et nos contemporains : à quoi bon la foi, à quoi bon Jésus, si la guerre continue ses ravages, si les catastrophes atteignent les plus faibles, si la maladie nous tombe dessus, si la réconciliation demeure impossible ?

Face au désarroi de ses amis, Jésus prend l’initiative de cette ascension sur la montagne, là où on peut prendre un peu de hauteur, un peu de recul par rapport à la réalité, là où ont eu lieu nombre de révélations fulgurantes dans la Bible (Moïse, Élie, notamment). Il ne s’agit pas d’un retrait du monde, mais de comprendre le sens des événements qui nous atteignent. Dans la lumière de cette rencontre inoubliable, intraduisible (d’où les expressions symboliques), les amis de Jésus vont découvrir que son chemin de vie, chemin de douleurs, d’échec, d’humiliation, de mort, tels nos propres chemins, peut déboucher sur une nouvelle réalité (que les évangélistes appellent la gloire, à ne pas confondre avec la gloriole dont se couvrent les puissants de ce monde). Nous dirions plutôt en langage moderne ‘accomplissement de soi’, ‘réalisation de notre vocation humaine’. Ce sera d’ailleurs ce qui se passera quelque temps plus tard, où sur une autre montagne, le Golgotha, le calvaire, Jésus mourra sur une croix, après avoir dit ces mots si denses : « Tout est accompli ». Un accomplissement authentifié par la gloire de la résurrection, la vie nouvelle du matin de Pâques.

Une rencontre exceptionnelle donc, qui ne dure qu’un instant, même si l’envie est grande de s’y installer, (n’est-ce pas, Pierre, toi qui voudrais dresser 3 tentes ?) Elle se termine par cette invitation à se mettre à l’écoute de Jésus. Quand on a été saisi par une rencontre décisive au cours de son existence, par une expérience spirituelle forte, qui a permis d’avancer, de trouver sens à la vie et à ses soubresauts , il est rare de ne pas ressentir un déclic pour un changement profond de comportement, d’état d’esprit : une sorte d’appel intérieur qui est peut-être la réponse à la parole de Jésus qu’il nous faut toujours écouter.

André Jobard
6 août 2023

La foi : un trésor, une perle rare – homélie du 30 juillet 2023

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La foi : un trésor, une perle rare

« Avez-vous bien compris tout cela ? » Ce n’est pas moi qui vous pose la question, comme si vous étiez à une séance de catéchisme, c’est Jésus qui veut savoir auprès de ses amis ce qu’ils ont compris de toutes ces paraboles qu’il vient de raconter au sujet de ce qu’il appelle le royaume des cieux. Vous allez m’objecter qu’en ce dimanche de juillet, en pleine période estivale, notre préoccupation première n’est peut-être pas celle du royaume des cieux.

Et pourtant si nous sommes venus là aujourd’hui, à cette messe, c’est bien parce que nous avons conscience de posséder un certain trésor, une perle rare, images qu’emploie Jésus pour désigner ce royaume des cieux. Nous n’employons pas exactement ce terme, mais plutôt celui de la foi au Christ. Que de fois ne disons-nous pas, et notamment dans les épreuves  : « quelle chance que nous ayons la foi ! », sous-entendu comment peuvent vivre ceux qui n’ont pas la foi ? C’est ici qu’il nous faut alors nous demander ce qu’est la foi et comment elle peut être un trésor, une perle fine pour nous : s’agit-il de la simple affirmation des dogmes de l’Église, contenus dans ce que nous appelons le Credo, proclamé chaque dimanche ? Je trouve cela bien terne et peu enthousiasmant s’il n’y a pas derrière ces formules une expérience humaine, un vécu concret.

La réponse à notre question, je la trouve dans cette attitude de ceux qui ont découvert le trésor ou la perle et qui vont vendre tout ce qu’ils possèdent pour acheter leur merveilleuse découverte. Dans le fait de se dessaisir de toutes ses autres richesses, je vois que ce trésor de la foi ne peut se découvrir que dans une certaine pauvreté. Pauvreté, pas seulement matérielle, mais surtout dans ce que nous éprouvons quand nous ne pouvons plus compter sur nos seules forces. A ce moment-là ne reste plus que la confiance, confiance en l’autre, en l’avenir surtout si le chemin de la vie est plongé dans les ténèbres. Un trésor que l’on trouve chez les pauvres, chez tous ceux (peut être nous-mêmes d’ailleurs) qui ont tout perdu. Perte de biens matériels, des récoltes détruites par la grêle, des maisons brûlées par les incendies ou détruites par la guerre. Je pense aussi à un échec professionnel, à une santé dégradée, à l’harmonie familiale compromise ; ça peut être enfin la perte d’un être cher. La foi, la confiance qu’un avenir est possible dans ces épreuves peut alors être une chance extraordinaire, inouïe, qui fait dire avec le psalmiste : « mon bonheur, c’est la loi de ta bouche, plus qu’on monceau d’or ou d’argent. »

Jésus, sur son chemin de vie, a découvert ce trésor de la foi; alors qu’il allait vivre la plus tragique des situations humaines, son arrestation, son dépouillement total, sa mise à mort, il a redit sa confiance en son Père, source de vie nouvelle, manifestée par sa résurrection. Ce que les théologiens appellent le mystère pascal et qui est le centre de notre foi chrétienne, voilà notre trésor que nous allons célébrer une fois de plus dans cette eucharistie, à condition que notre prière rejoigne celle de Salomon, qui ne demande ni la richesse, ni la santé, mais la capacité à discerner le bien et le mal. Et nous croyons que Dieu lui-même à la fin des temps, saura faire le tri en jetant dans la fournaise tout ce qui nous empêche d’acquérir pleinement ce trésor, nos résistances à nous laisser dépouiller de tout ce qui n’est pas vital. Oui demandons la sagesse pour nous concentrer sur l’unique nécessaire, le trésor, la perle fine, ce qui nous procurera la vraie joie.

André Jobard
30 juillet 2023

Une Parole pour notre temps – homélie du 9 juillet 2023

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Une Parole pour notre temps

« En ce temps-là… » souvent les évangiles commencent par cette expression « en ce temps-là, in illo tempore » se souviennent les plus anciens d’entre nous, quand l’évangile était proclamé en latin. On peut se demander pourquoi les auteurs ont cru nécessaire de contextualiser les paroles de Jésus, qui sont devenues des paroles universelles qui ont traversé le temps. On sait que le contexte permet de comprendre toute la portée de ces paroles, qui peuvent devenir parole de Dieu dans notre propre histoire, dans notre actualité : oui Dieu nous parle aujourd’hui dans ce qui fait notre actualité collective. Et bien sûr celle-ci , c’est celle des violences qui ont éclaté dans notre douce France et qui sont le sujet majeur de toutes nos conversations, souvent intenses et passionnées. Que nous dit Dieu aujourd’hui à travers cette parole ?

Dans la première lecture, il est question de l’avènement d’un roi, aux caractéristiques surprenantes : juste, victorieux, pauvre, venant sur un ânon. Les auditeurs du prophète Zacharie attendaient un sauveur puissant capable de résoudre leurs difficultés après le retour d’exil. Il leur promet un roi aux moyens les plus dérisoires, qui pourtant ‘brisera l’arc de guerre, et proclamera la paix aux nations’ : un message de paix, de non-violence ; on est loin de ce qu’on a pu entendre ces jours-ci dans la bouche de nos médias et responsables politiques prompts à dégainer des mesures radicales.

C’est bien ce que proclame aussi Paul, quand il dit que nous ne sommes plus sous l’emprise de la chair, mais celle de l’Esprit. Traduisons :’depuis que vous avez connu le Christ, que vous avez reçu par le baptême son Esprit, vous vivez une réalité nouvelle ‘ vous ne devez plus vous contenter de suivre l’opinion publique, surtout quand celle-ci, emportée par des médias et politiciens, crie à la vengeance.

Bien sûr, face aux événements qui nous bousculent, nous déstabilisent, nous sommes pauvres et démunis ; c’est donc bien à nous que Jésus s’adresse dans l’évangile, comme à tous ceux qu’il a déjà rencontrés dans son ministère en Galilée. Devant la colère de tout un peuple, que dire ? Par moments on a pu dire à Dieu :’le fardeau est trop lourd, on ne sait plus où on va.’ Peut-être nous faut-il dans un premier temps reconnaître cette sidération, cette impuissance devant le déchaînement de tant de colères, avant de juger, de trancher entre le bien et le mal. Notre prière doit se situer à ce niveau, confiant que le Seigneur seul peut nous procurer le repos. A condition bien sûr qu’avec lui nous fassions l’option pour les pauvres, les sans-gloire, les exclus. Eux en effet ont tellement de choses à nous révéler sur ce qui est important dans la vie, sur la fraternité, bien plus que tous les savants, les experts qui commentent l’actualité à longueur de journée et prétendent avoir la solution sur tout. Peut-être nous faut-il jeûner , pas nécessairement de pain ou d’eau fraîche, mais d’informations continues qui génèrent un malaise permanent, une défiance universelle. Chrétiens, amis de ce Jésus dont le joug est facile à porter, n’avons-nous pas à prendre un peu de distance vis à vis de ce prêt-à-porter intellectuel que nous déversent les médias et qui envahit nos conversations ? Et peut-être aussi prendre le temps de réfléchir, et remettre en question notre mode vie, notre consommation, notre désir d’avoir toujours plus, alors que nous savons que tout cela est source d’injustice, de pauvreté, de frustration.

Par sa parole, Dieu rejoint notre actualité ; quand tout semble s’écrouler, elle peut nous éclairer et surtout nous porter à la confiance et à l’espérance.

André Jobard 9 juillet 2023

Messe d’Au revoir du Père Michel – homélie du dimanche 2 juillet 2023

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Messe d’Au revoir du Père Michel

Frères et sœurs, bien-aimés dans le Christ, réunis dans cette Église de la Visitation, le Christ veut, une fois de plus nous nourrir de sa Parole qui est source de vie. Plusieurs thèmes peuvent être abordés au regard des textes que nous venons d’écouter.

Dans l’évangile, nous voyons Jésus réclamer un amour prioritaire face à tous ceux qui nous sont les plus chers, comme un père, une mère, un fils, ou une fille, bref, un membre de famille très aimé. On s’étonnerait peut-être de cette attitude de Jésus et pourtant, Jésus n’émet pas une idée originale. C’est qu’il reprend en écho le tout premier commandement de Dieu donné à Moïse pour le peuple d’Israël sur le Mont Sinaï : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Unique. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. » (Deutéronome 6,4-5). Oui, Dieu mérite d’être aimé au-dessus de tout.

Ainsi, à l’exemple des Apôtres qui ont refusé d’obéir au Conseil suprême et au grand prêtre lesquels voulaient les obliger à ne plus parler de Jésus, nous sommes appelés à opérer à certains égards un choix en faveur de Dieu face à certaines contraintes des hommes et du monde. Ils disaient en fait : «  Il nous faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Actes 5, 29). En agissant ainsi, nous nous associons comme eux, à la mort et à la vie de Jésus dont nous parle Saint Paul dans la lecture d’aujourd’hui.

En effet, morts au péché avec le Christ, nous participons à sa résurrection pour la vie éternelle. Nous devenons des êtres renouvelés dont la vie tire son modèle dans le Christ qui a passé toute sa vie à faire du bien. (Actes 10,38). Aujourd’hui, il nous propose d’accueillir chez nous l’étranger. (Mt25,35). Cette invitation se retrouve tant dans la première lecture que dans l’Évangile que nous venons d’écouter. C’est dire jusqu’à quel point ce message d’hospitalité est parmi les thèmes essentiels sur lesquels nous devons méditer aujourd’hui et dont il faut fournir l’effort de concrétiser dans notre vie.

Cette femme riche de Sunam qui a accueilli le prophète Elisée a semé dans une terre fertile dont elle a cueilli un fruit jamais soupçonné jusque-là : un fils. Oui, elle a enfin eu un fils, elle qui pourtant se savait stérile et dont le mari était très âgé. Ce récit nous rappelle celui d’Abraham qui, ayant également accueilli des étrangers de passage, obtint la promesse d’un fils, Isaac, avec sa femme Sara, une femme stérile et tous les deux avancés en âge. (Genèse 18,1-15) ; ou encore celui d’Elisabeth stérile qui enfanta Jean le baptiste de Zacharie, un mari qui était tout autant avancé en âge comme elle. (Luc 1,36). « Car rien n’est impossible à Dieu » (Luc 1,37). Dieu est celui qui récompense les bons actes. Si nous exerçons une franche hospitalité vis-à-vis de nos prochains, nous exprimons par là-même notre amour vis-à-vis de Dieu qui est dans le prochain. « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Matthieu 25, 40). En outre, Dieu n’attend pas que nous fassions l’impossible. Notre geste d’amour doit simplement être motivé par un sentiment de bienveillance émanant de notre cœur en toute simplicité et sincérité. Oui, dit-il, « même un simple verre d’eau fraiche offert » peut nous devenir une source de grâce et de bénédiction. Jean Rodhain disait : « Nul n’est trop pauvre pour n’avoir rien à partager et nul n’est trop riche pour n’avoir rien à recevoir » (Fondateur du Secours catholique).

Faisons un examen de notre conscience. Quel est mon sentiment face à l’immigré qui a croisé mon chemin ? Quelle a été la nature de mon geste de charité auprès de l’étranger que j’ai soutenu ? Car comme le disait Raph Waldo Emerson, « vaines et inutiles sont toutes les offres d’hospitalité s’il n’y a pas de fête dans le regard ». Savez-vous qu’un sourire peut mieux fortifier un corps affaibli qu’un morceau de pain offert sans joie ? Faisons accompagner nos gestes de charité de la gratuité de cœur.

Puisse le Seigneur nous aider à l’aimer par-dessus tout, à vivre nos engagements baptismaux et à ouvrir notre cœur au service de notre prochain. Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, Amen !

Donat Michel Tembo Umba

Manger la chair de Jésus : une expérience unique à vivre avec Dieu sans être anthropophage ! – homélie du dimanche 11 juin 2023

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Manger la chair de Jésus : une expérience unique à vivre avec Dieu sans être anthropophage !

Chers frères et sœurs, chers amis,

Nous célébrons dans ce mystère du saint sacrement du corps et du sang de Jésus, l’une des plus grandes nouveautés du christianisme. Et cette nouveauté n’est pas inventée par l’Église, mais par Jésus lui-même. Le mystère du corps et du sang de Jésus est le point culminant de nos célébrations dominicales et l’objet de notre plus grande vénération. Et pourtant il reste un mystère. Si nous lui enlevons cette dimension mystérieuse, nous ferons de l’eucharistie un geste banal, qui n’a rien de sacré, et finalement coupé de sa source et de son origine qu’est Jésus lui-même et son sacrifice sur la croix.

Dans l’Évangile que nous venons d’entendre, les juifs qui écoutaient Jésus sont choqués par ses paroles, et c’est peut-être aussi le cas pour nous : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? ». Mais Jésus, n’en démord pas, il insiste et enfonce même le clou : « si vous ne mangez pas la chair du fils de l’homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous ». Cela m’inspire deux choses :

  • La première est le caractère unique de cette communion à la chair de Jésus. En effet, dans l’Ancien Testament, il est formellement interdit de boire le sang de quelque animal que ce soit et surtout pas le sang d’un être humain. Parce que dans le judaïsme, le sang est le siège de l’âme. Manger la chair humaine est aussi strictement interdit, parce qu’elle est gorgée de sang. Mais alors cet interdit absolu a pour but, comme c’est souvent le cas dans la Bible, de préserver une expérience unique et profonde à vivre avec Dieu lui-même. Manger de la chair et boire du sang sans être un anthropophage devient possible dans le cadre d’une expérience unique, intime et intense qui transfigure.
  • La deuxième chose, est que nous pouvons être vivants, débordants de vie, sportifs, en excellente santé, joyeux et apparemment heureux, sans avoir la Vie en nous. La vie avec un grand V, la vie de Dieu. La vie qui donne sens à la vie. La vie qui fait vivre non pas seulement pour aujourd’hui mais pour une existence éternelle et impérissable, une expérience que nous pouvons entrevoir avec les lunettes de l’espérance, et que nous pouvons anticiper dès à présent. C’est ce que l’Eucharistie réalise en nous. Elle nourrit la vie de Dieu que nous avons reçu à notre baptême. Elle irrigue les sécheresses qu’il peut y avoir. Elle nourrit véritablement l’âme.

Qu’en est-il de ceux qui ne sont pas chrétiens ? Eh bien heureusement qu’il y a le Saint Esprit pour s’occuper de les conduire par les chemins que lui seul connaît vers l’accomplissement plénier de cette union à Dieu que nous anticipons déjà pour notre part, sans y comprendre grand-chose, dans notre communion à l’eucharistie.

Notre communion eucharistique, nous unit les uns aux autres, mais elle nous unit d’abord et avant tout, de manière intime, dans un corps à corps et dans un cœur à cœur, à la personne de Jésus. Chaque eucharistie devient alors alors le plus intime de tous les rendez-vous d’amour qui puissent exister.

Judicaël Mitokpey
11 juin 2023

Fête de la Sainte Trinité – fête du signe de croix – homélie du dimanche 4 juin 2023

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Fête de la Sainte Trinité – fête du signe de croix

Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit.

Pas une prière qui ne commence et ne finisse par ces paroles. Pas une célébration en communauté qui ne commence et ne finisse par ce geste pour dire dans un même temps l’unité de l’assemblée et sa foi au Dieu Trinité. Le signe de croix est le geste majeur de la prière chrétienne. Avec l’habitude, il peut perdre du sens. Pour celui qui dit que la Foi l’a quitté, ce geste reste parfois un réflexe quand il entre dans une église.

Jésus ne faisait pas le signe de croix, même au début du Notre Père ! Le signe de croix est apparu dans les premiers siècles de l’Église, d’abord en signant le front avec trois doigts. Puis la parole de ceux qui priaient à haute voix le Dieu trois fois saint s’est fondue avec le geste de ceux qui traçaient sur leur corps la croix glorieuse du ressuscité. Le signe assemble donc en un instant le corps de celui qui prie, le mystère de la,Trinité et la croix du christ.

Le signe de croix a traversé les siècles. Il traverse aussi notre vie. Notre baptême a commencé par le signe de croix tracé sur notre front d’enfant ou de catéchumène. C’est à la fois une inscription et une transmission, invitation à adopter le signe et à le reproduire. Et nos obsèques se termineront par un signe de croix tracé avec l’eau de la vie sur notre corps.

L’enfant découvre le signe de croix avec ses premières prières et les premières célébrations. Il observe que des adultes le font avec solennité et d’autres avec timidité. Un jour en regardant un crucifix, il fait le lien entre la croix tracée de la main et la croix du supplice. Mais le lien entre le geste et l’invocation des trois personnes de la Trinité est beaucoup plus délicat. Il peut prendre toute une vie. Nous sommes bien loin de la sainteté d’Elisabeth de la Trinité qui priait ainsi : « O mon Dieu, Trinité que j’adore… ; ô mes trois, mon tout, ma Béatitude… 

Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. Le geste est majestueux.

« Au nom du Père ». La main droite se met en mouvement. La paume tournée vers la personne, la main se dirige vers le haut, vers le ciel, vers son immensité infinie en invoquant le créateur, Père de tendresse et de miséricorde. La main s’arrête. Elle touche le front comme pour faire entrer dans la tête un peu de cette puissance d’en haut et mettre l’intelligence à contribution dans la prière.

« Au nom du Fils ». La main descend comme une source féconde vers la terre qui nous est confiée. Elle s’arrête à hauteur du coeur, symbole de la vie et de l’amour. On invoque le Fils qui a donné sa vie par amour de l’humanité.

« Et du Saint-Esprit ». La main va d’une épaule vers l’autre. Les épaules, siège de la force, de la charge portée, de la mission commune. La main passe devant la poitrine qui respire. On invoque alors l’Esprit Saint, sa force et son souffle de vie.

« Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprt. Amen ». La main droite rejoint la main gauche. La prière ou la célébration peuvent commencer.

Vincent Boggio
4 juin 2023 – Fête de la Trinité

Laisse le saint Esprit accorder et jouer le violon de ta vie ! – homélie du 28 mai 2023 – Pentecôte

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Laisse le saint Esprit accorder et jouer le violon de ta vie !

Chers frères et sœur, chers amis.

Il me semble qu’en règle générale, on se souvient toujours du jour de sa première communion. Mais on se rappelle rarement ce que le prêtre a dit ce jour-là. Encore faut-il se rappeler du nom du prêtre ! Ce n’est pas bien grave, le plus important pour tous les nouveaux communiés n’est pas d’abord ce que le prêtre a dit le jour de la première communion. C’est encore moins le prénom du prêtre. J’ai presque envie de dire que c’est tant mieux si on oublie tout cela. Tant mieux, à condition qu’on n’oublie pas cette grâce solennelle et ce jour solennel. L’essentiel chers amis, c’est que l’habitude de communier ne deviennent pas pour vous une routine banale et dénuée de signification. Si donc vous oubliez le père André et moi, si vous oubliez vos animatrices de KT qui vous ont préparés, si vous oubliez que votre première communion était à l’église de la visitation. Ce ne sera pas bien grave. La plupart des adultes qui sont ici ont peut-être oublié aussi tout cela. Mais vous voyez bien qu’ils sont là autour de vous. Ils sont là pour célébrer le dimanche qui est jour du Seigneur. Eh bien vous aussi, même si vous oubliez tout, n’oubliez pas que le dimanche est le jour du Seigneur. Le jour où, unis à toute l’Église vous pourrez communier au corps de Jésus avec la même ferveur que celle du jour de votre première communion.

Vous vous souviendrez peut-être aussi que vous avez fait votre première communion le jour de la fête de Pentecôte. Ce jour où toute l’Église célèbre la descente de l’Esprit Saint sur les disciples de Jésus et accueille ce même Esprit qui nous unit à Jésus. En pensant à ce que l’Esprit Saint va faire en chacun de vous, à ce qu’il fait en chacun de nous, je me suis souvenu de cette histoire que j’ai lue quelque part.

Un jour, au coin d’une rue grouillante de monde, un mendiant essayait en vain d’attirer l’attention des passants en jouant de son violon très désaccordé. C’était peine perdue ! Tout le monde était indifférent. Aucun regard ne s’arrêtait sur lui, et personne ne songeait à déposer la moindre piécette dans sa gamelle désespérément vide. Voici qu’arriva un homme vêtu de manière très élégante, qui lui demanda bien gentiment de lui prêter son instrument, rien que pour un instant. Le mendiant s’exécute avec empressement, en espérant recevoir en retour une petite gratification. Et avec ses doigts d’expert, le monsieur accorde le violon et se met à jouer d’une manière si admirable que bien vite, des foules s’attroupent autour de lui. Il y a une pluie de pièces dans la gamelle et même des billets de banque, à la grande joie du clochard, qui bondit sur ses pieds et se mit à dire à tout le monde : « C’est mon violon ! C’est mon violon !» Alors amusée par la fébrilité de cet homme qui se couvre de la gloire d’autrui, la foule lui répondit :« C’est bien ton violon mais il est à présent dans d’autres mains. »

Cette histoire me fait penser que nous sommes comme ce mendiant qui joue de manière désaccordée le violon de notre vie. Et quand l’Esprit Saint vient nous prendre, il accorde parfaitement le violon de notre vie pour jouer de divines mélodies qui nous réjouissent nous-mêmes et réjouissent tous ceux et celles qui nous rencontrent. Pentecôte, c’est la joie de se laisser saisir par l’Esprit de Dieu pour devenir des êtres nouveaux intimement unis à Jésus. Ces langues de feu qui se posent sur chacun des disciples dans la première lecture signifient que l’Esprit est donné à chacun en vue de la mission qui lui est confiée.

A chacun est donné vraiment en ce jour de Pentecôte la capacité et la force d’aller jusqu’au bout de sa mission dans le monde en se laissant guider par l’Esprit Saint. Laissons-nous donc conduire par l’Esprit Saint. Et vous chers amis, en attendant de recevoir le sacrement de la confirmation dans l’Esprit Saint, vous vivez déjà unis au corps, à l’âme et à la divinité de Jésus grâce à ce même Esprit. Jésus a encore beaucoup de choses à vous dire et à vous apprendre. Communiez chaque dimanche de votre vie et parfois en semaine si vous en avez l’occasion. Et n’oubliez pas de l’écouter.

Judicaël Mitokpey
28 mai 2023 – Pentecôte

L ‘Ascension : la résurrection accomplie – homélie du jeudi 18 mai 2023 – Fête de l’Ascension

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L ‘Ascension : la résurrection accomplie

Aujourd’hui je suis habité d’une prétention inhabituelle : j’ai envie de vous parler de ce qui se passe après la mort, comme si je le savais plus que vous : c’est la fête de l’Ascension qui a suscité en moi ce désir. J’entends souvent des personnes dire : « après ma mort je vais retrouver mon mari, mes parents, mon enfant trop tôt disparu… » légitime et bien compréhensible attente. Ce qui sous-entend que nous rêvons de revenir à ce que nous aurons vécu sur terre, allant même jusqu’à reprendre nos vieilles habitudes dans une existence confortable libérée de tout souci… Avec peut-être parfois cette interrogation : « est-ce qu’on ne va pas s’ennuyer à être constamment en adoration devant Dieu ? »

C’est ainsi que la résurrection de Jésus a pu être vécue par ceux qui en ont été les témoins : un retour à la vie antérieure, une reconstitution du passé. C’est d’ailleurs ce qu’expriment les apôtres qui vont jusqu’à dire : « bon maintenant n’est-il pas temps de s’attaquer au vrai problème : la libération du joug romain et l’instauration du royaume d’Israël ? » Or c’est à ce moment où ils rêvent tout fort que Jésus les quitte définitivement. Voilà une invitation à lire autrement la résurrection de Jésus et par conséquent la nôtre, puisque nous sommes son corps. Et c’est ici que la fête de l’Ascension a toute sa place.

Ascension : spontanément on pense à élévation physique, ascension du Mont Blanc par exemple, ou bien ascenseur pour atteindre l’étage d’un bâtiment, et bien sûr l’avion qui monte dans le ciel pour franchir les océans. Sans oublier les fusées qui nous transporteront sur Mars ou autres planètes : c’est ainsi qu’avaient compris mes premiers élèves de catéchisme, à qui, tout jeune séminariste j’avais pourtant tenté d’expliquer le sens second de l’ascension : ils avaient dessiné des fusées ! Mais on parle aussi d’ascenseur social, pour évoquer une promotion au travail, dans l’habitat, dans les responsabilités, y compris dans l’Église (où le carriérisme n’est pas absent!). Cela peut nous permettre de comprendre que la résurrection de Jésus n’est pas un simple retour à la vie antérieure mais une transformation de tout son être. Assis à la droite du Père comme nous le chantons aujourd’hui, il réalise ainsi sa vocation première, celle de tout être humain appelé à s’ouvrir à l’immensité de l’amour, tel qu’il l’a vécu lors de sa vie terrestre. Et le nom de cet immense amour, c’est Dieu lui-même ; et donc être assis à la droite de Dieu, c’est être tout près de l’amour. Jésus nous entraîne avec Lui dans cette ascension et nous communique sa force, son Esprit, pour, selon sa dernière instruction aller, aller vers les autres, aller témoigner de la puissance de l’amour, à travers l’amour que nous aurons les uns pour les autres.

Et nous savons combien l’amour est source d’une vraie joie ; surtout si celui-ci requiert une démarche de pardon, de vérité, de sortie de son confort : un avant-goût du paradis, car aimer son prochain, surtout celui qui est dans le besoin c’est aimer Jésus qui s’est reconnu dans le plus pauvre des hommes. Et au paradis l’amour, qui peut-être nous engagera encore, nous comblera bien au-delà des attaches familiales, même si celles-ci peuvent demeurer.

Nous voilà revenus à notre question de départ, où nous nous demandions quelle tournure prendrait la promesse de la résurrection. Bien malin celui qui s’aventure sur ce terrain : une seule chose est certaine que nous rappelle l’Ascension de Jésus. A travers ce texte splendide de la lettre aux Éphésiens, Paul annonce ceci : notre vie sera totalement transformée et nous serons comblés de l’amour infini dans lequel vit Jésus ressuscité, présent tous les jours jusqu’à la fin du monde.

André Jobard
18 mai 2023 Ascension

Ces cousins qu’on n’aime pas fréquenter – homélie du dimanche 14 mai 2023

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Ces cousins qu’on n’aime pas fréquenter

Chers petits amis, du caté et des aumôneries,

J’ai choisi de m’adresser plutôt à vous ce matin. Ce n’est pas grave si les adultes ne comprennent pas. Vous leur expliquerez si vous suivez bien. Je voudrais vous raconter une histoire. A la fin de l’histoire vous m’aiderez à trouver la morale de l’histoire, les leçons qu’on peut en tirer pour nous. C’est une histoire qui s’est passée dans la première lecture. C’est l’histoire d’un homme appelé Philippe.

Dans la cette lecture, nous voyons Philippe qui est un diacre comme Vincent notre diacre, qui s’est retrouvé en Samarie et qui s’est mis à proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus aux samaritains. Les samaritains sont les cousins éloignés des juifs, ces cousins qu’ils n’aiment pas trop parce qu’ils ne sont pas tout à fait dans les clous par rapport à la religion et à la culture des juifs de Jérusalem. Ils se sont mélangés à d’autres peuples par des mariages et ils ont créé d’autres autels en dehors du temple de Jérusalem pour adorer Dieu. Pour les juifs de Jérusalem, les samaritains sont les cousins à éviter.

Mais Philippe ne s’est pas retrouvé chez eux par hasard. A Jérusalem, une grande persécution avait éclaté contre les chrétiens. Et ils ont dû fuir. Dans leur fuite ils se sont retrouvés dans les territoires éloignés de Jérusalem, et ils se sont mis à parler de Jésus dans ces territoires. Philippe s’était donc retrouvé à Samarie, parce qu’il fuyait lui-aussi la persécution qu’on faisait subir aux disciples de Jésus. L’un d’eux appelé Étienne avait même été tué et on cherchait à les mettre tous en prison.

Et voici qu’à Samarie, chez ces cousins chez qui on n’aime pas trop aller, des foules se sont attachées à la Bonne Nouvelle de Jésus proclamée par Philippe et sont devenues chrétiens en recevant le Baptême. Et les apôtres Pierre et Jean qui étaient restés à Jérusalem sont venus à Samarie pour s’en rendre compte et pour confirmer les Samaritains dans la foi, en priant pour eux et en leur imposant les mains pour qu’ils reçoivent l’Esprit Saint, comme certains parmi vous les enfants, vont le recevoir l’année prochaine.

Quelle est la leçon de l’histoire ? Il y a au moins deux leçons à tirer.

La première leçon, c’est que, quand nous pensons que tout se passe mal, en règle générale, il y a que le Seigneur n’a pas dit son dernier mot. Il se sert même des situations difficiles pour étendre son royaume et pour opérer des choses par nous. Avec la persécution des disciples, on croyait peut-être que tout était fini, étant donné qu’ils se sont dispersés dans toute la région. Mais voilà qu’au contraire, ils se mettent à répandre la Bonne Nouvelle de Jésus partout où ils sont. Dîtes-vous donc quand les choses ne se passent pas comme vous souhaitez, que Dieu a quelque chose à accomplir au détour de la situation.

La deuxième leçon, c’est que ceux que nous voyons comme des personnes infréquentables et que nous ne voulons surtout pas croiser, sont aussi dans le cœur et dans le projet de Dieu. Elles sont aussi aimées de Lui. Elles sont aussi capables de recevoir la Bonne Nouvelle de Jésus. Et peut-être que Dieu nous enverra vers elles pour leur transmettre cette Bonne nouvelle.

La conclusion de l’histoire, c’est ce que Jésus dit dans l’Évangile. « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements et moi je prierai le Père et Il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous ». Est-ce que vous aimez Jésus ? Voila une question toute simple à laquelle chacun peut répondre. Aime-moi, te dis Jésus. Aime-moi parce que moi je t’aime. Et si tu m’aimes, tu garderas mon commandement. Le commandement de Jésus, c’est d’aimer les autres qui ne sont pas comme nous. Puisque cela n’est pas toujours facile, si tu aimes Jésus, tu recevras ce Défenseur qui t’aidera à aimer les autres, à aller vers ceux qui pour toi sont comme les samaritains, c’est-à-dire des gens qui ne sont pas comme tu penses qu’ils devraient être. Ce Défenseur s’appelle l’Esprit Saint.

Judicaël Mitokpey
14 mai 2023

Des lunettes adaptées – homélie du samedi 13 mai 2023

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Des lunettes adaptées

On me demande parfois si je reprends des anciennes homélies pour cet exercice hebdomadaire. Je les relis souvent, du moins celles que j’ai gardées, mais il est très rare que je les reprenne en entier, tellement elles sont datées, en lien avec l’actualité du moment, et donc inadaptées à aujourd’hui. Exceptionnellement cette fois-ci, je me suis beaucoup inspiré de ce que j’avais pu vous dire en 2017 ; certains d’entre vous vont peut-être reconnaître mes propos d’alors, tandis que moi j’ai eu l’impression de découvrir pour la première fois ces paroles datant de 6 ans. J’avoue donc humblement que je reprends mon commentaire sur ces paroles pleines d’espérance de Jésus : « je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi ». Paroles bienvenues dans le contexte actuel, où tout porte à la désespérance, au repli sur soi et à la peur du déclin de notre civilisation chrétienne. Nous le verrons vivant : quelles lunettes devrons-nous chausser pour le voir ?

Je suis donc allé chez mon opticien lui expliquer mon cas ; il est sûr qu’il est resté perplexe devant ma demande. Il m’a proposé un télescope, estimant qu’avec cet appareil, j’avais une chance d’apercevoir une trace de Dieu dans le ciel, mais je n’y croyais pas vraiment. Heureusement j’ai aperçu dans un recoin de son magasin, un paquet qu’il n’avait pas encore déballé. Devinez ce qu’il y avait dedans : des lunettes extraordinaires, pas des lunettes déformantes qui ne voient que du noir partout, mais des lunettes qui portent la vue très loin non dans le ciel mais sur la terre, jusque dans les plus petites réalités de la vie, des lunettes qui suscitent le chant, provoquent l’émerveillement. Elles font voir le sourire d’un enfant, elles font voir le dévouement extrême d’une personne à l’égard de son conjoint atteint d’une grave maladie, elles font voir l’engagement des artisans de la paix et de la justice au cœur-même des conflits les plus violents. Elles révèlent une réconciliation obtenue après une incompréhension, elles font voir la beauté de la nature en cette saison printanière. Bref des lunettes extraordinaires pour voir tout autrement les choses les plus ordinaires de la vie. Vous ne serez pas surpris que porteur de ces lunettes merveilleuses, je n’ai pas voulu les enlever, et j’ai quitté l’opticien en dansant de joie, car j’avais vu le Seigneur : pour la petite histoire, dans mon exultation je ne me souviens plus si j’ai payé ces lunettes qui n’ont pas de prix ! J’avais tellement hâte de partager ma découverte avec mes amis.

Depuis lors nos conversations ne s’attardent plus sur les catastrophes que nous déversent à longueur de journée les médias avides d’audience, mais nous avons toujours un fait positif à commenter, de quoi redonner un peu de lumière et de couleurs dans notre actualité bien grise. Alors je pense à cette belle parole de Jésus qui nous dit que nous le verrons vivant ; avec ces super-lunettes, qui sont peut-être cet Esprit qu’Il nous annonce, c’est possible et je comprends mieux pourquoi il prie le Père de nous le donner : Esprit de vérité, de quoi nous remplir de joie, cette joie qui s’est emparée de la ville de Samarie après s’être ouverte à l’évangile.

André Jobard
samedi 13 mai à la Visitation et dimanche 14 mai à Couternon

« Je suis le Chemin » et non « Je suis l’autoroute » – homélie du dimanche 7 mai 2023

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« Je suis le Chemin » et non « Je suis l’autoroute »

Chers frères et sœurs, chers amis

Dans cet extrait d’Évangile, Jésus nous redit qu’il est le Chemin, la Vérité et la Vie. Qu’est ce que cela peut nous dire ? Qu’est ce que cela peut nous faire ? Où nous mène le chemin Jésus ? Que nous révèle la vérité Jésus ? Que nous apporte la vie Jésus ?

Je n’ai pas forcément les réponses à ces questions que je me suis posées moi-même. Mais, Je vous propose de revenir au contexte dans lequel Jésus a dit ces paroles. Nous sommes au soir du Jeudi saint, et Jésus anticipe la fête de Pâque avec ses disciples. Il fait de cette Pâque, sa propre Pâques parce qu’il sait qu’il va être livré et conduit la mort. Aussi confie-t-il à ses disciples, ses dernières volontés, son testament spirituel. Voila le contexte dans lequel Jésus s’exprime.

Mais ces paroles ont été écrites dans un autre contexte. Elles ont été écrites après sa résurrection d’entre les morts. Les disciples se souviennent maintenant de toutes ces choses qu’il avait dites et qu’ils ne comprenaient pas. Tout leur paraît maintenant évident. Et ils nous rapportent ces paroles pour que nous puissions non pas simplement faire notre propre opinion sur ce Jésus, mais pour que nous puissions croire en lui et entrer en communion avec LUI. Et nous aujourd’hui, nous entendons ces paroles, parce que la foi en Jésus Ressuscité nous rassemble en cette assemblée dominicale pour célébrer les mystères par lesquels Jésus nous sauve, et pour recueillir les dons gratuits que Dieu nous faits.

C’est donc du Ressuscité que nous entendons cette proclamation « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie ». Cette proclamation veut susciter et affermir notre foi en lui quel que soit notre itinéraire de vie personnelle et quelles que soient les préoccupations et les problèmes du monde dans lequel nous sommes. A partir de tout cela, on peut comprendre ce que Jésus nous dit, soit dans la logique de l’Évangile : A Philippe qui lui dit « montre-nous le Père », Jésus réponds, qu’il est le Chemin vers le Père. On peut aussi interpréter qu’il nous dit qu’il est Chemin vers le Bonheur, Chemin vers la Paix. On peut interpréter qu’il est Vérité sur Dieu et sur l’homme, Vérité sur l’existence, Vérité sur la Vie. Non pas Vérité scientifique, mais vérité sur la science et sur la Vie. Vérité sur le passé, Vérité sur le présent et Vérité sur l’Avenir. On peut aussi interpréter qu’Il veut nous dire qu’il est la Vie. La Vie de nos vies, la Vie des vivants et de ceux qui sont morts. La vie présente et l’éternité de vie bienheureuse.

Ce chemin, cette Vérité et cette Vie sont en construction continue en chacun de nous, aussi longtemps que notre relation avec Jésus est en construction. Le chemin Jésus n’est pas un chemin facile. Le Père André nous a rappelé vendredi matin, que c’est justement un chemin et non pas une autoroute. Dieu n’a pas promis un chemin facile. Mais il a dit qu’il est Le Chemin. Il n’a pas dit qu’il est un boulevard vers le bonheur. Il a dit qu’il est la Vérité, mais pas que nous nos vérités ou les vérités que nous croyons possédées soient des vérités absolues. Lui il est la Vérité sur l’Absolu. Il nous dit qu’il est la Vie, et non pas qu’il est une vie facile, sans souci. Rappelons-nous qu’il le dit à la veille de la trahison de l’un de ses amis, de ses souffrances et de sa propre mort.

Je pense qu’en même temps que ces paroles nous invitent à la foi et à la confiance en Jésus Ressuscité et Vivant qui marche avec nous sur le Chemin de la Vie et qui nous découvre progressivement sa vérité, elles nous mettent aussi en garde contre toute prétention et toute tentation d’absolutisation de nos points de vue, de nos opinions et de nos croyances.

Si tu veux marcher sur le chemin Jésus, renonce au boulevard et à l’autoroute facile sur lesquelles tu roules la Ferrari de ta vie pour prendre son Chemin ; Pas de panique : sur ce chemin, il y a aussi des fleurs et des rencontres et des points d’eau fraîche. Si tu veux connaître la Vérité Jésus, remets en cause chaque jour tes certitudes et tes vérités que tu crois absolues. Et si tu veux vivre la vie Jésus, abandonne ta vie, ton souffle et tes intérêts dans le souffle de l’Esprit et dans la Vie de Jésus.

Judicaël Mitokpey
7 mai 2023

Le berger qui rassure – homélie du dimanche 30 avril 2023

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Le berger qui rassure

Note à l’intention des enfants. Quand un chrétien vient de mourir, on place son corps dans un cercueil et on le conduit dans une église où sa famille et ses amis viennent prier pour le confier à Dieu. Cela s’appelle « célébrer les obsèques ».
Un jour, on a célébré ici les obsèques d’une femme de 102 ans. Elle avait souvent raconté à ses petits-enfants que, petite fille, elle allait à l’école de Talant à Daix, 3 km à pied, toute seule, en traversant la forêt. [Je ne pense pas qu’il y avait entre Talant et Daix une grande forêt, peut-être un petit bois avec des arbres assez grands pour inquiéter une fillette.] Elle se souvenait que la forêt lui faisait peur mais chaque jour, dans une clairière, elle rencontrait un berger, toujours le même, et elle se sentait rassurée. Pour les obsèques de cette petite fille devenue leur grand-mère, ses petits-enfants ont choisi le psaume que Clément vient de lire : Le Seigneur est mon berger. L’image du berger est une image rassurante. Nous aimons penser à Dieu comme à un berger.
Si on relit l’histoire de Dieu avec son peuple, on voit qu’il a bien les deux qualités du berger, celle du guide et celle du compagnon. Dieu est un guide qui nous accompagne et qui prend soin de nous.
Pourtant, avant la venue de Jésus, quand on parlait de Dieu ou que l’on priait Dieu, on disait rarement « Dieu mon berger », parce que le berger est modeste, pauvre, souvent méprisé. On préférait d’autres images, la grandeur « Dieu Très-Haut, Dieu éternel, Dieu très saint », la solidité « Dieu mon rocher », la puissance « Dieu fort, Dieu tout-puissant », ou encore l’image du roi ou celle de la protection « Dieu mon bouclier ».
Jésus, le Fils de Dieu, n’a pas hésité à se présenter comme le berger ou comme la porte de la bergerie. On pourrait lui dire : « Il faut choisir, es-tu le berger ou la porte ? » Mais chacune des deux images nous dit quelque chose de lui. Celle du berger nous dit sa tendresse pour chacune de ses brebis, chacun de nous. Il nous rassemble, il va nous chercher si nous sommes perdus. Il nous choisit de bons pâturages et des rivières tranquilles. Pour la porte, c’est plus compliqué. Ce pourrait être la porte du Royaume de Dieu ou la porte de l’Eglise présentée comme une bergerie ou simplement la porte de la vie : Je suis venu pour que les brebis aient la vie.
Jésus nous met aussi en garde contre les mauvais bergers, ceux qui rentrent dans la bergerie en escaladant la clôture, sans passer par la porte, c’est-à-dire sans passer par lui. Depuis 2000 ans, des parents, des catéchistes, des prêtres ont ce rôle de pasteurs, de bergers. La plupart sont de bons bergers, même de très bons bergers. Quelques-uns, rarement, sont de mauvais bergers. Ils peuvent faire du mal à ceux qui leur sont confiés, surtout les plus fragiles. Il faut donc faire attention. Comment les reconnaître ? Un mauvais berger, c’est celui qui cherche d’abord son intérêt, son pouvoir ou son plaisir. Heureusement les bons pasteurs sont beaucoup plus nombreux. Quand ils s’occupent de leurs brebis, ils ne cherchent pas leur intérêt, leur pouvoir ou leur plaisir.Ils ont, comme Jésus, un cœur désintéressé. Ils accompagnent leurs brebis en respectant leur liberté.
Vincent Boggio
30 avril 2023

Un autre Dieu – homélie du dimanche 23 avril 2023

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Un autre Dieu

Je vous annonce aujourd’hui un autre Dieu. N’ayez crainte, je ne crois pas être atteint d’un accès de folie, mais la lecture et la méditation de ce grand texte des pèlerins d’Emmaüs, pourtant très connu, m’a une fois de plus bouleversé dans ma perception de Dieu, à tel point que j’ose affirmer que c’est un Dieu encore nouveau qui s’est révélé à moi. Dieu, on n’a jamais fini de le découvrir. L’expérience que vivent ces deux personnages en route vers Emmaüs est riche d’une révélation du Dieu de Jésus.

Tout d’abord Luc nous présente ces deux personnes complètement perdues après ce qui est arrivé à leur ami, un certain Jésus sur lequel ils avaient mis tant d’espoir. Elles vont être rejointes dans leur peur, dans leur désarroi par un étranger qui veut s’associer à leur entretien. Un inconnu qui certainement a repéré leur tristesse se met tout simplement à leur disposition pour essayer de comprendre le sens de ce qui leur arrive. J’aime beaucoup cette attention de Jésus à nos existences, alors que nous déplorons souvent le silence de Dieu, l’accusant d’être indifférent à nos malheurs ; voilà qu’il se mêle à nos conversations. Étrange ce Dieu qui nous rejoint sur nos chemins d’infortune.

Le deuxième point qui m’a séduit c’est le fait que cet étranger a l’audace de rattacher tout ce vécu à un vécu plus large, qui embrasse l’histoire de Dieu avec les hommes, ce qui donne un éclairage déterminant, une lumière qui réchauffe le cœur, et qui appelle à aller plus loin dans le partage, jusqu’à désirer rester ensemble pour le repas tandis que le soir tombe. C’est un Dieu pédagogue qui se présente à ces marcheurs déboussolés ; c’est à nous qu’il donne sa parole pour que nous trouvions sens à nos existences en apparence vides de sens.

C’est donc un Dieu qui se met à notre table dans une auberge de campagne, et qui partage le pain, non sans avoir prononcé la bénédiction : la bénédiction, c’est une manière pour lui de rappeler que tout ce que nous avons, tout ce que nous vivons vient d’un autre, ce qui nous éloigne de toute tentation d’absolutiser notre pouvoir, notre savoir, notre avoir. Pour un moment inoubliable, qui révèle une présence bien au-delà d’une seule présence physique, puisque même quand elle disparaît, elle demeure brûlante dans les cœurs : « à la fraction du pain, ils le reconnurent ».

Loin de rester en extase devant cette révélation, nos deux compagnons se mettent vite en marche et retournent à Jérusalem, pour retrouver les frères et sœurs qui avaient marché avec eux derrière Jésus. Leur peur et leur désarroi se sont transformés en élan enthousiaste pour proclamer que la mort n’a pas eu le dernier mot, que tous nous sommes appelés à dépasser le cycle infernal de la vengeance, de l’indifférence, de la violence, celle-là même qu’a subie Jésus. C’est un Dieu qui veut la vie, qui appelle à renouveler notre comportement et qui se révèle dans les transformations que nous consentons à vivre, même si celles-ci semblent exigeantes. Avouez frères et sœurs, qu’il s’agit bien d’un autre Dieu que celui des tenants des pouvoirs religieux qui voudraient enfermer Dieu dans l’image d’un absolu devant lequel la seule attitude serait de s’abaisser. Le Dieu de Jésus c’est le Dieu de bonté, qui nous veut debout, ressuscités, comme l’est Jésus.

Tout cela nous le vivons dans chaque eucharistie : c’est une rencontre entre frères et sœurs d’une même famille, où nous partageons nos peines et nos espoirs, où nous relisons ensemble et avec lui la grande histoire du peuple de Dieu, à laquelle nous pouvons raccrocher notre propre histoire. Il se met à notre table et nous mangeons le pain après avoir rendu grâce dans la grande prière eucharistique. La fraction du pain renouvelle le signe de sa présence réelle au milieu de nous et nous envoie dans le monde travailler à la résurrection de son royaume d’amour et de paix.

André Jobard
23 avril 2023

« La grâce de Dieu est en promotion » – homélie du dimanche 16 avril 2023

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« La grâce de Dieu est en promotion »

Chers frères et sœurs, chers amis….

Ce temps de Pâques est un beau temps de grâce. La grâce de Dieu peut nous rejoindre à tout moment mais en ce moment, pour employer un langage commercial, je dirais qu’« elle est en promotion ». Il y a une promotion non pas avec 100% de remise, mais avec 200% de remise sur toutes les grâces en ce moment. J’ai pensé aussi que je pourrais peut-être faire une grande enseigne publicitaire, pour annoncer cette « promo ». Et j’ai imaginé que sur cette enseigne, je pourrais peut-être mettre la photo d’une personne qui a soif et qui se désaltère. Et j’écrirai en grand caractère : LE CHRIST EST RESSUSCITE, ÉTANCHE TA SOIF.

Frères et sœurs, la source jaillissante de la grâce et de la miséricorde de Dieu est maintenant descellée ; Et nous sommes tous invités à venir boire abondamment à cette source. Vous pouvez avec raison me demander où se trouve cette source de vie et comment y boire ?

Les récits des apparitions du Ressuscité nous conduisent tous d’une manière ou d’une autre sur les chemins où 2000 ans après cet événement, nous pouvons le rencontrer et surtout boire à sa source vivifiante. Le récit des disciples d’Emmaüs à qui il a expliqué longuement les Écritures avant de se révéler à eux à la Fraction du pain, nous dit par exemple, que le ressuscité nous rejoint sur nos chemins de découragement et d’amertume, et qu’il nous désaltère à la source de la Parole et dans l’Eucharistie.

Dans le récit d’aujourd’hui, Thomas appelé jumeau apparaît comme le frère jumeau de chacun de nous. Après avoir sérieusement douté, Il croit maintenant que Jésus est ressuscité. Il a professé sa foi en contemplant et en touchant les plaies et les marques des blessures du Ressuscité. Et Jésus profite de ce moment unique pour nous faire une promesse, à nous qui sommes les frères et sœurs jumeaux de Thomas : « Parce que tu m’as vu tu crois, heureux ceux qui croient sans avoir vu ».

Frères et sœurs, nous qui croyons sans avoir vu, nous faisons la même expérience du Ressuscité que Thomas, lorsque nous allons toucher et soigner les plaies et les marques des blessures du quotidien : notre soin et notre attention aux malades, aux personnes âgées, aux personnes handicapées, et à ceux et celles qui représentent les blessures du ressuscité dans notre monde. C’est là que se trouve la source abondante. C’est là que l’Évangile nous invite à aller étancher notre soif. Si tu veux étancher ta soif, va donner à boire à celui qui a soif de ta présence, de ton attention et de ton amour. C’est là que le ressuscité t’attend. C’est là que sa grâce, sa bénédiction et sa miséricorde sont en promotion tout le temps, et plus encore en ce temps de pâques. Puisons dans sa Parole et dans son Eucharistie la force pour le contempler aussi dans ses blessures.

Judicaël Mitokpey
16 avril 2023

IL EST VIVANT ! IL EST RESSUSCITE – homélie du dimanche 9 avril 2023 – Pâsques

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Chers amis, chers frères et sœurs,

J’ai entendu dire, qu’à une certaine époque, il y avait dans un pays arabo-musulman, des débats publiques entre chrétiens et musulmans, pour donner l’occasion aux uns, de convaincre les autres de sa foi. A l’un de ces débats, il y avait un pasteur chrétien bien connu pour sa grande foi et pour ses talents de prédicateur. Il laissa le musulman exposé sa doctrine pendant une bonne heure. Et quand vint son tour de convaincre l’assistance, il cria d’une voix forte IL EST VIVANT, et tous les chrétiens présents dans l’assistance répondirent fermement d’une voix forte et unanime, IL EST RESSUSCITE. Et le débat de ce jour s’est arrêté là. Il n’avait plus rien d’autre à dire. J’aurais voulu pour toute homélie, me contenter moi aussi de proclamer ce matin que JÉSUS EST VIVANT, et de vous entendre répondre fort et unanimement qu’il est ressuscité. Me permettez-vous d’essayer : « IL est vivant ! (R/ Il est ressuscité). » J’étais sûr que ça marcherait. L’homélie est dite.

Oui mes frères et sœurs, tout l’univers est réveillé ce matin par la nouvelle. Le tombeau de Jésus vide. Le Christ est ressuscité. Dieu a accompli ce qu’il avait promis. Son serviteur a réussi comme l’a annoncé le prophète Isaïe. Celui qui était complètement défiguré et qui ne ressemblait plus à un fils d’homme, celui qui est mort sur la croix est ressuscité. Il est Vivant. C’est le sommet de l’œuvre de Dieu. C’est l’accomplissement de toute chose. L’humanité et la création tout entière peuvent être renouvelées. La croix de Jésus est l’antidote au poison du mal, et sa résurrection est la garantie de notre salut. Le mal ne peut plus avoir le dernier mot, parce que la Vie a triomphé. Le pardon de Dieu et l’offrande faite par Jésus de sa propre vie sont désormais plus forts que tout.

Nous aurions pu croiser Marie Madeleine sur le chemin qu’elle prend de grand matin pour se rendre au tombeau. Mais c’était il y a deux mille ans. Et nous n’étions pas nés. Cependant son témoignage est encore vrai pour nous aujourd’hui. La Pierre a été enlevé du tombeau. Et Jésus n’y est plus. Pierre et Jean sont venus constater. Le tombeau est vide. Le corps du Seigneur n’a pu être volé. Quel idiot volerait un corps en prenant le soin maladroit d’enlever le linge qui le recouvre. Et Pierre nous dit dans la première lecture que Dieu l’a ressuscité dans les morts, qu’ils l’ont vu vivant, qu’ils ont mangé et bu avec lui après sa mort et sa résurrection.

La résurrection de Jésus appartient au mystère de Dieu lui-même. Elle défie notre raison humaine comme le fait le mystère de Dieu, le mystère de l’incarnation de ce Jésus qui est Fils éternel du Père ou encore le mystère de nos propres existences. La foi en Jésus mort et ressuscité vient dissiper toutes ces ténèbres. Le point de départ de cette foi, c’est Pâques ; Et Pâques, c’est aujourd’hui. Jésus est ressuscité et il fait toute chose nouvelle. Notre présence ici en est le signe et le témoignage.

Et toi Maëlys, tu vas vivre très concrètement tout à l’heure le signe de ce renouveau de toute chose dans la résurrection de Jésus. Tu vas être baptisée, non pas pour devenir membre d’une méga-association appelée Église catholique, mais pour plonger toute ta vie dans la mort et la résurrection de Jésus. Tu deviendras une personne nouvelle. Tu seras marqués à vie et pour toujours par l’onction de l’Esprit Saint qui a marqué et consacré le Christ Ressuscité. Et tu garderas au fond de ton cœur, ce souvenir et cette foi en Jésus qui va continuer à grandir en toi. Et tout au long de ta vie, si tu fais attention, tu t’apercevras qu’il est vivant et qu’il marche avec toi, aussi bien dans les moments de joie que dans les moments de souffrance. Comme tu l’as lu à l’instant, ta vie restera cachée avec le Christ en Dieu. Que la joie du Ressuscité réjouisse à jamais ton cœur, et que sa lumière éclaire ton chemin comme elle éclaire le chemin de vie de chacun de nous. Amen. Il est Vivant, Il est Ressuscité.

Judicaël Mitokpey
9 avril 2023 – Pâsques

L’œuvre de Dieu – homélie du samedi 8 avril 2023 – Veillée Pascale

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Les lectures du jour

L’œuvre de Dieu

Après le sabbat Léontine et Marina* sont venues regarder le tombeau, où repose Jésus, leur nouvel ami. Hier elles avaient été témoins de sa mort, une mort d’une grande violence attisée par la jalousie et la lâcheté des responsables de l’époque. De même qu’elles avaient ressenti en elles un bouleversement très profond à la découverte de ce Jésus, voilà qu’à leur arrivée au tombeau, se produit à nouveau un grand tremblement de terre et, nous dit saint Matthieu, « l’ange du Seigneur descendit du ciel, vint rouler la pierre qui fermait le tombeau et s’assit dessus. » Nous sommes en présence d’une immense révélation, à la fois celle qui a attiré le cœur de nos deux amies, et aussi celle que nous célébrons ce soir dans la joie.

Quelle révélation ? Celle de l’œuvre de Dieu, celui qui agit depuis la création du monde, qui libère le peuple des Hébreux esclaves en Égypte, qui se joue de nos limites humaines (que valent toutes ces pierres, ces murailles que nous érigeons comme protections?), qui défie la mort, qui transforme le cœur des humains, et ce soir le cœur de Léontine et de Marina. Oui, Jésus ressuscité par Dieu est le témoin de la puissance de l’amour de Dieu, amour qui fait vivre au-delà de la mort.

Nous avons là racontée de façon imagée, mais très explicite l’intervention de Dieu ; c’est Dieu qui va casser la spirale infernale de notre désespérance, de nos échecs répétitifs, de notre repli sur nous-mêmes. C’est lui qui a fait sortir Jésus du tombeau, comme il veut nous faire sortir de nos tombeaux, pour que, dira saint Paul, nous menions une vie nouvelle.

Et cette vie nouvelle : quelle est-elle ? C’est d’aller en Galilée, leur dit Jésus, car c’est là que nous le verrons. S’agit-il alors de prendre l’avion et d’aller sillonner les routes de Galilée, de Nazareth, du lac de Tibériade pour le rencontrer ? Bien sûr que non. La Galilée représente notre monde, dans sa grande diversité de peuples, religions, cultures. C’est une province de brassage de populations aux mœurs pas toujours orthodoxes. C’est donc là, dans la vie, dans nos rencontres multiples (voir notre chemin de carême) que nous découvrons le ressuscité. Plus besoin de temple ni d’église. Une seule chose est nécessaire, celle qui a habité Jésus tout au long de son parcours, et spécialement son parcours de mort : la confiance en Dieu, la foi. Il ne cesse d’agir au-delà de nos doutes. C’est cette foi qui nous surprend parfois, comme elle vous a surprises , Léontine et Marina ; la foi en l’œuvre de Dieu pour notre bonheur.

André Jobard
8 avril 2023 – Veillée Pascale

* Léontine et Marina ont reçu les sacrements de la vie chrétienne en cette veillée pascale.

J’ai soif – homélie du Vendredi Saint – 7 avril 2023

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Les lectures du jour

J’ai soif

« J’ai soif » Je me souviens d’une célébration d’obsèques, où avait été lu ce passage de l’évangile. Elle concernait un homme, mon voisin d’immeuble, dont la mort avait certainement été précipitée par une sur-consommation d’alcool. Il avait surtout soif d’amitié, de chaleur humaine, alors qu’il vivait dans une infinie solitude.

Le mot de Jésus « j’ai soif », prononcé en cet instant si douloureux et si particulier, résume bien son attente, ce qu’il porte sur son cœur, une soif qu’un peu de boisson vinaigrée ne saurait suffire à étancher. Quelle est donc cette soif qui l’habite ?

Certainement le désir que ce qu’il a vécu sur cette terre, son message de liberté, de tendresse envers les plus pauvres et exclus, ne demeure pas lettre morte. A l’heure où il meurt condamné pour avoir ouvert les portes de la liberté face aux dirigeants religieux, il a soif que vive cette attention au respect de tout homme et de toute femme. Nous entendons ces mots de Jésus ce soir comme un vibrant appel à nous, ses disciples de poursuivre ce chemin du service et de l’amour inconditionnel. Oui Jésus a soif de notre engagement à construire un monde fraternel.

Je pense aussi que son cri s’adresse à Dieu, qu’il a découvert comme son Père, ce père vers qui tout enfant se tourne dans la détresse. Il a conscience d’accomplir sa vocation, ce pour quoi il est envoyé. A maintes reprises dans le récit de la passion, il est fait mention de l’accomplissement des Écritures. Il ne s’agit pas de comprendre cela comme une fatalité, comme si tout ce que vit Jésus était déjà écrit. En accomplissant les Écritures, Jésus réalise le projet de Dieu, projet largement déployé dans toute la tradition juive, qui était celle de Jésus, projet d’une alliance éternelle entre l’humanité et Dieu. Oui Jésus a soif que se réalise cette alliance et il s’en remet totalement à son père pour qu’aboutisse ce projet, lui-même étant à cette heure plongé dans un profond et total désespoir.

Comment enfin ne pas lire dans ces mots, l’attente de tous ceux qui ont soif de paix, de justice, de santé, de reconnaissance ? Que le cri de Jésus, « J’ai soif » retentisse à leur cœur comme un formidable signe de proximité et d’amour !

André Jobard
6 avril 2023 – Vendredi Saint

Jésus et la souffrance – homélie du dimanche 2 avril 2023 – Rameaux

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Les lectures du jour

« Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi. » Des mots qui trahissent l’état d’angoisse que traverse Jésus : on le comprend. Et on ne peut pas dire qu’il a joué la comédie, qu’il a fait semblant de souffrir. Tout le récit de cette arrestation, de ce jugement, de cette mise à mort révèle la tragédie qu’il vit. Et derrière cet événement on entend certainement le cri de nos frères et sœurs en humanité confrontés aux mêmes épreuves, la maladie, la guerre, l’exclusion, la torture, la fin de vie ; et peut-être certains d’entre nous vivent-ils cela actuellement. Alors surgit la question : pourquoi cette souffrance, pourquoi m’atteint-elle ? Jésus apporte-t-il une réponse ? Pas vraiment ; loin de la justifier, ce qui serait scandaleux et qu’un certain discours a pu entretenir dans la mentalité chrétienne, il vient seulement la vivre jusqu’à son paroxysme, avec ses dernières paroles si bouleversantes :«Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ? »

On sait que c’est par jalousie que les responsables religieux ont condamné Jésus, qui aurait pu éviter cela s’il avait renoncé à ses prises de position, notamment celles où il voulait libérer l’homme de l’emprise des pouvoirs religieux : ses nombreux miracles, ses paroles novatrices, son engagement sans faille pour le respect de la dignité de tout homme, de toute femme lui ont valu cet assaut de violence ; pour cela on dit qu’il est mort par amour pour toute l’humanité.

Et c’est cela qu’ont retenu les soldats qui l’ont crucifié ; ils n’étaient pas experts en théologie, mais à la façon dont Jésus s’était comporté sur son chemin de croix, ils ont compris qu’il ne pouvait venir que de Dieu : « vraiment celui-ci était fils de Dieu ». Sous-entendu, derrière ces mots qui sont une vibrante profession de foi, c’est déjà la manifestation de l’éternité qui émerge de ce désastre ; il est mort, mais il est éternel ; il est vivant, ce que nous célébrerons dimanche prochain. De quoi orienter vers cette éternité toute notre vie avec ses souffrances, ses épreuves, notamment quand elle est portée par un amour immense et vrai.

André Jobard
2 avril 2023

Jn 11, 35 – homélie du dimanche 26 mars 2023

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Les lectures du jour

Connaissez-vous Robert Estienne ? C’est l’imprimeur qui a découpé en versets le Nouveau Testament pour favoriser le repérage et les échanges entre les lecteurs. Exemple : je dis « Luc 20, 25 » et chacun pense « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu« . Ça marche aussi à l’envers : je dis « Commencement de l’Evangile de Jésus-Christ Fils de Dieu », chacun répond « Marc chapitre 1, verset 1 ».

Apprendre la Bible par cœur, ce n’est pas facile ! Il y a 31000 versets. Conseil d’ami : commencez par le plus court. Il est niché dans l’évangile de Jean, au milieu du chapitre 11, le chapitre du milieu, celui que nous venons de lire. C’est le verset 35 : « Jésus pleura« , en latin « Et lacrimatus est Iesus. »

Robert Estienne était imprimeur mais aussi chrétien et humaniste. Je le soupçonne donc d’avoir été ému en lisant ce chapitre et d’avoir sciemment mis cette phrase en relief dans ce petit verset.

« Jésus pleura. » Les larmes de Jésus sont le déversoir du trop-plein de sa compassion, cette couleur que prend l’amour quand on partage le chagrin des autres. Ce n’est pas tant la mort de Lazare qui le fait pleurer que le chagrin, les larmes de ses amis juifs et surtout celles de Marie, l’amie si proche qu’elle avait osé essuyé avec ses cheveux le parfum répandu sur ses pieds, l’amie dont il doit maintenant essuyer les larmes.

« Jésus pleura. » Dans l’Evangile Jésus ne cesse de nous révéler son Père. Aujourd’hui ses larmes donnent du corps à la tendresse de ce Père, tendresse si souvent chantée par les psalmistes. Dieu tendresse pleure avec ceux qui souffrent. Il ne plaît pas à Dieu que les Hommes souffrent.

Comme Jésus, nous sommes parfois confrontés à la maladie et à la mort d’un ami. Jésus connaît les émotions qui, alors, se succèdent ou se bousculent en nous. Il les a vécues.

Lui qui a mis deux jours à se décider, il connaît, comme nous, l’hésitation à l’annonce de la maladie d’un ami − J’y vais ou j’attends. Après tout « cette maladie ne conduit pas à la mort » – hésitation qui peut nous faire arriver trop tard.

Il a senti la colère de Marie qui lui reproche sa responsabilité ­­– « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort » – responsabilité que l’on attribue parfois au corps médical.

Comme nous, il a connu l’odeur du dépositoire.

Il a entendu les doutes des voisins sur sa puissance du Christ : « Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? » – interrogations que l’on entend aujourd’hui sous la forme : « Si Dieu existe, pourquoi permet-il la souffrance la mort ? »

Il a aussi entendu des paroles d’espérance : « Tout ce que tu demanderas à Dieu, il te l’accordera » et des paroles de Foi « Je sais qu’il ressuscitera le dernier jour« .

Toutes ces émotions, entendues ou vécues par Jésus au moment de la mort de Lazare, les équipes d’accompagnement au deuil les repèrent dans la voix des familles des défunts. Jésus a vraiment partagé notre humanité. S’il nous arrive, quand nous sommes devant la maladie ou la mort, de douter de la tendresse de Dieu, nous pouvons murmurer Jean chapitre 11, verset 35 : « Jésus pleura.« 

Vincent Boggio
26 mars 2023

Jésus et les opticiens – homélie du dimanche 19 mars 2023

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Les lectures du jour

Je parlais hier avec une personne qui vend des lunettes, et je lui racontais cette histoire que nous venons d’entendre. Comment pensez-vous qu’elle a réagi ? Elle m’a dit que si cela se passait encore aujourd’hui, des gens, comme Jésus, qui rendent la vue à des aveugles ou à des personnes qui voient mal, elle serait obligée de fermer sa boutique. Des gens qui ne voient pas ou pas bien, il y en avait du temps de Jésus, et hélas, il y en a encore maintenant un certain nombre : ils sont donc obligés de porter des lunettes (tant mieux pour les opticiens!). Jésus ne guérit plus les aveugles, mais il nous dit, à travers ce récit, plein de choses, de belles choses. Car nos yeux sont souvent bouchés, ou bien ne voient qu’une partie de ce qui existe. On s’en est déjà aperçu avec l’histoire de Samuel et de David, ce que vous les enfants avez bien traduit : dans notre vision des choses, on s’arrête souvent sur l’apparence, sans voir ce qu’il y a dans le cœur des personnes, et du coup on va classer les autres selon des jugements superficiels, des a priori, selon ce que pensent la majorité des gens. « Celui-là il n’est pas bien habillé, il est mal coiffé, il a plein de boutons, il ne sait pas jouer au foot, il a une option politique qui ne me plaît pas… » sans voir que derrière cette apparence, il y a peut-être un garçon très gentil, une fille très intelligente, une belle personnalité.

C’est ici que l’histoire de la guérison de l’aveugle de naissance prend tout son sens ; en effet les témoins de cette guérison sont des pharisiens, c’est-à-dire des gens qui avaient un grand souci d’appliquer la loi de Dieu ; ils sont scandalisés de voir que Jésus a opéré ce miracle un jour de sabbat, ce qui était strictement interdit. Alors Jésus va montrer que ce qu’il faut voir, ce n’est pas le fait d’avoir désobéi à la loi, mais le fait que cet aveugle a retrouvé la vue ; et de cela il faut se réjouir. Et plus important encore c’est de voir que cet homme a compris que celui qui l’a guéri est un envoyé de Dieu, sur qui il peut compter : on dit alors qu’il a foi en lui. Sa guérison en fait va le conduire à voir autrement la réalité de sa vie.

Quand parfois on est tout triste, quand on a eu une mauvaise note, qu’on s’est disputé avec un copain ou une copine, que les parents nous ont refusé une sortie, un cadeau, ou bien devant la guerre, l’injustice, on a l’impression de voir tout en noir, on dit qu’on est dans la nuit, on ne voit plus pourquoi on vit. Jésus nous dit et nous le redit aujourd’hui encore : « je suis la lumière, et je veux vous conduire à la lumière ». Oui, si nous croyons en lui, si nous mettons notre confiance en lui, bien des choses, même les plus difficiles, les plus obscures vont s’éclairer.

Même si on a des problèmes de vue et qu’il nous faut porter des lunettes (tant mieux pour les opticiens !), avec Jésus on peut voir clair.

André Jobard
19 mars 20
23

La richesse d’une rencontre – homélie du dimanche 12 mars 2023

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Les lectures du jour

« Ce n’est pas à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons… » L’évangéliste saint Jean ne craint pas de se faire rappeler à l’ordre par les féministes qui peuvent lui reprocher de mentionner que les samaritains donnent plus de crédit à la parole de Jésus qu’à celle de la femme. Ils ont donc dû faire un pas de plus pour prendre au sérieux les paroles de cette femme, qui, par son témoignage va conduire ses compatriotes à reconnaître en Jésus le Sauveur du monde. N’est-ce pas là une bonne nouvelle, que saint Jean traduit à travers le récit d’une rencontre si particulière au bord d’un puits à l’heure la plus chaude de la journée. Une bonne nouvelle pour nous, surtout à l’heure où nous doutons de la capacité de notre Église à l’annoncer à nos contemporains.

Au bord de ce puits s’engage donc une conversation, toute simple, anodine, comme celles nombreuses que nous pouvons avoir dans la vie ordinaire : « j’ai soif, veux-tu me donner un peu d’eau ? Quelle chaleur ! » En fait pas si anodine qu’il n’y paraît, puisqu’elle va déboucher sur une révélation tout à fait exceptionnelle de l’identité de Jésus. La samaritaine est la figure d’un peuple mal considéré par les juifs, qui avait fait sécession et refusait le pouvoir des religieux de Jérusalem. Les cinq maris dont il est question, certains commentateurs affirment qu’il s’agit des dieux qui sévissent dans cette contrée toute proche des terres païennes, de là son interrogation sur le culte à rendre à Dieu. Peut-être vivait-elle aussi dans un vide affectif considérable qui lui fait crier sa souffrance : « je n’ai pas de mari ». Ces samaritains et cette femme sont peut-être l’image de notre condition humaine, jamais satisfaite ; incapable d’aimer vraiment, de rétablir la paix, de résoudre les différends dans le dialogue, et en recherche de repères et de raisons de vivre ? Quant à Jésus ne serait-ce pas Dieu lui-même, ce Dieu qui a soif pas seulement d’eau fraîche, mais surtout de nous faire connaître la force de son amour, et le chemin pour aller vers lui, en l’aimant en vérité , par toute notre vie, et non par un culte extérieur ?

Finalement à partir d’un verre d’eau, ils vont s’en dire des choses, tous les deux. Ils vont aller très loin dans leur dialogue, à tel point que l’un et l’autre vont oublier ce pour quoi ils étaient venus : la femme abandonne sa cruche, elle n’a plus besoin de l’eau, tellement Jésus l’a comblée. Et Jésus ne daigne même plus manger ce que ses amis lui ont acheté au Carrefour du coin : « ma nourriture, c’est de faire la volonté de mon Père »; c’est de manifester à tous, quelle que soit leur situation religieuse, quelle que soit leur conduite, qu’il les aime passionnément. Le pape Paul VI aimait à dire que l’Église était dialogue ; il me semble que dans ce récit où l’eau fait office d’agent de liaison, le dialogue conduit à la révélation. Dans notre vie, combien de dialogues, d’échanges ont abouti à des découvertes décisives, telle cette eau vive que nos amies Léontine, Marina sont venues chercher en demandant à devenir chrétiennes !

Pour cela il a fallu l’audace, celle de Jésus d’oser demander de l’eau à une inconnue, à une étrangère ; et celle de cette femme qui s’est livrée dans sa recherche du vrai Dieu. Que cette audace nous habite, au-delà des préjugés, des a priori, des peurs ; qu’elle nous fasse grandir dans la rencontre des autres et dans le témoignage de la bonne nouvelle de Jésus.

André Jobard
23 mars 2023

Être à l’écoute et prendre le chemin de la foi – homélie du dimanche 5 mars 2023

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Les lectures du jour

Chers frères et sœurs,

Et si vous étiez Abraham ! Mettez-vous à la place de cet homme. Au moment où ce qui est relaté dans la première lecture lui arrive, il a 75 ans. Si vous avez 75 ans ou plus en ce moment, où si vous ne l’avez pas encore, vous devez vous dire, « A 75 ans, je vais enfin pouvoir me reposer ». Ou bien, « je ne voudrais pas avoir à affronter des situations imprévisibles ».

Eh bien, comme tous ceux de son âge, Abraham aspirait sans doute à un repos bien mérité. Il habitait à Ur en Chaldée dans un pays tranquille et riche. Et voici que Dieu l’invite à se mettre en route. A 75 ans, Abraham doit quitter sa maison et ce pays où s’était installé son père pour aller vers une destination inconnue. Ainsi, Abraham part à l’aventure sans avoir d’autre référence que sa foi en Dieu, ni d’autre certitude pour le guider que la promesse de Dieu. Il n’avait pas d’enfant, et à 75 ans Dieu lui promet un fils et une descendance nombreuse. Devenu Pèlerin de la foi, il écoute l’appel du Seigneur et laisse derrière lui une situation prospère pour marcher vers l’inconnu. Dans ce récit de la vocation d’Abraham, Dieu ne mentionne même pas le nom du pays où Abraham doit se rendre. Il lui dit simplement : « quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton Père et va vers le pays que je te montrerai. »

Abraham est invité dès le départ à vivre dans une disponibilité totale. Il ne peut calculer la distance à parcourir ni prévoir les étapes à franchir, parce qu’il s’agit d’un itinéraire à découvrir jour après jour, avec les risques d’égarement et les difficultés de discernement.

Nous ne sommes pas Abraham, et pourtant nous sommes tous invités à prendre ce chemin, quel que soit notre âge et quelle que soit l’étape où nous en sommes dans notre vie. Parce que ce chemin, c’est le chemin de la foi. La foi est un appel. Appel à avancer sur un chemin qui n’est pas tracé d’avance, en ayant la certitude que Dieu nous y devance et qu’il saura nous guider.

Il y a trois autres personnes qui ont été appelées dans les textes de ce dimanche. C’est Pierre, Jacques et Jean qui, dans l’Évangile, sont témoins de la manifestation glorieuse de celui qui a annoncé qu’il devrait souffrir et être mis à mort. Jésus leur annonce sa passion et juste après, il leur manifeste sa gloire. Puis ils sont invités à redescendre avec cet ordre de n’en parler qu’après que le Fils de l’homme ressuscite d’entre les morts. Sans doute parce qu’il leur faut attendre ce moment pour comprendre. On ne doit parler que de ce que l’on a compris. Sur le chemin de la foi, on ne comprend pas tout immédiatement. Le chemin de la foi est un chemin de silence parfois. C’est un chemin de carême. La foi nous fait cheminer derrière une personne qui nous sauve non pas d’une manière puissante et facile, mais au prix de sa souffrance.

Comment rester attentif sur ce chemin ? comment ne pas être troublé par le caractère surprenant et imprévisible de l’appel ou par la perspective douloureuse de la croix ? La réponse à cette question est dans ce que les trois disciples ont entendu sur la montagne : « celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le ». Cette exhortation « Écoutez-le » est la réponse à notre peur de la souffrance et de la croix. Cette exhortation est la réponse à notre peur de l’imprévisible. La foi est un chemin imprévisible. Mais sur ce chemin, nous pouvons être certain que Dieu nous devance et qu’il nous parle. Puissions-nous garder l’oreille attentive pour entendre sa voix et pour écouter, c’est-à-dire obéir.

Judicaël Mitokpey
5 mars 2023

Satan et l’Esprit Saint – homélie du dimanche 26 février 2023

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Les lectures du jour

Satan et l’Esprit Saint

Aujourd’hui il est donc beaucoup question de serpent, de diable et de Satan : peut-être pensiez-vous que ces êtres maléfiques avaient disparu de notre vocabulaire chrétien. Eh bien non. Pourquoi donc ? Si ces mots ont traversé les siècles, les générations, et je dirais-même toutes les cultures, ne serait-ce pas parce qu’on n’a pas trouvé meilleur moyen de traduire et de mémoriser une expérience qui se passe dans le cœur de l’homme tiraillé entre l’appel du mal symbolisé par le démon et l’appel de sa conscience ? Une expérience spirituelle qui le bouleverse, le met à l’épreuve, le fait grandir et l’aide à faire de bons choix dans la vie . Regardons Adam et Eve, ne sont-ils pas les parents de tout homme, de toute femme qui a le désir de s’ériger en juge du bien et du mal, la tentation de se prendre pour Dieu grâce à ses exploits technologiques, à l’intelligence artificielle, à la conquête de l’espace ? Le résultat, l’homme se découvre nu, vulnérable. Et pour Jésus, qui vient de réaliser à son baptême qu’il est fils de Dieu, la tentation est forte d’utiliser cette identité pour se jouer des contraintes de notre nature humaine… un peu pareil quand nous estimons que notre statut de chrétien, de gens de prière, et de généreux donateurs au denier de l’Église devrait nous mettre à l’abri de tout danger. Oui la tentation est présente en permanence dans nos vies ; en la personnalisant sous les traits de Satan, du diable ou du serpent, l’humanité reconnaît la force du mal, et sa puissance dans le déroulement de nos histoires personnelles et collectives. Mais la bonne nouvelle, dans ces tentations, dans ces déserts que nous traversons, nous ne sommes pas seuls, puisque l’Esprit Saint nous pousse au désert, et nous assure que nous grandirons ainsi dans la confiance en Dieu, le seul qui puisse apaiser notre faim.

Nous pouvons alors accueillir cette parole de Dieu à tout âge, à toute époque, dans toute culture, et y puiser sans cesse des raisons d’espérer, sans nous laisser dominer par de supposées puissances démoniaques.

André Jobard
25 février 2023

Mettre tout son cœur – homélie du 22 février 2023 – Cendres

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Les lectures du jour

Mettre tout son cœur

Samedi dernier, les fidèles présents à la messe présidée par Judicaël ont eu la chance de l’entendre au moment des annonces parler du jeûne et de l’abstinence préconisés pour ce temps du carême. Par des mots dignes d’un Père de l’Église il nous a invités non pas à des exercices surhumains mais plutôt à mettre tout notre cœur dans ce que chacun décidera. Il me semble qu’il a vu juste, et que saint Matthieu qui nous rapporte l’évangile ce soir ne dit pas autre chose. L’important n’est pas de réaliser des exploits visibles, dont on pourrait tirer orgueil, mais de vivre dans une communion vraie et profonde avec le Seigneur.

Je voudrais reprendre cette disposition du cœur et l’appliquer à ce qui guidera notre carême ici à la Visitation, je veux parler de la rencontre : rencontre avec soi-même, rencontre avec les autres, rencontre avec le Seigneur. Tout au long des dimanches la parole de Dieu nous présentera des rencontres… ce qui laisse entendre que ce sont elles qui nous font avancer, qui sont déterminantes dans la vie. Nous verrons alors que les rappels de Jésus entendus dans notre évangile concernent aussi notre façon de vivre les rencontres : qu’elles ne soient pas le moyen d’une emprise sur l’autre, sur sa liberté. Que ce soit une rencontre libérée de la volonté d’accaparer, de prendre possession de l’autre. En quelque sorte une gratuité dans nos échanges. Comme d’ailleurs dans l’aumône, le partage : « que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite ». Ou bien que ton jeûne ou ta prière ne soient pas une façon de te glorifier aux yeux des autres !

Vous le constatez : nous sommes loin d’exercices de hautes performances, héroïques. Nous sommes invités à retrouver la chance d’une disposition du cœur pour un dialogue vrai avec nous-même, avec les autres, avec Dieu. Le cœur, nous y revenons : débarrassons-nous de ce cœur de pierre pour accueillir le cœur de chair que Dieu nous donne. Et vivons notre carême avec un cœur sincère.

André Jobard
22 décembre 2023 – Cendres

Tendre la joue – homélie du dimanche 19 février 2023

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Les lectures du jour

Tendre la joue

« Vous donc vous serez parfaits, comme votre Père céleste est parfait » Voilà, ça c’est dit !

Matthieu conclut son 5ème chapitre avec cette parole de Jésus : ce n’est pas une demande de sa part, mais une constatation : « Vous donc vous serez parfaits, comme votre Père céleste est parfait » . Il nous en sait capable.

Ce chapitre 5 commence par les béatitudes : « heureux sommes nous d’être ce que nous sommes : des enfants de Dieu » avec nos joies et nos peines. En tant qu’enfants de Dieu, nous devons être des témoins, ses témoins : des lumières pour les hommes, ce sel qui donne de la saveur à la vie, à l’humanité. Et Jésus annonce le programme : « je ne suis pas venu abolir la Loi et les prophètes, mais l’accomplir » et il nous montre le chemin à suivre et nous explique en détail comment nous devons mettre en pratique la Loi et les prophètes.

« Vous avez appris que…», eh bien « mais moi je vous dis que… », pas pour dire le contraire, mais pour préciser les choses, pour aller au-delà de ce que l’on a envie d’entendre. Quand on prend la première lecture, on entend les mêmes choses que dans l’Évangile : « tu ne haïras pas ton frère dans ton cœur… Tu ne te vengeras pas… Tu ne garderas pas rancune contre les fils de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même » : On vous as appris, on vous a dit tout cela, on vous a dit de suivre et de faire tout cela, mais que nous dit Jésus aujourd’hui ?: Il nous demande de déplacer les lignes, d’appliquer ces bonnes paroles non seulement « aux fils de ton peuple » mais également à nos ennemis : notre prochain. Là, il faut avouer que cela devient plus compliqué : « Si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre » Pas simple ! J’avais entendu comme explication à cette parole de Jésus que si une personne, en face de vous, vous donne une gifle sur la joue droite, elle le faisait avec le revers de la main et que le fait de lui présenter l’autre joue, on s’exposait au plat de sa main qui sert le plus souvent à caresser, qui invite à un geste de tendresse,( d’ailleurs Jésus ne dit pas que l’on recevra une deuxième gifle sur cette joue) : on donne ainsi la possibilité à l’autre de « demander pardon » en quelque sorte. On ouvre la porte au repentir de l’autre.

Toutes ces invitations de Jésus ouvrent en quelque sorte la porte à un mieux, à un meilleur. Faire mille pas de plus : pas pour le plaisir de faire mille pas de plus, mais les faire avec l’autre. « fais-en deux milles avec lui ». « Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! Moi, je vous dis : aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent » :

Voilà un an que la guerre fait rage en Ukraine : faut-il couper les ponts des négociations pour autant avec Poutine ? Le choix n’est pas simple, mais s’il n’y a plus de place pour le dialogue : comment fait-on pour trouver une issue ? Il faut priez pour les victimes de cette guerre et également priez pour lui, pour le faire revenir à la raison. Et puis honnêtement, on est pas toujours du bon côté : Pour mes « ennemis », le mot est fort, mais pour mes « ennemis » : je suis moi-même leur ennemi. Est-ce que je peux me regarder dans la glace le matin et me dire que je suis l’ennemi de personne ? Non, sincèrement je ne crois pas !

Saint Paul nous ramène à cette réalité : « Que personne ne s’y trompe : si quelqu’un parmi vous pense être sage à la manière d’ici bas, qu’il devienne fou pour devenir sage. Car la sagesse de ce monde est folie devant Dieu ». Et Audiard de rajouter : « Dieu aime les fêlés car ils laissent passer la lumière ». C’est ce que nous demande Jésus dans cet Évangile : d’être fou pour laisser passer la lumière, cette lumière d’Amour, « l’Esprit de Dieu qui habite en nous ».

Frères et sœurs, nous connaissons le programme : il est simple en somme, à chacun de nous de trouver les ressorts, la force d’aller au-delà de nos peurs, de nos principes, de nos rancœurs et de nos blessures. La semaine prochaine, nous allons entrer en carême, ce sera l’occasion d’avancer un peu plus vers cette lumière.

Écoutons notre cœur, réentendons ces mots de Moïse dans le Deutéronome : « Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique ».

Comme je vous l’ai dit au début de cette homélie, Jésus nous en sait capable : « Nous serons donc parfaits, comme notre Père céleste est parfait »

Stéphane Marion, Diacre
19 février 2023

Visiteuses de La Visitation – homélie du 12 février 2023 – dimanche de la santé

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Les lectures du jour

Visiteuses de la Visitation

L’Évangile est une bonne nouvelle. En voici une autre : le pape a demandé que les homélies ne dépassent pas 10 minutes. Dans 10 minutes vous pourrez dire « Amen ». Aujourd’hui l’Église met en avant les souffrants et les aidants. Cependant les lectures du jour ne sont pas adaptées à une réflexion sur la souffrance et le service aux malades.

Je m’efface donc devant les visiteuses de La Visitation, visiteuses de malades et de résidents en EHPAD, qui ont préparé la messe. Comme prédication, voici des voix de femmes – peut-être une anticipation des conclusions du synode – celles de Médiatrice, de Catherine et de Bernadette. Quand elles visitent les malades au nom de la communauté, elles ont le visage du Christ.

Médiatrice et Catherine : Ce sont des Paroles de Jésus qui ont suscité notre désir de nous engager au sein de l’équipe de visiteurs de malades.

« Si vous saluez seulement vos frères et vos sœurs, qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ? Même les gens qui ne connaissent pas Dieu font la même chose que vous ! »

Ou encore :

« J’étais malade et vous m’avez visité. »
« Seigneur, quand t’avons-nous vu malade et sommes allés te voir ? »
« Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

Oui, ces Paroles de Jésus, nous les avons prises comme une invitation à aller à la rencontre de nos frères et sœurs éprouvées par la maladie, le grand âge ou un sentiment d’isolement, pour témoigner, par notre présence à leurs côtés, de l’amour de Dieu pour eux.

Raymond a fait partie de ces frères. Nous lui avons rendu visite pendant trois ans. Cloué sur son fauteuil roulant quand il n’était pas dans son lit, il nous étonnait par sa force de vie, son enthousiasme à aborder les nombreux sujets qui le passionnaient toujours. Il évoquait avec fougue son séjour en Algérie, sa vie dans le Jura, son enfance dans la pauvreté, sa passion pour les chiens et son penchant pour les bonbons à l’anis de Flavigny… Son visage s’éclairait alors et nous étions émerveillées de voir chez ce frère, dont l’horizon depuis des années se bornait aux murs de son appartement, autant d’enthousiasme et de vitalité.

A défaut de pouvoir se déplacer jusqu’à l’église, il participait aux messes télévisées et restait marqué par une homélie, un lieu. Il appréciait la lecture de l’Écho de la Visitation qui le mettait en lien avec la paroisse et le rapprochait des paroissiens. Sa fille parfois présente à notre arrivée lui annonçait notre venue en disant « C’est l’Église ! ». Le dialogue concernant la foi s’établissait alors dans la confiance. Sans pour autant se plaindre, il se demandait souvent ce que le Seigneur attendait pour le rappeler à Lui… En novembre dernier, il a été exaucé. Il sait maintenant la joie qui fut la nôtre tout au long de cet accompagnement et combien il aura nourri notre foi.

Bernadette : Dans le cadre de la pastorale de la santé, je rencontre Alda et Antonio. Ils vivent chez eux et sont accompagnés par leurs enfants qui les aident dans les taches de la vie quotidienne. Je leur rends visite tous les quinze jours, le dimanche pour prier ou dans la semaine pour discuter.

Alda est accueillante et a toujours le sourire, Antonio est plus discret dans son coin regardant la télévision. Au début, je ne portais la communion que pour Alda, Antonio ne manifestait pas le désir de la recevoir. Puis lors d’une visite un dimanche, je me suis rendue compte qu’Antonio priait en même temps que nous. Du coup, j’en ai profité pour lui demander s’il souhaitait communier aussi.

La fois suivante, ils ont reçu le Corps du Christ tous les deux et nous avons vécu un beau moment de joie tous les trois. 

Amen

Vincent Boggio – 12 février 2023 – dimanche de la santé

Isaïe et l’intelligence artificielle – homélie du dimanche 5 février 2023

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Isaïe et l’intelligence artificielle

L’intelligence artificielle, on en parle beaucoup en ce moment. Et cette semaine, plusieurs amis m’ont encouragé à me tourner vers cette technique révolutionnaire, et à lui demander de me fournir, en guise d’homélie, un texte très correct qui pourrait remplacer avantageusement ce que ma petite intelligence humaine pouvait produire. Comme je suis féru d’informatique (!), je me suis précipité sur mon ordinateur et j’ai suivi les consignes en allant sur l’application ChatGPT, sans succès. Il m’a donc fallu revenir à mon humble travail de composition, et heureusement j’ai trouvé une homélie remarquable… chez Isaïe (1ère lecture).

En effet Isaïe répond bien à ma difficulté (qui est peut-être aussi la vôtre) de combiner le sel et la lumière, deux entités que Jésus nous propose comme modèles pour être ses disciples. Le sel et la lumière sont totalement opposés : le sel c’est la discrétion, l’enfouissement, alors que la lumière c’est l’éclat, la visibilité. Comment les tenir ensemble ? Il me semble que le prophète Isaïe a trouvé la réponse : « partage ton pain avec celui qui a faim, accueille chez toi les pauvres sans abri… ne te dérobe pas à ton semblable », toutes activités qui se réalisent souvent sans bruit, dans la discrétion, comme le sel qu’on ne voit pas dans la nourriture et qui donne la saveur aux aliments. « Alors, poursuit Isaïe, ta lumière jaillira comme l’aurore ». Nous le voyons : le lien est établi entre sel et lumière. Pas question de chercher à se montrer, à brandir des bannières de notre identité de disciples de Jésus, si au départ il n’y a pas ce désir de mettre nos pas dans ceux de la justice.

Petite explication pour comprendre la raison de ces paroles si puissantes d’Isaïe. C’est à un moment de désillusion : après le retour d’exil, si longtemps attendu, si fortement désiré, la restauration commence : on reconstruit le temple, on reprend le culte avec enthousiasme. Hélas les difficultés ne tardent pas à revenir, les vieilles injustices réapparaissent, tandis que les plus fidèles se lancent dans des dévotions du passé, dans l’espoir de plaire ainsi à Dieu. Le prophète comprend bien que le salut, l’avenir ne peuvent se dessiner dans le mépris des pauvres, dans la course au confort individuel, ou dans de pieuses dévotions. Il se trouve dans le souci de la justice qui, mise en tête de notre marche, devient lumière. Si nous mettions Dieu à la place de la justice, ce serait le réduire à n’être qu’un veau d’or, une idole parmi d’autres. Il fallait un certain courage à ce prophète pour oser proclamer cette découverte dans une époque aux prises avec des tensions, tandis que les plus fidèles songeaient à restaurer le culte et les ruines du passé.

Comment recevoir ces paroles aujourd’hui, dans notre monde déboussolé comme l’était celui d’Isaïe ou celui de Jésus ? Nous savons par expérience comment le fait de mettre en pratique cette justice illumine nos vies. C’est bien vrai dans l’accueil du pauvre, du malade, de l’étranger, ou dans l’engagement associatif, syndical ou politique ; c’est cela qui éclaire nos vies, leur donne sens, et qu’ainsi elles deviennent à leur tour lumière pour d’autres. Essayons de nous rappeler un moment où nous avons fait œuvre de justice, de service fraternel, moment où nous avons peut-être été un peu, à notre place, sel et lumière du monde.

André Jobard
5 février 2023

Les béatitudes comme un miroir de la foi – homélie du dimanche 29 janvier 2023

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Les lectures du jour

Les béatitudes comme un miroir de la foi

Chers amis, chers frères et sœurs,

Je pense qu’il faut tout une vie pour épuiser cet évangile des béatitudes que nous venons d’entendre. On peut l’entendre de plusieurs manières : comme un projet de vie, comme un encouragement… On peut aussi y voir la vie de Celui qui parle : la vie de Jésus qui s’est fait pauvre, petit et qui a été persécuté, avant de faire de sa croix un chemin de gloire, pour tous ceux qui croient et espèrent en lui. Un jour, j’étais jeune séminariste, alors que j’avais fini de lire un livre écrit par un pasteur presbytérien qui parlait avec un très grand enthousiasme de La puissance de la louange (c’est d’ailleurs le titre de ce livre qui contenait beaucoup de témoignages), j’avais dit à mes frères et sœurs qu’il fallait que nous remerciions Dieu pour la maladie et les souffrances atroces de notre tante qui souffrait horriblement. Qu’il fallait que notre tante soit dans l’action de grâce et la reconnaissance pour cette maladie. Je peux vous dire que mes frères étaient bien choqués et scandalisés. On peut bien essayer de rendre grâce à Dieu pour toute chose et pour toute situation (c’est ce que Saint Paul nous recommande), mais s’il vous plait, n’allez pas dire à une personne qui est dans la douleur et qui pleure, que c’est une situation heureuse qu’elle traverse, et que le royaume des cieux lui est donné. N’allez pas dire à quelqu’un qui a faim, « sois heureux par ce que tu as faim, car tu seras rassasié » ; Donnez-lui plutôt de quoi se rassasier ici et maintenant, et vous lui ferez un grand bien.

Il est clairement difficile, voire dangereux d’appliquer les béatitudes aux autres. Elles ne sont pas un argument pour ne pas regarder en face la souffrance ou encore pour esquiver très astucieusement et peut-être même chrétiennement les situations difficiles que nous-mêmes ou des personnes qui nous entourent peuvent traverser. On ne doit pas se cacher derrière les béatitudes pour ne pas lutter pour un monde plus juste et plus apaisé.

Je vous propose de regarder aujourd’hui les béatitudes comme un miroir qui vous renvoie votre propre image. Et peut-être aussi l’image d’un autre.

Quelle image de nous-même nous renvoient les béatitudes quand nous les regardons comme un miroir de foi ? Quand je me regarde dans cette phrase « heureux les pauvres de cœur », je découvre peut-être mes pauvretés ; Quand je médite cette béatitudes « heureux ceux qui ont faim et soif » je découvre mes faims et mes soifs les plus profondes ; en continuant, je peux découvrir mes persécutions, mes combats, mes manques de douceur ou mes besoins de douceur. Mais ce que je découvre aussi et surtout, c’est une forme d’espérance. Espérance et non complaisance. Les béatitudes peuvent nous rassurer. Elles nous disent que la pauvreté de notre cœur peut nous permettre de nous rapprocher du royaume de Dieu ; que notre tristesse peut nous permettre de sentir une vraie consolation, une consolation qui vient de Dieu. Que les persécutions et les situations ne sont pas la fin de tout, et qu’au contraire cela peut servir notre salut éternel. Mais en même temps les béatitudes nous renvoient l’image d’un autre qui n’est pas nous. Elles nous renvoient l’image de celui qui les proclame dans l’Évangile. Et nous invitent à partir de Lui.

Frères et sœurs, le miracle des béatitudes est possible lorsque nous avons les yeux fixés non pas sur nous-mêmes mais sur Celui qui pour nous s’est fait humble et miséricordieux. Et pour cela, nous avons toujours le choix, soit de partir de nous-mêmes comme le centre de tout – et Dieu sait que c’est la plus grande tentation de notre temps – soit d’accepter de nous recevoir d’en haut. Accepter d’être encore « enseignable », de faire les choses non pas comme nous voulons, non pas comme il nous parait agréable et beau de les faire, mais comme Dieu veut qu’on le fasse. C’est une manière d’accepter et d’accueillir les médiations naturelles et institutionnelles (Les enfants par rapport à leurs parents, l’Église, la tradition, la hiérarchie…) Le chemin des béatitudes est pour ainsi dire un chemin d’obéissance où l’on se laisse enseigner par la parole et l’exemple de Jésus. Un chemin où l’on se découvre soi-même comme étant limité, mais alors promis à un bonheur véritable : le bonheur de ceux qui ne partent pas d’eux-mêmes, mais qui accueille la volonté et la sagesse de Dieu. De la nuit de la faim, de la soif, de la persécution et même du doute, pourra naître une lumière. La lumière de la foi. L’obéissance de la foi rend possible pour chacun de nous aujourd’hui le miracle des béatitudes.

Judicaël Mitokpey
29 janvier 2023

Quoi de neuf ? – homélie du dimanche 22 janvier 2023

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Quoi de neuf ?

Finis la vaisselle jetable, la course aux derniers jouets mis sur la marché, le remplacement sans réflexion de tout instrument ou objet défectueux. Place à la réparation, à l’occasion, à la sobriété. Tout cela au nom du devoir de la protection de l’environnement. Cela donne bonne conscience à votre serviteur qui continue de rouler dans une voiture achetée au siècle dernier !

Eh bien, aujourd’hui c’est à du neuf que nous avons affaire… comme dans la publicité qui nous vante jour après jour une nouvelle lessive, une nouvelle application numérique, une voiture neuve, ou un nouveau chef de cuisine dans un restaurant. Oui la Parole de Dieu joue sur le registre du neuf, du nouveau, capable de susciter la joie, l’allégresse, à tel point qu’Isaïe s’aventure à proclamer la promesse d’une ère nouvelle, une période de bonheur à son peuple pourtant plongé dans la désolation et la désespérance. Du neuf Jésus va en apporter aussi dans cette région de Zabulon, Nephtali, et Galilée, région éloignée et méprisée par les responsables religieux de Jérusalem. Du coup c’est l’enthousiasme devant l’arrivée de Jésus, ses paroles ont un impact très fort, si bien que d’humbles pêcheurs partent derrière cet individu qu’ils ne connaissent pas du tout mais qui les a saisis, sur une simple parole « convertissez-vous, car le Royaume des cieux est tout proche ».

Voilà la grande nouveauté apportée par Jésus. Oui le Royaume des cieux est tout proche, reconnaît-il, ce royaume, c’est-à-dire ce nouveau monde de paix et fraternité aimé par Dieu. Il est là bien réel dans ces contrées de Palestine contrairement à ce qu’en disaient les bien-pensants de Jérusalem. Il est là dans notre monde d’aujourd’hui, dans nos sociétés violentes, injustes, très centrées sur la réussite individuelle. Dieu aurait-il déserté, sinon puni notre époque ? C’est tout le contraire qu’annonce Jésus. Quel souffle de fraîcheur dans ces mots qui peuvent nous encourager à témoigner qu’effectivement le Royaume est déjà là ! Là où la solidarité familiale ou de voisinage joue à plein devant l’adversité, là où s’engagent des passionnés de justice, de fraternité pour accompagner des gens en grande précarité. Il est là quand des gens de tout âge, de toute condition, de tout milieu social aspirent à entrer pleinement dans la vie de Jésus par le désir de recevoir le baptême.

« Venez à ma suite ; et je vous ferai pêcheurs d’homme » : j’ai vibré à cette parole au cours de mon adolescence ; à la fois elle apportait une dimension extraordinaire à mon avenir que je voulais tout orienté vers la rencontre, et elle m’assurait de l’accompagnement sans faille de Jésus ; car si c’est lui qui m’appelait à cette noble tâche, il ne pouvait pas m’abandonner. Je reçois cet appel comme s’il était toujours nouveau, et je souhaite vraiment que chacun de nous et toute notre communauté paroissiale goûtent à la joie de cette nouveauté, qui durera plus que celle apportée par les supposés plaisirs de notre société de consommation.

André Jobard
22 janvier 2023

Redécouvrir la grâce d’être aimé et choisi par Dieu – homélie du dimanche 15 janvier 2023

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Redécouvrir la grâce d’être aimé et choisi par Dieu

Chers amis, chers frères et sœurs,

Je voudrais vous parler ce soir (ce matin) d’une chose importante. Je suis sûr que c’est quelque chose qui va vous intéresser. C’est vrai que je ne vais pas vous proposer une affaire qui vous permettra de rentrer chez vous avec un chèque de 30.000 euros. Ce que je vais vous dire n’est pas sur le même plan. Mais c’est aussi important qu’un gros chèque. Je voudrais vous parler d’amour. C’est sûr qu’il y en a parmi vous qui se disent : l’amour oh si tu savais ! Ou encore « tu vas nous chanter la bonne vieille chanson catho, de « Dieu vous aime, Dieu est amour ». Et pourtant, il bien vrai que Dieu est amour et qu’il nous aime inconditionnellement.

Je voudrais vous parler d’amour et d’élection. Pas d’élection de député ou de président de la République, mais d’élection divine. Alors c’est quoi cette histoire d’amour et d’élection divine ? C’est ce qui se passe dans les textes de la liturgie de ce dimanche. Dans la première lecture, le prophète Isaïe donne la parole à un Serviteur de Dieu choisi pour être la lumière des nations. Voici ce que dit ce serviteur : « Maintenant le Seigneur parle, Lui qui m’a façonné dès le sein de ma mère pour que je sois son serviteur. Oui j’ai de la valeur aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force. Il m’a dit : C’est trop peu pour que tu sois mon serviteur, je fais de toi la lumière des nations ». S’il n’y a pas trop de poussière sur votre Bible (Passez un coup de chiffon s’il y en a), n’hésitez pas à l’ouvrir et à lire entièrement ce chapitre 49 du livre du Prophète Isaïe. L’Ancien Testament ne montre pas forcément un visage de Dieu guerrier et vengeur comme on le pense souvent. Plus loin dans ce texte on peut lire ceci : « Une femme peut-elle oublier son nourrisson, ne plus avoir de tendresse pour le fils de ses entrailles ? Même si elle l’oubliait, moi je ne t’oublierai pas. Car je t’ai gravé dans les paumes de mes mains. ».

Il est clair que Dieu est passionnément amoureux de ce serviteur. Et qu’il l’a élu, c’est-à-dire choisi. Pour nous aujourd’hui, ce serviteur qui est la lumière des nations présente une grande similitude avec Jésus. Et même si le texte d’Isaïe l’assimile à tout le peuple d’Israël, les Paroles de Jean Baptiste dans l’Évangile nous disent que c’est bien de Jésus qu’il s’agit. D’ailleurs, c’est en lui et pour lui que Israël a été choisi. Jean Baptiste témoignage que Jésus est l’élu, l’agneau de Dieu, celui qui a reçu la totalité et la plénitude de l’amour de Dieu, celui sur qui repose l’Esprit du Père. Jean Baptiste dit : « tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour lui, pour qu’il soit manifesté ». Et il ajoute : je l’ai reconnu moi-même parce que j’ai vu l’Esprit descendre et demeurer sur lui. Et contrairement à moi, Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint.

Chers amis, le baptême dans l’Esprit Saint est la grâce extraordinaire que nous recevons au jour de notre Baptême. Ce n’est pas un autre baptême. Mais c’est la prise de conscience profonde du feu d’amour qui est allumé en nous et qui parfois ne brûle pas assez parce que recouvert de cendre. C’est le fait de partager et de vivre la vie de Jésus. C’est-à-dire la grâce d’être aimé et choisi de la même manière que Lui. C’est une grâce dont il nous faut constamment prendre conscience et qu’il faut mettre à jour en entretenant la lumière que nous avons reçue à l’intérieur de nous au jour de notre Baptême. Depuis ce jour de notre baptême, Dieu le père en nous regardant, voit son Fils Jésus. Et il nous dit les mêmes paroles que nous avons entendues dans la première lecture : je t’ai désiré depuis toujours, je t’aime d’un amour infini. Tu as de la valeur à mes yeux. J’ai gravé ton nom dans la paume de mes mains. C’est trop peu que tu sois mon serviteur ou ma servante, je fais de toi la lumière des nations. Sois porteur de cette lumière.

Frères et sœurs, se savoir ainsi aimé, élu et choisi pour porter Dieu au monde, c’est plus que gagner au loto. C’est vivre de la vie de Dieu. Aimer de l’amour dont il a aimé et briller de sa lumière. Je nous souhaite à tous de redécouvrir et de vivre profondément la grâce de notre Baptême. D’y trouver notre joie et notre bonheur. Amen

Judicaël Mitokpey, Vicaire
15 janvier 2023

Avec audace – homélie du dimanche 8 janvier 2023 – Épiphanie

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Avec audace

A l’heure des échanges de vœux, j’ai eu l’idée de téléphoner à Balthazar, Gaspard et Melchior, d’abord pour leur souhaiter une bonne année, et surtout pour leur demander s’ils avaient eu un faire-part de naissance du roi des juifs, pour s’être mis si facilement en route en direction d’un pays lointain. Savez-vous ce qu’ils m’ont répondu après m’avoir chaleureusement remercié d’avoir pensé à eux en ce début d’année ? Ils m’ont tout simplement dit qu’ils avaient entendu au fin fond de leur conscience un appel à se lever pour aller rendre visite à ce prétendu roi des Juifs. Cette réponse m’a complètement abasourdi, stupéfié, sidéré : « comment faire crédit à une petite voix intérieure et se lancer dans une telle aventure ? » J’en étais là de mes réflexions quand ils m’ont invité à regarder l’étoile, et donc à lever la tête, alors que j’étais rivé sur mes doutes, sur mes questions, sur mes peurs. Et la conversation s’est interrompue : vraisemblablement une panne de réseau !

J’ai donc regardé le ciel, mais d’étoile je n’en ai pas vu, tellement était forte la pollution lumineuse de nos villes, jointe à un ciel couvert de nuages. Une fois de plus j’étais dans une perplexité extrême, quand soudain me sont revenues les paroles d’Isaïe (notre première lecture), invitant à regarder tout autour de moi, à adopter une attitude d’accueil de l’inattendu, à croire que du bon peut surgir de ce que j’ai tendance à estimer mauvais ou insignifiant. Et cela m’a rempli de joie, à l’instar de la joie qu’ont ressentie les mages à la redécouverte de leur étoile. Il faut dire qu’ils avaient été ‘douchés’ par l’accueil plutôt froid de la part d’Hérode et des responsables religieux de Jérusalem, à qui ils avaient parlé d’un prétendu roi des Juifs qui venait de naître. Le manque d’enthousiasme, sinon la méfiance chez ces derniers avait provoqué chez les marcheurs venus de loin une remise en question de leur initiative : « est-ce que nous nous serions trompés ? » Heureusement l’étoile était réapparue après leur visite à Hérode, les assurant qu’ils n’avaient pas fait fausse route. Leur audace, leur courage, leur confiance y compris envers Hérode (sans naïveté, puisqu’en finale ils n’entreront pas dans son jeu et le piège), vont les conduire tout naturellement vers Celui qui a eu aussi l’audace de venir s’immerger dans l’histoire humaine et qui paiera très cher cette audace, puisqu’il sera rejeté.

« De l’audace, toujours de l’audace ! » tonnait un célèbre révolutionnaire. Je crois que l’audace peut être la dominante de la Parole en cette fête de l’épiphanie. Audace à sortir des sentiers battus et de la routine, à changer notre regard sur les personnes, sur les événements, à retisser des liens distendus après une brouille, à cultiver des pensées bienveillantes et de paix, audace à être attentifs aux signes les plus discrets. La crèche a dû paraître bien lointaine aux mages, comme nous semblent très loin la paix, la réconciliation, la justice ; cela ne les a pas retenus. Quand la voix de la conscience appelle à des choix, même difficiles au premier abord, ne craignons pas de l’écouter, confiants que rapidement la joie va prendre place dans le cœur et donner la force de continuer. N’hésitons pas à relire, prier, contempler la parole de Dieu de ce jour. Tous, quelles que soient nos opinions, notre culture, notre religion, nous pouvons vivre l’expérience des mages, puisque cet enfant couché dans une mangeoire, il est venu pour tous, sans conditions. Il est le roi, non plus d’un clan, d’un peuple, mais le roi de tous.

J’ai tenté à maintes reprises de téléphoner à mes amis pour connaître leur sentiment après une telle aventure. Le répondeur se contentait de dire laconiquement : nous avons trouvé le Messie, cela nous suffit.

André Jobard
8 janvier 2023

Comme Marie, Oser prendre des chemins nouveaux ! – homélie du dimanche 1er janvier 2023

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Comme Marie, Oser prendre des chemins nouveaux !

Chers amis, chers frères et sœurs,

Nous sommes toujours dans la joie de cet événement exceptionnel qu’est la naissance de Jésus. Aujourd’hui nous contemplons le miracle par lequel la Vierge en donnant naissance au Fils de Dieu, est devenue la mère de Dieu. C’est un motif d’action de grâce pour la Vierge elle-même. C’est pourquoi elle proclame dans son Magnificat que « le Seigneur s’est penché sur son humble servante ». Mais c’est aussi un motif d’action de grâce pour nous : une créature humaine, une personne partageant notre condition humaine a été choisie par Dieu pour participer d’une manière intime et étroite à son projet d’amour au profit de tout le genre humain. A travers la Vierge, nous sommes tous choisis pour donner Dieu au monde. Nous nous réjouissons donc avec elle parce qu’elle a dit « oui » au projet de Dieu en renonçant à ses projets personnels d’une vie de famille simple et ordinaire avec Joseph. Et vous savez comment leurs vies ont été bouleversées par l’irruption de Jésus dans leurs projets.

C’est sous le signe du Oui de Marie et de son renoncement que nous entrons dans l’année nouvelle. C’est aussi sous le signe de la Paix. Je ne vous apprends rien si je vous dis que nous sommes au premier jour de l’an et que nous célébrons tous les premiers jours de l’an la journée mondiale de la paix. Et cela depuis 56 ans. A l’occasion de cette journée mondiale de la Paix, le pape a délivré un message dans lequel il pose une question importante pour chacun de nous en ce début d’année : « Quels chemins nouveaux devons-nous emprunter pour nous défaire des chaînes de nos vieilles habitudes, pour être mieux préparés, pour oser la nouveauté ? Quels signes de vie et d’espérance pouvons-nous saisir pour aller de l’avant et essayer de rendre notre monde meilleur ? » Nous pourrons faire le pari cette année, « d’oser la nouveauté ». Le refrain du psaume de ce dimanche et la première lecture dessinent une ligne de conduite qui nous invite à de nouveaux engagements dont l’initiative vient de Dieu : « Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s’illumine pour nous » dit le Psalmiste. Et l’auteur du livre des Nombres dit : « Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage et qu’Il te prenne en grâce. Que le Seigneur tourne vers toi son visage et qu’il t’apporte la paix ». Il s’agit de se placer sous le regard indulgent et paternel de Dieu. Ce regard de Dieu resplendit d’une lumière qui peut nous conduire tout au long de l’année nouvelle et nous emmener à oser la nouveauté. Pour faire l’expérience d’une année nouvelle, il faut des attitudes nouvelles, des comportements nouveaux, des résolutions nouvelles. Sans cela, rien ne fait vraiment la nouveauté de l’année.

Frères et sœurs, ouvrons-nous cette année à la nouveauté de Dieu. Ouvrons les portes au Seigneur. Soyons joyeux de la joie qui nous est donnée. Joyeux de partager cette joie. Les bergers qui se hâtent dans l’évangile vers Bethléem se trouvaient peut-être là par hasard. Ces bergers étaient considérés, comme des parias, des laissés pour compte. Ils se sont laissés conduire en dehors de leurs propres projets vers des terres nouvelles comme ce fut aussi le cas de Marie et Joseph. Et ils repartent joyeux en glorifiant et en louant Dieu. La nouveauté de l’enfant de Bethléem les rejoint dans les aspirations enfouies dans leurs cœurs. Noël est la réponse à tous leurs vœux. Dieu s’est rendu solidaire de leur condition. Oserons-nous marcher avec l’Emmanuel tout au long de cette nouvelle année ? Marcherons-nous dans la paix et la lumière de celui qui nous rejoint aujourd’hui et qui se fait l’un de Nous ? Nous savons en ce premier jour de l’an, que Marie est pour nous un modèle pour faire inconditionnellement confiance au Seigneur et pour rechercher la paix qui vient de Lui.

Judicaël Mitokpey, Vicaire
1er janvier 2023