Les obsèques de Vincent Boggio se sont déroulés le 10 décembre 2024 en l’église de La Visitation. Retrouvez l’homélie prononcée par le Père André Jobard.
Évangile de Luc 10,25-37 – Le bon Samaritain
Homélie du Père Jobard
Vincent aimait surprendre ses auditeurs par une citation, un fait étrange, une analyse un peu décalée d’une situation la plus ordinaire. Je pense qu’ont dû être surpris ceux de ses collègues de l’hôpital quand ils ont entendu, au moment de son départ en retraite, son dernier message à leur adresse, un commentaire de cette parabole du bon samaritain. Un texte que va nous lire sa fille Claire.
« Ce passage de la Bible est si célèbre que bon samaritain est devenu synonyme de personne charitable. Ce samaritain est un précurseur polyvalent en matière de soins. Il banda les plaies : il est secouriste. Il y versa de l’huile et du vin : il connaît la pharmacologie. Il le chargea sur sa propre monture : il devient ambulancier. Il le mena à l’hôtellerie : logisticien, il transforme une auberge en hôpital. Il prit soin de lui : il est infirmier. Le lendemain, il dit à l’hôtelier ‘prend soin de lui’ : il organise la permanence des soins et fait les transmissions. Il donna deux deniers à l’hôtelier : il pratique le tiers payant. Ce que tu auras dépensé en plus, je te le rembourserai à mon retour : il invente la mutuelle. Et tout ça dans le cadre de la coopération internationale puisqu’il se trouve à l’étranger. Bref, notre système de soins modernes n’a rien inventé. »
À la lecture de ce commentaire, on comprend comment Vincent était passionné par l’Évangile, par la figure de Jésus. Loin de le réduire à un maître de morale, ce dans quoi veut l’enfermer le docteur de la loi, Vincent aimait rendre l’homme Jésus très proche de nous, de nos réalités humaines. Ses homélies en étaient toutes imprégnées. On se souvient ici dans cette église de quelques-uns de ces mimes qu’il jouait devant les enfants. Et on ne peut oublier son attrait pour le lavement des pieds, qu’il nous a aidé à remettre en valeur lors du jeudi saint. Son ministère de diacre le disposait à cela bien sûr, mais servir le frère jusqu’à s’abaisser à ses pieds, était pour Vincent une priorité. On sait, et parfois, on en riait, qu’il était très critique vis-à-vis de tout système religieux qui enferme dans un carcan de règles ou de tabous. La parabole du bon samaritain a orienté son métier, sa vie.
Et certainement, comprenait-il aussi que cet étranger tout entier donné à celui qui souffre, ne pouvait être que Jésus lui-même. Durant les derniers mois de son existence, alors qu’il se savait perdu, Vincent, pris par l’angoisse, a pu ouvrir son cœur à la paix que donne Jésus à travers les sacrements de l’Église, la réconciliation, le sacrement des malades, l’eucharistie. Comment ne pas capter comme héritage pour nous, pour notre monde, la foi dont Vincent a rayonné, avec ce qu’il a été, ses défauts, ses travers bien sûr, mais surtout à travers sa disponibilité, son humour, son courage, sa détermination ? Ce qu’il aurait aimé, c’est que nous partions de cette célébration dans la paix que donnent la foi et le service du plus pauvre. Nous y serons attentifs et nous t’adressons une dernière fois un très grand merci Vincent !